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04/05/2011 | FRANCE | N°10-13996

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 04 mai 2011, 10-13996


Attendu que, par acte authentique du 16 mai 2001, Jeanine X..., née le 6 janvier 1928, a donné à ses cinq neveux et nièces (les consorts X...) la nue-propriété des parts sociales dont elle était propriétaire dans deux SCI ; qu'elle a institué, le 22 octobre 2001, comme légataire universelle, Mme Y... qu'elle a adoptée simplement par jugement du 18 octobre 2002 ; que Jeanine X... est décédée le 31 mars 2004 ; que, par acte du 30 juin 2004, Mme Y... a assigné les consorts X... en révocation des donations intervenues le 16 mai 2001, au motif qu'elles avaient, de plein droit, été

révoquées par son adoption ; que, par jugement du 10 février 200...

Attendu que, par acte authentique du 16 mai 2001, Jeanine X..., née le 6 janvier 1928, a donné à ses cinq neveux et nièces (les consorts X...) la nue-propriété des parts sociales dont elle était propriétaire dans deux SCI ; qu'elle a institué, le 22 octobre 2001, comme légataire universelle, Mme Y... qu'elle a adoptée simplement par jugement du 18 octobre 2002 ; que Jeanine X... est décédée le 31 mars 2004 ; que, par acte du 30 juin 2004, Mme Y... a assigné les consorts X... en révocation des donations intervenues le 16 mai 2001, au motif qu'elles avaient, de plein droit, été révoquées par son adoption ; que, par jugement du 10 février 2005, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, statuant à la fois sur la tierce opposition au jugement d'adoption des consorts X... et sur la demande en révocation des donations du 16 mai 2001, a joint les deux procédures, reçu la tierce opposition, refusé l'adoption de Mme Y... par Jeanine X..., au motif que cette adoption avait pour but de consacrer les liens amoureux existant entre elles et non de créer une relation filiale, et rejeté les demandes de révocation ou de réduction des donations ; que l'arrêt confirmatif de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a fait l'objet d'un pourvoi sur lequel la première chambre civile a statué par arrêt du 6 février 2008 (n° 06-20. 054) ; que, sur renvoi de cassation, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, par arrêt du 25 novembre 2009, a confirmé la décision entreprise sur la recevabilité et le bien-fondé de la tierce opposition et rétracté le jugement d'adoption du 18 octobre 2002 ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 25 novembre 2009) d'avoir confirmé le jugement du 10 février 2005 sur la recevabilité et le bien-fondé de la tierce opposition, ainsi que sur le rejet de ses demandes en révocation et en réduction des donations du 16 mai 2001 ;
Attendu qu'en vertu de l'article 446 du code de procédure civile, les contestations afférentes à la publicité des débats doivent être présentées, à peine d'irrecevabilité avant leur clôture ; qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des productions qu'une telle contestation ait été soulevée devant les juges du fond ; d'où il suit que le moyen n'est pas recevable ;
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait le même grief à l'arrêt attaqué ;
Attendu qu'ayant relevé, d'une part, que le rapport de police, établi lors du décès de Jeanine X..., mentionnait Mme Y... comme étant sa " compagne ", d'autre part, que celle-ci admettait avoir entretenu avec la défunte une relation homosexuelle ancienne, continue et persistante jusqu'à son décès et avoir vécu en concubinage avec elle depuis les années 1990, c'est par une appréciation souveraine que la cour d'appel a estimé que Jeanine X..., en ne révélant pas ses relations homosexuelles avec l'adoptée et en travestissant la réalité par son silence sur la nature véritable de leurs relations, avait commis une omission dolosive constitutive d'une fraude de nature à influer de façon déterminante sur la décision d'adoption et rendant recevable la tierce opposition des consorts X... ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que Mme Y... fait le même grief à l'arrêt attaqué, alors, selon le moyen :
