LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 4 juin 2008) que, par acte du 13 juillet 1994, la société May Top Iso Bretagne (société May Top) a pris à bail un local à usage commercial appartenant en indivision à Mme Marie-Louise X... veuve Y..., Mme Patricia Y... et Mme Marie-France Y... (les consorts Y...) ; qu'un jugement du 12 mars 2003, confirmé par un arrêt du 16 juin 2004, a prononcé la résiliation de ce bail aux torts de la société May Top pour avoir réalisé sans autorisation des travaux dans les locaux loués ; que la société May Top ayant quitté les lieux à la suite de ces décisions, les consorts Y... l'ont assignée pour obtenir paiement d'un arriéré de loyer et d'une certaine somme au titre de la remise en état des locaux ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que la société May Top ayant fait valoir dans ses conclusions que les consorts Y... ne versaient aux débats que des pièces tronquées et que le devis de remise en état de l'entreprise Menez-Riou était incomplet, la cour d'appel a, sans violer le principe de la contradiction, souverainement apprécié les éléments de preuve qui lui avaient été soumis par les parties ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1239 du code civil ;
Attendu que, pour débouter les consorts Y... de leur demande en paiement de l'arriéré de loyers, l'arrêt retient que la société May Top affirme qu'elle a payé les loyers au notaire en charge de la succession de M. Vincent Y..., que cette société s'est adressée à ce notaire pour se plaindre de problèmes liés à des infiltrations d'eau, que ce dernier a transmis ces réclamations aux consorts Y..., que ces derniers ne démontrent nullement que le mandat du notaire était limité aux travaux et ne s'étendait pas à la perception des loyers, que le paiement fait entre les mains du notaire est libératoire ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le notaire avait reçu pouvoir de recevoir les loyers pour le compte des bailleurs, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté les consorts Y... de leur demande en paiement de loyers, l'arrêt rendu le 4 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande formée par la SCP Ortscheidt ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils pour M. Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme Marie-Louise X..., veuve Y..., bailleresse, de sa demande en paiement de 32. 000 €, au titre des loyers échus et impayés, formée contre la SARL May Top Iso Bretagne ;
AUX MOTIFS QUE la société May Top Iso Bretagne affirme qu'elle a versé les loyers au notaire Maître Z... en charge de la succession de Monsieur Vincent Y... ; que la société preneuse s'est adressée à ce notaire pour se plaindre des problèmes liées à des infiltrations dans les lieux loués et que le notaire a transmis ces réclamations à Mesdames Marie-Louise, Marie-France, Patricia Y... et à Madame Nicole A... ; que Madame Marie-Louise X... veuve Y..., Madame Marie-France Y... et Madame Patricia Y... ne démontrent nullement que le mandat du notaire était limité aux travaux et ne s'étendait pas à la perception des loyers ; que le paiement fait entre les mains du notaire est libératoire ;
1°) ALORS QUE le paiement doit être fait au créancier, ou à quelqu'un ayant pouvoir de lui, ou qui soit autorisé par justice ou par la loi à recevoir pour lui ; que le paiement fait à celui qui n'aurait pas pouvoir de recevoir pour le créancier, est valable, si celui-ci le ratifie, ou s'il en a profité ; qu'en se bornant à affirmer que Me Z..., notaire en charge de la succession de Vincent Y... avait reçu mandat de percevoir les loyers pour le compte des consorts Y..., sans préciser la source de ce mandat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1239 du code civil ;
2°) ALORS QUE le paiement doit être fait au créancier, ou à quelqu'un ayant pouvoir de lui, ou qui soit autorisé par justice ou par la loi à recevoir pour lui ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme l'y invitaient pourtant les conclusions d'appel des bailleresses, la teneur du mandat autorisant Me Z..., notaire, à percevoir les loyers pour le compte des consorts Y... (concl. d'appel, p. 3, § 9), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1239 du code civil ;
3°) ALORS QUE celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et que, réciproquement celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en déboutant Mme Y..., bailleresse, de sa demande en paiement de loyers prétendument réglés entre les mains de Me Z..., notaire en charge de la succession de Vincent Y..., à défaut pour les consorts Y... de démontrer que le mandat du notaire était limité aux travaux et ne s'étendait pas à la perception des loyers, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir limité la condamnation de la SARL May Top Iso Bretagne, locataire, à la somme de 6. 455, 58 € au titre de la remise en état des lieux loués ;
AUX MOTIFS QU'il résulte du rapport d'expertise ordonné dans la précédente instance que la société MAY TOP ISO BRETAGNE a fait les travaux suivants : à l'extérieur un fronton a été réalisé avec un ravalement intégral ; les menuiseries extérieures ont toutes été réalisées en PVC vitrage isolant et porte neuve ; trois pièces ont été aménagées avec sol en carrelage blanc cloisons en placopan, sous plafond en dalles isolantes phoniques ; l'ensemble de l'installation électrique a été fait ainsi que les peintures complètes des locaux. ; une isolation thermique a également été faite sur les parties des 3 pièces créées ; sur la partie stockage un demi-étage partiel a été construit et la porte de garage pour y accéder a été réalisée en aluminium ; que Madame Marie-Louise X... veuve Y..., Madame Marie-France Y... et Madame Patricia Y... n'ont produit aucune pièce à hauteur d'appel ; que la société locataire a versé aux débats la copie de la pièce 7 de l'adversaire, communiquée en première instance, soit le devis incomplet de l'entreprise MENEZ-RIOU en date du 13 octobre 2003 intitulé : " Démolitions " qui décrit des travaux correspondant à la destruction de ceux effectués par la société MAY ISO BRETAGNE dans les lieux loués ; que le total des travaux mentionnés du 1. 01 au 1. 11 sur cette première page, seule produite aux débats, s'élève à la somme de 6. 455, 58 € qui seront alloués aux bailleresses au titre de la remise en état des locaux ;
1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut statuer sur une demande en considérant que les pièces qui la fondent ne figurent pas à son dossier, sans avoir invité les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces pièces, qui figuraient pourtant sur le bordereau de pièces annexé aux dernières conclusions du demandeur dont la communication n'avait pas été contestée ; qu'en limitant la demande des bailleresses au titre de la remise en état des lieux à 6. 455, 88 €, motif pris qu'elles n'avaient produit aucune pièce à hauteur d'appel, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence du devis évaluant les travaux à 12. 688, 21 € visé au bordereau de pièces annexé aux seules conclusions d'appel des bailleresses (concl. d'app., p. 6, pièce n° 8), la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans constater que la communication effective aux débats du « devis de remise en état » (concl. d'app., p. 6, pièce n° 8) avait été contestée par la SARL May Top Iso Bretagne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale l'article 16 du code de procédure civile.