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01/07/2010 | FRANCE | N°09-14379;09-66539

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 01 juillet 2010, 09-14379 et suivant


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société L'Agora de ce qu'elle se désiste de son pourvoi n° M 09-66.539 dirigé contre le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Rhône-Alpes ;
Joint les pourvois n° R 09-14.379 et M 09-66.539 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 17 mars 2009), que l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée La Grimotière (l'EURL) a donné en location-gérance à la société Hostellerie du Manoir, aux droits de laquelle se trouve la société L'Agora, un fond

s de commerce d'hôtellerie restauration moyennant une redevance annuelle d'un certai...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société L'Agora de ce qu'elle se désiste de son pourvoi n° M 09-66.539 dirigé contre le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Rhône-Alpes ;
Joint les pourvois n° R 09-14.379 et M 09-66.539 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 17 mars 2009), que l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée La Grimotière (l'EURL) a donné en location-gérance à la société Hostellerie du Manoir, aux droits de laquelle se trouve la société L'Agora, un fonds de commerce d'hôtellerie restauration moyennant une redevance annuelle d'un certain montant ; qu'à la suite d'un contrôle portant sur les années 2003, 2004 et 2005, l'URSSAF de la Savoie a réintégré le montant de cette redevance dans l'assiette des cotisations sociales de la société L'Agora ; que celle-ci a contesté ce redressement devant une juridiction de la sécurité sociale ;
Sur le premier moyen identique des pourvois n°s R 09-14.379 et M 09-66.539 :
Attendu que la société L'Agora fait grief à l'arrêt de valider ce redressement, alors, selon le moyen :
1°/ que sont assujettis à cotisation les revenus tirés de la location de tout ou partie d'un fonds de commerce muni du mobilier ou du matériel nécessaire à son exploitation lorsque ces revenus sont perçus par une personne qui réalise des actes de commerce au titre de l'entreprise louée ou y exerce une activité ; que, pour statuer comme elle l'a fait, la cour d'appel a constaté que les revenus tirés de la location-gérance étaient perçus par l'EURL, dont les parts sont détenues par M. X..., que celui-ci est salarié de la société L'Agora, ce dont il ressort qu'il n'y a pas d'identité entre la personne qui perçoit des revenus de la location-gérance et celle qui exerce une activité au sein de l'entreprise (M. X...) ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que l'option fiscale réalisée par une société commerciale pour l'impôt sur le revenu est inopposable aux organismes sociaux ; que, pour appliquer les dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a considéré que l'EURL avait opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes et que M. X..., son unique associé, est imposé au titre de l'impôt sur le revenu pour les bénéfices industriels et commerciaux qu'il tire de la société, si bien que celui-ci percevrait de la société L'Agora une somme annuelle de 329 289 euros ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale que, pour le calcul des cotisations sociales, sont prises en compte, dans les conditions prévues à l'article L. 242-11 du même code, les revenus tirés de la location de tout ou partie d'un fonds de commerce, lorsqu'ils sont perçus, même indirectement, par une personne qui réalise des actes de commerce au titre de l'entreprise louée ou y exerce une activité ;
Et attendu qu'ayant constaté, d'une part, que les revenus tirés de la location-gérance sont perçus par l'EURL dont l'associé unique est M. X..., également salarié et président-directeur général de la société L'Agora qui les verse, d'autre part, que l'EURL a opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes de sorte que M. X... est imposé sur le revenu pour les bénéfices industriels et commerciaux qu'il tire de celle-ci, la cour d'appel en a exactement déduit que la somme annuelle de 329 289 euros qu'il a reçue de la société L'Agora au titre des bénéfices réalisés par l'EURL était soumise à cotisations ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen identique des pourvois n°s R 09-14.379 et M 09-66.539 :