1°/ que l'adoption simple qui n'a pas pour but unique la création, le maintien ou la reprise de relations sexuelles entre l'adoptant et l'adopté ne peut être considérée comme un détournement de l'institution au seul motif que l'un et l'autre entretiennent des relations sexuelles ; qu'au cas d'espèce, en ce que l'arrêt s'est fondé, pour retenir un détournement de l'institution de l'adoption simple, sur la circonstance que Mme Y... et Mme X... entretenaient des relations homosexuelles, il a été rendu en violation des articles 353, 353-2 et 361 du code civil, ensemble les articles 6 et 1133 du même code, ensemble l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que l'adoption simple ne peut être refusée, au motif d'un détournement de l'institution, que lorsqu'elle poursuit exclusivement un but étranger à celui prévu par la loi ; qu'au cas d'espèce, en accueillant la tierce opposition formée contre le jugement d'adoption simple de Mme Y... par Mme X... au motif que Mme X... avait notamment poursuivi un but patrimonial, sans constater que celui-ci était l'unique but poursuivi, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard des articles 353, 353-2, 355 et 361 du code civil ;
Attendu qu'ayant rappelé, à bon droit, que l'adoption simple a pour objet non pas de renforcer des liens d'affection ou d'amitié entre deux personnes ayant des relations sexuelles mais de consacrer un rapport filial, la cour d'appel, après avoir retenu que Mme Y... et Jeanine X... vivaient en concubinage depuis 1990 et que l'adoptante n'avait jamais évoqué l'existence d'un rapport filial, mais aussi, que l'adoption simple leur permettait de contourner les règles civiles régissant les donations entre vifs, a souverainement apprécié leur demande au regard de la finalité de l'institution et constaté son détournement ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
Sur le quatrième moyen, ci-après annexé :
Attendu que le moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... et la condamne à payer la somme totale de 3 000 euros aux défendeurs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour Mme Y..., épouse A...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a confirmé le jugement du 10 février 2005 sur la recevabilité de la tierce opposition formée par les consorts X... contre le jugement rendu le 18 octobre 2002 par le tribunal de grande instance d'Aix en Provence prononçant l'adoption simple de Mme Y..., épouse A... par Mme X..., confirmé le jugement du 10 février 2005 sur le bien-fondé de la tierce opposition, rétracté le jugement du 18 octobre 2002, déclaré nul et de nul effet l'adoption simple de Mme Y... par Mme X... et confirmé le jugement du 10 février 2005 en ce qu'il avait débouté Mme Y... de ses demandes en révocation des donations du 16 mai 2001 et de ses demandes subsidiaires de réduction de celles-ci ;
AUX ENONCIATIONS QUE « l'affaire a été débattue le 3 juillet 2009 en chambre du conseil » (arrêt p. 3) et que « statuant en audience publique, après débats non publics, contradictoirement » (arrêt p. 12) ;
ALORS QUE lorsque la tierce opposition est dirigée contre un jugement rendu en matière gracieuse, elle est formée, instruite et jugée selon les règles de la procédure contentieuse ; qu'en matière contentieuse, les débats sont publics sauf les cas où la loi exige qu'ils aient lieu en chambre du conseil ; qu'au cas d'espèce, en statuant après débats en chambre du conseil, quand ils étaient saisis d'une tierce opposition à l'encontre d'un jugement d'adoption, de sorte que les débats devaient être publics, peu important que la décision frappée de recours eût été rendue en matière gracieuse, les juges du second degré ont violé, par fausse application, les articles 434, 436, 1167 et 1170 du Code de procédure civile et, par refus d'application, les articles 22, 433 et 587 du même code.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a confirmé le jugement du 10 février 2005 sur la recevabilité de la tierce opposition formée par les consorts X... contre le jugement rendu le 18 octobre 2002 par le tribunal de grande instance d'Aix en Provence prononçant l'adoption simple de Mme Y..., épouse A... par Mme X..., confirmé le jugement du 10 février 2005 sur le bien-fondé de la tierce opposition, rétracté le jugement du 18 octobre 2002, déclaré nul et de nul effet l'adoption simple de Mme Y... par Mme X... et confirmé le jugement du 10 février 2005 en ce qu'il avait débouté Mme Y... de ses demandes en révocation des donations du 16 mai 2001 et de ses demandes subsidiaires de réduction de celles-ci ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la recevabilité de l'action en tierce-opposition des consorts X... contre le jugement d'adoption