LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. Alberto X..., auteur de la photographie représentant Che Guevara, intitulée " Guerillero heroico " et connue comme la photographie du Che au béret et à l'étoile, en a cédé les droits d'exploitation, par contrat du 25 mai 1995, pour une durée de dix ans, à Patrick A... qui a lui-même accordé à la société Legende Llc une licence d'exploitation de cette photographie, par contrat du 14 avril 2002 ; que M. A... a également déposé la photographie à titre de marque communautaire, le 18 janvier 2002, pour désigner des produits et services en classes 16, 25 et 41 ; qu'ayant découvert que la société XIII Bis Records commercialisait, via les réseaux de distribution classiques et via son site internet, le DVD d'un concert du groupe de rock Trust, montrant en fond de scène un cliché représentant un portrait de Che Guevara, Mme B..., fille et légataire universelle de X..., Patrick A..., décédé, aux droits duquel se trouvent ses héritiers, les consorts A..., et la société Legende Llc l'ont assignée en contrefaçon sur le fondement de l'atteinte portée à leurs droits moraux et patrimoniaux d'auteur et en contrefaçon de marque, sollicitant la réparation de leurs préjudices et l'interdiction de l'usage de la photographie ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que Mme B..., les consorts A... et la société Legende Llc font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 21 novembre 2008) d'avoir débouté Mme B... et Patrick A... de leur demande formée au titre de la contrefaçon de la photographie de X... dite du « Che au béret et à l'étoile » et en réparation de l'atteinte ainsi portée à leurs droits patrimoniaux sur cette oeuvre et de leur demande d'expertise graphique subsidiaire et d'avoir dit que la société Legende LLC n'était pas recevable à agir en contrefaçon au titre des droits patrimoniaux sur ce cliché, alors, selon le moyen :
1°/ que la notion de carence étant indissociable de la notion de faute, l'article 146, alinéa 2, du code de procédure civile, relatif à l'impossibilité pour le juge de suppléer la carence probatoire, n'est applicable qu'en cas d'abstention délibérée ou de refus d'une partie de concourir à l'administration de la preuve, et ne peut trouver application en cas d'impossibilité de fournir les éléments de preuve nécessaires ; qu'en refusant d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, sans rechercher si les exposants n'étaient pas dans l'impossibilité de fournir les éléments de preuve nécessaires pour établir que la reproduction de Che Guevara utilisée en fond de scène par le groupe Trust reprenait effectivement les caractéristiques originales du cliché X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 146 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en se bornant, pour dire que la société Legende Llc était irrecevable à agir en contrefaçon, à énoncer qu'aux termes du contrat du 14 avril 2002 liant la société Legende Llc à M. A..., la première ne jouissait que d'une licence d'exploitation non exclusive et non cessible d'utilisation du cliché en cause, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si au-delà des termes employés dans le contrat litigieux, les parties n'avaient pas eu l'intention de conférer à la société Legende Llc l'exploitation complète du cliché litigieux lui ouvrant la faculté d'agir en contrefaçon, dans la mesure où ce contrat transférait à cette dernière société les droits d'exploitation dont M. A... se trouvait lui-même cessionnaire exclusif en vertu d'un contrat du 25 mai 1995 conclu avec X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1156 du code civil ;
Mais attendu que, d'abord, les juges du fond, qui ont, au demeurant, écarté que le personnage de Che Guevara illustrant le DVD diffusé par la société XIII Bis Records soit la reproduction de la photo de X..., ont souverainement apprécié la carence des consorts A... et de Mme B... dans l'administration de la preuve du caractère contrefaisant de l'image litigieuse, dont ils n'invoquaient pas l'impossibilité et qu'aurait permise la simple production des éléments propres à effectuer la comparaison des caractéristiques originales de l'oeuvre première avec le décor de fond de scène illustrant le DVD ; qu'ensuite, la cour d'appel, à laquelle il n'est pas reproché d'avoir dénaturé le contrat conclu entre Patrick A... et la société Legende Llc, a, par motifs propres et adoptés, fait application des termes littéraux de ce contrat selon lequel " le concédant de licence octroyait au licencié une licence non exclusive et non cessible d'utilisation de la photographie ", sans avoir à se livrer à la recherche de la prétendue intention des parties de réaliser une cession des droits d'exploitation, que cette stipulation clairement contraire rendait inutile ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen, après avis de la chambre commerciale :
