La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/07/2010 | FRANCE | N°09-13103

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 juillet 2010, 09-13103


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 23 janvier 2009), que par jugement du 28 juin 2005, publié au BODACC le 31 juillet 2005, la société Proresto a été mise en redressement judiciaire, M. X... étant désigné représentant des créanciers ; que, le 14 octobre 2005, la Chambre de commerce et d'industrie de la Martinique (la CCIM) a déclaré sa créance ; que, par ordonnance du 19 décembre 2006, le juge-commissaire a admis cette créance aux motifs qu'en application de l'articl

e 66 du décret du 27 décembre 1985, les créanciers domiciliés hors de l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 23 janvier 2009), que par jugement du 28 juin 2005, publié au BODACC le 31 juillet 2005, la société Proresto a été mise en redressement judiciaire, M. X... étant désigné représentant des créanciers ; que, le 14 octobre 2005, la Chambre de commerce et d'industrie de la Martinique (la CCIM) a déclaré sa créance ; que, par ordonnance du 19 décembre 2006, le juge-commissaire a admis cette créance aux motifs qu'en application de l'article 66 du décret du 27 décembre 1985, les créanciers domiciliés hors de la France métropolitaine bénéficiaient d'un délai supplémentaire de deux mois ;
Attendu que la CCIM fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que sa déclaration de créance était forclose comme tardive et constaté l'extinction de sa créance, alors, selon le moyen :
1°/ que l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985, applicable à l'espèce, énonce : « Ce dernier délai le délai de deux mois est augmenté de deux mois pour les créanciers domiciliés hors de la France métropolitaine » ; que le texte, qui ne peut être le siège d'aucune interprétation, octroie un délai supplémentaire de deux mois à tout créancier, dont le siège est situé hors la France métropolitaine, sans qu'aucune autre condition ne puisse être imposée ; qu'en décidant que le délai supplémentaire de deux mois suppose que le siège du créancier et le lieu d'ouverture de la procédure ne soient pas situés dans la même sphère géographique, les juges du second degré, qui ont ajouté au texte, ont violé l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 ;
2°/ qu'en se référant à l'article R. 622-24 du code de commerce pour éclairer l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 quand les deux textes, relevant de philosophies différentes, posent des règles distinctes et que les deux textes doivent être appliqués dans le temps conformément aux règles régissant les conflits de lois dans le temps, les juges du second degré ont en tout état de cause violé l'article 2 du code civil, ensemble le principe de non-rétroactivité des lois ;
Mais attendu que l'arrêt retient à bon droit que l'allongement du délai de déclaration de créance prévu par l'article 66, alinéa 1er, du décret, qui édicte un régime dont la seule finalité est de compenser au profit du créancier domicilié hors de la France métropolitaine la contrainte résultant de l'éloignement, ne peut être étendu aux créanciers domiciliés dans un département ou territoire d'outre-mer ayant à déclarer leurs créances dans une procédure ouverte dans le même département ou territoire ; que de ce seul motif, la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche, a exactement déduit que la déclaration de créance de la CCIM, effectuée après l'expiration du délai de deux mois, était tardive et que la créance était éteinte ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Chambre de commerce et d'industrie de la Martinique (CCIM) aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Proresto la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Foussard, avocat aux Conseils pour la Chambre de commerce et d'industrie de la Martinique (CCIM).
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a décidé que la déclaration de créance de la Chambre de commerce et d'industrie de la MARTINIQUE était atteinte par la forclusion comme tardive, et constaté l'extinction de la créance ;
AUX MOTIFS QU' « en application de l'article 190 de la loi du 26 juillet 2005, les modalités de déclaration des créances dans les procédures collectives ouvertes avant l'entrée en vigueur de cette loi, restent soumises aux dispositions antérieures ; qu'en vertu des articles L 621-43 ancien du code du commerce et 66 du décret du 27 décembre 1985 applicables en l'espèce, les créances doivent être déclarées dans le délai de 2 mois à compter de la publication du jugement d'ouverture au BODACC ; qu'en l'espèce, le jugement d'ouverture du 28 juin 2005 a été publié le 31 juillet 2005, et la CCIM a déclaré sa créance une première fois le 14 octobre 2005, puis après rectification le 17 novembre 2005 ; que la CCIM entend bénéficier de la prolongation du délai de 2 mois pour déclarer sa créance prévue par l'article 66 alinéa 1 du décret du 27 décembre 1985 en faveur des créanciers n'ayant pas leur résidence en métropole, ce qui est son cas, son siège étant situé en MARTINIQUE ; que, reprenant