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16/06/2011 | FRANCE | N°10-19791

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 juin 2011, 10-19791


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mmes Christine X..., Claudine X... et Clotilde X... épouse Garrigou Y... et M. Vincent X..., agissant en leur nom personnel et ès qualités d'héritiers de leur mère, Simone Z..., veuve X..., (les consorts X...) ont recherché la responsabilité de l'Etat pour fonctionnement défectueux du service public de la justice en reprochant aux juridictions que leur mère avait saisies d'une action en nullité pour dol de l'acte de vente d'un terrain consentie à l'Etat, d'avoir rejeté la demande aux ter

mes de procédures inéquitables sans avoir examiné tous les éléments...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mmes Christine X..., Claudine X... et Clotilde X... épouse Garrigou Y... et M. Vincent X..., agissant en leur nom personnel et ès qualités d'héritiers de leur mère, Simone Z..., veuve X..., (les consorts X...) ont recherché la responsabilité de l'Etat pour fonctionnement défectueux du service public de la justice en reprochant aux juridictions que leur mère avait saisies d'une action en nullité pour dol de l'acte de vente d'un terrain consentie à l'Etat, d'avoir rejeté la demande aux termes de procédures inéquitables sans avoir examiné tous les éléments fournis ; qu'ils font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 6 avril 2010) de les débouter de leur demande ;

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant constaté que les consorts X..., qui avaient pu exercer intégralement leurs droits, reprochaient seulement aux décisions litigieuses de leur avoir été défavorables, la cour d'appel en a exactement déduit que les juridictions qui les avaient rendues n'avaient commis aucune faute propre à engager la responsabilité de l'Etat ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Et sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, ci-après annexé :

Attendu que ce grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les consorts X..., agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité d'héritiers de leur mère Simone Z... veuve X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué :

D'avoir débouté les consorts X... de leur demande d'indemnisation du préjudice subi du fait d'un dysfonctionnement du service public de la justice ;

Aux motifs que «les appelants, reprenant le bénéfice de leur argumentation de première instance, soutiennent que parmi les pièces produites figuraient des accords et négociations intervenus entre Madame X... et les représentants de l'Etat attestant de la promesse faite par ceux-ci de la délivrance d'autorisations de construire et de leur lien avec la vente des terrains ; qu'ils font valoir que les juridictions, tout en les visant comme étant les pièces principales, ne les ont pas examinées, commettant une faute lourde, que devant la cour de cassation, a été commise une grossière erreur de droit, le dol par silence ou par réticence n'étant pas pris en compte ; que l'agent judiciaire du trésor soutient que l'argumentation des appelants se limite à la critique des décisions rendues, sans établir ni un fait ni une série de faits de nature à constituer une faute lourde du service de la justice ; qu'en effet c'est l'appréciation des juridictions du fond qu'ils contestent, que la présente procédure constitue un détournement des dispositions de l'article L.141-1 du Code de l'organisation judiciaire, dès lors qu'après avoir épuisé toutes les voies de recours, les consorts X... tentent de permettre un nouvel examen de leur affaire et de créer ainsi un nouveau degré de juridiction, permettant de censurer la Cour de cassation ; que la faute lourde s'entend d'une déficience du service de la justice à remplir la mission dont il est investi, qu'elle est caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude dudit service mais ne saurait résulter du contenu des décisions rendues relevant du pouvoir souverain d'appréciation des juridictions ; qu'en l'espèce, les décisions critiquées contiennent un examen précis et circonstancié des moyens et prétentions développés par les consorts X... ; qu'ils ont recherché la commune intention des parties, constaté la validité de l'acte de vente du 17 mai 1971, dont les diverses stipulations étaient claires et n'avaient pas pour objet d'accorder à Madame X... les droits acquis et définitifs de construire sur certaines parcelles qu'elle conservait, ce qui excluait que le consentement de Madame X... ait pu être vicié ; que le jugement du 23 octobre 2000 a analysé la convention signée, les obligations du cédant et a retenu que la cession partielle des droits de constructions sur certaines parcelles dont le cédant conservait la propriété n'avait pas pour objet de permettre à l'Etat de construire effectivement sur ces parcelles mais de définir les possibilités maximales de construction conservées par la venderesse ; qu'ainsi, il a considéré que l'Etat n'avait pas conféré à Madame X... des droits à construire mais qu'au contraire cette dernière avait cédé à l'Etat les droits à construire qui pouvaient exister en application des règlements d'urbanisme alors en vigueur ; que si certes Madame X... conservait la faculté de construire une superficie de 5000 mètres carrés plancher, pour autant cette faculté ne pouvait s'analyser en une servitude instituée à son profit échappant aux règles d'urbanisme applicables, l'Etat ne pouvant s'engager à garantir par simple contrat de droit privé un droit de construire définitif, nonobstant les législations ultérieures susceptibles de l'affecter : qu'ainsi le jugement retient que l'acte de vente ne pouvait comporter de droits à construire ; que l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence analyse également les moyens et prétentions des parties et les termes clairs et sans ambiguïté du contrat qui n'appellent pas d'interprétation ce qui rend sans objet d'analyser plus avant les pièces relatives aux négociations ayant précédé la vente ; qu'enfin, par une décision de non-admission, la Cour de cassation a fait une application des principes de droit dont elle a seule le contrôle, sans que l'erreur grossière de droit tirée d'une prétendue méconnaissance de la théorie du dol, ne puisse lui être opposée pour caractériser une faute lourde ; que par des motifs pertinents que la Cour fait siens, les premiers juges ont constaté que les consorts X... reprochent seulement aux décisions rendues de leur avoir été défavorables alors qu'ils ont pu intégralement et normalement exercer leurs droits et ne démontrent pas l'existence d'une faute lourde susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat ; que le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions» ;

