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05/10/2010 | FRANCE | N°09-13092

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 octobre 2010, 09-13092


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 novembre 2008), que la société Blue Shadow Cruising Ltd (société Blue Shadow) a vendu à la société Blue Medshadow Ltd (société Blue Medshadow) le yacht Blue Shadow C, battant pavillon britannique, en lui consentant, pour le règlement du prix, un prêt garanti par un mort-gage portant sur le navire ; qu'un solde restant dû sur son montant, la société Blue Shadow a été autorisée à faire procéder, dans le port de Canne

s, à la saisie conservatoire du yacht ; que cette décision a été rétractée aux mo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 novembre 2008), que la société Blue Shadow Cruising Ltd (société Blue Shadow) a vendu à la société Blue Medshadow Ltd (société Blue Medshadow) le yacht Blue Shadow C, battant pavillon britannique, en lui consentant, pour le règlement du prix, un prêt garanti par un mort-gage portant sur le navire ; qu'un solde restant dû sur son montant, la société Blue Shadow a été autorisée à faire procéder, dans le port de Cannes, à la saisie conservatoire du yacht ; que cette décision a été rétractée aux motifs qu'un juge libanais, à la requête d'un tiers, se prétendant créancier de la société mère du vendeur, avait autorisé la saisie-arrêt entre les mains de la société Blue Medshadow de toutes sommes dues par elle au titre de la vente du navire et du prêt subséquent ;

Attendu que la société Blue Medshadow fait grief à l'arrêt d'avoir infirmé cette décision, alors, selon le moyen :

1°/ que la décision judiciaire étrangère produit effet en France en tant que fait juridique ; qu'en déclarant que le jugement étranger de saisie-arrêt ne valait pas paiement et laissait subsister la créance non contestée de la société Blue Shadow, cependant que la saisie-arrêt décidée à l'étranger rendait la créance indisponible, ce dont il résultait que la saisie conservatoire du navire en France ne répondait à aucun intérêt né et actuel du saisissant, la cour d'appel a violé les principes juridiques régissant les effets en France des décisions étrangères et les articles 509 et 31 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en déclarant tout à la fois que la saisie-arrêt était sans incidence sur le droit au paiement de la créance de la société Blue Shadow et que cette procédure mettait en péril le recouvrement de la créance, la cour d'appel, qui s'est prononcée par motifs contradictoires, a violé les articles 2 et 3 de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952, 67 et suivants de la loi du 9 juillet 1991 ;

Mais attendu que ni l'indisponibilité de la créance cause de la saisie, ni l'absence de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement ne font obstacle à la saisie conservatoire d'un navire ; qu'ayant retenu que la société Blue Shadow alléguait une créance maritime qui, au sens de l'article 1er (1) q) de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952 portant unification de certaines règles sur la saisie conservatoire des navires, avait pour cause un mort-gage, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Blue Medshacow Limited aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Blue Shadow Cruising Limited la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour la société Blue Medshadow Limited

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé l'ordonnance du 5 juin 2008 rendue par le Président du Tribunal de Commerce de CANNES et dit que la saisie conservatoire du navire BLUE SHADOW C par la société BLUE SHADOW CRUISING LTD, autorisée par ordonnance du 15 mai 2008, continuerait à produire tous ses effets ;

