LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 1134 du code civil, L. 113-12 et L. 113-15 du code des assurances ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 12 mars 2009, n° 08-11.444), que le 7 juin 2001, la société civile d'exploitation agricole de Serame et de Montrabech (la SCEA), exploitant un vignoble, a souscrit auprès de la société GAN assurances IARD (l'assureur) une assurance garantissant ses récoltes contre la grêle, pour une durée d'un an à compter du 30 mai 2001, avec tacite reconduction ; que par acte notarié des 16 et 26 novembre 2001, le propriétaire des parcelles concernées a résilié le bail dont la SCEA était titulaire et les a louées à la société Château de Serame ; que la SCEA a fait opposition à une injonction de payer le montant d'une prime correspondant à la période du 1er mars 2002 au 31 octobre 2002 ;
Attendu que pour rejeter l'exception de nullité du contrat d'assurance tacitement reconduit, fondée sur son absence d'objet et de cause et confirmer la décision des premiers juges condamnant la SCEA au paiement de la prime réclamée par l'assureur, l'arrêt retient que l'article 8 des stipulations contractuelles prévoit que la période de garantie prend fin chaque année au plus tard le 31 octobre à midi ; qu'en application de cette clause, le contrat s'est tacitement reconduit le 1er novembre 2001 et qu'à cette date la SCEA, dont le bail n'était pas encore résilié, était toujours exploitante des vignes assurées ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la période de garantie correspondant à l'époque de l'année pendant laquelle le risque de grêle était couvert par l'assurance était sans incidence sur la durée du contrat, fixée à un an à compter du 30 mai 2001, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux premières branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 avril 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société GAN assurances IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société GAN assurances IARD ; la condamne à payer à la société de Serame et de Montrabech la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société de Serame et de Montrabech.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné une société (SCEA SERAME MONTRABECH) au paiement d'une somme de 13.490 € au profit d'un assureur (GAN ASSURANCES) au titre d'une prime d'assurance pour la période allant du 1er mars 2002 au 31 octobre 2002 ;
AUX MOTIFS PROPRES SUBSTITUES QUE la SCEA faisait soutenir à titre principal le défaut de contrat d'assurance ; qu'elle indiquait que la SA GAN devait justifier d'un contrat d'assurance mettant à la charge de la SCEA une obligation à paiement d'une prime pour la période concernée ; que le moyen selon lequel le contrat conclu en 2001 se serait renouvelé par tacite reconduction à son terme le 31 mai 2002 ne pouvait être retenu ; que la cour dirait tout d'abord en ce qui concerne la demande de nullité de procédure que la SCEA ne reprenait pas cette demande devant la cour de céans ; que la cour dirait ensuite qu'en ce qui concernait la demande de nullité invoquée par voie d'exception que celle-ci était recevable en la forme ; que la cour constatait cependant et au fond que le contrat d'assurance initial avait été signé sans réserve par la SCEA SERAME et qu'il avait reçu plein application ; que celui-ci avait été rédigé selon les déclarations de la SCEA SERAME qui avait donc indiqué agir en qualité de propriétaire ; qu'au surplus, il convenait de rappeler que le but de ce contrat était d'assurer les pertes d'exploitation des vignes contre l'action de la grêle ; que donc seul l'exploitant effectif avait intérêt à s'assurer contre un tel risque, qu'il agisse en qualité de propriétaire exploitant ou en qualité de locataire exploitant ; qu'en effet, il ne s'agissait nullement d'assurer les vignes elles-mêmes ; que la cour relevait en effet que l'article 1er indiquait en caractère majuscule « LA GARANTIE S'APPLIQUE AUX PRODUITS ASSURES DE LA RECOLTE TELS QUE DEFINIS A L'ARTICLE 2 para 3 » ; que cet article se trouvant sur la même page précisait : « pour la vigne, les fruits de l'année sont seuls garantis, les sarments, ceps, souches ne l'étant en aucun cas » ; que la cour rappelait aussi qu'il était expressément indiqué dans les clauses particulières que le contrat se renouvelait à échéance par tacite reconduction ; que la cour rappellerait qu'en droit un contrat à durée déterminée et qui se prorogeait par tacite reconduction à échéance, devait pour ne pas être prorogé faire l'objet d'une demande de résiliation