Attendu que la société L'Agora fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une certaine somme, alors, selon le moyen, qu'à supposer que les revenus litigieux soient assujettis aux cotisations sociales, s'agissant de revenus perçus par une EURL, l'associé unique perçoit non pas l'intégralité des redevances mais un bénéfice ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si l'assiette des cotisations ne devait pas être limitée au bénéfice perçus par M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 242-11 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que l'arrêt retient que les revenus tirés de la location-gérance et perçus par M. X... constituent sa rémunération au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;
Que par cette énonciation, la cour d'appel, qui en l'absence de justificatifs des bases d'imposition n'était pas tenue de rechercher si l'assiette des cotisations devait se limiter au seul bénéfice perçu par celui-ci, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société L'Agora aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société L'Agora ; la condamne à payer à l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de la Savoie la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens identiques produits aux pourvois R 09-14.379, et M 09-66.539 par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société L'Agora.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, par confirmation, condamné la société l'Agora à payer la somme de 332.552 euros outre majorations et pénalités complémentaires et frais accessoires ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « L'article L 242-1 du code de la sécurité sociale prévoit expressément l'assujettissement aux cotisations sociales des revenus tirés de la location de tout ou partie d'un fonds de commerce, d'un établissement artisanal ou d'un établissement commercial ou industriel muni d'un mobilier ou du matériel nécessaire à son exploitation, que la location comprenne ou non tout ou partie des éléments incorporels du fonds de commerce ou d'industrie, lorsque ces revenus sont perçus par une personne qui réalise des actes de commerce au titre de l'entreprise louée où il exerce une activité. Cette disposition, ajoutée par la loi du 23 décembre 1998, a pour but affiché du législateur de lutter contre les montages juridiques de locations gérance fictives consistant pour des travailleurs indépendants à mettre leur fonds de commerce en location gérance et à le confier à une société dont ils sont associés, tout en continuant à exercer leur activité professionnelle, en se faisant rémunérer essentiellement par les loyers qu'ils tirent de la location, échappant ainsi aux cotisations. En l'espèce Monsieur X... est associé de la société l'Agora et gérant par définition unique de l'eurl La Grimotière. Sans qu'il soit utile d'examiner le régime fiscal de l'eurl La Grimotière, il est constant que le bénéficiaire des revenus de la location gérance est Monsieur X.... Les revenus générés par la location gérance du fonds exploité par la société l'Agora doivent en conséquence être soumis à cotisation sociale. (…) Monsieur X... est salarié de la société l'Agora. Les versements de loyers par cette société à la société La Grimotière dont Monsieur X... est l'unique associé viennent augmenter les revenus de Monsieur X.... Il appartient en conséquence à la société l'Agora de s'acquitter des cotisations sociales dues sur le montant des loyers versés » ;
ET AUX MOTIFS PROPRES QUE, : « l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale dispose que « pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations, toutes les sommes versées au travailleur en contrepartie ou à l'occasion du travail… sont également pris en compte dans les conditions prévues à l'article L 242-1, les revenus tirés de la location de tout ou partie d'un fonds de commerce, d'un établissement artisanal, ou d'un établissement commercial ou industriel muni du mobilier ou du matériel nécessaire à son exploitation, que la location, dans ce dernier cas, comprenne ou non tout ou partie des éléments incorporels du fonds de commerce ou d'industrie lorsque ces revenus sont perçus par une personne qui réalise des actes de commerce au titre de l'entreprise louée ou y exerce une activité…Les revenus perçus par une personne au titre d'une location gérance sont donc considérés comme une rémunération lorsque cette personne exerce une activité au sein de l'entreprise pour laquelle cette location gérance a été consentie. En l'espèce, il n'est pas contesté, d'une part que les revenus tirés de la location gérance sont perçus par la société La Grimotière qui est une eurl dont la totalité des parts est détenue par Monsieur X... et d'autre part que ce dernier est salarié de la Sa l'Agora au sein de laquelle il exerce la fonction de Président Directeur Général. Il n'est pas davantage