LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt attaqué, statuant en matière d'assistance éducative, d'avoir, à la requête de la caisse d'allocations familiales de Béarn et Soule, ordonné une mesure d'aide à la gestion du budget familial et désigné en qualité de délégué aux prestations familiales versées pour leurs deux enfants, l'UDAF de Pau jusqu'au 5 mai 2008 puis à compter de cette date l'Association départementale de gestion des services d'intérêts familiaux, alors, selon le moyen, que l'entrée en vigueur de la loi dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures ; qu'en désignant, le 30 avril 2008, un délégué aux prestations familiales versées aux époux X... sur le fondement des dispositions de l'article 375-9 -1 du code civil tandis que ces dispositions ne pouvaient pas recevoir application avant le 1er janvier 2009, date à laquelle est entré en vigueur le décret d'application auquel elles renvoient, la cour d'appel a violé l'article 1er du code civil ;
Mais attendu qu'il résulte de la combinaison des articles 20 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007, 31-III et 45-1 de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 que la nouvelle mesure d'aide à la gestion du budget familial instituée par l'article 375-9-1 du code civil est immédiatement applicable mais demeure régie, jusqu'au 1er janvier 2009, par les règles fixées par les articles L. 167-4 , L. 167.5 et R. 167-1 à R. 167-31 du code de la sécurité sociale ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article 375-9-1 du code civil ;
Attendu que la mesure judiciaire d'aide à la gestion du budget familial ne peut être ordonnée qu'à la double condition que les prestations familiales ne soient pas employées pour les besoins liés au logement, à l'entretien, à la santé et à l'éducation des enfants et que l'accompagnement en économie sociale et familiale prévu à l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles n'apparaisse pas suffisant ;
Attendu que pour désigner un délégué aux prestations familiales, l'arrêt retient que les conditions dans lesquelles sont élevés les enfants, qui vivent au sein d'une communauté, ne leur permettent pas de s'épanouir, qu'ils ne reçoivent pas une nourriture variée nécessaire à leur bon développement et que ces manquements démontrent que les prestations familiales perçues par les époux X... ne sont pas utilisées pour la santé et l'éducation de leurs enfants ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans constater que la mesure d'accompagnement en économie sociale et familiale prévue à l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles n'apparaissait pas suffisante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la caisse d'allocations familiales de Béarn et Soule aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour les époux X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir fait droit à la demande de la Caisse d'allocations familiales de Béarn et Soule tendant à la désignation d'un délégué aux prestations familiales versées aux époux X... pour leurs enfants ;
AUX MOTIFS QU' aux termes des dispositions de l'article 375-9-1 du code civil, lorsque les prestations familiales ne sont pas employées pour les besoins liés au logement, à l'entretien, à la santé et à l'éducation des enfants et que l'accompagnement en économie sociale et familiale prévu à l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles n'apparaît pas suffisant, le juge des enfants peut ordonner qu'elles soient en tout ou en partie versées à une personne physique ou morale qualifiée dite délégué aux prestations familiales ; qu'il convient donc de rechercher si les sommes versées aux époux X... sont employées aux besoins essentiels des enfants ; que les témoignages produits au dossier établissent que les conditions dans lesquelles sont élevés les enfants, au sein de la communauté à laquelle appartiennent les époux X..., ne permettent pas à leur personnalité de se développer et de s'épanouir ; qu'il ressort également de ces attestations que les enfants ne reçoivent pas une nourriture variée nécessaire à leur bon développement ; qu'en conséquence il y a lieu de considérer que les prestations familiales perçues par les époux X... ne sont pas utilisées pour les besoins liés à la santé et à l'éducation de Kâmara et Talitha ; que dès lors, réformant la décision entreprise, il y a lieu de désigner un délégué aux prestations familiales en la personne des services de l'UDAF de Pau ;
1°) ALORS QUE l'entrée en vigueur de la loi dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures ; qu'en désignant, le 30 avril 2008, un délégué aux prestations familiales versées aux époux X... sur le fondement des dispositions de l'article 375-9-1 du code civil, tandis que ces dispositions ne pouvaient pas recevoir application avant le 1er janvier 2009, date à laquelle est entré en vigueur le décret d'application auquel elles renvoient, la cour d'appel a violé l'article 1er du code civil ;
2°) ALORS QUE, subsidiairement , en vertu de l'article 375-9-1 du code civil, un délégué aux prestations familiales ne peut être désigné qu'à la double condition que les prestations ne soient pas employées pour les besoins liés au logement, à l'entretien, à la santé et à l'éducation des enfants et que l'accompagnement en économie sociale et familiale prévu à l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles n'apparaisse pas suffisant ; qu'en retenant, pour considérer que les prestations familiales versées aux époux X... n'étaient pas utilisées pour les besoins liés à la santé et à l'éducation de leurs enfants, que les conditions dans lesquelles sont élevés les enfants de la communauté à laquelle appartiennent les époux X... ne permettaient pas à leur personnalité de se développer et de s'épanouir et que les enfants ne recevaient pas une nourriture variée nécessaire à leur bon développement, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser l'utilisation des prestations familiales à des fins étrangères au logement, à l'entretien, à la santé et à l'éducation des enfants et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 375-9-1 du code civil ;
3°) ALORS QUE, subsidiairement , en vertu de l'article 375-9-1 du code civil, un délégué aux prestations familiales ne peut être désigné qu'à la double condition que les prestations ne soient pas employées pour les besoins liés au logement, à l'entretien, à la santé et à l'éducation des enfants et que l'accompagnement en économie sociale et familiale prévu à l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles n'apparaisse pas suffisant ; qu'en se bornant à considérer, pour faire droit à la demande de la Caisse d'allocations familiales de Béarn et Soule, que les prestations familiales perçues par les époux X... n'étaient pas utilisées pour les besoins liés à la santé et à l'éducation de leurs enfants, sans rechercher si l'accompagnement en économie sociale et familiale prévu à l'article L. 222-3 du code de l'action sociale et des familles apparaissait insuffisant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 375-9-1 du code civil.