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24/11/2011 | FRANCE | N°10-25554

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 novembre 2011, 10-25554


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Nîmes, 15 avril 2010), que Mme X..., avocat, est intervenue à la demande de Mmes Y..., Z...- Y... et B...-Y... (Mme B...) pour résoudre un différend d'ordre successoral avec leur frère M. Jean Y..., survenu à la suite du décès de leur père et relatif à l'évaluation d'un bien immobilier en indivision et à la répartition des parts constituant un groupement foncier agricole, exploitÃ

© par leur frère ; qu'à cet effet, une convention d'honoraires a été conclue ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Nîmes, 15 avril 2010), que Mme X..., avocat, est intervenue à la demande de Mmes Y..., Z...- Y... et B...-Y... (Mme B...) pour résoudre un différend d'ordre successoral avec leur frère M. Jean Y..., survenu à la suite du décès de leur père et relatif à l'évaluation d'un bien immobilier en indivision et à la répartition des parts constituant un groupement foncier agricole, exploité par leur frère ; qu'à cet effet, une convention d'honoraires a été conclue entre les trois soeurs Y... et Mme X..., prévoyant un honoraire fixe forfaitaire de 700 euros et des honoraires de résultat en fonction des sommes allouées au client ou économisées par lui, de 11 % jusqu'à 7 625 euros et 10 % au delà ; que faute d'avoir été rémunérée à l'issue de son intervention ayant permis à Mme B... de percevoir une somme de 839 526, 25 euros, Mme X... a saisi le bâtonnier de son ordre en fixation de ses honoraires ;

Attendu que Mme B... fait grief à l'ordonnance de rejeter le moyen dénonçant la nullité de la convention d'honoraires, de rejeter sa contestation et de confirmer la décision ayant arrêté à 100 777, 60 euros TTC le montant des honoraires dus à Mme X..., alors, selon le moyen :

1°/ qu'aux termes de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, « toute fixation d'honoraires, qui ne le serait qu'en fonction du résultat judiciaire, est interdite » ; qu'en revanche « est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu » ; qu'en décidant que la convention d'honoraires du 23 septembre 2005 était licite, du seul fait qu'un honoraire de diligence avait été convenu, sans qu'il soit besoin de prendre parti sur le point de savoir s'il était dérisoire ou non, les juges du fond ont violé les articles 6 et 1134 du code civil, 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

2°/ qu'en statuant comme ils l'ont fait, sans s'expliquer sur les raisons ayant pu les conduire à considérer que l'honoraire de diligence fixé à 233, 33 euros, n'était pas dérisoire, et permettait par ailleurs à l'avocat de stipuler un honoraire de résultat aux taux de 11 et 10 % suivant la tranche, permettant de demander une somme de 85 028, 28 euros HT, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard des articles 6 et 1134 du code civil, 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

Mais attendu que l'ordonnance retient que Mme X...

s'est expliquée sur le fait que la rémunération forfaitaire pour ses diligences s'était élevée à 233, 33 euros parce que ses clientes étaient totalement démunies de revenus ; que Mme B... ne souhaitait pas intenter une action judiciaire et qu'elle aurait obtenu un résultat extrêmement aléatoire ; que grâce à l'obstination de Mme X... alors que même M. Y... n'était pas d'accord avec les premières estimations, elle a réussi à persuader ce dernier d'emprunter des sommes d'argent pour devenir le seul porteur de parts du groupement foncier agricole avec une autre soeur se trouvant sous tutelle permettant ainsi à ses deux clientes de percevoir les sommes très importantes dépassant 800 000 euros alors qu'elles avaient jusque là bénéficié de revenus extrêmement faibles ;

Que de ces constatations et énonciations, faisant ressortir que honoraire conventionnel de diligence n'était pas dérisoire compte tenu de la situation des parties, le premier président a pu décider que la convention n'était pas illicite ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme B... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme B... ; la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour Mme B...

