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01/06/2011 | FRANCE | N°10-15009

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 01 juin 2011, 10-15009


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis :
Vu l'article R. 142-4 du code rural ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que lorsque la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural a attribué un bien acquis à l'amiable, elle est tenue d'informer les candidats non retenus des motifs qui ont déterminé son choix ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 26 janvier 2010), que la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Marché

limousin (la SAFER) a, par décision du 12 décembre 2006, rétrocédé des terres...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis :
Vu l'article R. 142-4 du code rural ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que lorsque la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural a attribué un bien acquis à l'amiable, elle est tenue d'informer les candidats non retenus des motifs qui ont déterminé son choix ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 26 janvier 2010), que la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Marché limousin (la SAFER) a, par décision du 12 décembre 2006, rétrocédé des terres qu'elle avait acquises à l'amiable ; que soutenant que la notification lui ayant été faite n'était pas suffisamment motivée, M. X..., candidat non retenu, a sollicité l'annulation de cette décision de rétrocession ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que la motivation se borne à un énoncé lapidaire, très général et abstrait, sans aucun élément circonstancié permettant de percevoir concrètement l'opération réalisée ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la notification désignait l'attributaire, le prix ainsi que les parcelles et que la décision de rétrocession était motivée par un remaniement parcellaire par échange d'une exploitation agricole avec apport de parcelles voisines, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à la SAFER du Marché limousin la somme de 1 500 euros et à M. Y... la somme de 1 500 euros ; rejette la demande de M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la SAFER du Marché limousin.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR annulé la décision de rétrocession de la SAFER Marché Limousin notifiée à M. X... par lettre du 9 janvier 2007 concernant les parcelles cadastrées AX 46, 48 et 49 lieudit Le Bois Epais, commune de Meilhards-en-Corrèze ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article R 142-4 1er alinéa in fine du code rural applicable en l'espèce, la SAFER informe les candidats non retenus des motifs ce qui ont déterminé son choix ; que la décision de rétrocession (et non l'avis du comité départemental qui n'est justement qu'un avis) peut faire l'objet d'un recours en annulation, le contrôle juridictionnel concerne la légalité et la régularité de la décision, le respect de l'exigence de motivation, mais non l'opportunité de la rétrocession ; que si, en l'espèce, la notification désigne l'attributaire (M. Y...), le prix et les parcelles, la motivation en elle-même se borne à la phrase suivante sous l'intitulé nature de l'opération réalisée : « remaniement parcellaire par échange d'une exploitation agricole avec apport de parcelles voisines » ; qu'il s'agit d'un énoncé lapidaire, très général et abstrait qui confine à une formule stéréotypée, sans aucun élément circonstancié permettant de percevoir concrètement l'opération réalisée ; qu'il est employé des termes génériques (remaniement, échange, apport) qui peuvent donc s'appliquer de manière uniforme à un grand nombre d'opérations, sans indiquer notamment quel échange est effectué, étant observé qu'il est évoqué un échange d'une exploitation alors qu'un tel contrat implique deux propriétés, ni signalé quelles parcelles font l'objet d'un apport, de qui, à qui... ; que d'ailleurs, c'est au moyen d'éléments ultérieurs (notamment conclusions, note manuscrite du 11 mai 2007 avec plans) que l'on parvient à savoir et à comprendre l'opération réalisée ; qu'elle est expliquée ainsi dans cette note : la SAFER (rouge sur les plans) cède à François Y... 7 ha 65 a 60 ca en échange de 9 ha 61 a 15 ca ; ces terrains situés au Mas (trois îlots bleus) sont attribués à Christian Z... (jaune) qui cède à la SAFER en échanges 4 ha 10 a 74 ca (lot jaune située à proximité du Chalard) rétrocédés à François Y... (bleu) ; que de manière plus générale, il est indiqué que la majeure partie de l'exploitation B... a été attribuée à Mme A... en tant que jeune agricultrice ; que la nécessité de cette note pour exposer l'opération montre d'ailleurs que la motivation dans la notification n'était nullement explicative et équivalait à un défaut de motivation ; que cependant ces éléments ultérieurs sont inopérants, la motivation contenue dans la notification devant être suffisante en elle-même ; que l'éventuelle connaissance du milieu local par le candidat évincé est indifférente et ne peut suppléer une motivation insuffisante ; que compte tenu de ces éléments il convient d'annuler la rétrocession ;
1) ALORS QUE la décision d'attribution d'un bien acquis amiablement est suffisamment motivée lorsqu'elle précise la situation du bien rétrocédé, l'identité du rétrocessionnaire choisi par la SAFER et comporte une mention permettant d'apprécier sa conformité à l'objectif légal poursuivi ; qu'en affirmant que la décision d'attribution par la SAFER Marché Limousin des parcelles en cause à M. Y... était insuffisamment motivée, tout constatant qu'elle désignait clairement l'attributaire et les parcelles concernées et mentionnait l'objectif poursuivi, à savoir un remaniement parcellaire par échange, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article R 142-4 du code rural ;
2) ALORS QUE si la décision d'attribution d'une parcelle doit être motivée, la SAFER n'est jamais tenue de faire référence à des données concrètes extérieures à la rétrocession ; qu'en décidant qu'à défaut d'indiquer les termes précis et les bénéficiaires des échanges effectués, la décision de rétrocession prise par la SAFER Marché Limousin était insuffisamment motivée, quand l'exposé complet de l'opération de remaniement parcellaire aurait nécessairement conduit la SAFER à révéler l'identité et la situation d'attributaires étrangers à la seule rétrocession contestée, la cour d'appel a violé l'article R 142-4 du code rural ;
