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04/05/2011 | FRANCE | N°10-14142

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 04 mai 2011, 10-14142


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X... et Mme Y..., mariés au Maroc en 1996, vivent en France où ils ont poursuivi leurs études ; qu'en 2005, le tribunal de première instance de Casablanca, saisi par M. X... a prononcé leur divorce et a fixé à 69 000 dirhams (6 900 €) le montant de la pension due à l'épouse ; que M. X... n'ayant pu faire transcrire le jugement marocain sur les registres français, a formé une nouvelle demande de divorce en France, sur le fondement de l'article 233 du code civil français ;

Sur

le moyen unique pris en ses deux premières branches :

Attendu que ces gr...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X... et Mme Y..., mariés au Maroc en 1996, vivent en France où ils ont poursuivi leurs études ; qu'en 2005, le tribunal de première instance de Casablanca, saisi par M. X... a prononcé leur divorce et a fixé à 69 000 dirhams (6 900 €) le montant de la pension due à l'épouse ; que M. X... n'ayant pu faire transcrire le jugement marocain sur les registres français, a formé une nouvelle demande de divorce en France, sur le fondement de l'article 233 du code civil français ;

Sur le moyen unique pris en ses deux premières branches :

Attendu que ces griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le moyen unique pris en sa troisième branche :

Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué (Rennes, 13 janvier 2009) de l'avoir déboutée de sa demande de prestation compensatoire, alors, selon le moyen, que pour être reconnu en France, un jugement de divorce marocain doit remplir les conditions énumérées à l'article 16 de la Convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 ; qu'en jugeant qu'il ne pouvait être fait abstraction du jugement de divorce en vertu duquel les époux, au regard de leur loi nationale d'origine, sont divorcés depuis trois ans sans avoir au préalable apprécié la régularité internationale de ce jugement étranger, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à son arrêt au regard de cette disposition conventionnelle et de l'article 3 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, sans reconnaître le jugement marocain, lui a accordé un effet de fait, s'agissant de la séparation des époux ainsi que, pour l'appréciation de l'existence d'une disparité, du versement d'un somme d'argent à l'épouse ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour Mme Y....

Mme Y... fait grief à l'arrêt infirmatif de l'avoir déboutée de sa demande de prestation compensatoire

Aux motifs que la vie commune n'a pas excédé huit ans même si le mariage a duré 12 ans. En fait et en outre, il ne peut être fait abstraction du jugement d'avril 2005 – auquel l'épouse a acquiescé et au terme duquel ils sont, au regard de leur loi nationale d'origine, divorcés depuis trois ans ; l'épouse ayant remplie de ses droits ; qu'au cas d'espèce, la jeune femme n'est âgée que de 35 ans pour être née le 15 janvier 1973 ; que la jeune femme n'établie pas avoir dû cesser ses études par suites d'un choix de couple, alors que son mari était comme elle-même encore étudiant au début de leur mariage et que ses difficultés de santé sont clairement apparues en 2004, soit au moment de la rupture de la vie commune ; qu'il n'est pas davantage fourni le moindre renseignement sur sa vie personnelle alors qu'il ressort de la nouvelle demande de logement formulée en septembre 2008, qu'elle a sollicité un logement pour deux personnes ; que rien ne permet d'affirmer et de retenir qu'elle est à aujourd'hui et dans un avenir prévisible – compte tenu d'une part du traitement médical qu'elle suit maintenant depuis plus de quatre ans (dont la finalité est de stabiliser l'humeur) et d'autre part de l'absence de preuve d'une dégradation progressive et inévitable de son état psychique – dans l'incapacité de trouver un travail et par suite de pourvoir à ses besoins ; que le prononcé du divorce, tel qu'il résulte du jugement entrepris, ne crée dans les conditions de vie des parties aucune disparité, la différence de situation actuelle étant la seule résultante d'un état de santé, un temps déficient, mais non irrémédiablement compromis ; que par voie de conséquence, le jugement doit être infirmé en ce qu'il a été mis à la charge de M. X... une prestation compensatoire, les conditions d'octroi de cette prestation n'étant pas légalement remplies ».

ALORS QUE la prestation compensatoire a pour objet de compenser la disparité que la rupture du mariage créée dans les conditions respectives des époux, appréciées notamment au moment du divorce, en tenant compte, en particulier, de l'état de santé des époux ; que, dès lors, ayant constaté que le mari percevait, en sa qualité de gynécologue obstétricien exerçant à l'hôpital de Vitré, des revenus mensuels de plus de 4.000 euros, et que l'épouse, qui n'a jamais travaillé et n'a pas de diplôme, perçoit l'allocation adulte handicapé en raison de son incapacité due à ses difficultés de santé, la cour d'appel qui, tout en relevant l'existence d'une différence de situation actuelle, a dénié à l'épouse tout droit à prestation compensatoire dès lors que cette différence était la seule résultante d'un état de santé non irrémédiablement compromis, n'a pas ainsi tenu compte de la situation respective des époux au moment du divorce au regard, notamment, de leur état de santé et a ainsi violé l'article 271 du code civil.

ALORS QUE l'appréciation de la disparité est objective ; qu'en relevant que l'arrêt par Mme Y... de ses études, invoqué pour justifier de ses difficultés à trouver un travail, ne résultait pas d'un choix du couple, la cour d'appel s'est prononcée par un motif étranger aux prévisions de l'article 271 du code civil qu'elle a ainsi violé.

ET ALORS QUE, pour être reconnu en France, un jugement de divorce marocain doit remplir les conditions énumérées à l'article 16 de la Convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 ; qu'en jugeant qu'il ne pouvait être fait abstraction du jugement de divorce en vertu duquel les époux, au regard de leur loi nationale d'origine, sont divorcés depuis trois ans sans avoir au préalable apprécié la régularité internationale de ce jugement étranger, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à son arrêt au regard de cette disposition conventionnelle et de l'article 3 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-14142
Date de la décision : 04/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

DIVORCE, SEPARATION DE CORPS - Règles spécifiques au divorce - Prestation compensatoire - Attribution - Conditions - Disparité dans les conditions de vie respectives des époux - Appréciation - Eléments à considérer - Jugement étranger - Portée

DIVORCE, SEPARATION DE CORPS - Règles spécifiques au divorce - Prestation compensatoire - Fixation - Critères - Versement d'une somme d'argent à l'épouse - Détermination - Eléments à considérer - Jugement étranger

Une cour d'appel qui, pour apprécier le droit à prestation compensatoire de l'épouse, retient un jugement étranger comme un simple fait établissant la séparation des époux et le versement d'une certaine somme à l'épouse, ne se prononce pas sur la régularité internationale de cette décision


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 13 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 04 mai. 2011, pourvoi n°10-14142, Bull. civ. 2011, I, n° 80
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, I, n° 80

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Rapporteur ?: Mme Monéger
Avocat(s) : SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Potier de la Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.14142
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