Attendu que les consorts A..., Mme B... et la société Legende Llc font grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé l'annulation, pour défaut de caractère distinctif, de la marque communautaire n° 002550036, alors, selon le moyen :
1°/ que pour prononcer l'annulation de la marque communautaire n° 002 550 036 pour défaut de caractère distinctif, la cour d'appel s'est bornée à retenir que le signe constitué par la photo de X..., qui avait reçu une large diffusion mondiale, était emblématique d'un personnage historique et d'une époque de l'histoire contemporaine et dès lors très évocateur ; qu'en se déterminant ainsi, alors que le caractère distinctif de la marque signifie que le signe choisi, qui peut être indifféremment banal ou au contraire très original et évocateur, doit permettre au consommateur des produits pour lesquels l'enregistrement est sollicité de distinguer ces produits de ceux d'autres entreprises, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 4 et 7 du règlement n° 40/ 94/ CE du 20 décembre 1993 ;
2°/ que le signe est distinctif s'il permet au public ciblé d'individualiser les produits ou services du demandeur de la marque par rapport à ceux ayant une autre origine commerciale et de croire que tous les produits ou services désignés par la marque ont été fabriqués ou fournis sous le contrôle du titulaire de la marque ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la marque en cause, enregistrée pour permettre aux ayants droit de distinguer les produits officiels sous licence des produits non autorisés des contrefacteurs, et qui estampillait les étiquettes et l'emballage des produits officiels et sous licence, ne constituait pas, pour le consommateur desdits produits, un signe distinctif garantissant l'origine des produits et servant à distinguer les produits officiels de ceux qui étaient contrefaisants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 4 et 7 du règlement n° 40/ 94/ CE du 20 décembre 1993 ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la marque en cause, constituée de la seule photographie dont X... est l'auteur, a été déposée pour désigner " les produits de l'imprimerie, photographie, matériel d'instruction ou d'enseignement, vêtements, les services d'éducation, de divertissements, activités culturelles, édition de livres, production de spectacles, de films, organisation d'expositions à but culturel ou éducatif " ; que, relevant la puissance d'évocation que revêt cette oeuvre aux yeux de tous, compte tenu de sa diffusion mondiale et de l'écho qu'elle a reçu, l'arrêt en déduit que le consommateur concerné par les produits et services visés à l'enregistrement, notamment les vêtements, les produits de l'édition, les activités culturelles, percevra la marque communautaire litigieuse non pas comme un signe lui désignant l'origine des produits ou services auxquels il s'intéresse, mais comme une référence faite, à des fins politiques ou artistiques à l'oeuvre de X... qui magnifie Che Guevara ; qu'il ajoute que la perception de cette photographie par le consommateur est exclusive de son utilisation pour désigner à ses yeux l'origine des produits et services pour lesquels elle a été enregistrée ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur le seul fait que le signe en cause était emblématique d'un personnage historique et d'une époque de l'histoire contemporaine mais a examiné la marque tant par rapport à la perception qu'en avait le public pertinent que par rapport aux produits et services pour lesquels elle était enregistrée, pour en déduire qu'elle était dépourvue de tout caractère distinctif et qui n'avait pas à procéder à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les demandeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils, pour la société Legende Llc, Mme B... et les consorts A...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame B... et Monsieur A... de leur demande formée au titre de la contrefaçon de la photographie de X... dite du « Che au béret et à l'étoile » et en réparation de l'atteinte ainsi portée à leurs droits patrimoniaux portant sur cette oeuvre et de leur demande d'expertise graphique subsidiaire et d'avoir dit que la société Legende LLC n'était pas recevable à agir en contrefaçon au titre des droits patrimoniaux portant sur ce cliché ;