Et aux motifs du jugement confirmé «qu'aux termes de l'article L.141-1 du Code de l'organisation judiciaire, l'Etat est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service public de la justice, sa responsabilité n'étant engagée que par une faute lourde ou un déni de justice ; que la faute lourde s'entend de toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ; qu'en l'espèce, les consorts X... prétendent caractériser le dysfonctionnement pour faute lourde du service public de la justice par les décisions successivement rendues dans le litige les opposant à l'Etat sur la constructibilité de terrains situés à Porquerolles, décisions qui ont rejeté leurs demandes sans qu'aient été examinés, selon eux, les moyens soulevés et les pièces produites tant en première instance qu'en appel et enfin devant la Cour de cassation ; qu'une décision de justice à l'encontre de laquelle les recours, garants d'une procédure équitable, ont été normalement exercés, et les décisions qui s'en sont suivies bénéficiant de l'autorité de la chose jugée, ne peuvent caractériser en soi le fait ou la série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir sa mission au sens de l'article L.141-1 du Code de l'organisation judiciaire ; qu'au surplus, il résulte de la lecture des décisions critiquées que contrairement aux prétentions des demandeurs, elles contiennent un examen précis et circonstancié des moyens et prétentions développés par les consorts X... ; que c'est ainsi que saisi par Madame X... - ayant droit des consorts X... qui s'était vue refusée en septembre 1994 la délivrance d'un permis de construire - à titre principal, d'une demande en nullité de la vente intervenue le 17 mai 1971 au profit de l'Etat portant sur des terrains situés à Porquerolles dont la cession avait pour contrepartie l'octroi sur les terrains conservés au bénéfice de Madame X... de droits à construire, à titre subsidiaire d'une demande d'indemnisation en réparation du préjudice subi à raison du manquement au devoir de conseil du préfet en sa qualité de rédacteur d'acte et du non-respect par l'Etat de ses engagements, le tribunal de grande instance de Toulon a par jugement du 23 octobre 2000 débouté Madame X... de toutes ses demandes, après avoir déclaré recevable l'action en nullité de la vente du 17 mai 1971 et constaté la validité en la forme de l'acte de vente ; que pour rejeter les demandes de Madame X..., le Tribunal a considéré que les stipulations de l'acte du 17 mai 1971 n'avaient pas pour objet de lui accorder des droits acquis et définitifs de construire sur certaines parcelles qu'elle conservait, et que son consentement avait été recueilli sur un objet clairement défini ; que le Tribunal a notamment considéré en analysant en fait et en droit la convention signée et notamment les obligations du cédant, que la cession partielle des droits de construction sur certaines parcelles dont le cédant conservait la propriété, n'avait pas pour objet de permettre à l'Etat de construire effectivement sur ces parcelles mais de définir les possibilités maximales de construction conservées par la venderesse : qu'il en a déduit que l'Etat n'avait pas conféré à Madame X... des droits à construire mais qu'au contraire cette dernière avait cédé à l'Etat les droits à construire qui pouvaient exister en application des règlements d'urbanisme alors en vigueur sur les parcelles par elle conservées, elle-même conservant seulement la faculté de construire une superficie de 5000 mètres carrés plancher, sans que cette faculté puisse s'analyser en une servitude instituée à son profit échappant aux règles d'urbanisme applicables, l'Etat ne pouvant s'engager à garantir par simple contrat de droit privé un droit de construire définitif, nonobstant les législations ultérieures susceptibles de l'affecter, notamment lors du dépôt en 1994 d'une nouvelle demande de permis de construire ; que tirant les conséquences des clauses claires et dénuées d'ambiguïté du contrat de vente et ajoutant que Madame X... ne démontrait nullement que la commune intention des parties résidait pour l'Etat dans la garantie absolue d'un droit à construire, quelle que soit l'évolution de la réglementation applicable, le tribunal constatait la validité du contrat, l'absence de faute et de dol de l'Etat ou de toute autre cause de nullité et déboutait Madame X... de toutes ses demandes après avoir encore considéré, sur le manquement du Préfet à son obligation d'information, que la possible évolution de la réglementation en matière de construction ne constituait pas une information nécessaire à l'expression du consentement du cocontractant dont celui ci ne pouvait disposer luimême ; que force est de constater, à la lecture de l'arrêt en date du 20 octobre 2005, que c'est aux termes d'une analyse également circonstanciée des moyens et prétentions développés par les consorts X... que la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a confirmé en tous points la décision des premiers juges en considérant même implicitement que les termes même du contrat, clairs, précis et dépourvus de toute ambiguïté au regard de l'ensemble des pièces produites n'appelaient aucune interprétation et privaient donc de tout objet les conséquences à tirer d'un défaut de communication de toutes les pièces concernant les négociations ayant précédé la conclusions de l'acte de vente ; qu'il est en effet constant qu'en application des dispositions des articles 1156 et suivants du Code civil, l'interprétation et la recherche de la commune intention des parties n'est nécessaire qu'en présence d'un acte ou d'une clause ambigus, de sorte qu'en s'abstenant de tirer explicitement toute conséquence de l'absence de communication des pièces sollicitées, la Cour d'appel d'Aix en Provence n'a pu commettre une faute, comme le soutiennent à tort les demandeurs ; que de même en constatant que c'était par une interprétation souveraine du contrat et des actes antérieurs ou postérieurs produits, exclusive de dénaturation que la Cour d'appel avait pu déduire que l'Etat avait consenti la possibilité de construire en fonction de la réglementation applicable au moment de l'échange du consentement, sans garantir des droits à construire définitifs, quelle que put être l'évolution ultérieure des règles d'urbanisme, la Cour de cassation a fait une stricte application des principes de droit dont elle a le seul contrôle, sans commettre l'erreur grossière alléguée, tirée d'une prétendue méconnaissance de la théorie du dol par le conseiller rapporteur, en tout état de cause sans incidence sur la décision de non admission, étant observé au surplus que l'erreur d'appréciation à la supposer commise, ne pourrait pas davantage caractériser l'existence d'une faute lourde au sens de l'article L.141-1 du Code de l'organisation judiciaire ; que les consorts X... qui ont normalement pu exercer leurs droits et dont l'action en responsabilité de l'Etat se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée aux décisions critiquées, motivées en fait et en droit et par voie de conséquence exclusives d'un dysfonctionnement du service public de la justice, seront déboutés de toutes leurs demandes ;

