LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1132-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société "Du Pareil au Même" (DPAM), selon contrat à durée indéterminée à compter du 12 janvier 1994, en qualité de directrice de magasin ; qu'à compter du 27 octobre 2006, elle a été placée en arrêt de travail pour maladie puis licenciée le 6 avril 2007 ; que contestant le bien-fondé de la rupture, elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour débouter Mme X... de sa demande, l'arrêt retient que son absence depuis presque six mois de l'entreprise et l'ignorance de la date à laquelle la salariée devait reprendre son activité désorganisaient l'exploitation du fonds de commerce, même si des solutions palliatives nécessairement temporaires avaient été trouvées, que le poste de Mme X... avait été pourvu en interne par la nomination de Mme Y..., directrice du magasin bébé, le 1er mars 2007, elle même étant remplacée par une vendeuse, Mme Z..., tandis que Mme A... embauchée comme vendeuse en contrat à durée déterminée dès le 6 novembre 2006, en remplacement de Mme Y... avait été définitivement engagée le 22 mai 2007, à temps partiel ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si le recrutement de la salariée à temps partiel pour occuper le poste laissé vacant était de nature à caractériser un remplacement total et définitif de la salariée mutée en interne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 14 avril 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société DPAM aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société DPAM à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat de Mme X...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de madame X... justifié par une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence débouté cette dernière de sa demande tendant à la condamnation de la société D.P.A.M. au versement d'une indemnité à ce titre ;
AUX MOTIFS QUE Madame X... occupait le poste de responsable de magasin dans lequel travaillaient trois à quatre salariés ; que c'est à juste titre que la société fait plaider que son absence depuis presque six mois et l'ignorance de sa date de reprise désorganisaient l'exploitation du fonds de commerce, même si des solutions palliatives nécessairement temporaires avaient été trouvées ; que le poste de Madame X... a été pourvu en interne par la nomination de Madame Y..., directrice du magasin bébé, le 1er mars 2007 ; qu'elle avait partagé ses deux fonctions entre le 1er janvier 2007 et le 30 avril 2007 ; que Madame Y... était remplacée par une vendeuse, Madame Z..., devenue à cette date responsable de la boutique DPAM bébé, tandis que Madame A... avait été embauchée comme vendeuse en contrat à durée déterminée dès le 6 novembre 2006, en remplacement de Madame Y... lorsqu'elle cumulait la responsabilité des deux magasins, puis embauchée définitivement le 22 mai 2007, à temps partiel, après renouvellement du contrat à durée déterminée ; qu'il s'ensuit que l'employeur a effectivement pourvu au remplacement de Madame X... le 1er mars 2007 par cascade et qu'il a été procédé à l'embauche d'une salariée pour occuper le poste laissé vacant ;
ALORS, de première part, QUE si le licenciement d'un salarié absent en raison de son état de santé peut, le cas échéant, être justifié par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées de l'intéressé, la rupture de la relation de travail ne peut cependant intervenir que si ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder au remplacement définitif du salarié ; que pour dire que le licenciement de Madame X... reposait sur une cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel s'est bornée à constater que l'absence de la salariée désorganisait l'exploitation du fonds de commerce et que la société D.P.A.M. avait procédé à une embauche afin de la remplacer ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel, qui n'a pas caractérisé en quoi les perturbations occasionnées par l'absence de Madame X... sur le fonctionnement de l'entreprise rendaient nécessaires son remplacement définitif, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1132-1 du Code du travail ;
ALORS surtout QUE la Cour d'appel qui a constaté que des solutions palliatives avaient pu être trouvées n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en déduisaient au regard desdites dispositions :
ALORS, de deuxième part, QUE le remplacement définitif du salarié absent ne peut intervenir par voie de mutation interne que si l'employeur procède par ailleurs à un recrutement en vue d'occuper les fonctions du salarié remplaçant ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a relevé que le poste de directrice de magasin occupé par Madame X... avait été pourvu en interne par la nomination de Madame Y..., elle aussi directrice, mais d'un autre magasin, cette dernière étant elle-même remplacée par une autre salariée, Madame Z..., qui occupait jusqu'alors des fonctions de vendeuse et promue responsable de magasin à cette occasion, tandis qu'une autre salariée, Madame A..., était définitivement engagée en qualité de vendeuse à temps partiel le 22 mai 2007 ; qu'il en résulte ainsi que la salariée appelée à occuper les fonctions de Madame X... après son licenciement n'avait pas, quant à elle, été remplacée dans ses fonctions de directrice de magasin ; qu'en jugeant néanmoins que la société D.P.A.M. avait bien procédé au remplacement définitif de Madame X..., la Cour d'appel n'a pas tiré toutes les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, au regard de l'article L.1132-1 du Code du travail, ainsi violé ;
QU'à tout le moins, en s'abstenant de rechercher s'il existait, au sein de la société D.P.A.M., une différence entre les emplois de directeur et de responsable de magasin, et, partant, si Madame Z... avait valablement pu remplacer Madame Y... dans ses fonctions de directrice de magasin lorsque celle-ci a été amenée à occuper définitivement les fonctions de Madame X..., la Cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L.1132-1 du Code du travail ;
ALORS, de troisième part, QU'en retenant que la société D.P.A.M. avait remplacé Madame X... par "cascade" en recrutant in fine une salariée à temps partiel pour occuper le poste laissé vacant, la Cour d'appel, qui s'est abstenue de procéder à la moindre constatation tenant à la durée du travail de Madame X... et des salariées appelées à la remplacer en interne, a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1132-1 du Code du travail ;
QU'en s'abstenant de mener cette recherche, alors que Madame X... soutenait dans ses écritures qu'elle ne pouvait avoir été valablement remplacée par une salariée à temps partiel, la Cour d'appel a, à tout le moins, entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, violant ainsi l'article 455 du Code de procédure civile.