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16/02/2011 | FRANCE | N°10-10209

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 février 2011, 10-10209


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un accord d'entreprise du 4 juillet 1996 portant sur les dispositions générales régissant le personnel de l'Association pour la formation professionnelle des adultes (l'AFPA) a prévu, en son article 65, que l'AFPA souscrit au bénéfice de l'ensemble de ses salariés un contrat visant à les indemniser des frais médicaux restés à leur charge et complétant les prestations ser

vies par la sécurité sociale, qui est défini en collaboration avec les organisati...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un accord d'entreprise du 4 juillet 1996 portant sur les dispositions générales régissant le personnel de l'Association pour la formation professionnelle des adultes (l'AFPA) a prévu, en son article 65, que l'AFPA souscrit au bénéfice de l'ensemble de ses salariés un contrat visant à les indemniser des frais médicaux restés à leur charge et complétant les prestations servies par la sécurité sociale, qui est défini en collaboration avec les organisations syndicales et est soumis au personnel par voie de référendum ; que l'AFPA a soumis à un référendum organisé du 1er au 15 octobre 2007 la question de savoir si le régime de couverture complémentaire qui serait mis en place le 1er janvier 2008 devait avoir un caractère obligatoire ; que les salariés de l'AFPA ont répondu en majorité par l'affirmative à ce référendum ; que le régime prévoyait qu'il s'appliquait aux conjoints et enfants des salariés sauf si ceux-ci étaient concernés par un autre régime complémentaire obligatoire ; que Mmes X... et Y... qui s'étaient inscrites à la tarification isolée se sont vu appliquer la tarification famille, à défaut d'avoir transmis à l'AFPA un justificatif de ce que leurs conjoints étaient couverts par un autre régime obligatoire ; qu'elles ont saisi la juridiction prud'homale pour demander la cessation du prélèvement mensuel de la cotisation frais de santé "famille" et le remboursement des cotisations précomptées au titre de la tarification famille ;

Attendu que pour dire que l'AFPA devra cesser les prélèvements de la cotisation de prévoyance complémentaire santé du conjoint effectués au profit de l'institution Novalis sur les salaires de Mmes X... et Y... et condamner l'AFPA à rembourser à ces salariées les prélèvements de la cotisation de prévoyance complémentaire santé pour le conjoint effectués depuis le mois de janvier 2008, l'arrêt retient que l'annexe 2 décrivant le nouveau régime mentionne en page 3 qu'il s'applique à tous les salariés et prévoit une dérogation pour les ayants-droits des salariés de l'AFPA qui sont couverts par un autre régime complémentaire obligatoire, que la notion d'ayants droits ne désigne pas nécessairement le conjoint, que le prospectus d'information en vue du référendum produit par l'intimée indique en page 3 que "à titre d'ayants droits les conjoints et enfants pourront bénéficier de la mutuelle obligatoire", ce qui précise peut-être la notion d'ayants droits mais contredit manifestement l'information donnée à l'annexe 2 en donnant à penser que l'adhésion du conjoint et des enfants est facultative, qu'en page 4 ledit prospectus indique le montant des cotisations pour le régime obligatoire en donnant des chiffres pour la formule "isolé" et pour la formule "famille" sans préciser que le salarié marié n'a pas le choix et se verra imposer la formule "famille", que c'est en vain que l'AFPA fait valoir que des informations ont été données par "mise en ligne sur le site internet Agora" et par un journal d'entreprise dans la mesure où ces informations n'avaient pas un caractère officiel et où il n'est pas démontré que les appelantes les aient effectivement reçues, qu'en conséquence, sans qu'il soit nécessaire à la cour de se prononcer sur la légalité de ce régime en ce qu'il a prévu l'adhésion obligatoire du conjoint du salarié sauf à justifier de son adhésion à un régime obligatoire, les appelantes sont fondées à prétendre qu'elles n'ont pas été régulièrement informées de cette disposition et à demander qu'elle ne leur soit pas appliquée et que le supplément de cotisation payé depuis le 1er janvier 2008 leur soit remboursé ;

Qu'en statuant ainsi, sans caractériser un lien de causalité entre le préjudice allégué et le manquement de l'employeur à son obligation d'information, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 novembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;

Condamne Mme Y... et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize février deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que l'AFPA devrait cesser les prélèvements de la cotisation de prévoyance complémentaire santé du conjoint effectués au profit de l'institution NOVALIS sur les salaires de Mesdames X... et Y... et condamné l'AFPA à rembourser à ces salariées les prélèvements de la cotisation de prévoyance complémentaire santé pour le conjoint s'élevant à 42,55 € par mois effectués depuis le mois de janvier 2008, ainsi qu'à leur régler 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

