LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 5 décembre 2008), que M. X... a été engagé à compter du 5 septembre 2002, en qualité d'ouvrier polyvalent par la société CMR aux droits de laquelle vient la société Boutmy ; que placé à plusieurs reprises en arrêt de travail pour maladie, le salarié a été examiné par le médecin du travail le 21 novembre 2005 dans le cadre d'une visite de pré-reprise ; qu'il a été licencié pour faute grave par lettre du 24 janvier 2006, l'employeur lui reprochant une absence au poste depuis le 5 décembre 2005 et de ne pas s'être présenté à la visite de reprise prévue par le médecin du travail le 13 décembre suivant ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que la société Boutmy fait grief à l'arrêt de dire le licenciement de M. X... dénué de cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui verser diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en énonçant au soutien de sa décision que la convocation du salarié à la visite de reprise aurait nécessité de la part de l'employeur l'envoi au salarié d'une lettre recommandée, la cour d'appel a méconnu les termes de l'article R. 241-51 du code du travail, devenu R. 4624-21 et R. 4624-22 du même code ;
2°/ qu'il résulte des constatations de l'arrêt et des documents de la cause que lors de la visite de pré-reprise du 20 novembre 2005, le médecin du travail avait notifié à l'employeur la reprise du travail au 5 décembre 2005, avec visite de reprise le 13 décembre 2005 soit dans le délai légal de huit jours, et que le salarié avait été avisé de la décision prise par la médecine du travail puisque, après avoir reçu de la CPAM des Vosges le 24 novembre 2005 notification de la cessation des indemnités journalières au 2 décembre 2005, il avait expressément, par lettre du 30 novembre 2005 adressée à son employeur, refusé de reprendre son travail à compter du 5 décembre 2005, en invoquant « l'ambiance » dans l'entreprise ; qu'en jugeant pourtant que n'aurait pas été fautive l'absence de M. X... lors de la reprise du travail le 5 décembre 2005 et lors de la visite médicale du 13 décembre suivant, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des dispositions de l'article R. 241-51 du code du travail, devenu R. 4624-21 et R. 4624-22 du même code, ensemble l'article L. 122-14-3 du code du travail, devenu L.1235-1 du même code ;
Mais attendu, d'abord, que seul l'examen pratiqué par le médecin du travail en application des articles R. 4624-21 et R. 4624-22 du code du travail met fin à la suspension du contrat de travail ; qu'il incombe à l'employeur de prendre l'initiative de cette visite médicale et de convoquer le salarié par tous moyens ;
Attendu, ensuite, qu'ayant constaté que l'employeur n'avait pas organisé lui même la visite de reprise, la cour d'appel, abstraction faite de la référence erronée à la nécessité d'une convocation par lettre recommandée avec accusé de réception, a pu en déduire que le salarié n'avait pas commis un manquement en ne se présentant pas à une visite seulement envisagée par le médecin du travail ;
Attendu, enfin, que la cour d'appel ayant constaté l'absence de visite de reprise à l'issue de l'arrêt de travail qui courait depuis le 21 décembre 2004, en a exactement déduit que le contrat de travail demeurant suspendu, le salarié qui ne s'était pas présenté à son poste le 5 décembre 2005 n'avait pas commis de faute ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Boutmy aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Boutmy à payer à la SCP Masse-Dessen et Thouvenin la somme de 2 500 euros à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux conseils pour la société Boutmy
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé que le licenciement de Monsieur Jean-Claude X... était dénué de cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR condamné la Société BOUTMY à lui payer les sommes de 7 320 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre le remboursement des indemnités de chômage, de 2 435,82 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 243,58 euros pour les congés payés afférents, ainsi que la somme de 1 236,05 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QU'il ressort des éléments du dossier que, contrairement à ce qu'affirme la Société BOUTMY, il ne saurait être considéré que l'absence fautive reprochée à Monsieur X... lors de la reprise de son poste le 5 décembre 2005 soit caractérisée ; qu'en effet, la seule mention figurant sur la fiche dressée par le Centre de Médecine du Travail du 20 novembre 2005, selon laquelle à l'issue de la visite de pré-reprise Monsieur X... déclarait reprendre son poste le 5 décembre 2005 et serait vu en visite médicale le 13 décembre suivant, ne peut valoir convocation en bonne et due forme par lettre recommandée du salarié à la visite de reprise de sorte qu'au 5 décembre 2005, le contrat de travail demeurait suspendu sans qu'à cette date puisse être reprochée au salarié son absence ; que dans son courrier adressé le 30 novembre 2005 à la Société BOUTMY, Monsieur X... fait certes état de son refus de reprendre son poste de travail le 5 décembre 2005 en se fondant principalement sur l'absence de visite de reprise du médecin du travail et d'avis émis de sa part sur son aptitude professionnelle ; qu'il est en tout état de cause surprenant que la Société BOUTMY ait attendu le 21 décembre 2005 pour convoquer Monsieur X... à l'entretien préalable et n'ait pas, dès le 5 décembre précédent, date selon elle impérieuse de la reprise de poste, mis en demeure l'intéressé de reprendre le travail ;
ALORS QUE, D'UNE PART, en énonçant au soutien de sa décision que la convocation du salarié à la visite de reprise aurait nécessité de la part de l'employeur l'envoi au salarié d'une lettre recommandée, la Cour d'Appel a méconnu les termes de l'article R. 241-51 du Code du Travail, devenu R. 4624-21 et R. 4624-22 du même Code ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il résulte des constatations de l'arrêt et des documents de la cause que lors de la visite de pré-reprise du 20 novembre 2005, le médecin du travail avait notifié à l'employeur la reprise du travail au 5 décembre 2005, avec visite de reprise le 13 décembre 2005 soit dans le délai légal de huit jours, et que le salarié avait été avisé de la décision prise par la médecine du travail puisque, après avoir reçu de la CPAM des VOSGES le 24 novembre 2005 notification de la cessation des indemnités journalières au 2 décembre 2005, il avait expressément, par lettre du 30 novembre 2005 adressée à son employeur, refusé de reprendre son travail à compter du 5 décembre 2005, en invoquant « l'ambiance » dans l'entreprise ; qu'en jugeant pourtant que n'aurait pas été fautive l'absence de Monsieur X... lors de la reprise du travail le 5 décembre 2005 et lors de la visite médicale du 13 décembre suivant, la Cour d'Appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des dispositions de l'article R. 241-51 du Code du Travail, devenu R. 4624-21 et R. 4624-22 du même Code, ensemble l'article L. 122-14-3 du Code du Travail, devenu L.1235-1 du même Code ;
ET ALORS ENFIN QU'en ne recherchant pas, en réfutation des motifs du jugement, si Monsieur X..., qui avait expressément refusé de reprendre le travail le 5 décembre 2005, alors que la visite de reprise était fixée dans les huit jours par le médecin du travail, sans pouvoir justifier d'un arrêt de travail et malgré l'injonction de la CPAM des VOSGES n'avait pas commis une faute caractérisée par une absence injustifiée au travail conférant à tout le moins une cause réelle et sérieuse de licenciement, la Cour d'Appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du Travail, devenu L. 1235-1 du même Code.