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07/09/2010 | FRANCE | N°09-16359

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 septembre 2010, 09-16359


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte aux sociétés Allianz Global Corporate et Specialty France, Helvetia assurances et Electricfil Automotive du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Galax et ANL ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par les sociétés Allianz Global Corporate et Specialty France, Helvetia assurances et Electricfil Automotive que sur le pourvoi provoqué éventuel relevé par la société Schenker ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Electricfil Automotive

(la société Electricfil) a vendu à la société coréenne Teasung, sous l'incote...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte aux sociétés Allianz Global Corporate et Specialty France, Helvetia assurances et Electricfil Automotive du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Galax et ANL ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par les sociétés Allianz Global Corporate et Specialty France, Helvetia assurances et Electricfil Automotive que sur le pourvoi provoqué éventuel relevé par la société Schenker ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Electricfil Automotive (la société Electricfil) a vendu à la société coréenne Teasung, sous l'incoterm FOB, des câbles électriques, dont elle a confié le déplacement "depuis usine à FOB" à la société Schenker, qui s'est substituée la société Transteam pour l'acheminement routier du conteneur renfermant la marchandise jusqu'au port de Fos où elle devait être chargée sur le navire "Monte Cervantes" ; que la société Transteam a remis le conteneur à l'acconier du transporteur maritime ANL, la société Eurofos, qui lui en a donné décharge sans réserve ; qu'ultérieurement, un préposé de cette dernière a endommagé la marchandise ; que la société Electricfil et les compagnies Allianz et Helvetia ont assigné la société Schenker en indemnisation puis ont demandé la condamnation solidaire avec celle-ci de la société Eurofos ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les articles L. 132-4 du code de commerce, 1134 et 1147 du code civil ;
Attendu que pour rejeter les demandes des compagnies Allianz et Helvetia et de la société Electricfil dirigées contre la société Schenker, l'arrêt retient que cette dernière est intervenue en qualité de commissionnaire de transport terrestre, que la présomption de responsabilité pesant sur elle a cessé au moment de la prise en charge de la marchandise par l'acconier Eurofos, substitué du transporteur maritime ANL, et que la garantie du commissionnaire de transport terrestre se termine avec la livraison, c'est à dire la remise physique de la marchandise au destinataire ou à son représentant qui l'accepte ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors la société Electricfil avait confié à son commissionnaire de transport, la société Schenker, l'organisation du transport de la marchandise jusqu'à sa "mise à FOB", ce qui impliquait que cette dernière en était responsable à l'égard de son commettant jusqu'à son chargement à bord du navire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le second moyen du pourvoi principal :
Vu l'article 50 de la loi du 18 juin 1966 ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes dirigées par les compagnies Allianz et Helvetia et la société Electricfil contre la société Eurofos, l'arrêt retient que celle-ci est intervenue comme substituée du transporteur maritime ANL, que la manipulation dommageable est survenue à l'expiration des opérations de transport terrestre et que la loi maritime nationale du 18 juin 1966 dispose que, quel que soit son fondement, une action ne peut être exercée contre l'acconier que dans le délai annal ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la manoeuvre au cours de laquelle la société Eurofos avait endommagé la marchandise était une opération qui réalisait sa mise à bord ou une opération de reprise sous hangar ou sur terre-plein qui en était le préalable nécessaire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen unique du pourvoi provoqué éventuel :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que le chef de l'arrêt attaqué par le premier moyen se rattache par un lien de dépendance nécessaire au chef qui met hors de cause les sociétés ANL et Galax et rejette les demandes dirigées contre ces sociétés ; que la cassation du premier de ces chefs entraîne par voie de conséquence l'annulation du second ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a joint les procédures et déclaré recevables les actions des sociétés Allianz et Helvetia et de la société Electricfil contre la société Schenker, l'arrêt rendu le 18 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne les sociétés Eurofos et Schenker aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour les sociétés Allianz Global Corporate et Specialty France, Helvetia assurances et Electricfil Automotive, demanderesses au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté les compagnies Allianz et Helvetia et la société Electricfil de leurs demandes dirigées contre la société Schenker afin que celle-ci soit condamnée à les indemniser du préjudice résultant de la perte des tourets de câbles électriques qui lui avaient été confiés ;
