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06/04/2011 | FRANCE | N°10-82357

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 06 avril 2011, 10-82357


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Gérard X...,
- Mme Myriam Y...,
- Mme Farah Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-8, en date du 11 mars 2010, qui a condamné le premier, pour association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les stupéfiants, importation sans déclaration de marchandises prohibées, en récidive, à douze ans d'emprisonnement, avec période de sûreté fixée aux deux tiers de la peine, la deuxième, pour association de malfaiteu

rs, complicité d'infractions à la législation sur les stupéfiants, contrebande et import...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Gérard X...,
- Mme Myriam Y...,
- Mme Farah Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-8, en date du 11 mars 2010, qui a condamné le premier, pour association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les stupéfiants, importation sans déclaration de marchandises prohibées, en récidive, à douze ans d'emprisonnement, avec période de sûreté fixée aux deux tiers de la peine, la deuxième, pour association de malfaiteurs, complicité d'infractions à la législation sur les stupéfiants, contrebande et importation sans déclaration de marchandises prohibées, à quatre ans d'emprisonnement, la troisième, pour association de malfaiteurs, complicité d'infractions à la législation sur les stupéfiants, contrebande de marchandises prohibées, à trente mois d'emprisonnement, solidairement à des amendes douanières et a prononcé une mesure de confiscation ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Sur la recevabilité du pourvoi formé par Mme Myriam Y... :

Attendu que l'arrêt attaqué a été rendu contradictoirement par application de l'article 411, alinéa 2, du code de procédure pénale, la prévenue ayant demandé à être jugée en son absence et son avocat ayant été entendu ;

Attendu que le pourvoi, formé le 18 mars 2010, plus de cinq jours francs après le prononcé de l'arrêt, est irrecevable comme tardif en application de l'article 568 du code de procédure pénale ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan pour M. Gérard X..., pris de la violation des articles 388 du code de procédure pénale, 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-9 du code pénal, violation des droits de la défense, de l'article 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans, en état de récidive légale pour les faits commis dans le cadre de cette infraction avant le 2 novembre 2006 à minuit ;

"aux motifs que M. X... a été condamné à treize ans de réclusion criminelle prononcés par la cour d'assises du Val-de-Marne le 15 novembre 1985, pour des faits de complicité de détournement d'aéronef, complicité d'arrestation ou de séquestration d'otage pour favoriser l'impunité d'un délinquant, association de malfaiteurs, tentative d'assassinat et port d'arme prohibée de 1ère ou 4ème catégorie, peine exécutée le 2 novembre 1996 ; que cette dernière condamnation est la seule dont il doit être tenu compte pour la récidive du chef d'association de malfaiteur dont elle constitue le premier terme et n'est applicable compte tenu de la date de fin de peine que pour les faits commis dans le cadre de cette infraction avant le 2 novembre 2006 à minuit ;

"1) alors que si les juges du fond peuvent modifier les qualifications des faits poursuivis c'est à la condition de ne rien changer aux faits visés par la prévention, sans que le prévenu ait, au préalable, expressément accepté d'être jugé sur un chef complémentaire et ait été mis en mesure de présenter sa défense sur ce point ; qu'en l'espèce, l'ordonnance de renvoi du 21 novembre 2008, ne visait l'état de récidive légale qu'en ce qui concerne le délit d'importation de produits stupéfiants, non au regard de la participation à un groupement ou à une entente formée en vue de la préparation d'un ou plusieurs délits punis de dix ans d'emprisonnement, qu'en constatant que M. X... est en état de récidive légale du chef de participation à une association de malfaiteurs, la cour d'appel a méconnu les textes et principes susvisés ;

"2°) alors que, dans ses conclusions, M. X... faisait précisément valoir que s'agissant des faits d'association de malfaiteurs et de trafic national, qui lui sont imputés, l'état de récidive légale n'a pas été retenue par l'ordonnance de règlement et qu'aucun débat sur cette circonstance aggravante personnelle n'a été entrepris devant l'audience tenue devant les premiers juges relativement à ces faits ; qu'en ne répondant pas à ce chef péremptoire des conclusions de M. X... qui établissaient qu'il n'avait jamais accepté d'être jugé sur des faits et circonstances qui n'étaient pas conformes à l'ordonnance de renvoi, et, qui dénonçaient la violation des droits de la défense ainsi commis, la cour d'appel a privé sa décision de motifs" ;

