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17/06/2010 | FRANCE | N°09-67530

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 juin 2010, 09-67530


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 7 mai 2009), que le 5 février 1996, l'enfant Abderrazak X..., âgé de 11 ans, piéton traversant la chaussée d'une rue, a été renversé et blessé par le véhicule conduit par Mme Y... ; que le contrat d'assurance du véhicule étant suspendu, le Fonds de garantie automobile a par voie de transaction, indemnisé la victime ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine (la caisse) a assigné Mme Y... en paiement de sa créance, en présence de M

. Abderrazak X... (M. X...), assisté de son tuteur, M. Mohamed X..., et d...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 7 mai 2009), que le 5 février 1996, l'enfant Abderrazak X..., âgé de 11 ans, piéton traversant la chaussée d'une rue, a été renversé et blessé par le véhicule conduit par Mme Y... ; que le contrat d'assurance du véhicule étant suspendu, le Fonds de garantie automobile a par voie de transaction, indemnisé la victime ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine (la caisse) a assigné Mme Y... en paiement de sa créance, en présence de M. Abderrazak X... (M. X...), assisté de son tuteur, M. Mohamed X..., et de M. Ammar X... ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de la dire tenue d'indemniser intégralement le préjudice de M. X..., de la condamner à verser à la caisse la somme de 47 123 euros correspondant à ses débours, avec intérêts au taux légal à compter du 15 novembre 2004, et de donner acte à la caisse de ses réserves pour les prestations non connues à ce jour ou pour celles qui pourraient être versées ultérieurement, alors, selon le moyen, qu'il résulte des articles 30 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et L. 376-1 du code de la sécurité sociale que toutes les prestations versées par un organisme qui gère un régime obligatoire de sécurité sociale ouvrent droit à un recours subrogatoire lorsqu'elles ont un lien direct avec le fait dommageable ; que, cependant, les prérogatives personnelles du subrogeant ne sont pas transmissibles au subrogé, de sorte que le tiers responsable d'un accident de la circulation peut opposer à l'organisme de sécurité sociale exerçant le recours subrogatoire la faute inexcusable de la victime âgée de moins de seize ans ; qu'en décidant que la faute inexcusable de la victime, âgée de moins de seize ans, ne pouvait être opposée à la caisse, subrogée dans les droits de celle-ci, la cour d'appel a violé les textes précités, ensemble l'article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ;
Mais attendu que, selon l'article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, sont, dans tous les cas, intégralement indemnisées des dommages résultant de telles atteintes les victimes âgées de moins de seize ans ou de plus de soixante-dix ans ou celles qui, quelque soit leur âge, sont titulaires, au moment de l'accident, d'un titre leur reconnaissant un taux d'incapacité ou d'invalidité au moins égal à 80 % ; que cette règle de portée générale selon laquelle une telle victime dispose en raison de son âge à la date de l'accident d'un droit à la réparation intégrale qu'aucune faute personnelle, même inexcusable, ne peut réduire, détermine ainsi l'ampleur de sa créance d'indemnisation ; que ce droit est nécessairement compris dans les droits et actions transmis par cette victime, par l'effet de la subrogation légale, au tiers-payeur qui a réglé tout ou partie de cette créance à la place du conducteur du véhicule impliqué tenu à indemnisation, lequel, en conséquence, ne peut opposer au tiers payeur subrogé, la faute inexcusable de la victime mineure de seize ans ;
Et attendu que l'arrêt retient exactement que l'implication du véhicule conduit par Mme Y... dans l'accident dont M. X... a été victime le 5 février 1996 n'est pas discutée ; que contrairement à ce qu'allègue Mme Y..., la caisse, par l'effet du paiement de prestations au profit de M. X..., est subrogée dans l'ensemble des droits de ce dernier y compris ceux conférés par la loi en considération de sa situation personnelle ; qu'au moment de l'accident, M. X... était piéton et âgé de moins de seize ans ; qu'ainsi sa faute, serait-elle inexcusable, ne peut lui être opposée ; qu'en conséquence, M. X... doit être indemnisé intégralement par Mme Y... des dommages résultant des atteintes à sa personne subis lors de l'accident dont il a été victime le 5 février 1996 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche, tel que reproduit en annexe :
Attendu que Mme Y... fait le même grief à l'arrêt ;
Mais attendu que, sous le couvert du grief non fondé de défaut de base légale au regard des articles L. 376-1 du code de la sécurité sociale, 30 et 32 de la loi du 5 juillet 1985, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la cour d'appel qui, relevant que la créance invoquée se rapportait au remboursement des frais d'hospitalisation et de transport d'un montant de 47 123 euros exposés pour M. X... à la suite de son accident lui ouvrant droit à la réparation intégrale de son dommage corporel et que la caisse en justifiait par la production d'un relevé définitif de prestations daté du 9 septembre 2004, a pu statuer comme elle l'a fait ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... ; la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour Mme Y....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Mme Y... est tenue d'indemniser intégralement le préjudice d'Abderrazak X... et de l'avoir condamnée en conséquence à verser à la CPAM des Hauts-de-Seine la somme de 47.123 euros correspondant aux débours exposés pour Abderrazak X... avec intérêts au taux légal à compter du 15 novembre 2004, outre d'avoir donné acte à la CPAM des Hauts-de-Seine de ses réserves pour les prestations non connues à ce jour ou pour celles qui pourraient être versées ultérieurement ;
