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07/09/2010 | FRANCE | N°09-87625

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 septembre 2010, 09-87625


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Didier,- Y... Éliane, épouse X..., parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de MONTPELLIER, en date du 18 juin 2009, qui, dans l'information suivie, sur leur plainte, contre personne non dénommée des chefs d'homicide involontaire et de mise en danger d'autrui, après avoir prononcé sur la demande d'annulation de la procédure, a évoqué et constaté la prescription ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassa

tion, pris de la violation des articles 222-19, 222-19-1 et 223-1 du code pé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Didier,- Y... Éliane, épouse X..., parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de MONTPELLIER, en date du 18 juin 2009, qui, dans l'information suivie, sur leur plainte, contre personne non dénommée des chefs d'homicide involontaire et de mise en danger d'autrui, après avoir prononcé sur la demande d'annulation de la procédure, a évoqué et constaté la prescription ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 222-19, 222-19-1 et 223-1 du code pénal, 6, 7, 8 et 802 du code de procédure pénale, 697, 697-1 et suivants du même code, 206, 591 et 593 dudit code, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que après avoir prononcé l'annulation de la procédure à compter de l'ordonnance de consignation, l'arrêt attaqué a ordonné le retrait des pièces du dossier puis, après avoir évoqué, a constaté la prescription des faits dénoncés par la partie civile et a dit n'y avoir lieu à informer ;
"aux motifs qu'il résultait tant de la plainte avec constitution de partie civile et de l'audition de la partie civile que de l'information qu'il était recherché l'existence d'un délit d'homicide involontaire et d'un délit de mise en danger délibérée de la personne d'autrui qui aurait notamment pu être reproché au chauffeur du camion, à la hiérarchie de l'UIISC n° 7 de Brignoles dont dépendait Emmanuel X... ou même à d'autres personnels appartenant à d'autres administrations comme le Conformis, l'Esol ou la Drire ; que, selon la réponse donnée dans le cadre du supplément d'information, les UIISC étaient des unités de l'armée de terre, mises pour emploi à la disposition du ministère de l'intérieur et que les personnels de ces unités étaient des militaires relevant de l'ancien article 61 du code de justice militaire ; que les faits dénoncés avaient eu lieu en service ou à l'occasion d'un service et relevaient, selon les dispositions de l'article 697-1 du code de procédure pénale, des juridictions prévues à l'article 697 du même code et devaient être poursuivis selon les dispositions des articles 698 et suivants dudit code, et cela même si des personnels non militaires pouvaient également être impliqués ; qu'il était donc constant que c'était le tribunal de grande instance de Montpellier qui était désigné comme juridiction compétente pour ce type de fait ; que les règles de compétence dérogatoires comme touchant à l'organisation des juridictions étaient d'ordre public et leur violation entraînait nécessairement la nullité des pièces de procédure dressées en infraction à ces règles si bien qu'il y avait lieu de constater la nullité de l'ensemble de la procédure à compter de l'ordonnance de consignation ; que, à la suite de cette annulation, il convenait d'évoquer et de constater la prescription des faits dénoncés par les parties civiles et de dire n'y avoir lieu à informer ;
"1) alors que, en cas d'infractions de droit commun commises dans l'exécution du service par les militaires de carrière, les juridictions spécialement désignées doivent uniquement être saisies lorsque la plainte avec constitution de partie civile vise nommément des militaires ou lorsque les faits ne peuvent être commis que par des militaires ; qu'en l'espèce la plainte avec constitution de partie civile du 24 janvier 2004 visait des faits d'homicide involontaire et de mise en danger délibérée d'autrui, contre personne non dénommée, et se bornait à dénoncer la défectuosité du système de freinage du camion dans lequel la victime avait pris place, si bien que la compétence spécifique était exclue, les faits n'étant pas nécessairement commis par des militaires au cours de leur mission ; que c'était uniquement lorsque la chambre de l'instruction, saisie de l'ordonnance de non-lieu, avait prescrit par arrêt du 4 octobre 2007 un supplément d'information avec demande de placement de l'adjudant Z... sous le statut de témoin assisté que s'imposait la nécessité de recourir à la procédure spéciale dans la mesure où l'intéressé était mis en cause en sa qualité de militaire pour une infraction de droit commun commise dans l'exercice de sa mission ; que la chambre de l'instruction ne pouvait donc prononcer l'annulation de la procédure à compter de la consignation des parties civiles effectuée en 2004, quand la compétence de la juridiction spécialisée s'imposait uniquement à la date de l'arrêt du 4 octobre 2007 ;
"2) alors que, en matière de délit, la prescription de l'action publique est triennale ; que si les pièces de procédure concomitantes et postérieures à l'arrêt du 4 octobre 2007 ayant ordonné un supplément d'information avec le placement sous le statut de témoin assisté de l'adjudant Z... devaient nécessairement être annulées, comme contraires aux dispositions ayant institué une compétence spécifique, et ne pouvaient interrompre la prescription de l'action publique, en revanche l'appel des parties civiles du 10 mai 2007, dirigé contre l'ordonnance de non-lieu, constituait le dernier acte de procédure ayant régulièrement interrompu la prescription de l'action publique ; que, dès lors, dans le cadre de son évocation, la chambre de l'instruction ne pouvait, le 18 juin 2009, déclarer l'action publique éteinte dans la mesure où, à cette date, le délai triennal de prescription n'était pas encore acquis" ;
Vu les articles 697, 697-1 et 698 du code de procédure pénale ;
Attendu que l'incompétence du juge d'instruction pour informer contre les personnes entrant dans les prévisions des articles ci-dessus visés n'existe légalement qu'à partir du moment où la qualité de ces personnes ou de l'une d'elles résulte des éléments du dossier soumis à ce magistrat et parvient ainsi avec certitude à sa connaissance ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 25 août 2001, Emmanuel X..., sapeur-pompier passager d'un véhicule de service revenant d'intervention, a trouvé la mort au lieu-dit "Col de Landure" (Aude) dans un accident de circulation ; que le 2 février 2004, Didier et Eliane X..., ses parents, ont porté plainte et se sont constitués partie civile devant le doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Narbonne du chef d'homicide involontaire et de mise en danger d'autrui contre personne non dénommée ; que, sur appel de l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction, la chambre de l'instruction a ordonné un supplément d'information tendant notamment au placement de l'adjudant Didier Z... sous le statut de témoin assisté ; qu'à l'issue d'un second supplément d'information établissant que l'unité d'instruction et d'intervention à laquelle appartenait la victime était une unité militaire, le ministère public a soulevé une exception d'incompétence au profit de la juridiction militaire et demandé l'annulation de la procédure ;
Attendu que, pour annuler l'ordonnance de consignation et la procédure subséquente, constater la prescription des faits et dire n'y avoir lieu à informer, l'arrêt retient que les faits visés par la plainte ont eu lieu en service ou à l'occasion d'un service et relevaient, selon les dispositions de l'article 697-1 du code de procédure pénale, de la juridiction spécialisée en matière militaire, en l'occurrence le tribunal de grande instance de Montpellier, et devaient être instruits selon les règles visées aux articles 698 et suivants ; que les juges ajoutent que ces règles de compétence dérogatoires, parce qu'elles touchent à l'organisation des juridictions sont d'ordre public et que leur violation entraîne la nullité des actes de la procédure en infraction de ces règles, le fait que la chambre de l'instruction soit en toutes hypothèses compétente restant sans influence sur la nullité originelle de la procédure ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que l'ouverture de l'information a été faite contre personne non dénommée et que la mise en cause d'un militaire n'est apparue qu'au moment du placement de l'adjudant Didier Z... sous le statut de témoin assisté par le juge d'instruction désigné dans le cadre du supplément d'information ordonné par la chambre de l'instruction, l'arrêt attaqué a méconnu les articles visés au moyen ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier en date du 18 juin 2009, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Harel-Dutirou conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Villar ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-87625
Date de la décision : 07/09/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