du 18 octobre 2002 :. les consorts X... agissent en tierce-opposition pour obtenir le débouté de la demande d'adoption simple de Marie-Françoise A..., présentée par Jeanine X... le 5 avril 2002, devant le Tribunal de Grande Instance d'Aix-en-Provence ; que par arrêt du 6 février 2008, la 1ère Chambre Civile de la Cour de Cassation a cassé l'arrêt rendu par cette Cour le 5 septembre 2006, pour avoir confondu la recevabilité de la tierce opposition et le bien fondé de la demande d'adoption ; que pour déclarer la tierce opposition recevable, le Juge doit rechercher si, comme l'exige l'article 353-2 du Code Civil, il existe un dol ou une fraude imputable à l'adoptant, ayant eu pour but de permettre l'adoption, en dissimulant intentionnellement au Tribunal, appelé à statuer sur l'adoption, des éléments d'information de nature à influer de façon déterminante sur sa décision ; qu'il n'est pas démontré, par les attestations produites par les consorts X..., qu'en avril 2002, Jeanine X... ne possédait pas toutes ses facultés mentales et l'aurait dissimulé au Tribunal ; de même, le fait que le Tribunal n'ait pas été informé de ce que l'adoption était demandée à l'insu des consorts X... et d'une manière générale, de l'entourage familial de Jeanine X..., ne constitue pas un dol, cette adoption ne changeant rien à la dévolution successorale de l'adoptante, sans descendants ni ascendants directs ; en revanche, Jeanine X... a bien commis une omission dolosive, de nature à influer de façon déterminante sur la décision d'adoption, en ne révélant pas les relations homosexuelles existant à la date de la requête en adoption, soit au 5 avril 2002, entre elle et la future adoptée Marie-Françoise Y... épouse A... ; ce comportement procédural, constitutif d'une fraude à la loi, est établi par les éléments suivants : dans sa requête aux fins d'adoption simple, Jeanine X... expose " qu'elle entretient des liens affectifs très profonds avec Marie-Françoise A... née Y..., née le 29 décembre 1043, que l'adoption aura pour résultat d'officialiser des liens d'affection ; que la requérante n'a aucun descendant vivant légitime, naturel ou adoptif et que suivant acte notarié du 11 février 2002, les parties ont consenti à l'adoption... " ; aucun terme dans cet exposé ne laisse deviner la nature réelle des relations unissant la candidate à l'adoption et la future adoptée alors que le rapport de police, établi lors du décès de Jeanine X..., les 1er et 2 avril 2004 mentionne expressément que cette dernière et Marie-Françoise A... vivaient en couple et que ce rapport comme le rapport d'autopsie de Jeanine X... emploient le mot " compagne " pour désigner Marie-Françoise A... ; c'est vainement que Marie-Françoise A..., après avoir contesté cette relation " homosexuelle, en produisant 30 témoignages, contredits au demeurant par des attestations adverses, dans le cadre de cette instance, reconnaît dans ses dernières écritures la réalité de cette relation mais soutient qu'elle s'était transformée en relation filiale à la date de la requête en adoption : Qu'en effet non seulement les témoignages F..., G..., H..., I... établissent que jusqu'en 2004 Jeanine X... et Marie-Françoise A... se comportaient comme un couple en public, se tenant par la main et s'embrassant sur les lèvres, mais il ressort de l'audition même de Marie-Françoise A..., dans les procès-verbaux de police des 1er et 2 avril 2004, que celle-ci a admis avoir avec Jeanine X... une relation homosexuelle ancienne, continue et persistante jusqu'au décès de Jeanine X... et vivre en concubinage avec cette dernière ; ainsi Marie-Françoise A... a déclaré aux enquêteurs en employant le présent, qu'elle était homosexuelle, Jeanine X... aussi, qu'elles avaient décidé de vivre ensemble dans les années 1990, après s'être connues en 1985, bien qu'elle ne soit pas divorcée et que dans la nuit du 30 au 31 mars 2004 elle se trouvait dans la chambre " où nous dormions ensemble " ; comme l'a relevé l'Avocat Général à la Cour de Cassation, " il ne peut y avoir de relations filiales là où existent des relations sexuelles ", qu'il s'ensuit que Jeanine X... a travesti la réalité par son silence sur la nature véritable de ses relations avec Marie-Françoise A... pour obtenir du Tribunal la décision d'adoption souhaitée ; ce dol, ainsi démontré, qui aurait été de nature à modifier cette décision, rend recevable la tierce-opposition formée par les consorts X... au jugement rendu le 18 octobre 2002 par le Tribunal de Grande Instance d'Aix-en-Provence ; » (arrêt p. 7, 8 et 9)