Aux motifs propres que « c'est à juste titre que les premiers juges, après avoir rappelé les dispositions des articles 1er, 2 et 3 de la loi du 5 juillet 1985, ont dit que l'implication du véhicule de Mme Y... dans l'accident dont a été victime Abderrazak X... le 5 février 1996 n'était pas contestée, précisé que la CPAM des Hauts-de-Seine est subrogée dans les doits et actions de la victime, y compris ceux conférés par la loi en considération de sa situation personnelle, que le droit à indemnisation de la victime était entier (piéton âgé de moins de seize ans), sans que puisse être invoquée la faute inexcusable de la victime ou la faute d'imprudence de ses parents et en conséquence, déclaré justifiée la créance de réparation dont dispose le fonds à l'encontre de Mme Mara Y... à hauteur de la somme de 47.123 euros correspondant aux prestations versées au profit de la victime » ;
Et aux motifs réputés adoptés que « en l'espèce, l'implication du véhicule conduit par Madame Y... dans l'accident dont Monsieur Abderrazak X... a été victime le 5 février 1996 n'est pas discutée ;
que contrairement à ce qu'allègue Madame Y..., la CPAM des Hauts de Seine, par l'effet du paiement de prestations au profit de Monsieur Abderrazak X..., est subrogée dans l'ensemble des droits de ce dernier y compris ceux conférés par la loi en considération de sa situation personnelle ;
qu'au moment de l'accident, Monsieur Abderrazak X... était piéton et âgé de moins de seize ans ; qu'ainsi sa faute, serait-elle inexcusable, ne peut lui être opposée ; que le fait d'un tiers, et notamment la faute d'imprudence de ses parents, ne peut pas davantage avoir d'effet sur son droit à indemnisation ;
qu'en conséquence, il y a lieu de dire que Monsieur Abderrazak X... doit être indemnisé intégralement par Madame Y... des dommages résultant des atteintes à sa personne subis lors de l'accident dont il a été victime le 5 février 1996 ;
qu'au titre de son recours subrogatoire, la CPAM des Hauts-de-Seine demande le remboursement des frais d'hospitalisation et de transport d'un montant de 47.123 euros exposés pour Monsieur Abderrazak X... à la suite de son accident ; qu'elle justifie de cette créance par la production d'un relevé définitif de prestations daté du 9 septembre 2004 ; que dès lors ce chef de préjudice est établi ; qu'il est distinct des préjudices indemnisés par le Fonds de garantie automobile qui, n'intervenant qu'à titre subsidiaire, n'avait pas vocation à indemniser les préjudices susceptibles d'être pris en charge par l'assurance maladie ; que de surcroît, l'évaluation faite par le Fonds de garantie automobile des préjudices subis par Monsieur Abderrazak X... ne saurait lier la présente juridiction ; que dès lors, le recours subrogatoire de la CPAM des Hauts de Seine n'est aucunement limité au montant des sommes accordées par le fonds de garantie ;
qu'en conséquence, il convient de faire droit intégralement à la demande de remboursement de la CPAM des Hauts de Seine et de condamner Madame Y... à lui régler une somme de 47.123 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 novembre 2004, date de sa demande » ;
Alors, d'une part, que il résulte des articles 30 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 et L.376-1 du code de la sécurité sociale que toutes les prestations versées par un organisme qui gère un régime obligatoire de sécurité sociale ouvrent droit à un recours subrogatoire lorsqu'elles ont un lien direct avec le fait dommageable ; que, cependant, les prérogatives personnelles du subrogeant ne sont pas transmissibles au subrogé, de sorte que le tiers responsable d'un accident de la circulation peut opposer à l'organisme de sécurité sociale exerçant le recours subrogatoire la faute inexcusable de la victime âgée de moins de seize ans ; qu'en décidant que la faute inexcusable de la victime, âgée de moins de seize ans, ne pouvait être opposée à la CPAM des Hauts-de-Seine, subrogée dans les droits de celle-ci, la Cour d'appel a violé les textes précités, ensemble l'article 3 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 ;
Alors, d'autre part et en tout état de cause, que l'organisme de sécurité sociale, subrogé dans les droits de la victime, ne peut obtenir la condamnation du tiers responsable que dans la limite de la part d'indemnité qui a été mise à la charge de celui-ci ; qu'en se bornant à constater, pour faire droit à la demande de la CPAM, subrogée dans les droits de la victime, que les sommes dont elle réclame le paiement correspondent à des versements qu'elle a effectués, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si ces versements étaient en relation avec le dommage subi par la victime et n'excédaient pas la part d'indemnité réparant l'atteinte à l'intégrité physique de cette dernière mise à la charge du tiers responsable, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L.376-1 du code de la sécurité sociale et 30 et 32 de la loi du 5 juillet 1985.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-67530
Date de la décision : 17/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ACCIDENT DE LA CIRCULATION - Victime - Victime autre que le conducteur - Piéton - Victime titulaire d'un titre d'incapacité permanente ou d'invalidité au moins égale à 80 % - Droit à réparation - Détermination - Portée

