LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. X... a saisi un juge de l'exécution d'une action tendant à obtenir la mainlevée d'une saisie de véhicule et d'une saisie-attribution pratiquées à son encontre à la requête de Mme Y..., son ex-épouse, par le ministère de M. Z..., huissier de justice, et la condamnation de ce dernier et de Mme Y... à lui rembourser les sommes saisies et trop perçues ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident, tel que reproduit en annexe :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une certaine somme à titre de dommages-intérêts ;
Mais attendu que par des motifs non critiqués par le moyen, l'arrêt retient que Mme Y... poursuit son ex-mari à tort depuis plus de quatre ans, la condamne à lui rembourser une somme importante au titre d'un trop perçu et ordonne la mainlevée des mesures d'exécution forcée qu'elle a fait pratiquer à son encontre, faisant ainsi ressortir le comportement fautif et dommageable de Mme Y... ; que par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen du pourvoi incident, tel que reproduit en annexe :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une certaine somme en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'application de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la partie condamnée aux dépens, fût-elle bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, relève du pouvoir discrétionnaire du juge ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 213-6, alinéa 4, du code de l'organisation judiciaire ;
Attendu que le juge de l'exécution connaît des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageables des mesures d'exécution forcée ou des mesures conservatoires ;
Attendu que pour déclarer le juge de l'exécution incompétent pour statuer sur l'action de M. X... contre M. Z..., l'arrêt retient, par motifs adoptés, que le juge de l'exécution n'est pas compétent pour statuer sur les contestations relatives au recouvrement de la pension alimentaire, cette notion s'appliquant à la somme due par M. X... à partir de l'ordonnance de non-conciliation ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que M. X... recherchait la responsabilité civile professionnelle de M. Z... à raison des mesures d'exécution forcée pratiquées par cet huissier de justice, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen unique du pourvoi principal :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare le juge de l'exécution incompétent pour statuer sur l'action de M. X... contre M. Z..., l'arrêt rendu le 29 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne Mme Y... et M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, déboute la SCP Le Bret-Desaché de sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit, au pourvoi principal, par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour M. X...
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'incompétence du juge de l'exécution pour statuer sur l'action en responsabilité dirigée contre Maître Z... ;
Aux motifs propres que, « au vu des conclusions du rapport d'expertise, Monsieur X... sollicite la condamnation in solidum de Madame Y... et de Maître Z... à lui verser la somme de 31.633,17 € avec intérêts de droit à compter du jugement du 29 juin 2004, outre celle de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; que c'est cependant à bon droit que le juge de l'exécution s'est déclaré incompétent pour statuer sur l'action en responsabilité dirigée contre Maître Z... » ;
Et aux motifs éventuellement adoptés que « il convient de rappeler que le juge de l'exécution n'est pas compétent pour statuer sur les contestations relatives au recouvrement de la pension alimentaire, cette notion s'appliquant à la somme due par Roland X... à partir de l'ordonnance de non-conciliation (…) ; que Maître Z..., qui n'a aucun moyen de vérifier les sommes versées par Monsieur Roland X... dans le cadre du paiement direct, ne saurait opérer une compensation ; qu'à ce sujet, il ne peut être fait le reproche à Maître Z... de ne pas avoir tenu compte des indications du jugement rendu le 29 juin 2004 par le juge de l'exécution dans la mesure où, encore une fois, cet huissier poursuivant ne devait s'attacher, en fonction des montants et dates mentionnés, qu'au calcul des sommes à recouvrer au titre de la prestation compensatoire et des dommages et intérêts » ;
1/ Alors que, d'une part, tout jugement doit être motivé ; qu'en se contentant, pour dire le juge de l'exécution incompétent pour statuer sur l'action en responsabilité dirigée contre Maître Z..., de confirmer le jugement du 10 octobre 2006 en indiquant que le juge de l'exécution s'était « à bon droit » déclaré incompétent, quand ce jugement ne comporte aucun motif relatif à l'incompétence du juge de l'exécution, mais seulement des appréciations sur le bien-fondé de la demande formée par Monsieur X..., la cour d'appel n'a pas motivé sa décision d'incompétence et a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
2/ Alors que, d'autre part, en vertu de l'article L.213-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît des demandes en réparation fondées sur l'exécution dommageable des mesures d'exécution forcée et se trouve ainsi compétent pour connaître de l'action en responsabilité exercée par le débiteur saisi à l'encontre de l'huissier de justice sur le fondement du droit commun ; qu'en déclarant néanmoins incompétent le juge de l'exécution pour statuer sur les demandes formées par Monsieur X... à l'encontre de Maître Z..., à l'occasion du recouvrement de la créance alléguée par Madame Y..., la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Moyens produits, au pourvoi incident, par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils pour Mme Y... ;
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Madame Y..., bénéficiaire d'une aide juridictionnelle partielle devant la cour d'appel, à payer à Monsieur X... une somme de 2000 € à titre de dommages-intérêts
- AU MOTIF QUE Monsieur X... ayant été poursuivi à tort depuis plus de 4 ans par son ex-épouse, il y a lieu de condamner cette dernière à lui payer la somme de 2.000 € à titre de dommages-intérêts.
- ALORS QUE D'UNE PART le juge est tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'en condamnant Madame Y... à des dommages-intérêts d'un montant de 2000 € sans préciser le fondement juridique de sa décision, la Cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle au regard de l'article 12 du Code de procédure civile
- ALORS QUE D'AUTRE PART et subsidiairement le droit d'agir ou de se défendre en justice ne peut dégénérer en abus et donner lieu à l'octroi de dommages-intérêts au profit de la personne qui supporte cet abus qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur équipollente au dol ; qu'en statuant comme elle l'a fait et en condamnant Madame Y..., qui avait obtenu gain de cause en première instance, au paiement de dommages-intérêts par des motifs impropres à caractériser l'existence d'un abus commis par Madame Y... dans l'exercice d'une action en justice, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.
- ALORS QUE D'AUTRE PART il ressort de l'arrêt lui-même que Madame Danièle Y..., défenderesse, avait obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à 70 % ; qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 700 du Code de procédure civile et de l'article 6-1 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales que lorsque dans un tel contexte - l'obtention du bénéfice de l'aide juridictionnelle - une juridiction entend cependant condamner le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle au paiement d'une somme au titre des frais irrépétibles, ce qui implique que l'on tienne compte de la situation économique de chacune des parties, l'équité du procès postule une motivation spéciale pour que puisse être justifiée une condamnation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'en l'absence d'une telle motivation, l'arrêt n'est pas justifié au regard de l'article précité, ensemble de l'article 6-1 également précité.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Madame Y..., bénéficiaire d'une aide juridictionnelle partielle devant la cour d'appel, à payer à Monsieur X... une somme de 2.000 € à titre de dommages-intérêts
- ALORS QUE il ressort de l'arrêt lui-même que Madame Danièle Y..., défenderesse, avait obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à 70 % ; qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 700 du Code de procédure civile et de l'article 6-1 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales que lorsque dans un tel contexte - l'obtention du bénéfice de l'aide juridictionnelle - une juridiction entend cependant condamner le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle au paiement d'une somme au titre des frais irrépétibles, ce qui implique que l'on tienne compte de la situation économique de chacune des parties, l'équité du procès postule une motivation spéciale pour que puisse être justifiée une condamnation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'en l'absence d'une telle motivation, l'arrêt n'est pas justifié au regard de l'article précité, ensemble de l'article 6-1 également précité.