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14/10/2010 | FRANCE | N°09-14938;09-66944

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 octobre 2010, 09-14938 et suivant


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° Y 09-14. 938 et n° B 09-66. 944 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 16 mars 2009), que Bernard X... a vendu un ensemble immobilier à la société Equinox Paris LLC (la société), en se réservant un droit d'usage et d'habitation sur certains bâtiments ; que les parties étant contraires sur l'étendue de ce droit, la société a assigné Bernard X... afin de voir circonscrire son droit d'usage et d'habitation et obtenir des dommages-intérêts ; qu'un arrêt du 11 mars 2004 a

, notamment, fixé le droit de Bernard X..., lui a enjoint, sous peine d'ast...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° Y 09-14. 938 et n° B 09-66. 944 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 16 mars 2009), que Bernard X... a vendu un ensemble immobilier à la société Equinox Paris LLC (la société), en se réservant un droit d'usage et d'habitation sur certains bâtiments ; que les parties étant contraires sur l'étendue de ce droit, la société a assigné Bernard X... afin de voir circonscrire son droit d'usage et d'habitation et obtenir des dommages-intérêts ; qu'un arrêt du 11 mars 2004 a, notamment, fixé le droit de Bernard X..., lui a enjoint, sous peine d'astreinte, de libérer une pièce du bâtiment C, l'a condamné à payer à la société certaines sommes à titre de dommages-intérêts et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à payer les dépens de première instance et d'appel et, avant dire droit sur la demande de déchéance du droit d'usage et d'habitation afférent au bâtiment B, a invité les parties à s'expliquer sur l'éventuelle irrecevabilité de cette demande ; que la Cour de cassation (3e Civ., 12 avril 2005, pourvoi n° 04-15. 366), a cassé cet arrêt, mais seulement en ce qu'il avait condamné Bernard X... à verser à la société des dommages-intérêts et une indemnité de procédure et à payer les dépens ; que Bernard X... étant décédé après avoir saisi la cour d'appel de renvoi, l'instance a été reprise par sa veuve ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° Y 09-14. 938 :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1° / qu'il résulte de ses propres constatations que l'arrêt cassé partiellement rendu le 11 mars 2004 par la cour d'appel de Paris est définitif, en ce qu'il a « fait défense à Bernard X... de pénétrer dans le hall, l'escalier principal et l'escalier de service situé à l'ouest du bâtiment A et ce, sous astreinte de 3 000 euros par infraction constatée à dater de la signification de l'arrêt » et « dit que le droit d'usage et d'habitation sur le bâtiment C (logement de l'employé de Bernard X...) ne porte pas sur la première pièce du rez-de-chaussée dénommée dégagement dans le plan annexé à l'acte de vente du 25 septembre 2000 et ne présentant pas un hachurage inversé et renforcé » et « ordonne en conséquence que Bernard X... libère cette pièce et en laisse le libre accès au sous-sol de ce bâtiment et ce, sous astreinte de 3 000 euros par jour de retard ou par infraction constatée à dater de la signification de l'arrêt », soit autant d'interdictions, dont l'irrespect par Bernard X... a causé le préjudice dont la réparation a été demandée par la société ; qu'en déclarant que « la société ne démontre pas avoir été troublée dans son usage personnel des locaux par la jouissance commune dont croyait pouvoir bénéficier Bernard X... sur les mêmes éléments immobiliers », la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences de ses propres constatations et violé l'article 1382 du code civil ;
2° / qu'en déclarant successivement que « Bernard X... a utilisé de façon indue l'escalier d'honneur et le hall de l'immeuble ainsi que le dégagement du bâtiment C », puis qu'« il n'est pas démontré qu'il a empêché la société de jouir personnellement des mêmes locaux et l'utilisation, par hypothèse limitée, qu'il a pu en faire n'a pas causé de préjudice de jouissance à la société », la cour d'appel a entaché son arrêt d'une contradiction de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3° / qu'en déclarant que l'utilisation indue des locaux précités « n'a pas causé de préjudice de jouissance à la société, qui ne démontre pas, de son côté, résider sur place de façon habituelle », la cour d'appel a déduit un motif inopérant, privant son arrêt de motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4° / qu'en déclarant que l'utilisation indue des locaux précités « n'a pas causé de préjudice de jouissance à la société », qui « a succombé en première instance sur sa demande de déchéance du droit d'usage et d'habitation de Bernard X... sur le bâtiment B qui constituait sa prétention essentielle », alors que, d'une part, le motif est inopérant au regard du litige et, d'autre part, le jugement a fait l'objet d'un appel suspensif qui n'a pas encore été tranché, la cour d'appel a déduit un motif inopérant privant son arrêt de motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, de contradiction et de défaut de motifs, le moyen ne tend qu'à remettre en cause devant la Cour de cassation les appréciations souveraines des juges du fond ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi n° B 09-66. 