AUX MOTIFS QUE « selon actes du 17 mars 2004 le navire BLUE SHADOW C, enregistré au Port de Southampton (GB) a fait l'objet d'une vente au prix de 4.000.000 de dollars US et d'un contrat de crédit-vendeur entre les sociétés BLUE SHADOW CRUISING LIMITED et BLUE MEDSHADOW LIMITED ; qu'au titre du contrat de crédit la société BLUE SHADOW CRUISING LIMITED accordait à la société BLUE MEDSHADOW un échelonnement du paiement du solde du prix du navire de 3.500.000 dollars US : 6 échéances de 250.000 dollars US du 1er mars 2005 au 1er octobre 2007 puis 4 échéances de 500.000 dollars US du 1er mars 2008 au 1er décembre 2008 ; qu'en garantie du prix de vente BLUE SHADOW CRUISING bénéficie aux termes du contrat d'une hypothèque de premier rang sur le navire, et cette dernière justifie de l'enregistrement de cette hypothèque maritime (mortgage) en date du 17 mars 2004 ; qu'il est également prévu que toute notification résultant du contrat devra être effectuée respectivement à JET AVIATION MANAGEMENT AG (Suisse) et Y. DOGMOCH CRUISE MED HOLDING SAL. ; Que la société BLUE MEDSHADOW LIMITED qui avait respecté le paiement des six premières échéances n'a pas réglé celle du 1er mars 2OO8 d'un montant de 500.000 dollars US soit 2.000.000 d'euros ; que la déchéance du prêt ayant été prononcée depuis, la dette s'élève à une somme de plus de 1.300.000 euros ; que cette créance de la société BLUE SHADOW CRUISING LIMITED est bien relative au solde du prix du navire ;
qu'il est établi et il n'est pas contesté que la société BLUE SHADOW CRUISING LIMITED est créancière de la société BLUE MEDSHADOW LIMITED de cette somme ; que le contrat conclu entre BLUE SHADOW CRUISING LIMITED et BLUE MEDSHADOW LIMITED soumis à la loi de Gibraltar par les parties, prévoit expressément que le créancier hypothécaire (BLUE SHADOW) pourra entamer une procédure à l'encontre du propriétaire (BLUE MEDSHADOW) dans toute autre juridiction qu'il estime appropriée ;
que la société BLUE SHADOW CRUISING est titulaire au sens de l'article 1 q) de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952 applicable en France, Gibraltar et Grande-Bretagne, états signataires, d'une créance maritime ; qu'aux termes des articles 1 et 2 de cette convention, un navire battant pavillon d'un des états contractants peut être saisi en vertu d'une créance maritime ; que par ordonnance du 17 mai 2008 le Président du Tribunal Exécutoire de BEYROUTH a autorisé la société DOGMOCHFINANCEDAL (holding) à procéder à la saisie-arrêt entre les mains de la société BLUE MEDSHADOW LIMITED, JET AVIATION LEBANON SAL et JET AVIATION ME SAL HOLDING de tous les montants dus ou à devoir en vertu du contrat d'achat de son yacht par la Société JET AVIATION MANAGEMENT AG qui détient 100 % du capital de la société BLUE SHADOW CRUISING LMT à hauteur de la somme de 2.000.000 dollars US ; que si cette décision constitue un fait juridique produisant des effets en France nonobstant toute exequatur, c'est-àdire établit l'existence d'une saisie sur le prix de vente entre les mains notamment de la présente débitrice, cette saisie ne vaut pas paiement et laisse subsister la créance non contestée, et ce, d'autant, que la saisie a été initiée par un tiers pour avoir garantie d'une créance à l'égard de la société JET AVIATION, personne morale distincte de la présente débitrice et que les liens existant entre ces différentes sociétés à personnalités distinctes et patrimoines distincts sont sans incidence sur le droit au paiement de sa créance de la société BLUE SHADOW CRUISING ; que cette procédure met en péril le recouvrement de sa créance par BLUE SHADOW CRUISING qui justifie avoir été contrainte de saisir le juge de Gibraltar en paiement » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la décision judiciaire étrangère produit effet en France en tant que fait juridique ; qu'en déclarant que le jugement étranger de saisie-arrêt ne valait pas paiement et laissait subsister la créance non contestée de la société BLUE SHADOW CRUISING cependant que la saisie-arrêt décidée à l'étranger rendait la créance indisponible ce dont il résultait que la saisie conservatoire du navire en France ne répondait à aucun intérêt né et actuel du saisissant, la cour d'appel a violé les principes juridiques régissant les effets en France des décisions étrangères et les articles 509 et 31 du Code de Procédure Civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU' en déclarant tout à la fois que la saisiearrêt était sans incidence sur le droit au paiement de la créance de la société BLUE SHADOW CRUISING LTD et que cette procédure mettait en péril le recouvrement de la créance, la cour d'appel, qui s'est prononcée par motifs contradictoires, a violé les articles 2 et 3 de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952, 67 et suivants de la loi du 9 juillet 1991.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-13092
Date de la décision : 05/10/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

DROIT MARITIME - Navire - Saisie - Saisie conservatoire - Convention de Bruxelles du 10 mai 1952 - Conditions - Créance maritime - Créance disponible ou menacée dans son recouvrement - Nécessité (non)

Ni l'indisponibilité de la créance cause de la saisie, ni l'absence de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement ne font obstacle à la saisie conservatoire d'un navire. Dès lors, justifie légalement sa décision d'autoriser la saisie conservatoire d'un navire, la cour d'appel qui retient que le saisissant alléguait une créance maritime qui, au sens de l'article 1er § 1 q de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952 portant unification de certaines règles sur la saisie conservatoire des navires, avait pour cause un mort-gage


Références :

articles 1er et 2 de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952 pour l'unification de certaines règles sur la saisie conservatoire des navires de mer

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 oct. 2010, pourvoi n°09-13092, Bull. civ. 2010, IV, n° 148
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 148

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Mollard
Rapporteur ?: M. Rémery
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.13092
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