3) ALORS, en toute hypothèse, QUE si la SAFER est tenue d'informer les candidats à la rétrocession non retenus des motifs ayant déterminé son choix, aucun texte n'empêche le juge de tenir compte d'éléments ultérieurs pour apprécier la régularité de la rétrocession ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L 143-2 et R 142-4 du code rural. Moyen produit au pourvoi incident par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. Y....
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé la décision de rétrocession de la SAFER Marché Limousin notifiée à M. X... par lettre du 9 janvier 2007 et concernant les parcelles AX 46, 48 et 49 situées au lieudit le Bois Epais, commune de Meilhards en Corrèze ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article R. 142-4 1er alinéa in fine du code rural, applicable en l'espèce, la SAFER informe les candidats non retenus des motifs qui ont déterminé son choix ; que la décision de rétrocession (et non l'avis du comité départemental qui n'est justement qu'un avis) peut faire l'objet d'un recours en annulation, le contrôle juridictionnel concernant la légalité et la régularité de la décision, tel le respect de l'exigence de motivation, mais non l'opportunité de la rétrocession ; que si, en l'espèce, la notification désigne l'attributaire (M. Y...), le prix et les parcelles, la motivation en elle-même se borne à la phrase suivante sous l'intitulé Nature de l'opération réalisée : « remaniement parcellaire par échange d'une exploitation agricole avec apports de parcelles voisines » ; qu'il s'agit d'un énoncé lapidaire, très général et abstrait qui confine à une formule stéréotypée, sans aucun élément circonstancié permettant de percevoir concrètement l'opération réalisée ; qu'il est employé des termes génériques (remaniement, échange, apport) qui peuvent donc s'appliquer de manière uniforme à un grand nombre d'opérations, sans indiquer notamment quel échange est effectué, étant observé qu'il est évoqué un échange d'une exploitation alors qu'un tel contrat implique deux propriétés, ni signalé quelles parcelles font l'objet d'un apport, de qui, à qui … ; que d'ailleurs, c'est au moyen d'éléments ultérieures (notamment conclusions, note manuscrite du 11 mai 2007 avec plans) que l'on parvient à comprendre l'opération réalisée ; qu'elle est expliquée ainsi dans cette note : la SAFER (rouge sur les plans) cède à François Y..., 7 hectares 65 ares 60 centiares en échange de 9 hectares 61 ares 15 centiares ; ces terrains situés au Mas (3 îlots bleus) sont attribués à Christian Z... (jaune) qui cède à la SAFER en échange 4 hectares 10 ares 74 centiares (lot jaune situé à proximité du Chalard) rétrocédés à François Y... (bleu) ; que de manière plus générale, il est indiqué que la majeure partie de l'exploitation B... a été attribuée à Mme A... en tant que jeune agricultrice ; que la nécessité de cette note pour exposer l'opération montre d'ailleurs que la motivation dans la notification n'était nullement explicative et équivalait à un défaut de motivation ; que ces éléments ultérieurs sont inopérants, la motivation contenue dans la notification devant être suffisante en elle-même ; que l'éventuelle connaissance du milieu local par le candidat évincé est indifférente et ne peut suppléer une motivation insuffisante ; que compte tenu de ces éléments, il convient d'annuler la rétrocession ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la décision d'attribution d'un bien acquis amiablement est suffisamment motivée lorsqu'elle précise la situation du bien rétrocédé, l'identité du rétrocessionnaire choisi par la SAFER et comporte une mention permettant d'apprécier sa conformité à l'objectif légal poursuivi ; qu'en affirmant que la décision d'attribution par la SAFER Marché Limousin des parcelles en cause à M. Y... était insuffisamment motivée, tout en constatant qu'elle désignait clairement l'attributaire et les parcelles concernées et mentionnait l'objectif poursuivi, à savoir un remaniement parcellaire par échange, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article R. 142-4 du code rural ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE si la décision d'attribution d'une parcelle doit être motivée, la SAFER n'est jamais tenue de faire référence à des données concrètes extérieures à la rétrocession ; qu'en décidant qu'à défaut d'indiquer les termes précis et les bénéficiaires des échanges effectués, la décision de rétrocession prise par la SAFER Marché Limousin était insuffisamment motivée, quand l'exposé complet de l'opération de remaniement parcellaire aurait nécessairement conduit la SAFER à révéler l'identité et la situation d'attributaires étrangers à la seule rétrocession contestée, la cour d'appel a violé l'article R. 142-4 du code rural ;
ET ALORS, ENFIN, QU'en toute hypothèse, si la SAFER est tenue d'informer les candidats à la rétrocession non retenus des motifs ayant déterminé son choix, aucun texte n'empêche le juge de tenir compte d'éléments ultérieurs pour apprécier la régularité de la rétrocession ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 143-2 et R. 142-4 du code rural.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-15009
Date de la décision : 01/06/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL - Rétrocession - Exercice - Information des candidats non retenus - Décision motivée - Données concrètes permettant de vérifier la réalité de l'objectif légal - Nécessité

Viole l'article R. 142-4 du code rural une cour d'appel qui retient que l'information d'un candidat à une rétrocession évincé ne répond pas aux exigences de ce texte alors qu'elle constate que cette information désigne l'attributaire, le prix, les parcelles ainsi que la décision de rétrocession motivée par un remaniement parcellaire par échange d'une exploitation agricole avec apport de parcelles voisines


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 26 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 01 jui. 2011, pourvoi n°10-15009, Bull. civ. 2011, III, n° 92
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, III, n° 92

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Gariazzo (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Pic
Avocat(s) : Me Balat, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.15009
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