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02/03/2011 | FRANCE | N°09-67139

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 mars 2011, 09-67139


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 avril 2008), que M. X... a été engagé par la société 4 Boulevard des Capucines, le 8 avril 2002, en qualité de plongeur en restaurant ; qu'il a été licencié pour faute grave le 10 août 2004 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la faute grave se définit comme la faute résultant d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des

obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 avril 2008), que M. X... a été engagé par la société 4 Boulevard des Capucines, le 8 avril 2002, en qualité de plongeur en restaurant ; qu'il a été licencié pour faute grave le 10 août 2004 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la faute grave se définit comme la faute résultant d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en cas de litige, les juges du fond sont tenus de vérifier le sérieux et la réalité des faits sur lesquels se fonde le licenciement, leur caractère fautif, et ne peuvent, sans s'expliquer sur la gravité de la faute commise par le salarié, priver ce dernier de ses indemnités de préavis et licenciement ; que pour dire justifié le licenciement pour faute grave, la cour d'appel s'est fondée sur le fait que « M. X... reconnaissait dans ses écritures qu'il avait parfois refusé, non de travailler, mais d'accomplir un travail qu'il était impossible de faire » ; qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il ne se déduisait nullement de ce constat que la faute grave alléguée par l'employeur-soit le « refus » par l'exposant de « reprendre son travail après sa pause »- était établie, le salarié contestant au contraire de la sorte que ses agissements aient pu être fautifs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1232-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail (anciennement articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du code du travail) ;
2°/ que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que la lettre reprochait au salarié d'avoir refusé de reprendre le travail ; qu'en se fondant sur des déclarations par lesquelles il avait admis « non de travailler, mais d'accomplir un travail qu'il était impossible de faire », la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
3°/ qu'en outre, le comportement de l'employeur est susceptible de priver de caractère fautif le comportement reproché au salarié ; qu'ainsi, l'inexécution par le salarié de tâches qui s'avèrent irréalisables ne peut justifier une quelconque sanction à son encontre ; qu'en l'espèce, M. X... faisait précisément valoir dans ses conclusions d'appel qu'il ne pouvait lui être reproché d'avoir « refusé de reprendre son travail après sa pause », dans la mesure où il n'avait jamais refusé de travailler mais seulement d'effectuer certains travaux qu'il n'avait pas le temps d'accomplir en raison de sa surcharge de travail au retour de sa pause repas, depuis que l'employeur avait décidé que la vaisselle accumulée pendant ladite pause devait être lavée par les plongeurs eux-mêmes, et non par un autre plongeur comme c'était le cas auparavant ; que M. X... produisait deux attestations en ce sens ; que la cour d'appel ignorait d'autant moins cette argumentation qu'elle a visé les écritures de l'exposant au soutien de sa décision, relevant par ailleurs que le salarié faisait valoir que sa charge de travail était excessive, et que les conditions de travail dans lesquelles il se trouvait ne lui permettaient pas de mener à bien ses tâches ; que cependant, la cour d'appel a retenu que le licenciement de M. X... reposait sur une faute grave, sans rechercher, comme elle l'y était invitée, si le salarié n'était pas dans l'incapacité matérielle d'effectuer le travail qui lui était imparti, telle impossibilité ôtant tout caractère fautif à son comportement ; que par suite, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1232-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail (anciennement articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du code du travail) ;
4°/ qu'il résulte enfin de l'article L. 1232-6 du code du travail (anciennement article L. 122-14-2 du code du travail) que la lettre d'énonciation des motifs de licenciement fixe les limites du litige ; que la lettre de licenciement faisait état d'un seul grief à l'encontre de M. X..., soit le refus réitéré du salarié de travailler à son retour de pause, l'employeur visant tant les faits du « 21 juillet » 2004 que les « fautes similaires » à celle-ci déjà sanctionnées » ; que néanmoins, la cour d'appel a cru pouvoir juger que le licenciement de l'exposant reposait sur une faute grave, au motif « qu'outre la mise à pied disciplinaire précitée, qui avait été prononcée le 26 juillet 2004, en raison notamment du refus de M. X... de travailler à son retour de pause, celui-ci avait déjà fait l'objet d'un avertissement le 7 avril 2004, en raison d'une absence injustifiée sans avoir prévenu, du 1er au 9 mars 2004 » ; que dès lors, en retenant ainsi un motif de licenciement-soit l'absence injustifiée du salarié-qui n'était pas énoncé par la société dans la lettre de rupture, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail (anciennement article L. 122-14-2 du code du travail) susvisé ;
Mais attendu qu'ayant constaté, sans sortir des limites fixées par la lettre de licenciement, que M. X... avait, de manière réitérée, refusé d'accomplir une partie de son travail, sans justifier d'une raison légitime, la cour d'appel a pu en déduire que ce manquement, s'ajoutant à d'autres, rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait alloué au salarié une indemnité de préavis, les congés payés afférents ainsi qu'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'AVOIR débouté de sa demande en paiement d'une indemnité de licenciement et de l'AVOIR condamné aux dépens de première instance et d'appel ;
AUX MOTIFS QUE, sur le licenciement, la lettre de licenciement, pour faute grave, est ainsi rédigée :
« Nous vous avons reproché, en autre de refuser de reprendre votre travail après votre pause, car selon vous personne ne vous avait remplacé. Nous vous avons confirmé qu'il ne vous appartenait pas de décider de l'organisation de votre poste, que cette organisation était parfaitement adaptée, et que vos collègues ayant les mêmes attributions les exécutaient normalement. Malgré cela, le mercredi 21 juillet vous n'avez pas hésité à récidiver votre refus de travailler à votre retour de pause toujours pour le même motif Compte tenu de votre dossier disciplinaire relatif à des fautes similaires, nous vous confirmons votre licenciement pour faute grave... » ;