la motivation du juge-commissaire, elle soutient que la Cour de cassation ayant jugé que ce texte ne jouait qu'au bénéfice des créanciers non résidents en métropole, et la lettre du texte ne faisant pas la distinction selon le lieu d'ouverture de la procédure, tous les créanciers ayant leur résidence en MARTINIQUE disposent d'un délai de 4 mois pour déclarer leurs créances, y compris dans les procédures collectives ouvertes en MARTINIQUE ; que cependant, l'allongement du délai de déclaration de créance prévu par cet article 66 précité étant dérogatoire du droit commun comme prévoyant une exception au principe du délai de 2 mois, il ne peut être que strictement appliqué ; que ce texte issu du décret du 27 décembre 1985, en prévoyant un régime plus favorable au cas du créancier domicilié hors de la France métropolitaine, avait pour seule finalité de compenser la contrainte résultant de l'éloignement ; qu'il ne peut donc être étendu aux créanciers domiciliés dans un département ou territoire d'outre-mer ayant à déclarer leurs créances dans une procédure ouverte dans le même département ou territoire, la circonstance de l'éloignement faisant alors défaut ; que c'est d'ailleurs la solution qui a été consacrée à l'article R 622-24 du décret du 28 décembre 1985 pris pour l'application de la loi de sauvegarde des entreprises en difficulté et ce, dans le double souci d'une part de soigner la rédaction du texte, et d'autre part, de combler la lacune du texte initial qui n'envisageait pas la situation inverse de l'éloignement du créancier métropolitain devant déclarer sa créance dans une procédure ouverte outre-mer ; que la CCIM ayant déclaré sa créance plus de 2 mois après la publication du jugement d'ouverture au BODACC, elle doit être déclarée forclose ; que sa créance est donc éteinte de plein droit en application des dispositions de l'article L 621-46 ancien du code du commerce (…) » (arrêt, p. 3, antépénultième, avant-dernier et dernier § et p. 4, § 1, 2 et 3) ;
ALORS QUE, premièrement, l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985, applicable à l'espèce, énonce : « Ce dernier délai le délai de deux mois est augmenté de deux mois pour les créanciers domiciliés hors de la France métropolitaine » ; que le texte, qui ne peut être le siège d'aucune interprétation, octroie un délai supplémentaire de deux mois à tout créancier dont le siège est situé hors la France métropolitaine, sans qu'aucune autre condition ne puisse être imposée ; qu'en décidant que le délai supplémentaire de deux mois suppose que le siège du créancier et le lieu d'ouverture de la procédure ne soient pas situés dans la même sphère géographique, les juges du second degré, qui ont ajouté au texte, ont violé l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 ;
Et ALORS QUE, deuxièmement, en se référant à l'article R. 622-24 du Code du commerce pour éclairer l'article 66 du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985 quand les deux textes, relevant de philosophies différentes, posent des règles distinctes et que les deux textes doivent être appliqués dans le temps conformément aux règles régissant les conflits de lois dans le temps, les juges du second degré ont en tout état de cause violé l'article 2 du Code civil, ensemble le principe de non-rétroactivité des lois.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-13103
Date de la décision : 13/07/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Période d'observation - Créanciers - Déclaration des créances - Délai - Calcul - Augmentation en raison de la distance - Domaine d'application - Exclusion - Créancier domicilié et procédure ouverte dans le même département ou territoire d'outre-mer

Ayant justement retenu que l'allongement du délai de déclaration de la créance prévu par l'article 66, alinéa 1er, du décret du 27 décembre 1985, qui édicte un régime dont la seule finalité est de compenser au profit du créancier domicilié hors de la France métropolitaine la contrainte résultant de l'éloignement, ne peut être étendu aux créanciers domiciliés dans un département ou territoire d'outre-mer ayant à déclarer leurs créances dans une procédure ouverte dans le même département ou territoire, la cour d'appel a exactement déduit que la déclaration de créance, effectuée après l'expiration du délai de deux mois, était tardive et que la créance était éteinte


Références :

article 66, alinéa 1er, du décret du 27 décembre 1985

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 23 janvier 2009

Sur les conditions d'application de l'allongement du délai de déclaration de la créance prévu par l'article 66, alinéa 1er, du décret n° 85-1388 du 27 décembre 1985, à rapprocher : Com., 23 novembre 1999, pourvoi n° 96-21034, Bull. 1999, IV, n° 207 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 jui. 2010, pourvoi n°09-13103, Bull. civ. 2010, IV, n° 125
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 125

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : Mme Bonhomme
Rapporteur ?: M. Arbellot
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.13103
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award