Attendu que le demandeur ne saurait faire grief à l'arrêt attaqué d'avoir retenu comme second terme de la récidive une infraction visée à la prévention pour laquelle il a été déclaré coupable mais différente de celle retenue à ce titre dans l'acte de saisine du tribunal, dès lors qu'il résulte des pièces de procédure qu'il a été mis en mesure de se défendre devant la cour d'appel ;

Que, dès lors, le moyen ne peut être admis ;

Sur le second moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan pour M. Gérard X..., pris de la violation des articles 179, 464-1, 465, 465-1 du code de procédure pénale, 591 et 593 du même code, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, après avoir annulé le jugement entrepris, évoqué et statué au fond, a condamné M. X... à la peine de dix années d'emprisonnement avec une période de sûreté des deux tiers et a ordonné son maintien en détention, « afin d'assurer l'exécution immédiate et suivi des peines prononcées et d'éviter dans un avenir immédiat tout risque de renouvellement d'infractions… » ;

"1) alors que la cour d'appel, qui annulait le jugement rendu par le tribunal correctionnel de Paris, au demeurant dépourvu de motifs sur le prononcé du maintien en détention de M. X..., lequel avait fait l'objet d'un mandat de dépôt le 23 novembre 2006, son maintien en détention ayant été prolongé jusqu'à sa comparution devant le tribunal, par ordonnance du 21 novembre 2008, puis par jugement du 14 janvier 2009, ne pouvait se borner à ordonner, dans son arrêt du 11 mars 2010, le « maintien en détention » de M. X... sans décerner mandat de dépôt contre le prévenu ; qu'en effet, le mandat de dépôt initial ne pouvait continuer de produire ses effets, et était devenu caduc en raison même de l'annulation de la décision déférée pour l'exécution de laquelle, seulement, le mandat était susceptible de continuer de produire ses effets, en application de l'article 464-1, dernier alinéa, du code de procédure pénale ; qu'ainsi, M. X... se trouve détenu sans titre et doit être mis immédiatement en liberté ;

"2) alors qu'en l'absence de motivation à l'appui de la décision ordonnant le maintien en détention du prévenu, celui-ci était, en toute hypothèse, détenu sans titre valable à compter du jour du jugement, la comparution devant la juridiction de jugement ayant fait cesser, de plein droit, la détention provisoire et seule une décision spéciale et motivée pouvait permettre au mandat antérieurement délivré de continuer à produire ses effets ; qu'a fortiori, la cour d'appel ne pouvait-elle donc se borner à « prolonger » la détention de M. X..., sans délivrer un nouveau mandat de dépôt se substituant à celui qui a nécessairement pris fin au jour du jugement annulé sans violer les textes susvisés, ensemble l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X..., placé sous mandat de dépôt, a été renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef de participation à une association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les stupéfiants, importation sans déclaration de marchandises prohibées, en récidive et maintenu en détention provisoire, par ordonnance distincte du juge d'instruction ;

Attendu qu'après avoir annulé le jugement du tribunal correctionnel ordonnant le maintien en détention du prévenu et évoqué, la cour d'appel l'a condamné à douze années d'emprisonnement et ordonné son maintien en détention afin d'assurer l'exécution immédiate des peines prononcées et d'éviter dans un avenir immédiat tout risque de renouvellement des infractions ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que, d'une part, la condamnation du prévenu par la cour d'appel et son maintien en détention se sont substitués, en application de l'article 520 du code de procédure pénale, à la décision annulée, d'autre part, l'annulation du jugement par la cour d'appel est sans incidence sur la validité du mandat de dépôt délivré par le juge d'instruction, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le premier moyen de cassation proposé par Me Haas pour Mme Farah Y..., pris de la violation des articles 38, 215, 399, 414, 417 et 419 du code des douanes, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Mme Farah Y...

coupable pour les faits qualifiés de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans, de complicité d'importation, de transport, de détention non autorisés de stupéfiants et de contrebande de marchandise prohibée et, en répression, l'a condamnée, sur l'action publique, à la peine de trente mois d'emprisonnement et, sur l'action douanière, à payer une somme de 1 409 640 euros à l'administration des Douanes ;