de la part de l'une des deux parties dans les formes contractuelles ; que la cour constatait qu'il résultait des dispositions de l'article 12 du contrat liant les parties que l'assuré qui cessait toute culture pouvait résilier le contrat dans les formes contractuelles et avant le 1er mars ; qu'il devait justifier de la cessation de culture ; que certes, la SCEA faisait soutenir que par acte notarié, en date des 16 et 26/11/01, le GFA des héritiers d'EXEA, propriétaires des parcelles objet, objet du contrat d'assurance, après avoir résilié le bail rural à long terme passé le 31/07/96 avec la SCEA consentait un nouveau bail à la SCA CHATEAU DE SERAME qui commençait à courir le 1/11/01, les SCEA et SCA étant des sociétés distinctes ; que dès lors et à compter du 1/11/01 le contrat d'assurance n'avait plu d'objet ni de cause, ce qui l'empêchait de se renouveler, fait porté à la connaissance de la SA GAN ; que cependant, la cour rappellerait que le contrat objet des débats n'avait pas pour but d'assurer la propriété des vignes ni même les vignes elles-mêmes, mais seulement la perte d'exploitation qui pourrait résulter pour l'exploitant de ces vignes en cas d'action de la grêle et uniquement de la grêle ; que la cour constatait aussi que contrairement à ce que prétendu par la SCEA, celle-ci n'avait jamais porté à la connaissance de la SA GAN sa cessation d'exploitation des vignes ; que la SCEA n'avait jamais utilisé le droit de résiliation qui lui était offert en cas de cessation de culture ; que la cour constatait à la lecture des clauses contractuelles et plus particulièrement de l'article 8 dénommé PERIODE DE GARANTIE que celle-ci avait une durée très particulière puisqu'elle s'arrêtait chaque année au plus tard le 31 octobre midi ; que donc les actes de résiliation de bail étant postérieurs à cette date, le 31/10/01 la SCEA était encore et toujours l'exploitante des vignes considérées ; que faute pour la SCEA d'avoir dénoncé le contrat dans les termes contractuels avant la date d'échéance, la clause de tacite reconduction avait joué de plein droit à compter du 1/11/01 ; que la SCEA aurait dû dénoncer sa cessation de culture à la SA GAN dès la conclusion des nouveaux contrats en date des 16 et 26/11/01 ; que faute par elle de l'avoir fait, le contrat avait continué de plein droit ; qu'en effet et en droit, le défaut d'information de l'assureur lui rendait inopposable la résiliation du bail et rendait exigible les primes afférentes à la période considérée (arrêt pages 3 et 4) ;
1°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'au soutien de sa demande, la société GAN ASSURANCES faisait valoir que le contrat d'assurance s'était reconduit par tacite reconduction à compter du 1er mars 2002, faute par la SCEA d'avoir procédé à la résiliation de la police d'assurance selon les conditions fixées par les articles 9 et 12 du contrat du fait de la cessation d'exploitation (conclusions page 3 § 9 – 10) ; que la SCEA SERAME MONTRABECH soutenait au contraire que le contrat dépourvu d'objet et de cause à compter du 16 novembre 2001 n'avait pu ensuite être tacitement reconduit à son échéance (conclusions page 4) ; qu'en se fondant sur l'article 8 de la police d'assurance, dénommé « période de garantie » pour décider que le contrat s'était tacitement reconduit à compter du 31 octobre 2001, soit antérieurement à la résiliation du bail consenti à la SCEA SERAME MONTRABECH, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer ou observer lui-même le principe de la contradiction ; il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en soulevant d'office le moyen tiré de la tacite reconduction du contrat à la date du 31 octobre 2001 en application de l'article 8 de la police d'assurance dénommé période de garantie, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le contrat d'assurance ne peut tacitement se reconduire qu'à l'issue de la période déterminée pour laquelle il a été conclu, laquelle se distingue de la période de garantie ; qu'en déduisant des stipulations contenues dans l'article 8 de la police dénommé « période de garantie », indiquant que celle-ci s'arrêtait chaque année au plus tard le 31 octobre midi, que le contrat s'était tacitement reconduit à compter du 1er novembre 2001, quand il ressortait de ses propres constatations que le contrat avait été conclu le 7 juin 2001, à effet du 30 mai 2001, pour une durée d'un an avec tacite reconduction, la cour d'appel a violé les articles 1101 et 1134 du Code civil, ainsi que les articles L 113-12 alinéa 1er et L 113-5 du Code des assurances ;