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12/10/2010 | FRANCE | N°09-70337

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 octobre 2010, 09-70337


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier, le deuxième et le troisième moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 11 septembre 2008), qu'informée par les termes d'un jugement rendu le 10 novembre 2003 par le tribunal de grande instance de Nanterre, de ce que Jacques X..., décédé le 5 décembre 2003, avait fait bénéficier son neveu, M. Bernard X..., de trois dons manuels, l'administration fiscale a notifié un redressement à ce dernier le 21 juin 2005 puis a mis en recouvrement les droits de mutation et pénalit

és correspondants ; qu'après le rejet de sa réclamation, M. Bernard X......

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier, le deuxième et le troisième moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 11 septembre 2008), qu'informée par les termes d'un jugement rendu le 10 novembre 2003 par le tribunal de grande instance de Nanterre, de ce que Jacques X..., décédé le 5 décembre 2003, avait fait bénéficier son neveu, M. Bernard X..., de trois dons manuels, l'administration fiscale a notifié un redressement à ce dernier le 21 juin 2005 puis a mis en recouvrement les droits de mutation et pénalités correspondants ; qu'après le rejet de sa réclamation, M. Bernard X... a saisi le tribunal de grande instance afin d'obtenir l'annulation de l'avis de mise en recouvrement et le dégrèvement de l'imposition mise à sa charge ;
Attendu que M. Bernard X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que dans l'imposition de la révélation d'un don manuel, l'imposition ne frappe pas la mutation à titre gratuit elle-même mais l'acte que constitue le jugement et que l'existence du don, lorsqu'elle est contestée par les parties concernées, doit résulter non pas des motifs mais du dispositif, de telle sorte qu'en se fondant sur les seuls motifs du jugement du 10 novembre 2003, l'arrêt attaqué est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article 757 du code général des impôts ;
2°/ que le jugement du 10 novembre 2003 ne comportait pas de faisceau de présomptions de fait graves, précises et concordantes établissant de façon non équivoque la réunion de tous les éléments d'une donation, contrairement aux exigences des droits d'acte ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué manque de base légale au regard des dispositions de l'article 757 du code général des impôts ;
3°/ que le jugement du 10 novembre 2003 ne comporte pas, sur ce point également, de faisceau de présomptions de fait graves, précises et concordantes établissant de façon non équivoque tous les éléments d'une donation, contrairement aux exigences des droits d'acte ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué manque de base légale au regard des dispositions de l'article 757 du code général des impôts ;
Mais attendu qu'il suffit que la reconnaissance judiciaire prévue par l'article 757 du code général des impôts figure ou dans les motifs ou dans le dispositif du jugement, qu'elle soit exempte de toute équivoque et qu'il y ait constatation certaine de la transmission de la propriété à titre de libéralité ; qu'en l'espèce, l'arrêt constate qu'en écartant l'existence d'un prêt de la somme de 121 372,67 euros, le jugement du 10 novembre 2003 avait nécessairement considéré que les fonds avaient été remis à titre gratuit avec une intention libérale ; qu'il relève que, pour écarter l'existence d'un prêt de cette somme et démontrer l'existence de l'intention libérale de Jacques X... envers son neveu, le tribunal s'était référé à deux reconnaissances de dette, de ce dernier, du 5 janvier 1995, portant sur les sommes de 381 122 et 426 857 euros, et à une attestation du 7 janvier suivant par laquelle Jacques X... mentionnait que, s'il décédait avant l'expiration des prêts de ces deux dernières sommes, fixée à 15 ans, ceux-ci seraient transformés en donation ; que reprenant l'analyse de ces documents par le jugement du 10 novembre 2003, l'arrêt retient que, loin d'émettre une simple hypothèse sur la nature de la remise des fonds ayant fait l'objet des reconnaissances de dette du 5 janvier 1995, le tribunal avait considéré que les pièces du dossier démontraient l'intention libérale de Jacques X... ; qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a décidé à bon droit que les motifs du jugement du 10 novembre 2003 constituaient une reconnaissance judiciaire de trois dons manuels au bénéfice de M. Bernard X... ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Bernard X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par Me Odent, avocat aux Conseils, pour M. Bernard X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il avait déclaré fondée la décision de rejet implicite portant sur la somme de 121.372,67 € et d'avoir déclaré fondée la décision de rejet implicite portant sur les sommes de 381.122,54 € et 426.857,24 € ;
AUX MOTIFS QU'il est établi que les motifs du jugement du 10 novembre 2003 constituent une reconnaissance judiciaire des trois dons manuels au bénéfice de Bernard X...