AUX MOTIFS QU' il résulte des pièces versées aux débats que la société Electricfil, vendeur FOB, a confié à la société Schenker, dans le cadre de relations qui perduraient depuis plusieurs années, l'organisation du transport jusqu'à leur mise à FOB des 30 tourets de câbles électriques qu'elle avait vendus le 28 septembre 2004 à la société coréenne Taesung ; que l'acquéreur, tenu d'organiser le transport maritime de la marchandise, a le 4 octobre 2004, et par l'intermédiaire de la société Galax, réservé le fret à destination du port de Pusan sur le navire Monte Cervantes armé par la compagnie ANL qui était au départ de Fos-sur-Mer le 6 octobre 2004 en lui demandant de mettre un conteneur à la disposition de la société Schenker « tractionnaire » ; que le transporteur maritime ANL a expressément indiqué dans ses dernières écritures que la société Eurofos est l'acconier au port de Fos-sur-Mer de l'armement ANL en charge des opérations de réception des marchandises et de leur embarquement sur le navire concerné ; que la société Schenker a ainsi « ramassé » ces tourets à l'usine de la société Electricfil, les a stockés dans ses entrepôts, les a empotés dans le conteneur fourni par le transporteur maritime avant de les faire acheminer le 4 octobre 2004 jusqu'au port de Fos-sur-Mer par le voiturier Transteam qu'elle a affrété ; que la lettre de voiture mentionnait comme expéditeur Schenker et comme destinataire Eurofos ; que le 5 octobre 2004, la société Eurofos a établi un procès-verbal de prise en charge (EIR) sans réserve sur un document à l'en-tête ligne Medex consignataire ANL mentionnant le nom du navire, la date de son départ, sa destination et l'emplacement qui lui avait été assigné à quai ; que les dommages sont survenus le 5 octobre 2004 lors d'une manipulation du conteneur sur le parc Eurofos par un préposé de cet acconier ; que les mentions de l'EIR démontrent que le déchargement du conteneur était terminé lors de son établissement ; que les dommages sont survenus à l'occasion de manoeuvres sur le parc Eurofos ; qu'ainsi, si la société Schenker est intervenue en qualité de commissionnaire de transport terrestre, et même si sa mission incluait les formalités douanières, la présomption de responsabilité pesant sur lui a cessé au moment de la prise en charge de la marchandise par l'acconier Eurofos substitué du transporteur maritime ANL ; que même s'il n'a pas été formalisé de connaissement, la garantie du commissionnaire de transport terrestre se termine en effet avec la livraison, c'est-à-dire la remise physique de la marchandise au destinataire ou à son représentant qui l'accepte ; que par ailleurs, la société Electricfil et ses assureurs ne démontrent pas un défaut de calage et d'empotage imputables à la société Schenker à l'origine des dommages ; qu'ils n'établissent pas non plus un manquement du commissionnaire de transport terrestre à un devoir de conseil pour avoir omis d'avoir informé sa cliente de la réglementation ; qu'ainsi il convient de débouter la société Electricfil et ses assureurs de leurs demandes dirigées contre la société Schenker ;
ALORS QUE le commissionnaire de transport auquel est confié le transport d'une marchandise Franco à bord ne remplit son obligation que lorsque cette marchandise arrive à la destination prévue et passe le bastingage du navire au port d'embarquement de sorte que le commissionnaire est responsable des dommages survenus antérieurement au cours des opérations exécutées par lui-même ou par toute personne qui lui est substituée ; qu'en décidant que la société Schenker avait exécuté son obligation de livraison et que sa garantie avait cessé par la remise physique de la marchandise à la société Eurofos qui représentait le transporteur maritime tandis que la société Schenker s'était engagée à l'égard de la société Electricfil, son commettant, à exécuter le transport Franco à bord et qu'au moment où la marchandise a été endommagée par la société Eurofos qui la déposait sur le parc du port, la marchandise n'était pas arrivée à la destination prévue "Franco à bord", de sorte que le commissionnaire de transport en était encore responsable, la cour d'appel a violé les articles L 132-4 et suivants du Code de commerce et 1134 et 1147 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes dirigées par les compagnies Allianz et Helvetia et la société Electricfil contre la société Eurofos ;
