LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 5 novembre 2009), que M. X..., adhérent de La Mutuelle générale (la mutuelle) depuis le 14 mai 1979, a été victime de deux ruptures d'anévrisme successives les 6 janvier et 2 février 2002, à la suite desquelles il a été hospitalisé avant d'être placé en rééducation jusqu'au 19 décembre 2002 ; qu'il a perçu des prestations de sécurité sociale sous forme d'indemnités journalières jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité le 1er juillet 2005 ; qu'il a alors demandé la mise en oeuvre de la garantie «capital invalidité» mise en place à compter du 1er juillet 2002 ; que la mutuelle a refusé sa garantie au motif que la première constatation de son état d'invalidité était antérieure au 1er juillet 2002, date d'entrée en vigueur de l'offre de prévoyance ; qu'après expertise ordonnée en référé, M. X... a assigné par acte du 21 juin 2007 la mutuelle devant un tribunal de grande instance en paiement de diverses sommes au titre du capital invalidité, de la rente invalidité et, subsidiairement, du versement anticipé du capital décès ; que postérieurement, celui-ci a ajouté une demande en paiement au titre de la garantie dépendance ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes au titre des garanties invalidité et dépendance irrecevables comme prescrites, alors, selon le moyen :
1°/ que la prescription ne court pas contre celui qui a été dans l'impossibilité d'agir, pour avoir, de manière légitime et raisonnable, ignoré la naissance de son droit ; qu'à partir du moment où M. X..., suite à deux ruptures d'anévrisme, avait reçu des indemnités journalières pendant plus de trois ans avant d'être mis à la retraite d'office pour invalidité le 1er juillet 2005, la cour d'appel ne pouvait décider que celui-ci aurait eu connaissance de son invalidité en décembre 2002 et a ainsi violé l'article L. 221-11 du code de la mutualité ;
2°/ que l'arrêt attaqué ne précise en aucun de ses motifs quelle est la définition exacte de la réalisation du risque invalidité figurant au règlement de la mutuelle et constituant le point de départ de la prescription de l'article L. 221-11 du code de la mutualité ; qu'en déclarant l'action de M. X... prescrite au motif qu'il savait dès décembre 2002 qu'il ne pourrait jamais retravailler et qu'il n'apporte aucun élément susceptible de contredire les conclusions de l'expert désigné pour déterminer la date à laquelle il a été reconnu définitivement et totalement incapable d'exercer une profession quelconque sans préciser qu'il s'agit là de la définition contractuelle exacte de la réalisation du risque invalidité couvert par le contrat, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 221-11 du code de la mutualité, ensemble l'article 1134 du code civil ;
3°/ qu'une simple affirmation équivaut au défaut de motifs ; qu'en affirmant, sans la moindre référence à la clause du contrat souscrit par M. X... définissant la réalisation du risque invalidité indemnisable, que le fait que la sécurité sociale lui ait versé des indemnités journalières pendant plus de trois ans et que sa mise à la retraite n'a été décidée qu'à compter du mois de juillet 2005 pour invalidité n'est pas opposable à la mutuelle qui n'est pas liée par la fixation par cet organisme, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt relève que si M. X... avait été placé en arrêt maladie à compter du mois de janvier 2002 et avait perçu les indemnités journalières versées par la sécurité sociale à compter de cette date, il ne justifiait pas avoir perçu en complément des prestations de la mutuelle comme il le prétendait ; qu'il n'avait produit aucun document de la mutuelle de cette époque, et notamment aucun relevé de prestations, le premier document versé aux débats étant la lettre en date du 30 août 2005 par laquelle son épouse avertissait la mutuelle de la mise en retraite pour invalidité de son mari et sollicitait le versement d'un capital invalidité ; qu'un médecin consulté par M. X... en mai 2006 a écrit que l'invalidité était acquise le 19 décembre 2002 ; que le rapport de l'expert désigné en référé mentionnait que M. X... était définitivement et totalement incapable d'exercer une profession quelconque ; qu'il était dans l'obligation d'avoir recours de manière définitive à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes de la vie courante au sens de l'article 39 du chapitre 3 du règlement de la mutuelle, et que la date à partir de laquelle cet état de dépendance totale avait pu être définitivement et totalement constatée se situant au 19 décembre 2002 ; que dans son assignation, M. X... avait lui-même précisé que l'invalidité n'était reconnue comme telle qu'après la période de soins actifs se terminant au 19 décembre 2002 ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, qui a retenu à bon droit que la mutuelle n'était pas liée par la fixation par la sécurité sociale de la date d'invalidité de M. X..., motivant sa décision sans se prononcer par un motif d'ordre général, a pu décider que n'apportant aucun document médical venant contredire les conclusions claires et précises de l'expert désigné pour déterminer, comme l'y invitait le règlement de la mutuelle, la date à laquelle il avait été reconnu définitivement et totalement incapable d'exercer une profession quelconque, M. X..., qui avait eu connaissance de la réalisation du risque, dès décembre 2002 à sa sortie du centre de rééducation, alors qu'il lui était indiqué qu'il ne pourrait jamais retravailler, ne caractérisait pas une impossibilité absolue d'agir résultant d'une force majeure, de sorte que la demande de versement du capital invalidité formée en août 2005 plus de deux ans après l'événement donnant naissance à la réalisation du risque était prescrite en application de l'article L. 211-11 du code de la mutualité ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils pour M. X...
IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré les demandes de Monsieur X... au titre des garanties invalidité et dépendance irrecevables comme prescrites,
AUX MOTIFS QUE : « (…) si Daniel X... a effectivement été placé en arrêt maladie à compter du mois de janvier 2002 et a perçu en conséquence les indemnités journalières versées par la sécurité sociale à compter de cette date, il ne montre pas avoir, en complément, perçu des prestations de la MUTUELLE GENERALE contrairement à ce qu'il écrit dans ses conclusions et alors même que le premier juge a déjà fait observer cette carence dans l'administration de la preuve ; Que Daniel X... ne produit d'ailleurs aucun document de la MUTUELLE GENERALE de cette époque, et notamment aucun relevé de prestations ; Que le premier document qu'il verse aux débats est la lettre en date du 30 août 2005 par laquelle son épouse avertit la MUTUELLE GENERALE de la mise en retraite pour invalidité de Daniel X... et sollicite en conséquence le versement d'un capital invalidité ; Que, comme le fait observer la MUTUELLE GENERALE, le fait que la sécurité sociale lui ait versé des indemnités journalières pendant plus de trois ans et que sa mise à la retraite n'ait été décidée qu'à compter du mois de juillet 2005 pour invalidité n'est pas opposable à la MUTUELLE GENERALE qui n'est pas liée par la fixation par cet organisme de la date d'invalidité ; Que le Docteur Y..., consulté par Daniel X... lui-même en mai 2006, écrivait à cet égard « l'invalidité de Monsieur Daniel X... était acquise le 19 décembre 2002 » ; Que le Docteur Z..., désigné en référé par le Président du Tribunal de grande instance d'HAZEBROUCK, indiquait quant à lui dans son rapport en date du 7 mars 2007 « Monsieur X... est définitivement et totalement incapable d'exercer une profession quelconque et il est dans l'obligation d'avoir recours de manière définitive à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes de la vie courante au sens de l'article 39 du chapitre 3 du règlement de la MUTUELLE GENERALE. La date à partir de laquelle cet état de dépendance totale a pu être définitivement et totalement constatée se situe au 19 décembre 2002 » ; Que Daniel X... ne pourrait soutenir qu'il n'a pas eu connaissance de la réalisation du risque alors que, dès décembre 2002 à sa sortie du centre de l'Espoir, il savait qu'il ne pourrait jamais retravailler ; Que d'ailleurs dans son assignation, Daniel X... lui-même indiquait que « l'invalidité n'est reconnue comme telle qu'après la période de soins actifs se terminant au 19 décembre 2002 » et aujourd'hui, pour contrer ces éléments, il n'apporte aucun document médical qui contredirait les conclusions claires et précises de l'expert désigné précisément pour déterminer la date à laquelle il a été reconnu définitivement et totalement incapable d'exercer une profession quelconque ; Que dès lors, lorsque l'épouse de Daniel X... a écrit à la MUTUELLE GENERALE en août 2005 pour solliciter le versement du capital invalidité, la prescription de deux ans édictée par l'article L.221-11 du Code de la mutualité était bien acquise ; Que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a déclaré de ce fait irrecevable la demande présentée à ce titre par Daniel X... ; (…) Que bien évidemment, les demandes de rente prévue en cas d'invalidité permanente définie à l'article 24 du règlement de la MUTUELLE GENERALE, de la garantie dépendance prévue à l'article 46 dudit règlement, qui reposent toutes deux sur la constatation d'un état d'invalidité, sont tout aussi prescrites, sans qu'il soit besoin d'examiner si Daniel X... les avait souscrites.» ;
ALORS D'UNE PART QUE la prescription ne court pas contre celui qui a été dans l'impossibilité d'agir, pour avoir, de manière légitime et raisonnable, ignoré la naissance de son droit ; qu'à partir du moment où l'exposant, suite à deux ruptures d'anévrisme, avait reçu des indemnités journalières pendant plus de trois ans avant d'être mis à la retraite d'office pour invalidité le 1er juillet 2005, la Cour d'appel ne pouvait décider que celui-ci aurait eu connaissance de son invalidité en décembre 2002 et a ainsi violé l'article L. 221-11 du Code de la mutualité ;
ALORS D'AUTRE PART QUE l'arrêt attaqué ne précise en aucun de ses motifs quelle est la définition exacte de la réalisation du risque invalidité figurant au règlement de la MUTUELLE GENERALE et constituant le point de départ de la prescription de l'article L.221-11 du Code de la mutualité ; Qu'en déclarant l'action de l'exposant prescrite au motif qu'il savait dès décembre 2002 qu'il ne pourrait jamais retravailler et qu'il n'apporte aucun élément susceptible de contredire les conclusions de l'expert désigné pour déterminer la date à laquelle il a été reconnu définitivement et totalement incapable d'exercer une profession quelconque sans préciser qu'il s'agit là de la définition contractuelle exacte de la réalisation du risque invalidité couvert par le contrat, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.221-11 du Code de la mutualité, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
ALORS ENFIN QU'une simple affirmation équivaut au défaut de motifs ; Qu'en affirmant, sans la moindre référence à la clause du contrat souscrit par l'exposant définissant la réalisation du risque invalidité indemnisable, que le fait que la sécurité sociale ait versé des indemnités journalières à l'exposant pendant plus de trois ans et que sa mise à la retraite n'a été décidée qu'à compter du mois de juillet 2005 pour invalidité n'est pas opposable à la MUTUELLE GENERALE qui n'est pas liée par la fixation par cet organisme, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.