que la SAS 4 BOULEVARD DES CAPUCINESfait grief au salarié d'avoir, le 21 juillet 2004, refusé de travailler à son retour de pause, en prétextant qu'il n'avait pas été remplacé pendant celle-ci ; que Monsieur A...
X... répond, d'une part, que les faits invoqués dans la lettre de licenciement ont déjà été sanctionnés par une mise à pied de deux jours, les 4 et 5 août 2004 et qu'ils ne peuvent donner lieu à une seconde sanction et, d'autre part, qu'il n'a pas refusé de reprendre le travail après sa pause, ayant simplement fait valoir que sa charge de travail était excessive ; que, sur le cumul des sanctions, la mise à pied disciplinaire précitée, des 4 et 5 août 2004, ne visait que des faits des 21 juin, 27 juin et 5 juillet 2004 ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'affirme le salarié, seuls des faits antérieurs au premier entretien préalable, du 20 juillet 2004, ont été sanctionnés par cette mise à pied disciplinaire ; que ceux intervenus le 21 juillet 2004 ont donné lieu à un second entretien préalable, le 2 août 2004, et ont été sanctionnés pour la première fois par le licenciement du 10 août 2004 ; qu'il n'y a donc pas cumul de sanctions pour les mêmes faits ; que, sur les motifs du licenciement, l'attestation de Monsieur Y..., maître d'hôtel, déclare à propos des faits du 21 juillet, qu'« alors que la verrerie débordait de vaisselle sale Mr Z...... a demandé à Monsieur A...
X... de reprendre son poste mais Mr
A...
a catégoriquement refusé sous prétexte qu'il prétendait que personne ne l'avait remplacé pendant son heure de repas » ; que Monsieur A...
X... reconnaît dans ses écritures qu'il a parfois refusé, non de travailler, mais d'accomplir un travail qu'il était impossible de faire, depuis que la Direction avait décidé que la vaisselle accumulée pendant la pause repas des plongeurs devait être lavée par eux, et non par un autre plongeur, comme c'était le cas auparavant ; qu'outre la mise à pied disciplinaire précitée, qui avait été prononcée le 26 juillet 2004, en raison notamment du refus de Monsieur A...
X... de travailler à son retour de pause, celui-ci avait déjà fait l'objet d'un avertissement le 7 avril 2004, en raison d'une absence injustifiée sans avoir prévenu, du 1er au 9 mars 2004 ; qu'il résulte de ce qui précède, que le licenciement de Monsieur A...
X... repose sur un faute grave qui empêchait son maintien dans l'entreprise, pendant la période de préavis ; qu'il y a lieu de le débouter de ses demandes au titre du préavis, des congés payés y afférents, de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'infirmer le jugement déféré ;
ALORS QUE la faute grave se définit comme la faute résultant d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en cas de litige, les juges du fond sont tenus de vérifier le sérieux et la réalité des faits sur lesquels se fonde le licenciement, leur caractère fautif, et ne peuvent, sans s'expliquer sur la gravité de la faute commise par le salarié, priver ce dernier de ses indemnités de préavis et licenciement ; que pour dire justifié le licenciement pour faute grave, la Cour d'appel s'est fondée sur le fait que « Monsieur X... reconnaissait dans ses écritures qu'il avait parfois refusé, non de travailler, mais d'accomplir un travail qu'il était impossible de faire » ; qu'en se déterminant ainsi, alors qu'il ne se déduisait nullement de ce constat que la faute grave alléguée par l'employeur-soit le « refus » par l'exposant de « reprendre son travail après sa pause »- était établie, le salarié contestant au contraire de la sorte que ses agissements aient pu être fautifs, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1232-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du nouveau code du travail (anciennement articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du code du travail) ;