AUX MOTIFS QU'un accord d'entreprise du 4 juillet 1996 a prévu en son article 65 que l'AFPA souscrit au bénéfice de l'ensemble de ses salariés un contrat visant à indemniser des frais médicaux restés à la charge de l'assuré et complétant les prestations servies par la sécurité sociale, qui est défini en collaboration avec les organisations syndicales et est soumis au personnel par voie de référendum ; que l'AFPA a soumis à un référendum organisé du 1er au 15 octobre 2007 la question de savoir si le régime de couverture complémentaire qui sera mis en place le 1er janvier 2008 doit avoir un caractère obligatoire ; qu'il est constant entre les parties que les salariés de l'AFPA ont répondu en majorité par l'affirmative à ce référendum ; que dès lors, en application de l'article L. 911-1 du Code de la Sécurité Sociale, ce régime s'impose à l'ensemble des salariés (en ce sens Soc 5 janvier 1984 DS 1986.282) ; que les appelantes objectent qu'elles n'ont pas été exactement informées préalablement au référendum que l'assurance obligatoire s'applique également à leur conjoint et qu'aucune disposition législative ne permet d'affilier le conjoint du salarié ; que dans l'information donnée aux salariés en vue du référendum l'annexe 2 décrivant le nouveau régime mentionne en page 3 qu'il s'applique à tous les salariés et prévoit une dérogation pour les ayants-droits des salariés de l'AFPA qui sont couverts par un autre régime complémentaire obligatoire ; que la notion d'ayants droits ne désigne pas nécessairement le conjoint ; que le prospectus d'information en vue du référendum produit par l'intimée (pièce n° 9) indique en page 3 que « à titre d'ayants droits les conjoints et enfants pourront bénéficier de la mutuelle obligatoire », ce qui précise peut-être la notion d'ayants droits mais contredit manifestement l'information donnée à l'annexe 2 en donnant à penser que l'adhésion du conjoint et des enfants est facultative ; qu'en page 4 ledit prospectus indique le montant des cotisations pour le régime obligatoire en donnant des chiffres pour la formule « isolé » et pour la formule « famille » sans préciser que le salarié marié n'a pas le choix et se verra imposer la formule « famille » ; que c'est en vain que l'AFPA fait valoir que des informations ont été données par « mise en ligne sur le site internet AGORA » et par un journal d'entreprise dans la mesure où ces informations n'avaient pas un caractère officiel et où il n'est pas démontré que les appelantes les aient effectivement reçues ; qu'en conséquence, sans qu'il soit nécessaire à la Cour de se prononcer sur la légalité de ce régime en ce qu'il a prévu l'adhésion obligatoire du conjoint du salarié sauf à justifier de son adhésion à un régime obligatoire, les appelantes sont fondées à prétendre qu'elles n'ont pas été régulièrement informées de cette disposition et à demander qu'elle ne leur soit pas appliquée et que le supplément de cotisation payé depuis le 1er janvier 2008, lequel s'élève à 42,55 € par mois, leur soit remboursé ;

1. ALORS QUE l'employeur débiteur d'une obligation d'information peut y satisfaire en faisant savoir aux salariés que l'ensemble des informations nécessaires sont disponibles sur le site internet de l'entreprise ; qu'en l'espèce, parmi l'information adressée aux salariés en vue du référendum, l'annexe 2 décrivant le nouveau régime – dont la cour d'appel a admis qu'elle avait été reçue par les salariées – précise qu'une information complète a été mise en ligne sur le site internet AGORA ; qu'en affirmant que l'AFPA ne pouvait se prévaloir des informations données par mise en ligne sur le site internet AGORA dans la mesure où elles n'avaient pas un caractère officiel et où il n'est pas démontré que les salariées les aient effectivement reçues, sans rechercher si elles n'avaient pas été informées par les documents reçus de la mise à disposition de l'ensemble des informations sur le site de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du Code civil ;

2. ALORS QUE les salariées produisaient elles-mêmes et avaient donc reçu un document intitulé « dérogations possibles et leurs justifications » dont le deuxième cas était « les ayants-droits : conjoints/enfants des salariés de l'AFPA qui sont couverts par un autre régime complémentaire obligatoire », précisant qu'à titre de justificatif, le salarié devait « fournir une attestation de l'employeur de son conjoint ou de la mutuelle de son conjoint qui devra impérativement mentionner le caractère obligatoire du régime complémentaire de frais de santé (ou mutuelle) et à qui il s'applique (conjoint seul ; conjoint et ses ayants droits ou conjoint et sa famille) » ; que ce même document indiquait ensuite : « si l'attestation couvre obligatoirement le conjoint et les enfants, le salarié adhère sur une formule isolé ; si l'attestation couvre obligatoirement le conjoint, le salarié adhère sur une formule isolé s'ils n'ont pas d'enfant ; si l'attestation couvre obligatoirement le conjoint, le salarié adhère sur une formule famille s'ils ont des enfants » ; qu'il en résultait clairement que les conjoints des salariés de l'AFPA étaient obligatoirement pris en compte par le régime mis en place, sauf à justifier de leur adhésion à un régime complémentaire obligatoire ; qu'en s'abstenant d'examiner cette pièce, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;

3. ALORS en tout état de cause QUE le débiteur d'une obligation d'information ne peut, en cas de manquement à cette obligation, être condamné à réparer que le préjudice en relation de causalité avec le défaut d'information ; qu'il ne peut donc être condamné à indemniser le créancier d'un dommage que ce dernier n'aurait pu éviter même s'il avait été correctement informé ; qu'en l'espèce, l'information des salariées sur l'obligation faite par le contrat à caractère collectif et obligatoire de frais de santé aux salariés en couple de verser une cotisation « famille » sauf à justifier de l'adhésion de leur conjoint à un régime complémentaire obligatoire ne leur aurait pas permis de se soustraire à cette obligation et donc de régler la cotisation « isolé » au lieu de la cotisation « famille » sans justifier de l'adhésion de leur conjoint à un régime complémentaire obligatoire ; qu'en affirmant que le défaut d'information sur le caractère obligatoire pour les salariés mariés de verser une cotisation « famille » sauf à justifier de l'adhésion de leur conjoint à un régime complémentaire obligatoire autorisait les salariées à demander que cette disposition ne leur soit pas appliquée et à obtenir le remboursement du supplément de cotisation payé depuis le 1er janvier 2008, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-10209
Date de la décision : 16/02/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 09 novembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 fév. 2011, pourvoi n°10-10209


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.10209
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