ALORS QUE, dans l'imposition de la révélation d'un don manuel, l'imposition ne frappe pas la mutation à titre gratuit elle-même mais l'acte que constitue le jugement et que l'existence du don, lorsqu'elle est contestée par les parties concernées, doit résulter non pas des motifs mais du dispositif, de telle sorte qu'en se fondant sur les seuls motifs du jugement du 10 novembre 2003, l'arrêt attaqué est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article 757 du CGI.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en ce qu'il a déclaré fondée la décision de rejet implicite portant sur la somme de 800.000 F (121.372,67 €) ;
AUX MOTIFS QUE, pour écarter l'existence d'un prêt et démontrer l'intention libérale de Jacques X... envers son neveu, Bernard X... se réfère au courrier du 5 septembre 1995 de ce dernier à son oncle lui demandant le financement des travaux à hauteur de 800.000 F environ, moyennant signature d'une reconnaissance de dette, à l'absence de demande de remboursement de 1998 à 2002, mais également aux pièces produites par Jacques X..., à savoir la reconnaissance de dette du 5 janvier 1995 portant sur la somme de 2.800.000 F et l'attestation de celui-ci du 7 janvier 1995 mentionnant qu'en cas de décès avant l'expiration des prêts fixée à 15 ans, ceux-ci seront transformés en donation et qu'il analyse ainsi ces documents : « Ces pièces faisant état de prêts dont le remboursement est laissé à la discrétion de l'emprunteur et qui sont transformés en donation au décès du prêteur tendent plutôt à démontrer l'intention libérale de ce dernier pour le financement des travaux litigieux dont le montant est bien inférieur aux financements précédemment octroyés » ; que, loin d'émettre une simple hypothèse sur la nature de la remise des fonds ayant fait l'objet des deux reconnaissances de dette du 5 septembre 1995, le tribunal a considéré que les pièces du dossier démontraient l'intention libérale de Jacques X... l'adverbe « plutôt » marquant le choix du tribunal pour une appréciation plus juste et plus précise de la volonté du demandeur à l'instance ; qu'en utilisant l'expression « tendent plutôt à démontrer l'intention libérale », le tribunal a clairement reconnu que les remises de fonds du 5 septembre, qui n'ont jamais fait l'objet d'une quelconque demande de remboursement, devaient être considérées comme des dons manuels et en a déduit une présomption d'intention libérale lors du financement des travaux et qu'il est ainsi établi que les motifs du jugement du 10 novembre 2003 constituent une reconnaissance judiciaire des trois dons manuels au bénéfice de Bernard X... ;
ALORS QUE le jugement du 10 novembre 2003 ne comportait pas de faisceau de présomptions de fait graves, précises et concordantes établissant de façon non équivoque la réunion de tous les éléments d'une donation, contrairement aux exigences des droits d'acte ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué manque de base légale au regard des dispositions de l'article 757 du CGI.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré fondée la décision de rejet implicite portant sur les sommes de 381.122,54 € et 426.857,24 € ;
AUX MOTIFS QU'en analysant la reconnaissance de dette du 5 janvier 1995 portant sur la somme de 2.800.000 F et l'attestation du 7 janvier 1995, le tribunal, dans son jugement du 10 novembre 2003, a retenu que « ces pièces faisant état de prêts dont le remboursement est laissé à la discrétion de l'emprunteur et qui sont transformés en donation au décès du prêteur tendent plutôt à démontrer l'intention libérale de ce dernier pour le financement des travaux litigieux dont le montant est bien inférieur aux financements précédemment octroyés » et que, loin d'émettre une simple hypothèse sur la nature de la remise des fonds ayant fait l'objet des deux reconnaissances de dette du 5 septembre 1995, le tribunal a considéré que les pièces du dossier démontraient l'intention libérale de Jacques X... l'adverbe « plutôt » marquant le choix du tribunal pour une appréciation plus juste et plus précise de la volonté du demandeur à l'instance ; qu'en utilisant l'expression « tendent plutôt à démontrer l'intention libérale », le tribunal a clairement reconnu que les remises de fonds du 5 septembre, qui n'ont jamais fait l'objet d'une quelconque demande de remboursement, devaient être considérées comme des dons manuels et en a déduit une présomption d'intention libérale lors du financement des travaux ;
ALORS QUE le jugement du 10 novembre 2003 ne comporte pas, sur ce point également, de faisceau de présomptions de fait graves, précises et concordantes établissant de façon non équivoque tous les éléments d'une donation, contrairement aux exigences des droits d'acte ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué manque de base légale au regard des dispositions de l'article 757 du CGI.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-70337
Date de la décision : 12/10/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Enregistrement - Droits de mutation - Mutation à titre gratuit - Donations - Don manuel - Fait générateur - Reconnaissance judiciaire - Motifs d'un jugement

La reconnaissance judiciaire d'un don manuel, sujet au droit de mutation en application de l'article 757 du code général des impôts, peut résulter des motifs d'un jugement


Références :

article 757 du code général des impôts

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 11 septembre 2008

A rapprocher :Civ., 8 août 1882, Bull. 1882, n° 173 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 oct. 2010, pourvoi n°09-70337, Bull. civ. 2010, IV, n° 153
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 153

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Le Mesle (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Bregeon
Avocat(s) : Me Odent, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.70337
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