944 :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande tendant à l'anéantissement ou, subsidiairement, à la réduction de l'astreinte prononcée par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 11 mars 2004, alors, selon le moyen, que la juridiction de renvoi, substituée à la juridiction ayant rendu l'arrêt cassé et investie des mêmes pouvoirs que cette dernière, peut connaître de toutes les demandes nouvelles dont elle aurait pu être saisie ; qu'en se déclarant incompétente pour modifier l'astreinte prononcée par l'arrêt du 11 mars 2004, quand, désignée comme juridiction de renvoi, elle était substituée à la cour d'appel de Paris et disposait des mêmes pouvoirs que cette dernière, la cour d'appel a violé les articles 631 à 638 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant exactement énoncé que l'astreinte n'était que l'accessoire de la condamnation principale, dont elle suivait le sort, et relevé que l'arrêt de cassation partielle n'affectait pas l'injonction faite à Bernard X..., sous peine d'astreinte, par l'arrêt du 11 mars 2004, la cour d'appel en a déduit à bon droit qu'en application des articles 623 et 625 du code de procédure civile, la demande de suppression ou de modification de l'astreinte n'entrait pas dans ses pouvoirs ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi n° Y 09-14. 938 par la SCP Tiffreau et Corlay, avocat aux conseils pour la société Equinox Paris LLC
Par ce moyen, la Société EQUINOX PARIS L. L. C. reproche à la Cour d'appel de l'AVOIR déboutée de sa demande en paiement de dommages-intérêts,
AUX MOTIFS QUE « si la société EQUINOX triomphe en la majeure partie de ses prétentions devant la Cour d'appel de PARIS, il convient de relever que la contestation des époux X... sur plusieurs points du litige était sérieuse et qu'elle a donné » lieu à un âpre débat conclu par des décisions divergentes des juges du fond appelées à statuer sur l'interprétation d'un acte de vente délicat à exécuter ; qu'au surplus, la société EQUINOX a succombé en sa demande qui consistait à voir juger Bernard X... déchu de son droit d'usage et d'habitation sur le bâtiment B ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de manquements répétés à l'obligation de courtoisie et de loyauté dans l'exécution des obligations résultant d'un tel acte n'est pas fondé et ne saurait générer des dommages-intérêts ; que la société EQUINOX ne démontre pas avoir été troublée dans son usage personnel des locaux par la jouissance commune dont croyait pouvoir bénéficier Bernard X... sur les mêmes éléments immobiliers ; qu'en effet, si Bernard X... a utilisé de façon indue l'escalier d'honneur et le hall de l'immeuble ainsi que le dégagement du bâtiment C, il n'est pas démontré qu'il a empêché la société EQUINOX de jouir personnellement des mêmes locaux et l'utilisation, par hypothèse limitée, qu'il a pu en faire n'a pas causé de préjudice de jouissance à la société EQUINOX, qui ne démontre pas, de son côté, résider sur place de façon habituelle ; que la demande de dommages-intérêts de la société EQUINOX sera donc rejetée et ce, d'autant plus que la société EQUINOX a succombé en première instance sur sa demande de déchéance du droit d'usage et d'habitation de Bernard X... sur le bâtiment B qui constituait sa prétention essentielle (…) »,
ALORS QUE 1°), il résulte de ses propres constatations (arrêt attaqué, p. 3) que l'arrêt cassé partiellement rendu le 11 mars 2004 par la Cour d'appel de PARIS est définitif, en ce qu'il a « fait défense à Monsieur X... de pénétrer dans le hall, l'escalier principal et l'escalier de service situé à l'ouest du bâtiment A et ce, sous astreinte de 3. 000 euros par infraction constatée à dater de la signification de l'arrêt » et « dit que le droit d'usage et d'habitation sur le bâtiment C (logement de l'employé de Monsieur X... ne porte pas sur la première pièce du rez-de-chaussée dénommée dégagement dans le plan annexé à l'acte de vente du 25 septembre 2000 et ne présentant pas un hachurage inversé et renforcé » et « ordonne en conséquence que Bernard X... libère cette pièce et en laisse le libre accès au sous-sol de ce bâtiment et ce, sous astreinte de 3. 000 € par jour de retard ou par infraction constatée à dater de la signification de l'arrêt », soit autant d'interdictions, dont l'irrespect par M. X... a causé le préjudice dont la réparation a été demandée par la Société EQUINOX PARIS L. L. C. ; qu'en déclarant que « la société EQUINOX ne démontre pas avoir été troublée dans son usage personnel des locaux par la jouissance commune dont croyait pouvoir bénéficier Bernard X... sur les mêmes éléments immobiliers », la Cour d'appel n'a pas déduit les conséquences de ses propres constatations et violé l'article 1382 du Code civil.
ALORS QUE 2°), au surplus, en déclarant successivement que « Bernard X... a utilisé de façon indue l'escalier d'honneur et le hall de l'immeuble ainsi que le dégagement du bâtiment C », puis qu'« il n'est pas démontré qu'il a empêché la société EQUINOX de jouir personnellement des mêmes locaux et l'utilisation, par hypothèse limitée, qu'il a pu en faire n'a pas causé de préjudice de jouissance à la société EQUINOX », la Cour d'appel a entaché son arrêt d'une contradiction de motifs et violé l'article 455 du Code de procédure civile.