Aux motifs que l'intimée fait valoir que la licence qui a été consentie le 14 avril 2002 par Monsieur A..., pour une durée d'un an renouvelable tacitement, est une licence non exclusive et non cessible d'utilisation et ne prévoit aucunement que la société licenciée puisse agir en contrefaçon ; qu'en effet la licence dont se réclame la société Légende est, selon les termes contractuels utilisés dont les appelants ne contestent d'ailleurs ni le sens ni la portée, une licence non cessible et non exclusive des droits d'exploitation de la photo de X... ; qu'en l'absence de toute exclusivité consentie, les premiers juges ont à bon droit déclaré la société Légende irrecevable à agir en contrefaçon ; … que les appelants exposent que depuis 1997, il est de « notoriété publique » que le groupe Trust associe son image commerciale à la photo de X... et qu'au cours de tous les concerts du groupe cette photo était dressée en arrière-plan de la scène, en tant que décor principal ; que le DVD commercialisé par la société XIII Bis Records qui bénéficie d'un contrat d'exploitation exclusive en date du 23 décembre 1999, établit que tous les concerts intitulés « Still Alive » avaient pour décor cette représentation du Che, laquelle n'était nullement accessoire ne serait-ce que par ses dimensions et les jeux de lumière qui la mettaient en valeur, mais faisait corps avec la mise en scène ; que cependant l'utilisation litigieuse semble avoir eu lieu en concerts dans le courant de l'année 1997 ; qu'il n'est pas établi qu'elle ait perduré lors des années suivantes ; qu'avant d'apprécier si X... avait été informé de l'usage incriminé qualifié par les appelants eux-mêmes de notoire, il échet de déterminer si le décor en cause porte atteinte aux droits d'auteur dont les appelants, à l'exception de la société Légende, sont investis ; que les tirages qu'ont pu réaliser ceux-ci à partir du DVD semble-t-il, font en effet apparaître en fond de scène une effigie évocatrice de celle du Che, le visage présenté de face ; que l'agrandissement d'une image du concert, versé par les intimés, rend perceptible qu'il ne s'agit pas de la reproduction de la photo de X... mais qu'il s'agirait plutôt d'une oeuvre peinte à grands traits semble-t-il, dont la base n'est pas achevée ou tout au moins de la reproduction photographique de cette oeuvre peinte ; que pour que cette représentation du Che puisse être qualifiée de contrefaçon de l'oeuvre de X..., encore faut-il procéder à une analyse de cette dernière pour dégager ce qui en constitue l'originalité avant d'examiner si l'oeuvre litigieuse reprend les caractéristiques originales de l'oeuvre première ; que cet exercice est d'autant plus nécessaire que les appelants ne peuvent soutenir et ne soutiennent d'ailleurs pas, que la portée de leurs droits s'étendent à toute représentation du Che, porteur d'un béret étoilé et prise au tout début des années soixante ; qu'or, les appelants, pas plus qu'ils ne l'ont fait devant les premiers juges, ne procèdent à cette démonstration alors qu'il leur incombe de rapporter la preuve des faits qu'ils allèguent ; que la mesure d'instruction qu'ils sollicitent à titre subsidiaire n'a pas vocation à suppléer leur carence dans l'administration de cette preuve ; que leur demande ne peut dès lors qu'être rejetée ;
Et aux motifs repris des premiers juges que seul le cessionnaire de droits patrimoniaux d'auteur est recevable à agir en contrefaçon ; qu'en l'espèce, les demandeurs versent aux débats le contrat du 14 avril 2002 liant la société Legend LCC à Monsieur A... ; que relevant qu'il s'agit d'une convention régie par le droit français, le tribunal considère qu'aux termes de celle-ci, la société Legend LCC ne jouit que d'une licence d'exploitation non exclusive et non cessible d'utilisation du cliché en cause (cf article 1) ; que dès lors, sa demande au titre de la contrefaçon est irrecevable, le préjudice résultant pour elle d'une éventuelle utilisation illicite du cliché X... pouvant