ACCIDENT DE LA CIRCULATION - Indemnisation - Tiers payeur - Subrogation légale - Effets - Droits et actions transmis par la victime - Etendue - Détermination - Portée SUBROGATION - Subrogation légale - Cas - Accident de la circulation - Recours du tiers payeur contre l'auteur du dommage et son assureur - Droits et actions transmis par la victime - Etendue - Détermination - Portée

Il résulte de l'article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 que sont, dans tous les cas, intégralement indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne, les victimes âgées de moins de seize ans ou de plus de soixante-dix ans ou celles qui, quel que soit leur âge, sont titulaires, au moment de l'accident, d'un titre leur reconnaissant un taux d'incapacité permanente ou d'invalidité au moins égal à 80 %. Selon cette règle de portée générale, une telle victime dispose, en raison de son âge à la date de l'accident, d'un droit à la réparation intégrale qu'aucune faute personnelle, même inexcusable, ne peut réduire et qui détermine ainsi l'ampleur de sa créance d'indemnisation. Ce droit est nécessairement compris dans les droits et actions transmis par cette victime, par l'effet de la subrogation légale, au tiers payeur qui a réglé tout au partie de cette créance à la place du conducteur du véhicule impliqué, tenu à indemnisation, lequel, en conséquence, ne peut opposer au tiers payeur subrogé, la faute inexcusable de la victime mineur de seize ans


Références :

Article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 07 mai 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 17 jui. 2010, pourvoi n°09-67530, Bull. civ. 2010, II, n° 114
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, II, n° 114

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Rapporteur ?: M. Bizot
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.67530
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