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04/05/2011 | FRANCE | N°10-11530;10-11531

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 mai 2011, 10-11530 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° s Q 10-11. 530 et R 10-11. 531 ;

Sur le moyen unique :

Attendu selon les arrêts attaqués (Versailles, 8 décembre 2009), que M. X... engagé en qualité de directeur stagiaire de supermarché le 22 janvier 1996 et M. Y...engagé le 5 décembre 2001 en qualité de chef de marché par la société Atac, ont été licenciés, pour faute grave le 23 mai 2006 ;

Attendu que la société Atac fait grief aux arrêts de dire les licenciements sans cause réelle

et sérieuse et de la condamner en conséquence à payer à MM. X... et Y..., outre un rappel de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° s Q 10-11. 530 et R 10-11. 531 ;

Sur le moyen unique :

Attendu selon les arrêts attaqués (Versailles, 8 décembre 2009), que M. X... engagé en qualité de directeur stagiaire de supermarché le 22 janvier 1996 et M. Y...engagé le 5 décembre 2001 en qualité de chef de marché par la société Atac, ont été licenciés, pour faute grave le 23 mai 2006 ;

Attendu que la société Atac fait grief aux arrêts de dire les licenciements sans cause réelle et sérieuse et de la condamner en conséquence à payer à MM. X... et Y..., outre un rappel de salaire et des indemnités de préavis et conventionnelle de licenciement et les congés payés afférents, des dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que la faute grave est celle de nature à rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que commet une telle faute le salarié qui, après avoir ouvert une négociation avec son employeur en vue de conclure avec lui un contrat de franchise, entreprend secrètement, et contrairement à son obligation de loyauté, des discussions avec une entreprise concurrente, pour devenir franchisé de cette dernière ; qu'il est constant et ressort de l'arrêt attaqué, qu'elle avait proposé à MM. X... et Y..., qui étaient ses salariés, de conclure un contrat de franchise pour l'exploitation d'un supermarché ; que les parties avaient commencé à négocier les conditions de ce contrat ; que MM. X... avaient cependant engagé, à l'insu de leur employeur, des discussions pour « rechercher une autre enseigne », et devenir ainsi franchisés d'une entreprise concurrente ; qu'en estimant que les salariés n'auraient pas commis de faute grave, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail ;

2°/ subsidiairement, que le salarié a un devoir de loyauté envers son employeur ; que manque à ce devoir et commet une faute de nature à justifier son licenciement le salarié qui, après avoir ouvert une négociation avec son employeur pour conclure avec lui un contrat de franchise, entreprend des discussions avec une entreprise concurrente pour devenir franchisé de cette dernière, sans en informer son employeur ; qu'il est constant et ressort de l'arrêt attaqué, qu'elle avait proposé à MM. X... et Y..., qui étaient ses salariés, de conclure un contrat de franchise pour l'exploitation d'un supermarché ; que les parties avaient commencé à négocier les conditions de ce contrat ; que MM. X... avaient cependant engagé, à l'insu de leur employeur, des discussions pour « rechercher une autre enseigne », et devenir ainsi franchisés d'une entreprise concurrente ; qu'en estimant que le fait, pour les salariés, de n'avoir pas avisé leur employeur qu'ils recherchaient une autre enseigne ne constituait pas un manquement au devoir de loyauté de nature à fonder un licenciement pour cause réelle et sérieuse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant constaté que les négociations initiées par l'employeur avec MM. X... et Y...tendaient à substituer à la relation salariale une relation de franchiseur à franchisé, la cour d'appel en a exactement déduit que le fait pour ces salariés de s'être enquis, dans ce cadre, des conditions d'une franchise avec un tiers, fût-il concurrent de leur employeur, n'était pas constitutif d'une faute ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Atac aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Atac à payer globalement 2 500 euros à MM. X... et Y...;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit aux pourvois n° s Q 10-11. 530 et R 10-11. 531 par la SCP Tiffreau et Corlay, avocat aux Conseils pour la société Atac.

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur Y...sans cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR condamné la société ATAC à lui payer les sommes de 4. 352 € au titre de rappel de salaires pour la période de mise à pied, 362, 66 € pour les congés payés y afférents, 11. 520 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 960 € pour les congés payés y afférents, 11. 520 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, et 28. 910 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