AUX MOTIFS QUE la société Eurofos, acconier, est intervenu comme substitué du transporteur maritime ANL, et que la manipulation dommageable est survenue à l'expiration des opérations de transport terrestre ; que la loi maritime nationale du 18 juin 1966 applicable dispose que, quel que soit son fondement, une action ne peut être exercée contre l'acconier que dans le délai annal ; que la demande formée par la société Electricfil et ses assureurs le 18 janvier 2007 est donc irrecevable comme prescrite ; qu'au surplus même l'action délictuelle ne pouvait être en l'espèce envisagée à l'encontre de l'acconier alors que le vendeur chargeur disposait aussi d'une action contre le transporteur maritime choisi par l'acquéreur ; que les demandes dirigées contre la société Eurofos seront donc déclarées irrecevables ;
ALORS QUE relèvent de la loi maritime du 18 juin 1966 les seules opérations de manutention qui réalisent la mise à bord de la marchandise et celles qui en sont le préalable ou la suite nécessaire ; que, pour retenir que la société Eurofos avait agi en tant que manutentionnaire maritime et que l'action exercée à son encontre était soumise à la prescription annale prévue par la loi du 18 juin 1966, la cour d'appel a affirmé que cette société était intervenue comme substitué du transporteur maritime et que la manipulation dommageable était survenue à l'expiration des opérations de transport terrestre ; qu'en statuant par ces motifs impropres à justifier que l'opération au cours de laquelle la manipulation dommageable avait eu lieu, qui consistait à déposer la marchandise sur le parc Eurofos après son déchargement du camion, réalisait la mise à bord de la marchandise ou en était un préalable nécessaire et sans rechercher si l'opération de dépôt de la marchandise était le préalable nécessaire de sa mise à bord, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 50, 51 et 56 de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966.
Moyen produit par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils pour la société Schenker, demanderesse au pourvoi provoqué et éventuel
Il est fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la mise hors de cause des sociétés ANL et GALAX et d'avoir débouté les parties du surplus de leurs demandes ;
AUX MOTIFS QUE les demandes subsidiaires de garantie des sociétés ANL et GALAX sont donc sans objet ;
ALORS QUE, au cas où une cassation interviendrait sur le premier moyen de cassation, la société SCHENKER serait en droit de reprendre ses appels en garantie contre les sociétés EUROFOS, ANL et GALAX, en leurs qualités respectives d'acconier choisi par l'armement, de transporteur maritime ayant exercé le choix de l'acconier et de commissionnaire de transport intérimaire ; que cette censure interviendra par simple voie de conséquence en application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-16359
Date de la décision : 07/09/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Commissionnaire de transport - Obligations - Organisation du transport jusqu'à mise à FOB - Responsabilité à l'égard de son commettant - Terme

L'organisation du transport de la marchandise jusqu'à sa "mise à FOB" implique que le commissionnaire de transport en est responsable à l'égard de son commettant jusqu'à son chargement à bord du navire. Viole les articles L. 132-4 du code de commerce, 1134 et 1147 du code civil la cour d'appel qui retient que ce commissionnaire est intervenu en qualité de commissionnaire de transport terrestre, que la présomption de responsabilité pesant sur lui a cessé au moment de la prise en charge de la marchandise par l'acconier, substitué du transporteur maritime, et que la garantie du commissionnaire se termine avec la livraison, c'est-à-dire la remise physique de la marchandise au destinataire ou à son représentant qui l'accepte


Références :

Cour d'appel de Lyon, 18 juin 2009, 08/007161
article L. 132-4 du code de commerce

articles 1134 et 1147 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 18 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 sep. 2010, pourvoi n°09-16359, Bull. civ. 2010, IV, n° 134
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 134

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Le Mesle (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Potocki
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Laugier et Caston, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.16359
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