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07/12/2010 | FRANCE | N°10-12152

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 décembre 2010, 10-12152


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen pris en sa troisième branche :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 17 décembre 2009) et les pièces produites, que, le 12 décembre 2007, les juges des libertés et de la détention des tribunaux de grande instance de Draguignan et Grasse ont autorisé des agents de l'administration des impôts à effectuer, en vertu de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, une visite et une saisie de documents dans les locau

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen pris en sa troisième branche :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 17 décembre 2009) et les pièces produites, que, le 12 décembre 2007, les juges des libertés et de la détention des tribunaux de grande instance de Draguignan et Grasse ont autorisé des agents de l'administration des impôts à effectuer, en vertu de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, une visite et une saisie de documents dans les locaux et dépendances sis... à Saint-Raphaël et (ou)... et (ou)... à Saint-Raphaël, susceptibles d'être occupés par Kathleen et (ou) Catherine X... et (ou) David Y...
Z... et (ou) I... et (ou) la société Rivera Villas Ltd et (ou) SCI Coral, et dans ceux sis... et (oi) Les Cyprès,... à Juan-les-Pins et (ou)... à Juan-les-Pins, susceptibles d'être occupés par Mme A... et (ou) J...
B... et (ou) M. C... Michael et (ou) SCI Les Cyprès et (ou) Azur Villas Ltd et (ou) société Azur Services et (ou) Azur Villas Services Ltd, et ceux sis... (ou)... Juan-les-Pins, susceptibles d'être occupés par Mme A... et (ou) J...
B... et (ou) M. C... Michael et (ou) la SCI Romik et (ou) SCI Miros et (ou) Will D..., ainsi que ceux sis... et (ou)... susceptibles d'être occupés par M. E... Terence, et ceux sis..., susceptibles d'être occupés par Mme F... Meta et (ou) G... Stephan et (ou) la société Meetazur Ltd et (ou) M. H... Steven en vue de rechercher la preuve de leur fraude fiscale, au titre de l'impôt sur le revenu, de l'impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée ;

Attendu qu'il est fait grief à l'ordonnance d'avoir débouté les parties de leurs demandes tendant à l'annulation des ordonnances rendues le 12 décembre 2007, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales : « I. Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions … elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des impôts, à rechercher la preuve de ces agissements » ; qu'il résulte de ces dispositions ainsi que du principe de sécurité juridique que les agents des impôts ayant au moins le grade d'inspecteur habilités par le directeur général des Impôts à effectuer les visites et saisies prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales n'ont pas qualité pour saisir l'autorité judiciaire de la demande d'autorisation exigée par la loi à défaut d'avoir été expressément habilité à cet effet par le directeur général des Impôts ; qu'en l'espèce, il est constant que l'agent des impôts ayant présenté la requête n'était habilité qu'à effectuer les visites et à procéder aux saisies et non à solliciter la mise en oeuvre de telles mesures ; que dès lors, la requête était irrecevable et l'ordonnance autorisant les visites et saisies litigieuses a été rendue en violation de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales et, de ce fait, est atteinte de nullité ; qu'en jugeant néanmoins que l'agent habilité pour procéder aux visites et saisies l'est aussi pour présenter la requête au juge le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a violé les dispositions susvisées ;

Mais attendu que les agents de la Direction générale des impôts ayant au moins le grade d'inspecteur habilités par le directeur général des Impôts à effectuer les visites et saisies prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, ont, comme le directeur des services fiscaux, qualité pour saisir l'autorité judiciaire de la demande d'autorisation exigée par la loi ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que les autres branches du moyen ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme F..., la société Meetazur Limited, M. I..., agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de seul héritier de Mme Kathleen X..., et la société Riviera Villas Limited aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à verser à la Direction générale des finances publiques la somme globale de 2 500 euros et rejette leur demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Tiffreau et Corlay, avocat de Mme F..., de la société Meetazur Limited, de M. I... agissant tant en son nom personnel qu'ès qualités et de la société Riviera Villas Limited.

Il est reproché à l'ordonnance attaquée d'avoir débouté les exposants de leurs demandes tendant à l'annulation des ordonnances rendues le 12 décembre 2007.

