LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a souscrit un contrat auprès de la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF) pour assurer un véhicule automobile ainsi qu'un tracteur ; que, selon la police, l'assuré est le sociétaire ainsi que son conjoint " non divorcé ni séparé " ; que l'assureur, averti par Mme X... que le juge aux affaires familiales avait prononcé une ordonnance de non-conciliation l'ayant autorisée à résider séparément, a adressé à l'époux de cette dernière, M. X..., un courrier pour l'informer qu'il ne bénéficiait plus de la qualité d'assuré ; que M. X... a assigné la MAIF devant le tribunal de grande instance pour obtenir le maintien de la garantie portant sur le véhicule agricole ainsi que des dommages-intérêts en réparation, d'une part, du préjudice matériel subi du fait de la privation de jouissance de l'automobile, d'autre part, de la résistance abusive de l'assureur ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, tel que reproduit en annexe :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
Mais attendu que, sous le couvert du grief non fondé de violation de l'article 455 du code de procédure civile, le moyen critique une omission de statuer sur un chef de demande ; que l'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue par l'article 463 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation ;
D'où il suit que le moyen est irrecevable ;
Sur le second moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche :
Attendu que la MAIF fait grief à l'arrêt de dire qu'elle était tenue de maintenir la garantie du tracteur agricole alors, selon le moyen que le contrat d'assurance définissant l'assuré comme étant le sociétaire et son conjoint « non divorcé ni séparé » implique que le conjoint perd la qualité d'assuré en cas de séparation de fait, la police ne faisant aucune distinction entre les différentes formes de séparation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que l'ordonnance de non-conciliation du 21 novembre 2002 avait autorisé les époux X... à résider séparément ; qu'en décidant néanmoins que M. X..., conjoint de la sociétaire Mme X..., avait conservé la qualité d'assuré à la suite de cette ordonnance, en retenant que le terme « séparé » ne pouvait viser que la séparation de corps judiciaire, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la police d'assurance VAM et a violé l'article 1134 du code civil, ensemble le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'interprétation de la clause de la police, que l'ambiguïté de cette dernière rendait nécessaire, que la cour d'appel a décidé, hors toute dénaturation, que seuls étaient exclus de la garantie les époux judiciairement séparés de corps ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le premier moyen et le second moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi incident ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi :
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. X... en indemnisation du préjudice matériel résultant de la privation de jouissance de son véhicule, l'arrêt énonce qu'il n'établit pas que le refus de la MAIF de l'assurer l'ait empêché d'utiliser sa voiture en s'adressant à un autre assureur ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser la faute de l'assuré ayant causé l'aggravation de son préjudice matériel, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande en réparation de son préjudice de jouissance l'arrêt rendu le 21 octobre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne la société MAIF aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande la société MAIF ; la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par de Me Haas, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la privation de jouissance de sa voiture ;
AUX MOTIFS QUE M. X... n'établit pas que le refus de la MAIF de l'assurer l'ait empêché d'utiliser sa voiture en s'adressant à un autre assureur ;
ALORS, 1°), QUE la personne qui fait circuler un véhicule terrestre à moteur est tenue, sous peine de sanction pénale, d'être couverte par une assurance garantissant sa responsabilité civile ; que, par suite, la décision de l'assureur de cesser de garantir son assuré au titre de l'utilisation d'un véhicule automobile a pour effet immédiat d'en priver de dernier de la jouissance ; qu'ayant retenu que la MAIF avait, de manière illicite, dénoncé le contrat d'assurance dont bénéficiait M. X... au titre de l'utilisation de ses véhicules à moteur, la cour d'appel a, en rejetant la demande indemnitaire formulée par l'assuré au titre de la privation de la jouissance de sa voiture, violé l'article 1147 du code civil, ensemble les articles L. 211-1 du code des assurances et L. 324-2 du code de la route ;
ALORS, 2°), QUE la victime n'est pas tenue de limiter son préjudice dans l'intérêt de l'auteur fautif ; qu'en considérant, pour rejeter la demande indemnitaire formée pour obtenir la réparation du préjudice subi du fait de la décision illicite de l'assureur de dénoncer le contrat d'assurance automobile, qu'il était loisible à l'assuré de s'adresser à un autre assureur, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
ALORS, 3°) et subsidiairement, QUE, dans ses conclusions d'appel (pp. 30 et 31), M. X... faisait valoir que les tergiversations et volte-face de la MAIF, laquelle, après avoir illicitement dénoncé le contrat d'assurance et lui avoir proposé d'en souscrire un nouveau, avait finalement refusé de contracter, avaient fait obstacle à ce qu'il se tourne vers un autre assureur ; qu'en laissant ce moyen sans réponse, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
ALORS QUE toute décision doit être motivée à peine de nullité ; qu'en ne motivant pas le rejet de la demande indemnitaire formée par M. X... au titre de la résistance abusive dont elle constatait qu'elle lui avait été soumise, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF).
