LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 31 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un tribunal ayant condamné solidairement la société Soclaine (la société), M. X... et M. Y... à payer une certaine somme, avec exécution provisoire à hauteur du quart de celle-ci, à M. Z..., celui-ci a fait pratiquer une saisie-attribution au préjudice de la société pour avoir paiement de la partie exécutoire de cette condamnation ; qu'en appel, la société a été mise hors de cause, MM. X... et Y... restant tenus de payer une certaine somme à M. Z... ; que la société a délivré un commandement à fins de saisie-vente à l'encontre de M. Z... pour avoir remboursement de la somme qu'elle lui avait versée en exécution du jugement ;
Attendu que, pour déclarer nul le commandement de saisie-vente, l'arrêt, après avoir relevé que la société avait payé pour ses coobligés, a retenu que ceux-ci se trouvaient libérés à l'égard du créancier et que la société disposait d'une créance de remboursement à leur encontre, trouvant son origine dans l'engagement solidaire envers le créancier, de sorte qu'elle devait répéter contre les autres codébiteurs solidaires ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'arrêt d'appel avait débouté M. Z... de ses demandes à l'encontre de la société, de sorte que l'obligation de restitution résultait de plein droit de l'infirmation du jugement assorti de l'exécution provisoire , la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Z..., le condamne à payer à la société Soclaine la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Soclaine
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le commandement de payer aux fins de saisie-vente délivré le 19 novembre 2008 à la demande de la société Soclaine au préjudice de M. Z... est nul et de nul effet ;
Aux motifs que «aux termes de l'article 1236 du Code Civil, une obligation peut être acquittée par toute personne qui y est intéressée, telle qu'un coobligé ; que l'article 1214 du même Code précise que le codébiteur d'une dette solidaire, qui l'a payée en entier ne peut répéter contre les autres que les part et portion de chacun d'eux ; qu'en l'espèce par jugement en date du 27 mai 2002 assorti de l'exécution provisoire à hauteur du quart des condamnations exceptées celles prononcées au titre de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale, le tribunal correctionnel de VERSAILLES a condamné solidairement la S.A.R.L. SOCLAINE, Monsieur Pierre X... et Monsieur Jacques Y... à payer à Monsieur Patrick Z... la somme de 243 369 €, la somme de 43 905,32 € en réparation du préjudice matériel et financier, la somme de 40 000 € en réparation du préjudice moral et la somme de 7 700 € au titre de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale ; qu'il résulte des pièces versées au dossier que Monsieur Patrick Z... a fait pratiquer le 9 mars 2003 une saisie-attribution au préjudice de la S.A.R.L. SOCLAINE entre les mains de Maître A..., Notaire à PARIS en venu du jugement susvisé pour obtenir le recouvrement d'une somme de 89 892,36 € ; que la saisie a été entièrement fructueuse telle que cela résulte du courrier du tiers saisi en date du 29 janvier 2004 et que l'huissier poursuivant confirme, dans un courrier du 24 décembre 2008 qu'il a adressé le montant des sommes disponibles a Maître Véronique B... dont il n'est pas contesté qu'elle était le conseil de Monsieur Patrick Z... à cette époque ; que le courrier de cette avocate en date du 15 décembre 2008 adressée à Monsieur Patrick Z... corrobore ce versement dés lors qu'il indique "je me permets de vous remémorer que la somme de 89 692,36 € avait été saisie en exécution de la décision de 1re instance" ; que, cependant, la Cour d'appel de VERSAILLES a, notamment, par arrêt du 28 janvier 2004 mis hors de cause la S.A.R.L. SOCLAINE qui avait été citée comme civilement responsable ; que la Cour de Cassation a par arrêt en date du 6 avril 2005 rejeté le pourvoi formé notamment par Monsieur Patrick Z... ; qu'en conséquence, il n'est pas contestable que la S.A.R.L. SOCLAINE, en sa qualité de codébiteur, a réglé à Monsieur Patrick Z... les sommes dues, au titre du jugement entrepris ; que les codébiteurs solidaires, Monsieur Pierre X... et Monsieur Jacques Y... ont été valablement libérés à l'égard de Monsieur Patrick Z... par le paiement effectué par un des coobligés ; que l'arrêt de la Cour de VERSAILLES a déchargé la S.A.R.L. SOCLAINE de ses obligations envers Monsieur Patrick Z... mais a maintenu celles de Monsieur Pierre X... et de Monsieur Jacques Y... sous la même solidarité ; qu'en conséquence, la S.A.R.L. SOCLAINE, codébiteur qui a payé la dette, possède une créance de remboursement à l'encontre des autres codébiteurs qui a son origine dans l'engagement solidaire envers le créancier, Monsieur Patrick Z... ; qu'elle doit, en conséquence, répéter contre les autres codébiteurs solidaires ; qu'il convient donc de prononcer la nullité du commandement de payer diligenté le 19 novembre 2008 par la S.A.R.L. SOCLAINE au préjudice de Monsieur Patrie Z... ; que le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions» ;
Alors, d'une part, que l'exécution d'une décision de justice exécutoire à titre provisoire n'a lieu qu'aux risques et périls de celui qui la poursuit, à charge pour lui de restituer le débiteur dans ses droits ; que l'obligation de rembourser résulte de plein droit de la réformation du jugement de première instance ; qu'ainsi l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 janvier 2004 devenu définitif, ayant infirmé le jugement du 27 mai 2002 en ce qu'il avait condamné solidairement la société Soclaine avec d'autres personnes, dont les condamnations ont été en revanche maintenues, à l'égard de M. Z..., conférait à la société Soclaine un titre exécutoire lui permettant de poursuivre, entre les mains de celui-ci, la restitution des sommes qu'elle lui avait réglées au titre de l'exécution provisoire dont était assorti ce jugement ; qu'en annulant néanmoins le commandement de payer que la société Soclaine avait fait délivrer à M. Z... au motif qu'il lui appartenait d'en poursuivre le remboursement à l'encontre des autres codébiteurs de celui-ci, la cour d'appel a violé les articles 31, alinéa 2, de la loi du 9 juillet 1991 et 561 du Code de procédure civile, par refus d'application ;
Alors, d'autre part, que le dispositif de l'arrêt se substitue à celui de la décision qu'il réforme ; qu'ainsi à la suite de la réformation du jugement du tribunal correctionnel de Versailles du 27 mai 2002 ayant condamné in solidum la société Soclaine avec MM. X... et Y... à l'égard de M. Z... par l'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 28 janvier 2004 devenu définitif et ayant mis hors de cause la société Soclaine, celle-ci est réputée n'avoir jamais été débitrice des condamnations prononcées par les premiers juges ; qu'en retenant néanmoins que la société Soclaine devait obtenir restitution des sommes réglées au titre de l'exécution provisoire du jugement en exerçant contre MM. X... et Y... le recours en contribution ouvert au codébiteur solidaire, cependant que la société Soclaine n'était pas le codébiteur solidaire de M. Z..., la cour d'appel a violé les articles 1214 du code civil et 561 du code de procédure civile.