AUX MOTIFS QUE « Attendu que, eu égard à leur connexité, il convient, dans un souci de bonne administration de la justice de joindre les procédures suivies sous les numéros 09/ 01503 et 09/ 01856 ; … Attendu que, invoquant une violation de l'obligation de loyauté, des règles du procès équitable et du principe d'égalité des armes, Mme F... et MEETAZUR demandent in limine litis que soient écartés des débats les procès verbaux rédigés à l'issue des opérations autorisées ; Attendu qu'il convient de relever en premier lieu que les appelants se contentent d'affirmer que les nombreux principes qu'ils invoquent auraient été violés par la communication critiquée mais sans prendre la peine de préciser ni, a fortiori, de démontrer la nature des violations ; Qu'au surplus c'est à bon droit que l'intimé rappelle que ces pièces font partie intégrante du dossier JLD tel qu'il a été transmis au premier président à la suite du recours exercé conformément aux dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales qui imposent que les procès-verbaux et l'inventaire soient adressés au juge qui a autorisé les opérations ;

Sur la régularité formelle de l'ordonnance, Attendu que Mme F... et MEETAZUR soutiennent en premier lieu que l'agent qui a présenté la requête n'avait pas la qualité pour le faire ; Attendu qu'il suffira à cet égard de relever que les appelants eux-mêmes admettent que la jurisprudence constante considère que l'agent habilité pour procéder aux visites et saisies l'est aussi pour présenter la requête au juge, étant observé qu'aucune disposition légale n'est contraire à cette interprétation ; Attendu sur le fond que les appelants reprochent aux décisions susvisées d'avoir été prérédigées par l'administration, étant rédigées simultanément et en termes identiques par les deux magistrats signataires ; Mais attendu que ce seul fait ne permet pas de présumer que les juges ont rendu leur décision sans examiner les pièces produites par l'administration et sans adopter les motifs qui étaient soumis à leur appréciation ; Attendu que Mme F... et MEETAZUR dénoncent ensuite le défaut de mention du droit et des modalités d'accès au juge et de faire appel à un conseil de leur choix en invoquant la jurisprudence de la Cour européenne ; Mais attendu que c'est à bon droit que l'administration rappelle que la Cour européenne a seulement considéré, au visa de l'article 6 § 1 que la faculté de saisir la Cour de cassation ne permettait pas un examen des éléments de fait, sans autre exigence nouvelle et sans que soit remise en cause la validité des visites domiciliaires dès lors que l'intéressé pouvait bénéficier d'un contrôle juridictionnel effectif ; Attendu que les appelants soutiennent encore que les autorisations délivrées sont mal fondées en l'absence de présomption de fraude et d'un quelconque lien d'indivisibilité entre les diverses personnes physiques ou morales visées par les ordonnances ; Attendu que c'est pour des motifs pertinents qu'il convient d'adopter que les premiers juges, après avoir analysé les pièces qui leur étaient soumises (en pages 13 à 26), ont retenu que les présomptions de fraude alléguées étaient caractérisées et notamment que plusieurs éléments (adresse des dirigeants et du personnel, site internet, utilisation de lignes téléphoniques en France …) laissaient présumer que ces personnes physiques et morales exerçaient en France une activité professionnelle de location immobilière sans la déclarer ; Attendu d'autre part que, s'agissant du lien d'indivisibilité, les décisions critiquées ont retenu à bon droit que la présentation des sites internet mentionnant les prénoms de Karen, Katie et Meta agrémentés d'une photographie les présentant ensemble, leurs relations téléphoniques nombreuses mises en évidence par l'examen de leurs factures et un portefeuille de biens proposés en partie commun permettaient bien de présumer l'existence de relations d'affaires entre elles ; Attendu qu'est encore reproché au JLD de Grasse de ne pas avoir contrôlé la proportionnalité de la mesure autorisée par lui ; Attendu qu'il y a lieu de rappeler à cet égard que la mise en oeuvre de la procédure prévue par l'article L. 16 B est seulement subordonnée à l'existence de présomptions de fraude, lesquelles sont caractérisées en l'espèce pour les motifs exposés plus haut ; que la proportionnalité entre le recours à cette procédure et l'atteinte aux droits fondamentaux des intéressés dont ceux-ci réclament le contrôle suppose que soit établie l'ampleur de la fraude alléguée, laquelle ne peut résulter que de preuves et non de simples présomptions, sauf à ce que l'activité non déclarée ne soit pas susceptible, à raison de sa nature même ou des éléments déjà réunis par l'administration d'atteindre une ampleur pouvant justifier les autorisations sollicitées ; Que tel n'est pas le cas en l'espèce au vu du nombre des appels téléphoniques relevés et du portefeuille des biens immobiliers de luxe soumis à location ; Attendu de même que, au regard de la nature des présomptions de fraude consistant en une activité professionnelle non déclarée s'exerçant au domicile des responsables des sociétés visées, l'autorisation des visites domiciliaires sollicitées apparaît parfaitement fondée à l'aune des dispositions de l'article L. 16 B ; Attendu qu'enfin c'est à tort que la société MEETAZUR allègue que l'administration a manqué à son devoir de loyauté en n'ayant pas exercé son droit à l'assistance administrative internationale prévue par la convention fiscale franco-britannique, en présentant une pièce dénuée de force probante ; Qu'en effet, le seul fait de ne pas avoir usé d'un droit ou de produire une pièce sans valeur probante selon les appelants ne saurait à l'évidence constituer un manquement au devoir de loyauté, ne serait-ce que dans la mesure ou il apparaît plutôt être favorable à la partie adverse, laquelle est donc infondée à invoquer ce moyen ».

