LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu le principe de la séparation des pouvoirs et les articles L. 551-1 et R. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu à prolongation de la rétention administrative de Mme X... épouse Y..., de nationalité togolaise, en situation irrégulière en France, interpellée dans le département des Pyrénées-Atlantiques, l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, retient qu'il n'est pas contesté que le centre de rétention administrative de Hendaye est actuellement quasiment vide, que de nombreuses personnes retenues dans ce centre ont été transférées à Toulouse depuis que s'est développée, dans le ressort de la cour d'appel de Pau, une jurisprudence contestée par l'administration, à tel point que le centre de rétention de Toulouse est actuellement très chargé, et que cette pratique de l'administration, qui lui permet de choisir son juge, n'est pas conforme au respect des droits de la défense ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le juge judiciaire saisi en application de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut, sans excéder ses pouvoirs, se prononcer sur la légalité de la décision administrative désignant le centre de rétention administrative dans lequel l'étranger sera maintenu, le premier président a violé le principe et les textes susvisés ;
Vu l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Et attendu que les délais légaux de rétention étant expirés, il ne reste plus rien à juger ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 19 mars 2009, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Toulouse ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par le procureur général près la cour d'appel de Toulouse
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir rejeté la requête d'un préfet (le préfet des Pyrénées-Atlantiques) en prolongation de la rétention administrative d'un étranger (Louise X... épouse Y...) faute pour le préfet de n'avoir pas respecté les droits de la défense en choisissant un centre de rétention administrative plutôt qu'un autre.
Aux motifs que l'ordonnance attaquée retient que le placement au centre de rétention administrative de Toulouse de Louise X... épouse Y... porte atteinte aux droits de là défense dès lors que s'il est de principe que l'administration ale choix du centre de rétention, elle doit exercer ce choix dans le respect des droits de la défense, que le ce te d'Hendaye est actuellement quasiment vide et que de nombreuses personnes retenues dans c centre ont été transférées à Toulouse depuis que s'est développée dans le ressort de la cour d'appel de Pau une jurisprudence contestée par l'administration, à tel point que le centre de rétention de Toulouse est actuellement très chargé, et qu'une telle pratique de l'administration qui lui permet de choisir son juge n'est pas conforme au respect des droits de la défense.
Alors que :
1. Il ne résulte pas des dispositions du CESEDA que le préfet se trouve en situation de compétence liée lors du choix du centre de réténtion.
Bien au contraire, l'article R551-2 du CESEDA énonce que les centres de rétention administrative, qui ont une vocation nationale, reçoivent dans la limite de leur capacité d'accueil et sans considération de la compétence géographique du préfet ayant pris l'arrêté de placement en rétention, les étrangers retenus dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire régis par les articles R553-1 à R553-41, quel que soit le lieu de leur résidence ou de leur interpellation.
En retenant que le préfet ne pouvait, sans porter atteinte aux droits de la défense, placer l'intimée au centre de rétention de Toulouse, alors même que le centre de rétention d'Hendaye était quasiment vide, le conseiller délégué a violé les dispositions de l'article R551-2 du CESEDA.
D 'ailleurs par ordonnance n° 07/20O9 rendue le 29 mars 2009 à 10h., soit le même jour, un autre juge délégué par ordonnance du premier président de la cour d'appel de Toulouse pour connaître des recours prévus par les articles 11552-9 et L222-6, R552-12 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, avait rejeté le matin le même moyen de nullité soulevé par le conseil de l'étranger aux motifs : "qu'il appartient aux autorités administratives de choisir le centre de rétention en fonction notamment des contingences matérielles et des disponibilités, sans que le retenu Toulouse aurait été délibérément puisse tirer argument de ce que le choix du centre de fait pour qu'il ne puisse pas exercer correctement sa défense qui ne résulte que de sa seule affirmation" (ordonnance n° 67/2009 - Ahmed Z...).
2. Il résulte du principe de la séparation des pouvoirs qu'il ne ressortit pas au pouvoir du juge de l'ordre judiciaire de se prononcer sur la légalité d'une décision administrative.
En estimant que la décision de placement en rétention de l'intimée est illégale et que, de cette illégalité, découle sa remise en liberté immédiate, alors que le juge saisi en application des dispositions des articles L551-1 et suivants-du CESEDA ne peut, sans excéder ses pouvoirs, se prononcer sur la légalité de la décision de maintien en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, le conseiller délégué a violé le principe de la séparation des pouvoirs et les dispositions susdites du CESEDA (C. cass. civ.1 12 décembre 2006 n° 06-11002, C. cass civ.2 4 novembre 2004 n° 04-50022 et C. cass civ.2 21 février 2002 n° 00-50089).