JUSTICE MILITAIRE - Crimes et délits de droit commun commis dans l'exécution du service - Procédure - Désignation de la juridiction chargée de l'instruction ou du jugement - Connaissance de la qualité de la personne mise en cause - Actes antérieurs - Validité

L'incompétence du juge d'instruction pour informer contre les personnes entrant dans les prévisions des articles 697 et suivants du code de procédure pénale n'existe légalement qu'à partir du moment où la qualité de ces personnes ou de l'une d'elles résulte des éléments du dossier soumis à ce magistrat et parvient avec certitude à sa connaissance. Encourt la cassation l'arrêt de la chambre de l'instruction qui annule l'ensemble de la procédure en retenant une exception d'incompétence au profit de la juridiction militaire alors que l'ouverture de l'information a été faite contre personne non dénommée et que la mise en cause d'un militaire n'est apparue qu'au moment du placement d'un adjudant sous le statut de témoin assisté par le juge d'instruction désigné dans le cadre d'un supplément d'information ordonné par la chambre de l'instruction


Références :

articles 697, 697-1 et 698 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, 18 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 sep. 2010, pourvoi n°09-87625, Bull. crim. criminel 2010, n° 131
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2010, n° 131

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Davenas
Rapporteur ?: Mme Harel-Dutirou
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.87625
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