L'ordonnance attaquée encourt la censure ;

EN CE QU'elle a rejeté le moyen dénonçant la nullité de la convention d'honoraires, rejeté la contestation de Mme B..., et confirmé l'ordonnance du Bâtonnier ayant arrêté à 100. 777, 60 euros TTC le montant des honoraires dus à Maître X... ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'« en présence d'une convention d'honoraires valablement conclue prévoyant une rémunération complémentaire en fonction du résultat obtenu, cette rémunération complémentaire peut être supérieure à la rémunération des prestations fournies, le juge n'ayant pas le pouvoir d'ajouter aux dispositions légales une limite qu'elle ne comporte pas ; que Maître X... s'est parfaitement expliqué sur le fait que la rémunération forfaitaire pour ses diligences s'était élevée à 233, 33 euros parce que ses clientes étaient totalement démunies de revenus à telle enseigne qu'elles auraient bénéficié de l'aide juridictionnelle totale si elles auraient souhaité intenter une action judiciaire ; que Madame B... ne souhaitait pas intenter une action judiciaire puisque la procédure en partage aurait pu durer de nombreuses années et que de fait elle aurait obtenu un résultat extrêmement aléatoire ; qu'au contraire Madame B... et sa soeur souhaitaient obtenir par la persuasion un accord de leur frère qui disposait d'un fermage sur l'ensemble des biens de la succession s'agissant de parcelles de vignoble en Côte du Rhône et Châteauneuf du Pape ; que cette tâche extrêmement difficile a été conduite par Maître X... au nom de ses deux clientes, le notaire n'ayant pas pour mission de persuader Monsieur Y..., le co indivisaire et fermier en place, d'agir contrairement à ses intérêts ; que grâce à l'obstination de Maître X... alors même que Monsieur Y... n'était pas d'accord avec les premières estimations, elle a réussi à persuader ce dernier d'emprunter des sommes d'argent pour devenir le seul porteur de parts du GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE avec une autre soeur se trouvant sous tutelle permettant ainsi à ses deux clientes de percevoir les sommes très importantes dépassant 800. 000 Euros qui leur permettaient enfin de trouver une certaine aisance alors qu'elles avaient jusque là bénéficié de revenus extrêmement faibles ; qu'il s'ensuit que l'honoraire complémentaire de résultat ne peut être considéré comme une rémunération manifestement excessive, le pouvoir de révision reconnu au juge de l'honoraire ne pouvant s'appliquer qu'en cas d'abus manifeste ; en effet que si Madame B... avait considéré que l'honoraire de résultat avait été manifestement excessif, elle n'aurait pas manqué d'adresser bien longtemps avant la conclusion des pourparlers une lettre recommandée à son avocate pour lui signifier qu'elle mettait fin à son mandat ; que Madame B... n'a indiqué au notaire qu'elle considérait Maître X... comme n'étant plus sa mandataire qu'au moment où le protocole d'accord était signé ; qu'il s'ensuit que l'ordonnance du Bâtonnier de l'Ordre des Avocats d'AVIGNON doit être confirmée dans toutes ses dispositions, la chronologie des diligences de Maître X... démontrant que pendant trois années cette dernière a permis par son obstination la conclusion d'un accord amiable permettant à sa cliente de percevoir plus de 800. 000 euros » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« au titre de son intervention et compte tenu de la convention d'honoraire, Maître X... a demandé la somme de 100. 777, 60 euros TTC ; que cette demande a fait l'objet d'une contestation fondée sur l'absence de mandat et l'irrégularité de la convention d'honoraires du 23 septembre 2005 et les diligences insuffisantes ; que ces honoraires n'apparaissent pas exagérés au regard du service rendu » ;

ALORS QUE, premièrement, aux termes de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, « toute fixation d'honoraires, qui ne le serait qu'en fonction du résultat judiciaire, est interdite » ; qu'en revanche « est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu » ; qu'en décidant que la convention d'honoraires du 23 septembre 2005 était licite, du seul fait qu'un honoraire de diligence avait été convenu, sans qu'il soit besoin de prendre parti sur le point de savoir s'il était dérisoire ou non, les juges du fond ont violé les articles 6 et 1134 du code civil, 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;

ALORS QUE, deuxièmement et en tout cas, en statuant comme ils l'ont fait, sans s'expliquer sur les raisons ayant eu les conduire à considérer que l'honoraire de diligence fixé à 233, 33 euros, n'était pas dérisoire, et permettait par ailleurs à l'avocat de stipuler un honoraire de résultat aux taux de 11 et 10 % suivant la tranche, permettant de demander une somme de 85. 028, 28 euros HT, les juges du fond ont à tout le moins privé leur décision de base légale au regard des articles 6 et 1134 du code civil, 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-25554
Date de la décision : 24/11/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 15 avril 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 nov. 2011, pourvoi n°10-25554


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : Me Carbonnier, Me Foussard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.25554
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