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01/03/2011 | FRANCE | N°09-43020

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 mars 2011, 09-43020


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 29 juin 2009) que M. X..., engagé en qualité de serveur le 3 mars 2005, par la société Emicam-Le bar basque, après avoir été mis à pied, a été licencié pour faute grave le 22 janvier 2007 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement reposait sur une faute grave et de le débouter de l'intégralité de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la charge de la preuve de la faute grave incombant à l'employ

eur, le salarié n'a rien à démontrer si bien qu'en retenant, pour estimer que les fait...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 29 juin 2009) que M. X..., engagé en qualité de serveur le 3 mars 2005, par la société Emicam-Le bar basque, après avoir été mis à pied, a été licencié pour faute grave le 22 janvier 2007 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement reposait sur une faute grave et de le débouter de l'intégralité de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la charge de la preuve de la faute grave incombant à l'employeur, le salarié n'a rien à démontrer si bien qu'en retenant, pour estimer que les faits relatés dans trois attestations établies par des salariés constituaient une présomption permettant d'établir la réalité du vol imputé à M. X..., que ce dernier se bornait à nier les faits contestés sans produire aucun élément de nature à contredire ou combattre les éléments communiqués par l'employeur et à faire tomber les présomptions, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-5 (anciennement L. 122-8), L. 1234-9 (anciennement L.. 122-9), L. 1235-1 (anciennement L. 122-14-3) du code du travail et 1315 du code civil ;
2°/ que le vol par un salarié d'une faible somme d'argent, en l'espèce 5 euros saurait constituer une faute grave et justifier son départ immédiat de l'entreprise, quand bien même il aurait moins de deux années d'ancienneté et déjà été sanctionné une fois pour des faits radicalement différents de sorte qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1 (anciennement L. 122-6), L. 234-5 (anciennement L. 122-8), 1234-9 (anciennement L. 122-9) du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que l'employeur avait établi les faits reprochés au salarié et que c'est sans méconnaître la faible importance du vol commis au préjudice d'un autre serveur et par une appréciation de l'ensemble des éléments de la cause qu'elle a pu décider qu'ils rendaient impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour M. X...