ALORS au demeurant QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que la lettre reprochait au salarié d'avoir refusé de reprendre le travail ; qu'en se fondant sur des déclarations par lesquelles il avait admis, « non de travailler, mais d'accomplir un travail qu'il était impossible de faire » la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail
ALORS en outre QUE le comportement de l'employeur est susceptible de priver de caractère fautif le comportement reproché au salarié ; qu'ainsi, l'inexécution par le salarié de tâches qui s'avèrent irréalisables ne peut justifier une quelconque sanction à son encontre ; qu'en l'espèce, Monsieur X... faisait précisément valoir dans ses conclusions d'appel qu'il ne pouvait lui être reproché d'avoir « refusé de reprendre son travail après sa pause », dans la mesure où il n'avait jamais refusé de travailler mais seulement d'effectuer certains travaux qu'il n'avait pas le temps d'accomplir en raison de sa surcharge de travail au retour de sa pause repas, depuis que l'employeur avait décidé que la vaisselle accumulée pendant ladite pause devait être lavée par les plongeurs eux-mêmes, et non par un autre plongeur comme c'était le cas auparavant ; que Monsieur X... produisait deux attestations en ce sens ; que la Cour d'appel ignorait d'autant moins cette argumentation qu'elle a visé les écritures de l'exposant au soutien de sa décision, relevant par ailleurs que le salarié faisait valoir que sa charge de travail était excessive, et que les conditions de travail dans lesquelles il se trouvait ne lui permettaient pas de mener à bien ses tâches ; que cependant, la Cour d'appel a retenu que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une faute grave, sans rechercher, comme elle l'y était invitée, si le salarié n'était pas dans l'incapacité matérielle d'effectuer le travail qui lui était imparti, telle impossibilité ôtant tout caractère fautif à son comportement ; que par suite, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, L. 1232-1, L. 1235-1 et L. 1235-3 du nouveau code du travail (anciennement articles L. 122-6, L. 122-8, L. 122-9, L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du code du travail) ;
ALORS enfin QU'il résulte de l'article L. 1232-6 du nouveau code du travail (anciennement article L. 122-14-2 du code du travail) que la lettre d'énonciation des motifs de licenciement fixe les limites du litige ; que la lettre de licenciement faisait état d'un seul grief à l'encontre de Monsieur X..., soit le refus réitéré du salarié de travailler à son retour de pause, l'employeur visant tant les faits du « 21 juillet » 2004 que les « fautes similaires » à celle-ci déjà sanctionnées » ; que néanmoins, la Cour d'appel a cru pouvoir juger que le licenciement de l'exposant reposait sur une faute grave, au motif « qu'outre la mise à pied disciplinaire précitée, qui avait été prononcée le 26 juillet 2004, en raison notamment du refus de Monsieur X... de travailler à son retour de pause, celui-ci avait déjà fait l'objet d'un avertissement le 7 avril 2004, en raison d'une absence injustifiée sans avoir prévenu, du 1er au 9 mars 2004 » ; que dès lors, en retenant ainsi un motif de licenciement-soit l'absence injustifiée du salarié-qui n'était pas énoncé par la société dans la lettre de rupture, la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du nouveau code du travail (anciennement article L. 122-14-2 du code du travail) susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-67139
Date de la décision : 02/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 avril 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 mar. 2011, pourvoi n°09-67139


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.67139
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