LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 1382 et 1251 du code civil ;
Attendu que la contribution à la dette de réparation du dommage subi par la victime d'un accident de la circulation, entre un conducteur impliqué dans l'accident et un autre coobligé fautif, a lieu en proportion de la gravité des fautes respectives ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., passager du véhicule conduit par son époux, a été victime, en Suisse, d'un accident de la circulation ; que, blessée, elle a subi une intervention chirurgicale à l'hôpital de Neuchâtel et est demeurée paraplégique ; qu'elle a assigné en responsabilité et indemnisation son époux et son assureur, la société MAAF ; que ces derniers ont assigné en garantie la ville de Neuchâtel et la société Axa Winterthur ;
Attendu que pour condamner la ville de Neuchâtel et la société Axa Winterthur à payer à la MAAF une certaine somme, l'arrêt, après avoir relevé qu'une faute médicale avait été commise lors de l'intervention chirurgicale, retient que si l'hospitalisation avait été rendue nécessaire par l'accident causé par M. X... qui avait perdu le contrôle du véhicule, l'opération mal réalisée était à l'origine de la paraplégie et que la faute de M. X... n'avait joué aucun rôle direct dans l'apparition de cette paraplégie ; qu'eu égard à l'importance de la participation causale de chacune de ces deux fautes à la réalisation du dommage de Mme X..., le premier juge a justement apprécié la mesure de la part de responsabilité incombant à chacun des coauteurs en faisant supporter à chacun d'entre eux les conséquences directes des fautes commises, à savoir pour M. X..., les conséquences liées à l'accident, et pour l'hôpital, celle liées à l'intervention ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en cas de faute, la part contributive de chacun des coauteurs s'apprécie exclusivement en fonction de la gravité des fautes commises, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'i y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne M. X... et la société MAAF assurances aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et de la société MAAF assurances ; les condamne, in solidum, à payer à la société Axa Winterthur et à la ville de Neuchâtel la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour la société Axa Winterthur et la ville de Neuchâtel
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a, par confirmation du jugement entrepris, déclaré la Ville de NEUCHATEL responsable des conséquences dommageables pour Mme X... de la faute commise par l'hôpital POURTALES, ordonné à la Ville de NEUCHATEL de relever la société MAAF ASSURANCES et M. X... des condamnations mises à leur charge pour indemniser Mme X... du préjudice résultant de la faute médicale et, à ce titre, a condamné la Ville de NEUCHATEL et la compagnie WINTERTHUR, in solidum, à payer à la société MAAF ASSURANCES la somme de 1. 079. 502, 50 € ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... et la MAAF qui ont été condamnés à indemniser l'entier préjudice de Madame X... exercent une action récursoire à l'encontre du coauteur du dommage et de son assureur, la ville de NEUCHATEL et la SA WINTERTHUR ; que le premier juge a estimé que Monsieur X... et la MAAF devaient prendre en charge le préjudice de Madame X... résultant des conséquences de l'accident et que la ville de NEUCHATEL et la SA WINTERTHUR devaient prendre en charge les conséquences résultant de la faute médicale ; que la ville de NEUCHATEL et la SA WINTERTHUR, soulignant que l'hospitalisation et l'intervention chirurgicale à l'origine de la paraplégie ont été rendues nécessaires par l'accident, font valoir que le recours en contribution doit s'exercer sur le fondement de l'article 1251 du code civil en proportion des fautes respectives et non en proportion du préjudice consécutif à chaque fait dommageable ; elles considèrent que compte tenu de la gravité des fautes commises un partage de responsabilité par moitié doit être ordonné ; que l''action récursoire exercée par l'un des auteurs d'un dommage condamné à réparer l'entier préjudice de la victime à l'encontre d'un coauteur présente un caractère subrogatoire et a pour objet la contribution de celui-ci à la dette de réparation ; il est certes acquis que cette contribution a lieu en proportion des fautes respectives commises par les co-obligés, lesquelles doivent être en lien avec le dommage ; que s'il est exact que l'hospitalisation de Madame X... a été rendue nécessaire par l'accident causé par Monsieur X... qui a perdu le contrôle de son véhicule, puisque sans cet accident Madame X... n'aurait pas été hospitalisée, il n'en demeure pas moins que le choix, certes non fautif, d'opérer Madame X... incombe au seul hôpital de NEUCHATEL, alors qu'une autre option, non intrusive et sans risque, s'offrait à lui ; or c'est cette opération mal réalisée qui est à l'origine de la paraplégie dont souffre Madame X... ; la faute commise par Monsieur X... n'a donc joué aucun rôle direct dans l'apparition de cette paraplégie ; qu'en conséquence, eu égard à l'importance de la participation causale de chacune de ces deux fautes à la réalisation du dommage de Madame X..., le premier juge a justement apprécié la mesure de la part de responsabilité incombant à chacun des coauteurs en faisant supporter à chacun d'entre eux les conséquences directes des fautes qu'ils ont commises, telles qu'elles ressortent des rapports des Professeurs Y... et Z..., à savoir pour Monsieur X... les conséquences liées à l'accident et pour l'hôpital de NEUCHATEL, celles liées à l'intervention ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a condamné la ville de NEUCHATEL et la SA WINTERTHUR à payer à la MAAF, déduction faite de la part incombant à Monsieur X... :- la somme de 1. 0795. 02, 50 €,- la rente mensuelle qu'elle verse à Madame X... au titre de la tierce personne » ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, le recours en contribution à la dette entre deux co-auteurs fautifs d'un même dommage est réglé en proportion de la gravité des fautes respectives de chacun d'eux et non au regard de l'importance causale de ces fautes dans la réalisation du dommage ; qu'en déterminant la contribution de M. X... et de la Ville de NEUCHATEL à la réparation des dommages subis par Mme X... « eu égard à l'importance de la participation causale » de leur faute respective (arrêt p. 5, § 4), au lieu de statuer au vu de la gravité de ces fautes, les juges du fond ont violé l'article 1147 du code civil et, à titre subsidiaire, l'article 1382 du même code ;
ALORS QUE, deuxièmement et en tout cas, la faute d'un conducteur impliqué dans un accident de la circulation, lequel accident a rendu nécessaire une opération chirurgicale, est une cause directe du dommage qui a résulté de cette intervention médicale ; que la cour d'appel a constaté que « l'hospitalisation de Mme X... a été rendue nécessaire par l'accident causé par M. X... qui a perdu le contrôle de son véhicule, puisque sans cet accident, Mme X... n'aurait pas été hospitalisée » (arrêt p. 5, § 3) ; qu'en jugeant pourtant que « la faute commise par M. X... n'avait (…) joué aucun rôle direct » dans l'apparition de la paraplégie de Mme X... qui a suivi son hospitalisation (arrêt p. 5, § 3), les juges du fond n'ont pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations et, partant, ont violé l'article 1147 du code civil et, à titre subsidiaire, l'article 1382 du même code.