LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 7 mai 2009), que le 31 décembre 1991 les époux X... ont consenti un bail rural aux époux Y... portant sur des bâtiments d'habitation et d'exploitation et des terres pour une durée de neuf ans avec effet au 1er mai 1991, bail qui s'est renouvelé le 1er mai 2000 ; que le 29 octobre 2007, les bailleurs ont délivré aux preneurs un congé portant refus de renouvellement fondé sur les dispositions de l'article L. 416-2 du code rural, pour le 30 avril 2009, au motif que ces derniers avaient refusé de conclure un bail à long terme sans autre modification que la durée du bail de neuf années ; que les époux Y... ont saisi la juridiction des baux ruraux en annulation de ce congé ;
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt d'annuler le congé, alors, selon le moyen, qu'un bail rural peut, à tout moment, être converti par l'accord des parties en bail à long terme, soit par transformation du bail initial, soit par conclusion d'un nouveau bail ; lorsque cette conversion n'implique aucune autre modification des conditions du bail que l'allongement de sa durée et que le bailleur s'engage à ne demander aucune majoration du prix du bail en fonction de cette conversion, le refus du preneur le prive du bénéfice des dispositions des articles L. 411-35 et L. 411-46 du code rural ; qu'en l'espèce, le bail à long terme proposé à la signature des preneurs constituait la transformation du bail initial, sans autre modification que la durée, de sorte que le refus de ces derniers de le signer et d'accepter de convertir le bail initial en bail à long terme, tiré du seul refus de supporter les frais de rédaction de l'acte, lesquels restaient extérieurs à l'économie du contrat , n'était pas légitime ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, et en retenant que le désaccord des preneurs portant sur la décision des bailleurs de leur faire supporter les frais de l'acte, les conditions d'application de la sanction prévue par l'article L. 416-2 du code rural n'étaient pas réunies, la cour d'appel a ajouté à ce texte une condition qu'il ne postule pas et l'a violé ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les époux Y... n'avaient pas refusé la conversion du bail de neuf ans en bail à long terme, mais la décision des bailleurs de leur faire supporter les frais d'établissement du bail à long terme, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que les conditions d'application de la sanction prévue par l'article L. 416-2 du code rural n'étaient pas réunies ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des époux X... ; les condamne à payer aux époux Y... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils, pour les époux X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir , par confirmation du jugement entrepris, annulé le congé portant refus de renouvellement en application de l'article L. 416-2 du Code rural délivré le 29 octobre 2007 par M. et Mme X... à M. et Mme Y..., et constaté que le bail liant les parties pourra être renouvelé le 1er mai 2009, sauf nouveau congé ;
AUX MOTIFS QUE par lettre du 9 juin 2000, le notaire indiquait aux époux Y... que la Cour d'appel de DOUAI avait rendu sa décision le 25 mai 2000 et que rien ne s'opposait à la régularisation du bail à long terme ; qu'il précisait que les frais de l'acte s'élèveraient à 11 500 F ;que par lettre du 23 juin 2000, le notaire écrivait aux époux X... : «Je viens de recevoir M. et Mme Y... qui m'ont indiqué qu'ils étaient prêts à signer le bail à long terme dès que les travaux ordonnés par l'arrêt de la Cour d'appel de DOUAI auront été exécutés conformément à ce qui a été prévu au rapport d'expertise». Par contre, ils se sont renseignés et ne veulent pas payer les frais de cet acte. que le 23 février 2001, les époux Y... ont écrit aux époux X... : «Tout d'abord nous avons refusé de payer les frais d'un bail de 18 ans car vous nous avez prévenus moins de 18 mois avant la fin du bail de 9 ans. Celui-ci étant renouvelable par tacite reconduction nous sommes toujours en possession d'un bail jusqu'au 30 avril 2009. Il ne s'agit pas d'un acompte mais du règlement du fermage dû» ; que les époux X... ont mal interprété ce courrier ; que les époux Y... n'ont pas refusé la conversion du bail de neuf ans en bail à long terme au motif que cette demande aurait été faite hors délai ; qu'ils ont simplement entendu soutenir que dans la mesure où ils disposaient d'un bail jusqu'au 30 avril 2009 (puisqu'il n'avait pas été mis un terme au bail initial dix-huit mois avant l'échéance du 30 avril 2000), ils n'avaient pas à supporter les frais de l'établissement d'un bail à long terme ; que le désaccord des époux Y... portant non pas sur le principe de la conclusion d'un bail à long terme mais sur la décision des bailleurs de leur faire supporter les frais de l'acte, les conditions d'application de la sanction prévue par l'article L. 416-2 du Code rural ne sont pas réunies ;
ET AUX MOTIFS, adoptés des premiers juges, QUE les époux X... soutiennent que le projet de bail à long terme souhaité n'impliquait aucune modification autre que la durée du bail initial sans toutefois produire à l'appui aucun élément, autre que le courrier litigieux qui est insuffisant à en rapporter la preuve, permettant d'apprécier le contenu de la proposition de conversion du bail ; que le Tribunal n'est pas en mesure, en l'état des pièces versées, de vérifier si le refus opposé par les preneurs est de nature ou pas à être sanctionné par le non-renouvellement de leur bail ; qu'il n'est pas établi que les preneurs ont bien refusé la conversation de leur bail en bail à long terme , alors même qu'aucune modification autre que la durée du bail n'aurait résulté de cette conversion, conformément aux conditions énoncées par l'article susvisé ;
ALORS QU'un bail rural peut, à tout moment , être converti par l'accord des parties en bail à long terme, soit par transformation du bail initial, soit par conclusion d'un nouveau bail ; lorsque cette conversion n'implique aucune autre modification des conditions du bail que l'allongement de sa durée et que le bailleur s'engage à ne demander aucune majoration du prix du bail en fonction de cette conversion, le refus du preneur le prive du bénéfice des dispositions des articles l. 411-35 et L. 411-46 du Code rural ; qu'en l'espèce, le bail à long terme proposé à la signature des preneurs constituait la transformation du bail initial, sans autre modification que la durée, de sorte que le refus de ces derniers de le signer et d'accepter de convertir le bail initial en bail à long terme, tiré du seul refus de supporter les frais de rédaction de l'acte, lesquels restaient extérieurs à l'économie du contrat , n'était pas légitime ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, et en retenant que le désaccord des preneurs portant sur la décision des bailleurs de leur faire supporter les frais de l'acte, les conditions d'application de la sanction prévue par l'article L. 416-2 du Code rural n'étaient pas réunies, la Cour d'appel a ajouté à ce texte une condition qu'il ne postule pas et l'a violé.