ALORS QUE la tierce opposition à l'encontre du jugement d'adoption n'est recevable qu'en cas de dol ou de fraude imputable aux adoptants ; que le dol suppose l'intention de tromper ; qu'au cas d'espèce en jugeant recevable la tierce opposition formée par les consorts X... contre le jugement d'adoption simple de Mme Y... par Mme X..., motifs pris de la « réticence dolosive » imputable à Mme X... en raison de ce qu'elle n'avait pas expressément dit à l'occasion de la requête aux fins d'adoption simple qu'elle entretenait des relations homosexuelles avec Mme Y..., sans constater que cette omission avait été dictée par l'intention de tromper les magistrats, les juges du fond ont privé de base légale leur décision au regard de l'article 353-2 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a confirmé le jugement du 10 février 2005 sur la recevabilité de la tierce opposition formée par les consorts X... contre le jugement rendu le 18 octobre 2002 par le tribunal de grande instance d'Aix en Provence prononçant l'adoption simple de Mme Y..., épouse A... par Mme X..., confirmé le jugement du 10 février 2005 sur le bien-fondé de la tierce opposition, rétracté le jugement du 18 octobre 2002, déclaré nul et de nul effet l'adoption simple de Mme Y... par Mme X... et confirmé le jugement du 10 février 2005 en ce qu'il avait débouté Mme Y... de toutes ses demandes en révocation des donations du 16 mai 2001 et de ses demandes subsidiaires de réduction de celles-ci ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur le bien fondé de la tierce opposition : la tierce opposition remet en cause le jugement d'adoption simple du 18 octobre 2002 dans son intégralité pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit ; qu'il convient ainsi de rechercher si les conditions de l'adoption simple de Marie-Françoise Y... épouse A... par Jeanine X... étaient remplies et si le prononcé de l'adoption simple était justifié ; que le jugement du 18 octobre 2002 se borne à indiquer, dans ses motifs, que " les conditions prévues par la loi sont réunies et que l'adoption envisagée est conforme à l'intérêt de la (future) adoptée " ; Attendu que la finalité de l'adoption, même simple, est de créer un lien de filiation entre adoptant et adopté ; Attendu qu'à la date de la demande d'adoption le 5 avril 2002, Jeanine X..., née en 1928, était âgée de 72 ans et Marie-Françoise A..., née en 1943, de 59 ans ; qu'elles avaient à peine 15 ans de différence d'âge, soit le minimum requis pour adopter ; qu'homosexuelles toutes les deux, elles vivaient en concubinage depuis 1990, comme la preuve en a été rapportée ci-avant ; que Marie-Françoise A... était mariée et socialement installée, à l'époque où elle a fait connaissance de Jeanine X... et l'était toujours, à la date de la requête en adoption ; que Jeanine X... a déclaré, dans cette requête, vouloir par l'adoption, officialiser des liens d'affection avec Marie-Françoise A... ; que l'adoption simple n'a pas pour objet de renforcer des liens d'affection ou d'amitié entre deux personnes, ayant des relations sexuelles ensemble, mais de consacrer un rapport filial que Jeanine X... n'a jamais évoqué et qu'elle a même exclu, en ne souhaitant pas une modification de l'état civil de Marie-Françoise Y... épouse A... ; en conséquence que d'ores et déjà, il peut être affirmé que la demande en adoption simple présentée par Jeanine X... détournait l'institution de son objet ; en outre, qu'il est suffisamment établi par les pièces produites aux débats, que cette demande en adoption simple poursuivait une finalité essentiellement patrimoniale et ce, pour contourner les règles civiles des donations entre vifs et notamment le principe de leur irrévocabilité ; il sera rappelé que, par acte notarié du 16 mai 2001, Jeanine X... avait donné à ses neveux, les consorts X..., la nue-propriété des parts sociales des SCI SOCIGUI et SOJAYAN ELYSEES, représentant une valeur en 2001 de 608. 