ALORS QUE 3°), en déclarant que l'utilisation indue des locaux précités « n'a pas causé de préjudice de jouissance à la société EQUINOX, qui ne démontre pas, de son côté, résider sur place de façon habituelle », la Cour d'appel a déduit un motif inopérant privant son arrêt de motif en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.
ALORS QUE 4°), en déclarant que l'utilisation indue des locaux précités « n'a pas causé de préjudice de jouissance à la société EQUINOX », qui « a succombé en première instance sur sa demande de déchéance du droit d'usage et d'habitation de Bernard X... sur le bâtiment B qui constituait sa prétention essentielle », alors que, d'une part, le motif est inopérant au regarc du litige et, d'autre part, le jugement a fait l'objet d'un appel suspensif qui n'a pas encore été tranché, la Cour d'appel a déduit un motif inopérant privant son arrêt de motif en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.
Moyen produit au pourvoi n° B 09-66. 944 par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux conseils pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande de Madame X... tendant à voir anéantir ou, subsidiairement, réduire l'astreinte prononcée par l'arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 11 mars 2004 ;
AUX MOTIFS QUE pour estimer la Cour de renvoi compétente pour supprimer l'astreinte ordonnée par la Cour d'appel de PARIS afin de faciliter l'exécution des dispositions de l'arrêt enjoignant à Monsieur X... de libérer l'accès au dégagement du bâtiment C, Madame X... se fonde sur l'absence d'autorité de chose jugée qui, selon une jurisprudence séculaire, s'attache au prononcé de l'astreinte, et sur les dispositions de la loi du 9 juillet 1991 ; que s'il est exact que la disposition de l'arrêt qui prononce l'astreinte n'a pas autorité de chose jugée, cet élément n'a pas pour effet de conférer pour autant à la Cour de renvoi la compétence requise pour mettre à néant cette disposition au mépris des règles de procédure régissant la matière telles qu'elles résultent des article 623 à 639 du Code de procédure civile ; que l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991 est inapplicable à l'espèce puisque ce n'est pas la liquidation de l'astreinte qui est demandée à la Cour de renvoi, mais la mise à néant de son prononcé ou, subsidiairement, la réduction de son montant ; que l'astreinte n'est que l'accessoire de la condamnation principale dont elle suit le sort en principe ; que la cassation prononcée par l'arrêt du 13 mai 2005, n'affecte pas l'interdiction faite par la Cour d'appel de PARIS à Monsieur X... d'occuper le dégagement du bâtiment C et l'injonction qui lui est impartie d'en libérer l'accès ; que dès lors, la cassation partielle n'atteint pas le prononcé de l'astreinte qui est l'accessoire de cette condamnation principale et la Cour de renvoi n'est pas compétente, en application des dispositions des articles 623 et 625 du Code de procédure civile, pour connaître de la demande de modification de cette mesure ; qu'en outre, postérieurement à la saisine de la Cour de renvoi, la société EQUINOX a saisi le juge de l'exécution d'une demande de liquidation de l'astreinte, que le litige a été porté devant la Cour d'appel de PARIS, puis devant la Cour de cassation et que jamais, au cour de cette procédure, Monsieur X..., puis sa veuve, n'ont soulevé la litispendance ou la connexité au motif que la Cour de renvoi serait toujours saisie sur le principe même de l'astreinte ; que dans ces conditions, la demande de Madame X... tendant à voir anéantir ou réduire l'astreinte sera déclarée irrecevable ;
ALORS QUE la juridiction de renvoi, substituée à la juridiction ayant rendu l'arrêt cassé et investie des mêmes pouvoirs que cette dernière, peut connaître de toutes les demandes nouvelles dont elle aurait pu être saisie ; qu'en se déclarant incompétente pour modifier l'astreinte prononcée par l'arrêt du 11 mars 2004, quand, désignée comme juridiction de renvoi, elle était substituée à la Cour d'appel de PARIS et disposait des mêmes pouvoirs que cette dernière, la Cour d'appel a violé les articles 631 à 638 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-14938;09-66944
Date de la décision : 14/10/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ASTREINTE (loi du 9 juillet 1991) - Condamnation - Caractère de l'astreinte - Mesure accessoire - Portée

L'astreinte n'est que l'accessoire de la condamnation qu'elle assortit. Il en résulte que n'est pas recevable devant la cour d'appel de renvoi la demande de suppression ou de modification d'une astreinte assortissant une injonction faite à un débiteur par un arrêt qui a fait l'objet d'une cassation partielle n'affectant pas cette injonction


Références :

articles 623 et 625 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 16 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 14 oct. 2010, pourvoi n°09-14938;09-66944, Bull. civ. 2010, II, n° 169
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, II, n° 169

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : M. Marotte
Rapporteur ?: M. Moussa
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Tiffreau et Corlay

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.14938
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