être réparé sur le fondement de la concurrence déloyale ; qu'il ressort des indications figurant sur le DVD que le groupe Trust a effectué une tournée de concerts pendant toute l'année 1997 ; que dès lors, la reproduction de Che Guevara arguée de contrefaçon a bien été utilisée en concert par le groupe Trust postérieurement au 20 février 1997 ; que de même il ressort des mentions figurant dans la publicité accompagnant la vente du DVD sur le site « FNAC. com » que celui-ci reproduit un film comportant des concerts de la tournée de Trust ; que ce DVD et le CD qui porte le même titre « still a. 1ive » ont été commercialisés à partir de 2000 comme indiqué sur la pochette du phonogramme ; que dans ces conditions, les reproductions incriminées sont bien intervenues pendant la période de protection du cliché X... ; que toutefois, le tribunal à l'examen du film contenu dans le DVD constate que le caractère fugitif des prises de vue de la reproduction de Che Guevara utilisée en fond de scène par le groupe Trust ne permet pas d'établir si celle-ci reprend les caractéristiques originales du cliché X... ou s'il s'agit d'un portrait original du Che réalisé à partir d'autres représentations de celui-ci étant relevé que les demandeurs ne sauraient prétendre avoir le monopole de l'image de Che Guevara ; que dans ces conditions, le tribunal considère que la contrefaçon alléguée n'est pas établie ;
Alors, de première part, que la notion de carence étant indissociable de la notion de faute, l'article 146, alinéa 2, du Code de procédure civile, relatif à l'impossibilité pour le juge de suppléer la carence probatoire, n'est applicable qu'en cas d'abstention délibérée ou de refus d'une partie de concourir à l'administration de la preuve, et ne peut trouver application en cas d'impossibilité de fournir les éléments de preuve nécessaires ; qu'en refusant d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, sans rechercher si les exposants n'étaient pas dans l'impossibilité de fournir les éléments de preuve nécessaires pour établir que la reproduction de Che Guevara utilisée en fond de scène par le groupe Trust reprenait effectivement les caractéristiques originales du cliché X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 146 du Code de procédure civile ;
Alors, de seconde part, qu'en se bornant, pour dire que la société Legende était irrecevable à agir en contrefaçon, à énoncer qu'aux termes du contrat du 14 avril 2002 liant la société Legend LCC à Monsieur A..., la première ne jouissait que d'une licence d'exploitadtion non exclusive et non cessible d'utilisation du cliché en cause, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si au delà des termes employés dans le contrat litigieux, les parties n'avaient pas eu l'intention de conférer à la société Legend LCC l'exploitation complète du cliché litigieux lui ouvrant la faculté d'agir en contrefaçon, dans la mesure où ce contrat transférait à cette dernière société les droits d'exploitation dont Monsieur A... se trouvait lui-même cessionnaire exclusif en vertu d'un contrat du 25 mai 1995 conclu avec X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1156 du Code civil ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé l'annulation, pour défaut de caractère distinctif, de la marque communautaire n° 002550036 ;
Aux motifs que Patrick A... a déposé le 18 janvier 2002, l'oeuvre de X..., comme marque communautaire enregistrée le 13 novembre 2003 sous le n° 002550036 pour désigner : « les produits de l'imprimerie, photographie, matériel d'instruction ou d'enseignement, vêtements, les services d'éducation, de divertissements, activités culturelles, édition de livres, production de spectacles, de films, organisation d'expositions à but culturel ou éducatif » ; que la société XIII Bis Records poursuit l'annulation de cette marque au visa des articles 4, 7 et 51 du Règlement CE n° 40/ 94 du 20 décembre 1993, au motif notamment que le seul signe qui la compose est la photo du visage du Che, laquelle est utilisée par tous de manière usuelle sur tous supports, pour exprimer une appartenance ou un désir d'appartenance à un courant révolutionnaire incarné par le Che ; que mondialement diffusée depuis de nombreuse années, elle a inspiré de nombreux auteurs, dont Andy Warhol, qui ont créé à partir d'elle des oeuvres dérivées, de sorte qu'elle ne peut pas assurer la fonction d'identification