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08/12/2010 | FRANCE | N°09-71830

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 08 décembre 2010, 09-71830


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 7 octobre 2009) que la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) de la Corse a exercé son droit de préemption sur la vente de parcelles appartenant à Mme X... ; qu'aucun acte authentique de vente n'ayant pu être signé en raison de la contestation par Mme X... de la nature préemptable d'une partie de ces biens, la SAFER de la Corse a assigné cette dernière pour que la vente soit déclarée parfaite et que l

a décision à intervenir tienne lieu d'acte définitif de vente ;

Attendu qu...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 7 octobre 2009) que la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) de la Corse a exercé son droit de préemption sur la vente de parcelles appartenant à Mme X... ; qu'aucun acte authentique de vente n'ayant pu être signé en raison de la contestation par Mme X... de la nature préemptable d'une partie de ces biens, la SAFER de la Corse a assigné cette dernière pour que la vente soit déclarée parfaite et que la décision à intervenir tienne lieu d'acte définitif de vente ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen :

1°/ que la contestation portant sur la nature préemptable du terrain convoité par une SAFER porte nécessairement sur le respect des objectifs légaux de la préemption, ces objectifs ne pouvant être atteints avec des biens non-préemptables ; qu'en l'espèce, pour contester que le droit de préemption mis en oeuvre par la SAFER de la Corse l'ait été dans le cadre des objectifs définis à l'article L. 143-2 du code rural, Mme X... faisait état du caractère boisé à vocation forestière des parcelles, exclusif du mécanisme de la préemption mis en oeuvre dans un cadre agricole ; qu'en considérant que cette contestation n'entrait pas dans la catégorie des demandes mettant en cause le respect des objectifs définis par l'article L.. 143-2 du code rural et qu'ainsi, elle était irrecevable pour n'avoir pas été émise dans le délai de six mois à compter du jour où la décision de préemption avait été rendue publique, la cour d'appel a violé l'article L. 143-13 de ce même code ;

2°/ qu'en affirmant que Mme X... se contentait d'affirmer que sa demande visait à contester la mise en oeuvre des objectifs légaux sans cependant préciser en quoi la préemption réalisée ne correspondait pas à un objectif légal, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des écritures de Mme X... et a méconnu le principe en vertu duquel le juge ne peut pas dénaturer les documents de la cause ;

Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit que l'exception aux règles de forclusion édictées par l'article L. 143-13 du code rural était circonscrite aux demandes mettant en cause le respect des objectifs définis par l'article L. 142-2 du même code, la cour d'appel, qui a constaté que l'action en contestation de la préemption avait été intentée le 24 février 2005 et que cette décision avait été rendue publique par un affichage en mairie les 19 et 20 mars 2004, en a exactement déduit, sans dénaturation, que l'action de Mme X..., en tant qu'elle portait sur la nature préemptable du bien, était irrecevable ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à la SAFER de la Corse la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Mme X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande de madame X... en annulation de la décision de préemption de la SAFER DE LA CORSE, d'AVOIR dit que la décision de préemption définitive de la SAFER DE LA CORSE aux conditions fixées par le propriétaire des fonds emportait consentement réciproque des parties sur la chose et le prix et, dès lors, vente parfaite sur les parcelles visées au dispositif de l'arrêt, d'AVOIR dit que l'arrêt valait acte de vente desdites parcelles aux conditions décrites dans la décision de préemption, d'AVOIR ordonné la publication de l'arrêt à la conservation des hypothèques, d'AVOIR débouté madame X... de sa demande de dommages et intérêts pour comportement abusif de la SAFER DE LA CORSE et de prononcé d'une amende civile et d'AVOIR condamné madame X... au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QU'«aux termes de l'article L. 143-13 du Code rural, qu'«à moins que ne soit mis en cause le respect des objectifs définis à l'article L. 143-2, sont irrecevables les actions en justice contestant les décisions de préemption prises par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural, intentées au-delà de six mois à compter du jour où ces décisions motivées ont été rendues publiques» ; en l'espèce, il résulte des écritures des parties que le litige soumis à la Cour consiste à dire quelle est la nature des fonds complantés en châtaigniers, historiquement dédiés à l'exploitation castanéicole et à l'élevage annexe de porcins, mais depuis de nombreuses années laissés en l'état durable d'abandon et à déterminer en conséquence s'il s'agit de biens pouvant faire l'objet d'un droit de préemption au sens de l'article L. 143-4 du Code rural ou de surfaces boisées échappant en principe à un tel droit ; le débat ainsi posé par les parties et particulièrement par madame X... à l'appui de sa demande reconventionnelle n'entre nullement dans le champ de l'exception aux règles de forclusion édictées par l'article susvisé, pourtant clairement circonscrite aux demandes mettant en cause le respect des objectifs définis par l'article L. 143-2 du dit code, uniquement ; madame X... se contente d'affirmer que sa demande vise à contester la mise en oeuvre des objectifs légaux sans cependant préciser en quoi la préemption réalisée ne correspond pas à un objectif légal ; elle se borne, à cet égard, à reprocher à la SAFER de ne pas avoir visé l'un de ces objectifs ayant trait «à la mise en valeur et la protection de la forêt ainsi que l'amélioration des structures sylvicoles dans le cadre des conventions passées avec l'Etat en application de l'article L. 512-6 du Code forestier» ; qu'il ressort cependant de la motivation de la décision de préemption la référence implicite à deux des objectifs définis par l'article L. 143-2 du Code rural, à savoir «l'installation ou le maintien des agriculteurs» d'une part, «l'agrandissement et l'amélioration parcellaire des exploitations», d'autre part ; aux termes de l'article L.du Code rural, il n'est nullement imposé aux SAFER de justifier de leur droit de préemption au regard de l'ensemble des objectifs qui lui sont assignés, mais seulement par référence implicite à l'un ou plusieurs d'entre eux ; il résulte des pièces versées aux débats que la décision de préemption a été notifiée à la SCP Pinna-Melgrani-Cuttoli, notaire chargé de la vente ainsi qu'à l'acquéreur par courriers recommandés du 16 mars 2004 ; cette décision a été transmise le même jour aux mairies de Rapaggio et de Monacoia d'Orezza qui ont procédé à son affichage respectivement le 19 mars 2004 et le 20 mars 2004 ; c'est donc à compter de ces dates de publicité que le délai de six mois susvisé a commencé à courir ; la SAFER a assigné madame X... devant le tribunal de grande instance par acte du 24 février 2005 ; c'est aux termes d'une demande reconventionnelle que madame X... a sollicité l'annulation de la décision de préemption ; ainsi, la demande de madame X... est forclose au regard des dispositions de l'article L. 143-13 du Code rural et donc irrecevable sans qu'il y ait lieu d'opérer une distinction comme l'a fait le Tribunal entre les moyens de l'action qui portent sur l'insuffisance de la motivation et ceux qui mettent en cause le respect des objectifs de la loi ; l'article L. 143-8 du Code rural prévoit que le droit de préemption des SAFER s'exerce dans les conditions prévues par les articles 412-8 à L.412-11 du dit code notamment ; l'article L. 412-8 du Code rural dispose expressément que la communication par le notaire chargé d'instrumenter de l'intention de vendre vaut offre de vente aux prix et conditions qui y sont contenues, les dispositions de l'article 1589 du Code civil étant applicables à l'offre ainsi faite ; le propriétaire du fonds faisant l'objet d'un tel avis ne saurait en tout état de cause se prévaloir de l'existence d'un compromis de vente antérieur comme le fait en l'espèce madame X...»;

1°) ALORS QUE la contestation portant sur la nature préemptable du terrain convoité par une SAFER porte nécessairement sur le respect des objectifs légaux de la préemption, ces objectifs ne pouvant être atteints avec des biens non-préemptables ; qu'en l'espèce, pour contester que le droit de préemption mis en ..uvre par la SAFER DE LA CORSE l'ait été dans le cadre des objectifs définis à l'article L. 143-2 du Code rural, madame X... faisait état du caractère boisé à vocation forestière des parcelles, exclusif du mécanisme de la préemption mis en oeuvre dans un cadre agricole ; qu'en considérant que cette contestation n'entrait pas dans la catégorie des demandes mettant en cause le respect des objectifs définis par l'article L. 143-2 du Code rural et qu'ainsi, elle était irrecevable pour n'avoir pas été émise dans le délai de six mois à compter du jour où la décision de préemption avait été rendue publique, la Cour d'appel a violé l'article L. 143-13 de ce même Code ;

2°) ALORS en tout état de cause QU'en affirmant que madame X... se contentait d'affirmer que sa demande visait à contester la mise en oeuvre des objectifs légaux sans cependant préciser en quoi la préemption réalisée ne correspondait pas à un objectif légal, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des écritures de madame X... et a méconnu le principe en vertu duquel le juge ne peut pas dénaturer les documents de la cause.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-71830
Date de la décision : 08/12/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL - Préemption - Action en contestation - Délai - Action fondée sur la nature préemptable du bien - Point de départ

L'exception aux règles de forclusion de l'article L. 143-13 du code rural est circonscrite aux demandes mettant en cause le respect des objectifs définis par l'article L. 143-2 du même code. Est irrecevable la demande portant sur la nature préemptable du bien intentée plus de six mois après que la décision de préemption ait été rendue publique


Références :

articles L. 143-2, L. 143-13 et L. 143-14 du code rural

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 07 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 08 déc. 2010, pourvoi n°09-71830, Bull. civ. 2010, III, n° 219
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, III, n° 219

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Cuinat
Rapporteur ?: Mme Pic
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.71830
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