328 € puis, par acte notarié du 8 juin 2001, avait institué les consorts X..., légataires universels de tous ses biens meubles et immeubles ; que par acte notarié du 22 octobre 2001, Jeanine X... a, cependant „ désigné dans son testament de même date, Marie-Françoise Y... épouse A... comme sa légataire universelle ; toutefois que cette qualité de légataire universelle ne permettait pas à Marie-Françoise A... de demander la révocation de la donation susvisée alors que l'adoption aurait pu, suivant l'interprétation éventuellement faite par le Juge du fond de l'article 960 ancien du Code Civil, combiné aux articles 368 et 735 du même Code, autoriser Marie-Françoise A... à obtenir la révocation de ladite donation de plein droit ; que dans le procès-verbal de police du 2 avril 2004, Marie-Françoise A... reconnaît, en effet, qu'elle connaissait l'existence de la donation et dit " que Jeanine a appris par des amis qu'en m'adoptant, ses neveux ne pourraient me mettre à l'écart " ; que dans son codicille du 20 janvier 2004, Jeanine X... confirme que l'adoption a été principalement demandée en vue de la révocation de la donation du 16 mai 2001 puisqu'elle écrit " Etant informée des dispositions de l'article 960 du Code Civil par l'effet desquelles les donations que j'ai consenti, se trouvent révoquées par l'adoption simple de Marie-Françoise A..., je confirme cette dernière pour ma légataire universelle " ; enfin que par assignation du 30 juin 2004, soit 3 mois après le décès de Jeanine X... Marie-Françoise A... a invoqué son adoption simple pour voir révoquer les donations notariées du 16 mai 2001 ; ces buts poursuivis par la demande en adoption simple constituent un détournement de l'institution, ces buts étant étrangers à la création d'un lien de filiation ; que c'est la raison, pour laquelle, au demeurant le jugement d'adoption n'a pas été révélé par Jeanine X... à ses proches, comme Belmira Z..., ni à sa famille avant son décès ; que les conditions de la loi n'étant pas remplies, il convient de rétracter le jugement rendu le 18 octobre 2002 par le Tribunal de Grande instance d'Aix-en-Provence et d'annuler l'adoption prononcée, le jugement entrepris rendu le 10 février 2005 par le Tribunal de Grande instance d'Aix-en-Provence étant confirmé en ce qu'il a reçu la tierce-opposition et refusé l'adoption de Marie-Françoise Y... par Jeanine X..., sauf pour la Cour à prononcer la nullité de cette adoption ; » (arrêt p. 9 à 11) ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur la tierce opposition au jugement d'adoption du 18 octobre 2002 : En l'espèce, les consorts X... se plaignent d'un détournement de l'institution de l'adoption en absence de relations filiales entre l'adoptante et l'adoptée. Leur action se fonde sur la fraude et s'avère recevable ; l'adoption a pour objet de créer un lien de filiation entre l'adoptant et l'adopté et en absence d'un tel lien elle se trouve détournée de sa finalité et ne peut être prononcée ; Existait entre Mme Jeanine X... et Mme Y... une relation homosexuelle qui s'accompagnait depuis la fin 2001, début 2002 d'une vie commune. Cela ressort des attestations versées aux débats. Notamment Mesdames B... et C... relatent les avoir vu s'embrassant sur la bouche et s'étreignant très fort ; Mme D... affirme qu'elles faisaient ménage commun à l'évidence ; M. Henri E... témoigne qu'au fil des ans il était devenu évident que leur relation était amoureuse et M. Georges E... ajoute que Mme Jeanine X... lui a raconté que Mme Y... était sa compagne, ce qui était déjà, pour lui sans équivoque ; le rapport d'autopsie de Mme Jeanine X... qui reprend les déclarations du policier aux médecins, mentionne Mme Y... comme la compagne par ailleurs adoptée de Mme Jeanine X.... aucun élément ne contredit ces multiples attestations toutes concordantes. la nature de cette relation, persistante lors de l'adoption, s'oppose à des rapports filiaux ; d''autres éléments corroborent l'absence de liens filiaux ; Tout d'abord, Mme Y... n'a pas ajouté à son nom, celui de Mme Jeanine X... contrairement à ce que prescrit l'article 363 du Code civil, marquant la volonté des parties de ne pas traduire de manière patronymique l'adoption et de ne pas en faire perdurer ses effets une fois l'adoptant disparu ; ensuite, la différence d'âge entre l'adaptant et l'adaptée ne dépasse que de quelques mois la limite d'au moins quinze ans imposée par les articles 361 et 344 du Code civil et ne correspond pas à la différence d'âge habituelle entre une mère et sa fille. enfin, si les documents produits ne permettent pas de situer avec exactitude la date à laquelle Mme Jeanine X... a fait connaissance de Mme Y..., leur rencontre n'est pas antérieure à la décennie 1980. Or à cette époque Mme