LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches :
Vu l'article 47 du code de procédure civile ;
Attendu que le juge ne peut rejeter une demande de renvoi formée en vertu de ce texte, dès lors que les conditions d'application en sont remplies ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel statuant en référé, que Mme X..., avocate inscrite au barreau de Saint-Gaudens, a fait assigner la société Fiducial informatique devant le premier président de la cour d'appel de Toulouse aux fins de suspension de l'exécution provisoire de droit assortissant le jugement d'un juge de l'exécution dont elle avait interjeté appel ; qu'elle a demandé le renvoi de l'affaire devant le premier président d'une cour d'appel limitrophe en excipant de sa qualité d'auxiliaire de justice exerçant dans le ressort de la cour d'appel de Toulouse ;
Attendu que pour dire n'y avoir lieu à application de l'article 47 du code de procédure civile, l'ordonnance retient que la demande n'est pas fondée à raison de la carence procédurale de Mme X... qui n'a pas conclu au soutien de son appel et qui n'a développé aucun moyen à l'appui de sa demande de suspension de l'exécution provisoire du jugement, laquelle est dès lors irrecevable ;
Qu'en statuant ainsi, le premier président a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 22 septembre 2010, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Pau ;
Condamne la société Fiducial informatique aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils pour Mme X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR déclaré Madame X... irrecevable en sa demande de suspension de l'exécution provisoire de droit attachée à la décision du juge de l'exécution de TOULOUSE du 31 juillet 2010.
AUX MOTIFS QUE « dans le cas présent s'agissant d'une décision du Juge de l'exécution exécutoire de plein droit le premier président ne peut examiner la demande qu'au vu des dispositions de l'article 31 du décret du 31 juillet 1992 (...).
« Il en résulte que pour être recevable la requête en suspension de l'exécution provisoire doit s'accompagner d'un relevé de moyens susceptible de la fonder et qui justifient dès lors jusqu'à son prononcé la suspension des mesures d'exécution prévues par l'al. 2 de l'art. 31.
« Or dans le cas présent Madame X... n'a pas conclu et elle ne développe aucun moyen à l'appui de sa demande sauf à imputer au premier juge des erreurs dont l'examen relève de l'appréciation de la cour statuant au fond » (ordonnance p. 3, § 6, 8 et 9).
ALORS QUE le sursis à exécution des mesures ordonnées par le juge de l'exécution est accordé s'il existe des moyens sérieux d'annulation ou de réformation de la décision déférée à la Cour ; que le premier président doit motiver sa décision de suspendre ou non l'exécution de la décision ; qu'en l'espèce, Madame X... sollicitait la suspension de l'exécution de la décision du Juge de l'exécution de TOULOUSE en faisant valoir qu'elle était entachée d'erreurs grossières de droit rendant sa réformation inévitable ; que pour déclarer cette demande irrecevable, l'ordonnance a affirmé que l'examen des erreurs imputées au jugement relevait de l'appréciation de la Cour statuant au fond ; qu'en statuant ainsi, sans examiner les moyens de réformation de la décision du premier juge, le premier président a violé l'article 31 du décret du 31 juillet 1992.
ET ALORS QUE le sursis à exécution des mesures ordonnées par le juge de l'exécution est accordé s'il existe des moyens sérieux d'annulation ou de réformation de la décision déférée à la Cour ; que Madame X... développait dans son assignation devant le premier président des moyens de réformation de la décision du juge de l'exécution ; qu'en la déclarant irrecevable en sa demande, motifs pris de ce que Madame X... n'avait pas conclu devant la Cour, le premier président a ajouté une condition à l'article 31 du décret du 31 juillet 1992 et a violé cet article.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR dit n'y avoir lieu à application de l'article 47 du Code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUE « Or elle sollicite par application de l'art 47 du Code de procédure civile en raison de sa profession la délocalisation de l'affaire devant le premier président d'une cour limitrophe.
« Cette demande n'est pas fondée puisqu'il n'y a rien à examiner du fait de sa carence procédurale complète.
« Et enfin la cour étant saisie d'une demande de délocalisation, le premier président compétent sera le premier président de la cour ainsi désignée sans qu'il y ait lieu de préjuger de la décision à intervenir.
« Pour tous ces motifs les demandes irrecevables et mal fondées sont rejetées » (ordonnance p. 3, § deux derniers § et p. 4, deux premiers §).
ALORS QUE le juge ne peut rejeter une demande de renvoi formée en vertu de l'article 47 du Code de procédure civile lorsqu'un magistrat ou un auxiliaire de justice est partie au litige ; qu'il n'y a pas lieu d'examiner le bien-fondé d'une telle demande ; que Madame X... sollicitait le renvoi de l'affaire devant une juridiction limitrophe en raison de sa qualité d'avocat au barreau de SAINT-GAUDENS ; que pour dire n'y avoir lieu à application de l'article 47, l'ordonnance a affirmé qu'il « n'y avait rien à examiner du fait de la carence procédurale » de Madame X... ; qu'en statuant ainsi, le premier président a violé l'article 47 du Code de procédure civile.
ALORS, EN OUTRE, QUE le renvoi sollicité en vertu de l'article 47 du Code de procédure civile peut être prononcé à tous les stades de la procédure et quelle que soit la nature du litige ; qu'en l'espèce, il était demandé au premier président de renvoyer l'affaire devant le premier président d'une Cour d'appel limitrophe ; qu'en disant cette demande « sans objet », motifs pris de ce que la cour était saisie d'une demande de délocalisation et que le premier président compétent serait celui de la cour de renvoi désignée, le premier président a violé derechef l'article 47 susvisé.
ALORS, ENFIN, QUE le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé ; que dans ses conclusions, Madame X... demandait au premier président de surseoir à statuer jusqu'à ce que la Cour ait désigné la Cour d'appel de renvoi ; qu'en ne faisant pas état de ces conclusions et en omettant de statuer sur cette demande, le premier président a violé l'article 5 du Code de procédure civile.