ALORS QUE 1°) aux termes de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'Homme « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes » ; que l'espérance légitime d'une créance constitue, au sens des dispositions précitées, un bien auquel il ne peut être porté atteinte par une loi rétroactive qu'en raison d'un impérieux motif d'intérêt général ; qu'à lui seul, un motif d'ordre financier n'est pas un impérieux motif d'intérêt général ; que les dispositions transitoires de l'article 164 de la Loi de Modernisation de l'Economie (ci-après LME) portent atteinte à l'espérance légitime des contribuables d'obtenir, dans le cadre d'instances pendantes, la décharge totale des impositions supplémentaires mises à leur charge en raison de l'irrégularité de la procédure de visites domiciliaires dont elles procédaient, au regard de la Convention européenne des droits de l'homme, dès lors que ces dispositions tendent à régulariser rétroactivement les procédures fondées sur l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales dans son ancienne version jugée illicite par la Cour européenne des droits de l'Homme ; que, par ailleurs, il ressort des travaux parlementaires que les dispositions transitoires de l'article 164 de la LME visent à préserver le seul intérêt financier de l'Etat en diminuant le nombre de procédures fiscales annulées par les juridictions administratives ; que, par conséquent, lesdites dispositions violent l'article 1er précité du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'Homme.

ALORS QUE 2°) le recours de plein contentieux institué par l'article 164 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 sur l'autorisation de visites domiciliaires a pour finalité de pallier l'inégalité résultant du caractère non contradictoire de la procédure de première instance autorisant les visites domiciliaires, les personnes visées par les perquisitions n'ayant pas pu se faire entendre à ce stade de la procédure ; qu'il en résulte que l'administration fiscale ne peut, sans manquer à son devoir de loyauté, aux règles du procès équitable et au principe d'égalité des armes, produire, dans le cadre de l'appel de l'ordonnance d'autorisation, les procès verbaux et inventaires de saisies pour justifier du bien fondé de l'autorisation de visites domiciliaires dès lors que ces pièces ne se rapportent pas à la procédure d'autorisation mais à l'exécution ou au déroulement des opérations ; qu'en jugeant le contraire le premier président de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE a violé les dispositions et principes susvisés.

ALORS QUE 3°) aux termes de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales : « I. Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions … elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des impôts, à rechercher la preuve de ces agissements » ; qu'il résulte de ces dispositions ainsi que du principe de sécurité juridique que les agents des impôts ayant au moins le grade d'inspecteur habilités par le directeur général des Impôts à effectuer les visites et saisies prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales n'ont pas qualité pour saisir l'autorité judiciaire de la demande d'autorisation exigée par la loi à défaut d'avoir été expressément habilité à cet effet par le directeur général des Impôts ; qu'en l'espèce, il est constant que l'agent des impôts ayant présenté la requête n'était habilité qu'à effectuer les visites et à procéder aux saisies et non à solliciter la mise en oeuvre de telles mesures ; que dès lors, la requête était irrecevable et l'ordonnance autorisant les visites et saisies litigieuses a été rendue en violation de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales et, de ce fait, est atteinte de nullité ; qu'en jugeant néanmoins que l'agent habilité pour procéder aux visites et saisies l'est aussi pour présenter la requête au juge le premier président de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE a violé les dispositions susvisées.