contesté que l'eurl La Grimotière a opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes et que Pierre X..., son unique associé, est imposé au titre de l'impôt sur le revenu pour les bénéfices industriels et commerciaux qu'il tire de la société. Il en résulte que Pierre X... perçoit de la SA l'Agora une somme annuelle de 329.289 euros qui doit être considérée comme une rémunération de son travail en application de l'article L 242-1 précité et doit de ce fait être soumis à cotisation sociale. Dans la mesure où c'est la société l'Agora qui a payé ces rémunérations, c'est elle qui est redevable des cotisations sociales correspondantes peu important qu'elles constituent un chiffre d'affaires pour la société La Grimotière qui n'est pas redevable de ces cotisations sociales » ;
ALORS 1°) QUE : sont assujettis à cotisation les revenus tirés de la location de tout ou partie d'un fonds de commerce muni du mobilier ou du matériel nécessaire à son exploitation lorsque ces revenus sont perçus par une personne qui réalise des actes de commerce au titre de l'entreprise louée ou y exerce une activité ; que, pour statuer comme elle l'a fait, la cour d'appel a constaté que les revenus tirés de la location gérance étaient perçus par l'eurl La Grimotière, dont les parts sont détenues par Monsieur X..., que celui-ci est salarié de la société l'Agora, ce dont il ressort qu'il n'y a pas d'identité entre la personne qui perçoit des revenus de la location gérance (la société La Grimotière) et celle qui exerce une activité au sein de l'entreprise (Monsieur X...) ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales ses propres constatations, a violé l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale ;
ALORS 2°) QUE : l'option fiscale réalisée par une société commerciale pour l'impôt sur le revenu est inopposable aux organismes sociaux ; que, pour appliquer les dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a considéré que l'eurl La Grimotière avait opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes et que Monsieur X..., son unique associé, est imposé au titre de l'impôt sur le revenu pour les bénéfices industriels et commerciaux qu'il tire de la société, si bien que celui-ci percevrait de la société l'Agora une somme annuelle de 329.289 euros ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, par confirmation, condamné la société l'Agora à payer la somme de 332.552 euros outre majorations et pénalités complémentaires et frais accessoires ;
AUX MOTIFS QUE : « Pierre X... perçoit de la SA l'Agora une somme annuelle de 329.289 euros qui doit être considérée comme une rémunération de son travail en application de l'article L 242-1 précité et doit de ce fait être soumis à cotisation sociale » ;
ALORS QUE : à supposer que les revenus litigieux soient assujettis aux cotisations sociales, s'agissant de revenus perçus par une eurl, l'associé unique perçoit non pas l'intégralité des redevances mais un bénéfice ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si l'assiette des cotisations ne devait pas être limitée au bénéfice perçus par Monsieur X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 242-11 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-14379;09-66539
Date de la décision : 01/07/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE - Cotisations - Assiette - Location-gérance - Loyers payés par le locataire-gérant - Conditions - Détermination - Portée

FONDS DE COMMERCE - Location-gérance - Sécurité sociale - Cotisations - Assiette - Revenus tirés de la location-gérance - Conditions - Détermination

Les revenus tirés de la location de tout ou partie d'un fonds de commerce, lorsqu'ils sont perçus, même indirectement, par une personne qui réalise des actes de commerce au titre de l'entreprise louée ou y exerce une activité, entrent dans le calcul des cotisations sociales


Références :

article L. 242-1 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 17 mars 2009

Sur la prise en compte des revenus versés au titre de la location-gérance dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale, à rapprocher : 2e Civ., 2 mars 2004, pourvoi n° 02-19393, Bull. 2004, II, n° 79 (cassation) ;2e Civ., 4 février 2010, pourvoi n° 09-13003, Bull. 2010, II, n° 25 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 01 jui. 2010, pourvoi n°09-14379;09-66539, Bull. civ. 2010, II, n° 133
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, II, n° 133

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: M. Cadiot
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.14379
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