AUX MOTIFS QUE « (…) le 25 octobre 2005 messieurs Y...et X... signaient une promesse de bail sur les locaux concernés par le projet de super-marché ;

que par courriel du 19 décembre 2005 la société ATAC fixait les conditions qu'elle posait à la signature d'un contrat de franchise, parmi lesquelles sa participation, sans limite de durée, dans le capital de la société MAG-INDIS à hauteur de 35 % ;

que par courrier du 1er février 2006 la société ATAC faisait savoir à Messieurs X... et Y...qu'elle refusait toute clause de rachat forcé d'actions ;

que la position de la société ATAC revenait à entraver la possibilité pour Messieurs Y...et X... de sortir du contrat de franchise, prévu pour une durée de 5 ans ;

qu'à l'appui de sa demande la société ATAC invoque l'absence d'exécution de bonne foi du contrat de travail et, " indépendamment de toute clause contractuelle ", la concurrence déloyale ;

attendu que messieurs X... et Y...ont été recrutés en qualité de chefs de marché et qu'ils étaient en dernier lieu chacun responsable d'un secteur d'achat ;

attendu que si la société ATAC a choisi de négocier un contrat de franchise avec deux de ses salariés, ceux-ci, pour autant, dans leurs rapports avec la société ATAC, ne se trouvaient pas, pour négocier le futur contrat, dans un rapport de salariés à employeur mais dans une relation commerciale entre parties disposant de la même liberté d'action, aussi longtemps du moins que le contrat de franchise n'était pas signé ;

qu'il n'entrait pas dans le cadre de leur contrat de travail d'avoir à négocier avec la société ATAC un contrat de franchise en vue de l'exploitation en qualité de gérants indépendants, d'un supermarché ;

attendu que le projet de contrat de franchise ne comportait aucune disposition sur la participation du franchiseur au capital du franchisé ;

que dès lors il ne peut être reproché à messieurs Y...et X... d'avoir, après la lettre du 1er février refusant la possibilité de rachat forcé des parts de la société ATAC si la franchise n'était pas reconduite, recherché une autre enseigne ;

que la poursuite de contacts avec une autre enseigne entrait dans le cadres des négociations que la société ATAC avait accepté de mener avec ses deux salariés ;

que la société ATAC précise dans la lettre de licenciement que l'obligation de loyauté qu'elle revendique est une obligation générale, indépendamment de toute clause du contrat de travail ;

que la société ATAC ne fait valoir aucune disposition spécifique du contrat de travail ;

que l'interdiction générale de se livrer à une activité concurrentielle ne saurait être étendue aux discussions préalables entreprises, sans la signature d'aucun contrat ni d'aucune promesse ;

que durant l'exécution du contrat de travail Messieurs X... et Y...n'ont commis aucun acte de concurrence déloyale ;

que le seul fait de ne pas avoir avisé leur employeur qu'ils recherchaient une autre enseigne ne constitue pas, contrairement aux motifs des premiers juges, un fait de nature à fonder un licenciement pour cause réelle et sérieuse ;

attendu que la lettre de licenciement fixant les limites du litige, la cour ne répondra pas aux arguments des parties sur les pratiques commerciales alléguées de la société ATAC vis à vis de ses fournisseurs ;

attendu qu'en l'état des constatations rappelées ci-dessus, la société ATAC ne démontre aucune faute de ses salariés susceptible de fonder le licenciement dont ils ont été l'objet ;

que la décision du conseil des prud'hommes sera infirmée de ce chef (…) »,

ALORS QUE 1°), la faute grave est celle de nature à rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que commet une telle faute le salarié qui, après avoir ouvert une négociation avec son employeur en vue de conclure avec lui un contrat de franchise, entreprend secrètement, et contrairement à son obligation de loyauté, des discussions avec une entreprise concurrente, pour devenir franchisé de cette dernière ; qu'il est constant et ressort de l'arrêt attaqué, que la société ATAC avait proposé à Monsieur Y..., qui était son salarié, de conclure un contrat de franchise pour l'exploitation d'un supermarché ; que les parties avaient commencé à négocier les conditions de ce contrat ; que Monsieur Y...avait cependant engagé, à l'insu de son employeur, des discussions pour « rechercher une autre enseigne », et devenir ainsi franchisé d'une entreprise concurrente ; qu'en estimant que le salarié n'aurait pas commis de faute grave, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 122-6 (devenu L. 1234-1) et L. 122-8 (devenu L. 1234-5) du Code du travail,

ALORS QUE 2°), subsidiairement, le salarié a un devoir de loyauté envers son employeur ; que manque à ce devoir et commet une faute de nature à justifier son licenciement le salarié qui, après avoir ouvert une négociation avec son employeur pour conclure avec lui un contrat de franchise, entreprend des discussions avec une entreprise concurrente pour devenir franchisé de cette dernière, sans en informer son employeur ; qu'il est constant et ressort de l'arrêt attaqué, que la société ATAC avait proposé à Monsieur Y..., qui était son salarié, de conclure un contrat de franchise pour l'exploitation d'un supermarché ; que les parties avaient commencé à négocier les conditions de ce contrat ; que Monsieur Y...avait cependant engagé, à l'insu de son employeur, des discussions pour « rechercher une autre enseigne », et devenir ainsi franchisé d'une entreprise concurrente ; qu'en estimant que le fait, pour le salarié, de n'avoir pas avisé son employeur qu'il recherchait une autre enseigne ne constituait pas un manquement au devoir de loyauté de nature à fonder un licenciement pour cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 122-14-3 (devenu L. 1235-1) du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-11530;10-11531
Date de la décision : 04/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 08 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 mai. 2011, pourvoi n°10-11530;10-11531


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.11530
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