des produits et services d'une entreprise par rapport à ceux d'une entreprise concurrente ; qu'en effet, aux termes de l'article 7 du Règlement CE 40/ 94, sont refusées à l'enregistrement non seulement les marques composées exclusivement de signes descriptifs d'une caractéristique du produit, mais également les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif (art 7b) ; que l'exigence de distinctivité intrinsèque du signe déposé est ainsi autonome par rapport à l'exigence d'une absence de caractère descriptif ; que la distinctivité d'un signe ne se déduit pas de son absence de caractère descriptif ; qu'elle suppose en application de la jurisprudence communautaire et nationale, que le signe déposé ait l'aptitude à remplir la fonction qui est celle de la marque ; qu'il permette donc au consommateur de distinguer les produits par leur entreprise d'origine et qu'il lui garantisse ce faisant, l'identité et l'origine du produit ou du service concerné ; qu'en l'espèce, la marque communautaire enregistrée est constituée de la seule photographie dont X... est l'auteur ; que cette photo est incontestablement arbitraire au regard des produits et services pour la désignation desquels elle a été enregistrée, dans la mesure où elle ne décrit ni n'indique aucune de leurs qualités ; qu'en revanche, il convient d'examiner si elle distinctive, c'est à dire si elle est en mesure de remplir la fonction qui est celle assignée à la marque ; que les parties ont abondamment souligné la diffusion mondiale qu'a connue et que connaît encore cette oeuvre de X... ; que l'écho qu'elle reçut en fait presque une sorte d'icône, une photo emblématique d'un personnage historique et à travers le destin tragique de celui-ci, d'une époque de l'histoire contemporaine ; que la puissance d'évocation que revêt cette oeuvre aux yeux de tous n'est d'ailleurs pas contestée ; qu'il suit que le consommateur concerné par les produits et services visés à l'enregistrement, notamment les vêtements, les produits de l'édition, les activités culturelles, percevra la marque communautaire litigieuse non pas comme un signe lui désignant l'origine des produits ou services auxquels il s'intéresse, mais comme une référence faite, à des fins politiques ou artistiques à l'oeuvre de X... qui magnifie Che Guevara ; qu'en d'autres termes la perception de cette photo par le consommateur est exclusive de son utilisation pour désigner à ses yeux l'origine des produits et services pour lesquels elle a été enregistrée ; que la décision des premiers juges sera infirmée en ce qu'elle a rejeté la demande d'annulation de la marque communautaire ;
Alors, de première part, que pour prononcer l'annulation de la marque communautaire n° 002 550 036 pour défaut de caractère distinctif, la Cour d'appel s'est bornée à retenir que le signe constitué par la photo de X..., qui avait reçu une large diffusion mondiale, était emblématique d'un personnage historique et d'une époque de l'histoire contemporaine et dès lors très évocateur ; qu'en se déterminant ainsi, alors que le caractère distinctif de la marque signifie que le signe choisi, qui peut être indifféremment banal ou au contraire très original et évocateur, doit permettre au consommateur des produits pour lesquels l'enregistrement est sollicité de distinguer ces produits de ceux d'autres entreprises, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 4 et 7 du règlement n° 40/ 94/ CE du 20 décembre 1993 ;
Alors, de seconde part, que le signe est distinctif s'il permet au public ciblé d'individualiser les produits ou services du demandeur de la marque par rapport à ceux ayant une autre origine commerciale et de croire que tous les produits ou services désignés par la marque ont été fabriqués ou fournis sous le contrôle du titulaire de la marque ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la marque en cause, enregistrée pour permettre aux ayants droit de distinguer les produits officiels sous licence des produits non autorisés des contrefacteurs, et qui estampillait les étiquettes et l'emballage des produits officiels et sous licence, ne constituait pas, pour le consommateur desdits produits, un signe distinctif garantissant l'origine des produits et servant à distinguer les produits officiels de ceux qui étaient contrefaisants, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 4 et 7 du règlement n° 40/ 94/ CE du 20 décembre 1993 ;