ALORS QUE 4°) aux termes de l'article L 16 B du livre des procédures fiscales « le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée » ; qu'il résulte de l'article 66 de la constitution et des dispositions des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme que les personnes faisant l'objet d'une procédure de visites et de saisies domiciliaires prévue à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales doivent bénéficier d'un contrôle juridictionnel effectif par un tribunal indépendant et impartial ; que le fait pour un juge des libertés et de la détention de s'être borné, au titre de sa motivation, à reproduire une ordonnance prérédigée par l'administration et accompagnée d'un grand nombre de pièces porte atteinte aux textes et principes susvisés dans la mesure où une telle motivation peut faire peser un doute légitime sur l'impartialité du juge ainsi que sur la réalité, l'effectivité et le caractère concret du contrôle juridictionnel ; que, par suite, en jugeant le contraire le premier président de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE a violé les dispositions susvisées.

ALORS QUE 5°) il est de principe que le respect du droit à un recours effectif consacré par l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme implique que le juge des libertés et de la détention mentionne dans l'ordonnance d'autorisation des visites domiciliaires prévues à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales la possibilité et les modalités de sa saisine en vue de la suspension ou de l'arrêt de la visite ; que, pour rejeter le moyen tiré du défaut de mention dans les ordonnances d'autorisation litigieuses du droit et des modalités d'accès au juge, le premier président se borne à relever que la juridiction européenne ne pose pas une telle exigence ; qu'en statuant ainsi l'ordonnance attaquée a méconnu le principe susvisé.

ALORS QUE 6°) le respect des droits de la défense, droit fondamental à caractère constitutionnel rattaché aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, qui implique le droit de faire appel à un conseil de son choix, y compris pendant la phase d'enquête, s'impose à l'autorité administrative dans le silence de la loi ; Qu'aux termes de l'article 6 § 3 c de la Convention européenne des droits de l'homme « Tout accusé a droit notamment à … avoir l'assistance d'un défenseur de son choix » ; Que les personnes faisant l'objet d'opérations de visites et de saisies à leur domicile en raison de présomptions de fraude fiscale sont des accusées au sens du texte susvisé en sorte que celles-ci doivent être informées du droit de faire appel à un conseil de leur choix dans l'ordonnance autorisant les visites domiciliaires ; Qu'ainsi, en jugeant que les exposants ne seraient pas fondés à se plaindre du défaut de mention dans les ordonnances litigieuses du droit de faire appel à un conseil de leur choix, le premier président de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE a violé les dispositions susvisées.

ALORS QUE 7°) le juge ne peut autoriser par une ordonnance unique des visites domiciliaires dans plusieurs lieux pour rechercher la fraude de plusieurs contribuables qu'à la condition de relever entre les agissements des intéressés un lien d'indivisibilité ou de connexité ; qu'en l'espèce, les exposants faisaient valoir que les indices retenus par les ordonnances, pour établir le lien d'indivisibilité entre personnes visées par les visites domiciliaires étaient dénués de pertinence, dans la mesure où la photographie représentait trois amies en tenue de soirée en train de boire une coupe de champagne, que les appels téléphoniques étaient d'un volume banal et que les biens immobiliers figurant simultanément sur le site internet de la société MEETAZUR LIMITED et sur celui de la société AZUR VILLAS LTD étaient au même moment également présenté sur d'autres sites internet concurrents ; qu'en se bornant à reprendre les motifs des ordonnances autorisant les visites domiciliaires, sans répondre aux moyens présentés en appel par les exposants, le premier président de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE a violé l'article 455 du Code de procédure civile et, par voie de conséquence, privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales.

ALORS QUE 8°) la procédure de visites et de saisies prévue à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales est réservée aux hypothèses de présomptions de fraudes fiscales commises au moyen d'un ou plusieurs des procédés spécifiquement visés par ledit article L. 16 B du Livre des procédures fiscales à savoir, l'achat ou la vente sans facture, les factures fictives, l'omission intentionnelle d'écritures comptables et la passation intentionnelle d'écritures comptables fictives ou inexactes ; qu'en l'espèce, les ordonnances se fondent sur le fait que les exposants exerceraient en France une activité professionnelle de location immobilière sans souscrire les déclarations y afférentes ; que les exposants faisaient valoir qu'en aucune de leurs mentions les ordonnances attaquées ne caractérisaient l'un des procédés visés à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent, le premier président de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE a violé l'article 455 du Code de procédure civile et, par voie de conséquence, privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales.