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une faute grave, et de l'avoir débouté de l'intégralité de ses demandes,
AUX MOTIFS QUE
"la faute grave, dont la charge de la preuve pèse sur l'employeur, est la faute qui résulte d'un' fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise y compris pendant la durée du préavis. La lettre de licenciement du 22 janvier 2007 pour faute grave est ainsi rédigée: "Vos collègues et moi-même avons constaté ces derniers temps à plusieurs reprises des manques en caisse. Notamment le vendredi 5 janvier, nous avions constaté qu'il manquait 10 € dans un fonds de caisse. Aussi, vendredi soir, un de vos collègues a-t-il laissé une ceinture avec un fonds de caisse bien précis. Le samedi matin, vous étiez d'ouverture. A notre arrivée, nous avons constaté qu'il manquait 5 € dans son fonds de caisse. Les soupçons que vos collègues et moi-même pouvions avoir sur vos agissements ont donc à cette occasion trouvé confirmation. Il est évident qu'un tel comportement est inadmissible, non seulement pour votre employeur mais aussi pour vos collègues de travail auxquels vous portez délibérément préjudice. Vos dénégations au cours de l'entretien préalable ne peuvent changer mon appréciation de la situation et il m'apparaît que toute poursuite de nos relations de travail est désormais impossible, même pour le temps limité d'un préavis. En conséquence, je vous notifie par la présente votre licenciement pour faute grave qui prendra donc effet immédiatement ».
La SARL EMICAM "LE BAR BASQUE" verse aux débats les attestations de trois salariés, collègues de Monsieur Patrick X.... Dans son attestation en date du 31 mai 2007, Monsieur Nicolas Y... écrit notamment " qu'à plusieurs reprises il manquait de l'argent dans la caisse de (son) collègue Nicolas Z... ", " notamment un matin ce dernier me fit remarquer qu'il lui manquait 10 € alors que la veille j'avais moi-même compté avec lui son fonds de caisse. Le lendemain matin même chose (... )". Dans son attestation du 4 juin 2007 Monsieur Jean Charles A... écrit: " dans une ceinture contenant le fonds de caisse d'un des serveurs rangée dans un tiroir du bar, de l'argent avait été pris à plusieurs reprises. Le serveur m'en a fait part. J'ai donc compté sa ceinture avec lui à la fermeture. Le lendemain durant l'ouverture de Monsieur X... 10 € avaient disparus. J'ai donc recommencé l'opération le soir même, mais là je fus obligé d'appeler Monsieur B... pour participer à la constatation en tant que patron. Le lendemain matin il manquait 5 €, cela ne paraît rien dans l'importance des sommes, mais je peux vous assurer que nous étions tous écoeurés. P. S. : cet incident a été constaté le 6 janvier 2007 ".
Dans son attestation du 30 mai 2007 Monsieur Nicolas Z... écrit: " j'ai pu constater à plusieurs reprises qu'il me manquait de l'argent dans ma ceinture de limonadier. Début janvier, à l'aide du directeur on a compté précisément le fonds de caisse qui restait dans ma ceinture et le lendemain à mon arrivée il manquait de nouveau 5 € c'est alors que tout s'est déclenché. Ceci s'est passé le samedi 6 janvier 2007 ". Ces trois attestations concordent sur la constatation de la disparition, à plusieurs reprises de sommes d'argent dans la ceinture de limonadier d'un des serveurs. Le fait de constater que les disparitions avaient lieu lorsque Monsieur Patrick X... ouvrait seul le bar et d'induire qu'il était l'auteur de la disparition, constitue une présomption.
Le fait que trois personnes (l'employeur et deux salariés: Monsieur Jean Charles A... et Monsieur Nicolas Z...) constatent le montant de la somme déposée dans la " ceinture de limonadier " le soir avant la fermeture de l'établissement puis le lendemain matin à leur arrivée la disparition d'une partie de cette somme alors que Monsieur Patrick X... est celui qui a ouvert, seul, le bar et en induisent qu'il est l'auteur de la disparition, caractérisent un faisceau d'indices et constituent des présomptions graves, précises et concordantes. Or, les présomptions graves, précises et concordantes sont un mode de preuve suffisant pour entraîner la conviction du juge si, sans inverser la charge de la preuve, le salarié ne produit aucun élément de nature à combattre ces présomptions et donc à faire tomber cette preuve. En l'espèce, Monsieur Patrick X... se borne à contester les faits reprochés sans produire aucun élément de nature à contredire ou combattre les éléments produits par l'employeur et donc aucun élément susceptible de détruire les indices et faire tomber les présomptions. En effet, le fait d'affirmer que les faits ne sont pas prouvés n'est pas de nature à combattre ces présomptions graves, précises et concordantes qui, précisément, constituent la preuve qui pèse sur l'employeur. De même, la tentative " d'arrangement après la rupture, par l'intermédiaire d'un des salariés ", dénoncée par Monsieur Patrick X... n'est pas de nature à combattre ces présomptions graves, précises et concordantes.
En effet, sa lettre de contestation de cette démarche, adressée à l'employeur le 31 janvier 2007, ne contient aucun élément, positif ou objectif, relatif aux faits reprochés, hormis sa contestation de ces faits qui, en l'absence de tout élément venant l'étayer, demeure une allégation insusceptible de combattre les présomptions graves, précises et concordantes. Par conséquent il y a lieu de dire que les griefs formulés par l'employeur dans la lettre de licenciement constituent un motif réel et sérieux de licenciement. Il ressort des pièces versées aux débats que Monsieur Patrick X..., engagé à compter du 3 mars 2005 a reçu notification le 5 juin 2006 d'un avertissement, non contesté et dont il ne demande pas l'annulation, pour des motifs ainsi rédigés: " Je vous signifie un avertissement pour votre comportement, votre état, et vos manquements pendant le service de ce mardi 4 juillet 2006 au soir: en effet, j'ai constaté ce matin que: la terrasse n'avait pas été couverte et balayée; la porte de l'établissement n'avait pas été verrouillée; l'alarme n'avait pas été mise en service; le sol n'avait pas été nettoyé; la machine à calculer était détruite à même le sol; le téléphone était abîmé suite à une chute; la caisse n'avait pas été faite.
Après renseignements auprès de vos collègues de travail, il apparaît que tout au long de votre service vous avez été agressif et que vous avez fini en apothéose en ne remplissant pas vos tâches de responsables et surtout en ne verrouillant pas l'établissement. Ces faits interviennent après plusieurs avertissements qui vous ont été signifiés par oral par votre responsable et par moi-même après des états d'ébriété constatés au travail. Je vous adresse donc un avertissement, qui se transformera en cas de récidives en licenciement". Le fait, pour le salarié, après avoir reçu notification d'un avertissement, de commettre le fait grave de soustraction de numéraire, sur son lieu de travail, le tout en moins de deux ans de présence dans l'entreprise, constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'il rendait impossible son maintien dans l'entreprise y compris pendant la durée du préavis. Par conséquent il y a lieu de dire le licenciement de Monsieur Patrick X... fondé sur une faute grave et, par voie de conséquence, le jugement du conseil de prud'hommes sera infirmé en toutes ses dispositions" (Arrêt p. 5 et 6),
ALORS, D'UNE PART, QUE la charge de la preuve de la faute grave incombant à l'employeur, le salarié n'a rien à démontrer si bien qu'en retenant, pour estimer que les faits relatés dans 3 attestations établies par des salariés constituaient une présomption permettant d'établir la réalité du vol imputé à Monsieur X..., que ce dernier se bornait à nier les faits contestés sans produire aucun élément de nature à contredire ou combattre les éléments communiqués par l'employeur et à faire tomber les présomptions, la Cour d'appel a violé les articles L. 1234-5 (anciennement L. 122-8), L 1234-9 (anciennement L. 122-9), L. 1235-1 (anciennement L. 122-14-3) du Code du travail et 1315 du Code civil,
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le vol par un salarié d'une faible somme d'argent, en l'espèce 5 €, ne saurait constituer une faute grave et justifier son départ immédiat de l'entreprise, quand bien même il aurait moins de deux années d'ancienneté et déjà été sanctionné une fois pour des faits radicalement différents de sorte qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L. 1234-1 (anciennement L. 122-6), L. 1234-5 (anciennement L. 122-8), 1234-9 (anciennement L. 122-9) du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-43020
Date de la décision : 01/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 29 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 mar. 2011, pourvoi n°09-43020


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Peignot et Garreau, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.43020
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