Y... approchait de la quarantaine, se trouvait mariée e exerçait une profession dans le domaine pharmaceutique ; lors de l'adoption, Mme Y... était âgée de 69 ans e Mme Jeanine X... de 74 ans ; à l'évidence, celle-ci n'a jamais participé à l'entretien et l'éducation de celle-là alors qu'une telle contribution est consubstantielle à des liens filiaux. ainsi, l'adoption de Mme Y... par Mme Jeanine X... provient des liens amoureux existant entre elles et n'avait pas pour objet de consacrer ou de créer une relation filiale ; il convient de réformer le jugement d'adoption du 18 octobre 2002 du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence et de rejeter la demande d'adoption de Mme Y... par Mme Jeanine X... » (jugement du 10 février 2005, p. 4 à 6) ;
ALORS QUE, premièrement, l'adoption simple qui n'a pas pour but unique la création, le maintien ou la reprise de relations sexuelles entre l'adoptant et l'adopté ne peut être considérée comme un détournement de l'institution au seul motif que l'un et l'autre entretiennent des relations sexuelles ; qu'au cas d'espèce, en ce que l'arrêt s'est fondé, pour retenir un détournement de l'institution de l'adoption simple, sur la circonstance que Mme Y... et Mme X... entretenaient des relations homosexuelles, il a été rendu en violation des articles 353, 353-2 et 361 du Code civil, ensemble les articles 6 et 1133 du même Code, ensemble l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales ;
Et ALORS QUE, deuxièmement, l'adoption simple ne peut être refusée, au motif d'un détournement de l'institution, que lorsqu'elle poursuit exclusivement un but étranger à celui prévu par la loi ; qu'au cas d'espèce, en accueillant la tierce opposition formée contre le jugement d'adoption simple de Mme Y... par Mme X... au motif que Mme X... avait notamment poursuivi un but patrimonial, sans constater que celui-ci était l'unique but poursuivi, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à leur décision au regard des articles 353, 353-2, 355 et 361 du Code civil
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a tout à la fois rétracté le jugement d'adoption simple du 18 octobre 2002 rendu par le tribunal de grande instance d'Aix en Provence et déclaré nulle et de nul effet l'adoption simple de Mme Y... par Mme X... ;
AUX MOTIFS QUE « les conditions de la loi n'étant pas remplies, il convient de rétracter le jugement rendu le 18 octobre 2002 par le tribunal de grande instance d'Aix en Provence et d'annuler l'adoption prononcée, le jugement entrepris rendu le 10 février 2005 par le tribunal de grande instance d'Aix en Provence étant confirmé en ce qu'il a reçu la tierce opposition et refusé l'adoption de Marie François Y... par Mme X..., sauf pour la Cour à prononcer la nullité de cette adoption. » (arrêt p. 11 § 5) ;
ALORS QUE l'accueil de la tierce opposition remet en question la chose jugée en fait et en droit ; qu'il en résulte qu'au cas d'espèce, les juges du second degré ayant rétracté le jugement d'adoption rendu le 18 octobre 2002 et repoussé la requête en adoption présentée par Mme X..., ils ne pouvaient en outre prononcer la nullité de l'adoption, laquelle avait disparu par l'effet de la rétractation du jugement du 18 octobre 2002 ; qu'à cet égard, les juges du second degré ont violé l'article 353-2 du Code civil, ensemble les articles 583 et 591 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-13996
Date de la décision : 04/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

FILIATION - Filiation adoptive - Adoption simple - Domaine d'application - Exclusion - Cas

C'est à bon droit qu'une cour d'appel retient que l'adoption simple a pour objet non pas de renforcer des liens d'affection ou d'amitié entre deux personnes ayant des relations sexuelles, mais de consacrer un rapport filial


Références :

articles 353, 353-2, 355 et 361 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 25 novembre 2009

Sur la finalité de l'adoption, à rapprocher : 1re Civ., 23 juin 2010, pourvoi n° 09-66782, Bull. 2010, I, n° 144 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 04 mai. 2011, pourvoi n°10-13996, Bull. civ. 2011, V, n° 81
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, V, n° 81

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Rapporteur ?: Mme Vassallo
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.13996
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