ALORS QUE 9°) la présomption de fraude figurant à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales doit être claire et indiscutable ; qu'il résulte notamment de ce principe que, lorsque l'administration entend imposer en France les bénéfices d'une société étrangère dont le siège social se trouve dans un pays ayant conclu avec la France une convention fiscale bilatérale, elle doit s'assurer que la convention fiscale conclue entre les deux Etats concernés ne fait pas obstacle à l'imposition envisagée ; qu'en l'espèce, les exposants faisaient valoir que la convention fiscale franco-britannique fait obstacle, en son article 6, à l'imposition en France des bénéfices réalisés par une société anglaise dépourvue d'établissement stable en France et qu'au sens de ladite convention, une installation fixe d'affaires utilisée par l'entreprise aux seules fins de fournitures d'information ne constitue pas un établissement stable ; qu'ils soulignaient que l'ordonnance d'autorisation n'établit, ni même n'indique, en quoi les caractéristiques de l'activité immobilière, présumée exercée en France par la société anglaise MEETAZUR LIMITED, rendrait cette dernière imposable en France ; qu'en omettant de répondre à ce moyen pertinent, le premier président de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

ALORS QUE 10°) il résulte des dispositions de l'article 8 § 2 de la Convention européenne des droits de l'Homme que le juge autorisant la mesure de visites et de saisies domiciliaires prévue à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales doit contrôler la proportionnalité de l'ingérence dans l'exercice du droit au respect du domicile par rapport au but poursuivi ; qu'en l'espèce, ainsi que le faisaient valoir les exposants, le juge des libertés et de la détention s'est néanmoins abstenu de justifier du caractère proportionné, au regard des éléments en sa possession, de la demande de visites et de saisies domiciliaires ; Qu'en jugeant néanmoins que la mise en oeuvre des la procédure prévue à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales serait seulement subordonnée à l'existence d'une présomption de fraude visée à cet article la Cour a violé les dispositions susvisées.

ALORS QUE 11°) il est de principe, non seulement, que les présomptions visées à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales doivent être suffisantes pour que l'atteinte aux droits fondamentaux que constitue une visite domiciliaire soit proportionnée aux craintes objectives de l'administration et à l'ampleur ou à la complexité du processus frauduleux, mais également, que l'administration fiscale ne dispose pas de procédures autres lui permettant de servir le même objectif sans attenter aux droits fondamentaux ; que, par suite, en se bornant à relever que l'activité non déclarée aurait atteint une ampleur pouvant justifier les autorisations sollicitées compte tenu du nombre d'appel relevés et du portefeuille des biens immobiliers de luxe soumis à la location, sans rechercher si la mise en oeuvre des procédures de droit commun aurait permis de mettre en évidence la fraude alléguée le premier président de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE a privé sa décision de base légale au regard des principes et dispositions susvisés.

ALORS QUE 12°) le caractère non contradictoire de la procédure d'autorisation oblige l'administration fiscale à un devoir de loyauté dans la présentation de sa requête, celle-ci devant notamment s'abstenir de fournir au juge des éléments d'information inexacts ou tendancieux ; que l'administration fiscale manque à son devoir de loyauté en affirmant qu'une société étrangère n'aurait pas déclaré son chiffre d'affaires dans son pays sans justifier de la mise en oeuvre de la procédure d'assistance administrative internationale, en se fondant sur une réponse à une demande de communication dépourvue de signature et ne comportant pas le nom de son auteur, pour affirmer qu'une société étrangère recevrait du courrier en France, ou encore, en présentant une requête commune à plusieurs contribuables sans démontrer de lien d'indivisibilité ou de connexité entre les agissements qui leurs sont prêtés, suggérant ainsi l'existence d'un processus de fraude complexe et organisé ; qu'ainsi, en considérant que de telles circonstances « ne saur aient à l'évidence constituer un manquement au devoir de loyauté, ne serait-ce que dans la mesure ou il apparaît plutôt être favorable à la partie adverse » le premier président de la Cour d'appel d'AIX EN PROVENCE a méconnu le devoir de loyauté incombant à l'administration fiscale et violé l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-12152
Date de la décision : 07/12/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Redressement et vérifications (règles communes) - Visites domiciliaires (article L. 16 B) - Autorisation judiciaire - Conditions - Demande de l'administration - Qualité pour saisir l'autorité judiciaire - Définition

Les agents de la direction générale des impôts ayant au moins le grade d'inspecteur habilités par le directeur général des Impôts à effectuer les visites et saisies prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, ont, comme le directeur des services fiscaux, qualité pour saisir l'autorité judiciaire de la demande d'autorisation exigée par la loi


Références :

article L. 16 B du livre des procédures fiscales

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 déc. 2010, pourvoi n°10-12152, Bull. civ. 2010, IV, n° 191
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 191

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : Mme Bonhomme
Rapporteur ?: M. Delbano
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Tiffreau et Corlay

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:10.12152
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