La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/06/2010 | FRANCE | N°08-19351

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 juin 2010, 08-19351


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 juin 2008), que M. X..., employé par la société Cider santé (la société) a été licencié le 14 mai 2007 pour motif économique par le liquidateur, la société ayant fait l'objet d'une procédure de sauvegarde puis de liquidation judiciaire par jugements successifs du tribunal de commerce des 17 janvier et 2 mai 2007 ; que les sommes représentant les droits du salarié au jour de la rupture de son contrat de travail n'ayant été garanties

par l'assurance générale des salaires qu'en partie, le salarié a saisi le ju...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 juin 2008), que M. X..., employé par la société Cider santé (la société) a été licencié le 14 mai 2007 pour motif économique par le liquidateur, la société ayant fait l'objet d'une procédure de sauvegarde puis de liquidation judiciaire par jugements successifs du tribunal de commerce des 17 janvier et 2 mai 2007 ; que les sommes représentant les droits du salarié au jour de la rupture de son contrat de travail n'ayant été garanties par l'assurance générale des salaires qu'en partie, le salarié a saisi le juge de l'exécution, qui a autorisé par ordonnances du 16 juillet 2007 deux saisies conservatoires entre les mains des sociétés Repsco promotion et Codepharma ; que Mme Y..., liquidateur de la société, a assigné le 12 septembre 2007 M. X..., la société Repsco promotion et la société Codepharma, devant le juge de l'exécution aux fins d'obtenir la rétractation de ces deux ordonnances ;
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt confirmatif de rejeter sa demande de mainlevée des saisies conservatoires pratiquées par M. X... entre les mains des sociétés Codepharma et Repso promotion alors, selon le moyen :
1°/ que l'article L. 641-13-I du code de commerce ne vise ni les créances nées pour les besoins de la procédure, ni les créances nées pour les besoins de la liquidation judiciaire parmi les créances assorties d'un privilège de procédure ; qu'en qualifiant l'indemnité due au salarié licencié postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire de son employeur de «créance née régulièrement pour les besoins de la procédure» pour affirmer que cette créance devait bénéficier d'un traitement préférentiel, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
2°/ que seules les créances nées pendant la poursuite provisoire de l'activité en liquidation judiciaire pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période bénéficient d'un privilège de procédure ; que tel n'est pas le cas de l'indemnité due au salarié, licencié pour motif économique en raison du prononcé, sans poursuite d'activité, de la liquidation judiciaire de son employé ; qu'en élisant néanmoins une telle créance à un rang privilégié aux motifs erronés qu' «il n'y avait pas lieu de distinguer entre créance indemnitaire liée à la rupture du contrat de travail et créance de salaire lorsque ces créances sont nées après l'ouverture de la procédure collective», la cour d'appel a de nouveau violé l'article L. 641-13-I du code de commerce ;
Mais attendu que relèvent notamment du privilège institué par l'article L. 641-13-I du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur au jour du licenciement, les créances nées régulièrement après le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire, pour les besoins du déroulement de la procédure ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a retenu que le licenciement de M. X... avait été prononcé par le liquidateur conformément à ses obligations dans le cadre de la procédure collective en cours, en a exactement déduit que les créances indemnitaires résultant de la rupture du contrat de travail étaient nées régulièrement après le jugement prononçant la liquidation judiciaire pour les besoins du déroulement de cette procédure, et qu'en conséquence, elles relevaient de l'article L. 641-13-I du code de commerce, peu important que l'activité ait cessé immédiatement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Cider santé aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Cider santé à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour la société Cider santé
Le pourvoi reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR rejeté la demande de Maître Y..., ès-qualités, tendant à obtenir la mainlevée des saisies conservatoires pratiquées par Monsieur X... entre les mains des sociétés CODEPHARMA et REPSO PROMOTION ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, «Monsieur Yann X... a été embauché par la société CIDER SANTE, qui exerçait une activité de prestataire de services pour le compte de laboratoires pharmaceutiques dans le domaine des visites médicales, de la recherche clinique et du marketing, à compter du 1er mai 1990 au poste d'analyste programmeur ; qu'il a été ensuite promu aux fonctions de Directeur Informatique ; que la société CIDER SANTE ayant fait l'objet d'une procédure de sauvegarde puis de liquidation judiciaire par jugement successifs du Tribunal de commerce de Nanterre des 17 janvier et 2 mai 2007, Monsieur X... a été licencié le 14 mai 2007 pour motif