"aux motifs qu'aucun élément ne permet de dire que Mme Y... a effectivement transporté de la drogue en violation des dispositions légales ou règlementaires ; qu'en revanche, la prévenue reconnaît qu'à Saint-Martin, elle en a détenue, celle-ci lui ayant été remise pour sa consommation pour son compagnon ; qu'à l'issue des débats de première instance, la mis en cause a passé des aveux complets par lettres produites par son conseil, aveux réitérés devant la cour d'appel ; qu'elle sera donc déclarée coupable dans les termes de la prévention, hormis en ce qui concerne le transport en violation des dispositions règlementaires et légales ;

"1°) alors que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence de motifs ; que, dès lors, la cour d'appel ne pouvait pas, dans le dispositif de sa décision, déclarer la prévenue coupable, sans autre précision, « de contrebande de marchandise prohibée », sans y faire apparaître la relaxe du chef de transport de marchandise prohibée en violation des dispositions légales ou règlementaires que les motifs de sa décision impliquaient ;

"2°) alors que la simple détention de cocaïne destinée à une consommation personnelle ne caractérise pas en ses éléments matériels et intentionnel le délit de « de contrebande de marchandise prohibée » ;

Attendu que, pour déclarer la prévenue coupable de contrebande de marchandises prohibées, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors qu'il suffit, pour que la responsabilité du détenteur d'une marchandise prohibée soit retenue sur le fondement des articles 414 et 419 du code des douanes, que l'intéressé n'ait pu fournir de justificatif régulier d'origine de ladite marchandise, quand bien même la détention n'aurait été constatée que pour une consommation personnelle, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Mais sur le deuxième moyen de cassation proposé par Me Haas pour Mme Farah Y..., pris de la violation des articles 132-19 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a, sur l'action publique, condamné Mme Farah Y... à la peine de trente mois d'emprisonnement ;

"aux motifs que Mme Farah Y... a été condamnée en 2005 à six mois d'emprisonnement avec sursis pour vol avec violence ; qu'elle n'a pas tenu compte de l'avertissement solennel qui lui avait été précédemment adressé et s'est introduite dans une activité répréhensible attirée par l'appât du gain, alors qu'elle avait une qualification qui aurait pu lui permettre de gagner honnêtement sa vie ; que seule une sanction ferme lui permettra de comprendre l'ampleur de sa faute ;

"alors qu'en se fondant, pour prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis, sur la circonstance que Mme Farah Y... n'avait pas tenu compte de la condamnation dont elle avait fait l'objet « en 2005 », sans faire ressortir l'antériorité de cette condamnation par rapport aux faits dont elle la déclarait coupable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Et sur le troisième moyen de cassation proposé par Me Haas pour Mme Farah Y..., pris de la violation des articles 132-19, 132-24 du code pénal, 591 et 593 du procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Mme Farah Y... à la peine de trente mois d'emprisonnement ;

"aux motifs que Mme Farah Y... a été condamnée en 2005 à six mois d'emprisonnement avec sursis pour vol avec violence ; qu'elle n'a pas tenu compte de l'avertissement solennel qui lui avait été précédemment adressé et s'est introduite dans une activité répréhensible attirée par l'appât du gain, alors qu'elle avait une qualification qui aurait pu lui permettre de gagner honnêtement sa vie ; que seule une sanction ferme lui permettra de comprendre l'ampleur de sa faute ;

"alors qu'en dehors des condamnations en état de récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1 du code pénal, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; qu'en prononçant une peine d'emprisonnement sans sursis, sans constater que toute autre sanction aurait été manifestement inadéquate, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article
132-24 du code pénal ;

Attendu que, d'une part, tout jugement ou arrêt doit comporter
les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, d'autre part, selon l'article 132-24, alinéa 3, du
code pénal, en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1 du même code, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; que, dans ce cas, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28 dudit code ;

Attendu que, pour condamner la prévenue à une peine d'emprisonnement sans sursis, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des prescriptions légales ci-dessus rappelées ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle sera limitée à la peine, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure ;

Par ces motifs :

I - Sur le pourvoi de Mme Myriam Y... :

Le déclare IRRECEVABLE ;

II - Sur le pourvoi de M. Gérard X... :

Le REJETTE ;

III - Sur le pourvoi de Mme Farah Y... :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 11 mars 2010, mais en ses seules dispositions relatives à la peine prononcée à l'encontre de Mme Farah Y..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Labrousse conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-82357
Date de la décision : 06/04/2011
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 06 avr. 2011, pourvoi n°10-82357


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.82357
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