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la MAIF était tenue de maintenir la garantie RAQVAM garantissant la maison de Menthon-Saint-Bernard ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article 17-2 de la police RAQVAM, l'assuré est le sociétaire, son conjoint non divorcé ni séparé, ou son concubin et les enfants à charge ; que le terme « séparé » ne saurait s'appliquer à la situation qui résulte d'une ordonnance de non-conciliation, mais seulement à celle prévue par la séparation de corps judiciaire, de sorte que M. X... n'avait pas perdu sa qualité d'assuré ;
ALORS QUE le contrat d'assurance définissant l'assuré comme étant le sociétaire et son conjoint « non divorcé ni séparé » implique que le conjoint perd la qualité d'assuré en cas de séparation de fait, la police ne faisant aucune distinction entre les différentes formes de séparation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que l'ordonnance de non-conciliation du 21 novembre 2002 avait autorisé les époux X... à résider séparément ; qu'en décidant néanmoins que M. X..., conjoint de la sociétaire Mme X..., avait conservé la qualité d'assuré à la suite de cette ordonnance, en retenant que le terme « séparé » ne pouvait viser que la séparation de corps judiciaire, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 17-2 de la police d'assurance RAQVAM et a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la MAIF était tenue de maintenir la garantie VAM pour le tracteur agricole ... ;
AUX MOTIFS QUE sur le maintien des garanties relatives au contrat VAM, selon l'article 16 des conditions générales de la police VAM, les garanties sont acquises pour tous usages autres que le transport onéreux de personnes ou de marchandises par le sociétaire, son conjoint non divorcé ni séparé, ou son concubin et les enfants à leur charge ; qu'il y a lieu de retenir également que le terme « séparé » ne s'applique pas à la situation résultant d'une ordonnance de non-conciliation ; que d'autre part la MAIF ne peut davantage se prévaloir d'une démarche de Mme X... en vue de faire résilier le contrat ; qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande de M. X... visant à voir enjoindre à l'assureur de maintenir les garanties pour le tracteur agricole,
1°) ALORS QUE le contrat d'assurance définissant l'assuré comme étant le sociétaire et son conjoint « non divorcé ni séparé » implique que le conjoint perd la qualité d'assuré en cas de séparation de fait, la police ne faisant aucune distinction entre les différentes formes de séparation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que l'ordonnance de non-conciliation du 21 novembre 2002 avait autorisé les époux X... à résider séparément ; qu'en décidant néanmoins que M. X..., conjoint de la sociétaire Mme X..., avait conservé la qualité d'assuré à la suite de cette ordonnance, en retenant que le terme « séparé » ne pouvait viser que la séparation de corps judiciaire, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la police d'assurance VAM et a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause ;
2°) ALORS subsidiairement QUE la résiliation du contrat par l'assuré entraîne la cessation de la garantie à l'égard de toutes les personnes couvertes par cette police ; qu'en l'espèce, comme le faisait valoir la MAIF, à la suite de l'ordonnance de non-conciliation du 21 novembre 2002 Mme X... avait demandé la suppression de la garantie VAM afférente au véhicule Renault Safrane et au tracteur, ce qu'elle avait accepté ; qu'il en résultait que ces deux véhicules n'étaient plus couverts par cette police et que M. X... ne bénéficiait plus de ces garanties ; qu'en décidant que la MAIF ne pouvait se prévaloir d'une démarche de Mme X... en vue de faire résilier le contrat, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article L. 113-16 du Code des assurances.