1) Alors que l'État est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice et cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou un déni de justice ; que constitue une faute lourde toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ; que les juges du fond, pour rejeter la demande d'indemnisation des consorts X..., ont retenu que la faute lourde ne saurait résulter du contenu des décisions rendues relevant du pouvoir souverain d'appréciation des juridictions, à l'encontre desquels les recours ont été normalement exercés, et bénéficiant de l'autorité de la chose jugée ; qu'en statuant ainsi, et en refusant d'admettre que la faute lourde, ou le déni, puissent résulter du contenu de la, ou des décisions rendues par les juridictions, la Cour d'appel a violé l'article L.141-1 du Code de l'organisation judiciaire ;

2) Alors que l'État est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice et cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou un déni de justice ; que constitue une faute lourde toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant l'inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi ; que les juges du fond, pour rejeter la demande d'indemnisation des consorts X..., ont retenu que le Tribunal de grande instance et la Cour d'appel avaient souverainement interprété le contrat de vente du mai 1971, dont les termes étaient clairs et précis ; qu'en statuant ainsi, et tandis que les décisions auxquelles ils se référaient affirmaient en parfaite contradiction le caractère clair de l'acte de vente, qu'ils interprétaient finalement en y ajoutant, mais sans prendre en considération les documents émanant de l'État, décrivant l'économie du contrat, invoqués par les consorts X..., et que la Cour de cassation a déclaré non admis le pourvoi, la Cour d'appel a violé l'article L.141-1 du Code de l'organisation judiciaire ;

3) Alors que les consorts X... ont invoqué la prise en considération par les juges de pièces non communiquées, voire inexistantes (conclusions du 27 novembre 2009, p. 7, 13), la confusion avec la situation des cohéritiers de Simone X... (conclusions, p. 12, 25, 32), et l'absence de prise en considération du défaut de production par l'État des pièces dont la communication avait été demandée par le juge (conclusions, p. 8, 26, et s.) ; que les juges du fond, qui ont rejeté la demande d'indemnisation, sans s'expliquer sur ces éléments invoqués par les consorts X..., n'ont pas satisfait aux exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-19791
Date de la décision : 16/06/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 avril 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 jui. 2011, pourvoi n°10-19791


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.19791
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