économique par le liquidateur ; qu'il n'est pas contesté que les sommes représentant les droits de Monsieur X... au jour de la rupture de son contrat de travail, (salaire, préavis de trois mois, congés payés pour la période annuelle en cours, indemnité légale de licenciement), s'élevant à 80.116,08 euros bruts et 74.900,65 euros nets, n'ont été garanties à Monsieur X... par l'Assurance Générale des Salaires (A.G.S.) qu'à hauteur de 44.231,49 euros, Monsieur X... ayant été amené à demander l'autorisation de saisir à titre conservatoire, pour recouvrer le solde de tout compte qu'il estime lui être dû à hauteur de 30.669,14 euros les créances du liquidateur sur deux clients de la société CIDER SANTE, les sociétés CODEPHARMA et REPSCO PROMOTION ; que pour obtenir la mainlevée de ces saisies, le liquidateur oppose la suspension des poursuites consécutives à l'ouverture de la procédure collective, et l'ordre des paiements de cette procédure ; qu'il soutient que la nouvelle rédaction de l'article L. 621-32 du Code de commerce, devenu L.622-17 à la suite de l'entrée en vigueur de la Loi de Sauvegarde des Entreprises, exclurait de son champ la créance de Monsieur X... au motif qu'elle ne serait pas utile à la procédure de liquidation judiciaire ; qu'il y a lieu de rechercher si l'indemnité de licenciement dont le solde dû correspond à la somme réclamée, doit entrer dans la catégorie des créances «nées régulièrement pour les besoins de la procédure» ; que si par la réforme introduite par la Loi de Sauvegarde des Entreprises, le législateur a entendu exclure du traitement préférentiel les créances sans lien avec l'activité industrielle ou commerciale du failli, il ne peut davantage qu'auparavant être soutenu qu'un contrat de travail, tel que celui de Monsieur X..., Directeur Informatique au sein de la société CIDER SANTE, n'est pas directement rattaché à l'activité de la société employeur dès lors que la créance est née «régulièrement», même lorsqu'il n'y avait pas eu de poursuite d'activité ; que les dispositions de l'article L. 641-13 du Code de Commerce ne distinguent pas selon que la liquidation judiciaire a été assortie d'une poursuite d'activité ou prononcée avec cessation immédiate d'activité ; qu'au contraire il y a lieu de considérer que le licenciement pour motif économique de Monsieur X... est intervenu pour les besoins de la procédure collective et faisait parties des diligences attendues du liquidateur ; que la décision de réalisation est généralement fondée sur le fait que le contrat de travail n'est plus utile à la procédure ou à l'activité ou qu'il excède les moyens du débiteur en liquidation ; que dès lors l'argumentation de Maître Y... selon laquelle il devrait être distingué entre créance indemnitaire liée à la rupture du contrat de travail et créance de salaire lorsque ces créances sont nées après l'ouverture de la procédure collective, ne peut qu'être rejetée ; que la Loi de Sauvegarde des Entreprises n'a pas modifié l'ordre des créanciers postérieurs à l'ouverture de la procédure ; que les articles L.622-17 du Code de commerce (redressement judiciaire) et L.641-13 du même Code (liquidation judiciaire) retiennent que « les créances qui n'ont pas fait l'objet d'une prise en charge par l'A.G.S. en vertu des articles L.143-11-1 à L.143-11-3 du Code du travail, bénéficient du régime de faveur applicable aux créances nées après le jugement d'ouverture » ; que l'article L.143-11-12 du Code du travail vise expressément les créances « nées de la rupture du contrat de travail» ; qu'en conséquence, les saisies conservatoires pratiquées par Monsieur X..., reposant sur une créance certaine, liquide et exigible, fondée en son principe et menacée dans son recouvrement, ont donc été valablement diligentées » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'«aux termes de l'article L.641-13 du Code de commerce «le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire a les mêmes effets que ceux qui sont prévus en cas de sauvegarde par l'article L.622-21 et suivants» du Code de commerce, que l'article L.622-21 du Code de commerce dispose que le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée à l'article L.622-17 de ce même Code ; que l'article L.622-17 du Code de commerce dispose que : les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur, pour son activité professionnelle, pendant cette période sont payées à leur échéance ; qu'il s'ensuit que toute mesure d'exécution pratiquée après le jugement d'ouverture est interdite sauf si ces créances sont utiles à la procédure suivant les dispositions de l'article L.622-17 du Code de commerce ; qu'en l'espèce, il apparaît que le contrat de travail de Monsieur X... a été rompu le 14 mai 2007 soit 12 jours après le jugement prononçant la liquidation judiciaire ; que la créance est née postérieurement au jugement de liquidation judiciaire et une voie d'exécution ne peut être engagée que si elle répond aux besoins de la poursuite ou de cessation de d'activité ; que la liquidation judiciaire n'ayant été assortie d'aucune poursuite d'activité, le liquidateur se trouvait dans l'obligation de licencier l'ensemble des salariés de la société CIDER SANTE et la décision de licenciement est fondée sur les besoins de la procédure et rentre dans le champ de l'article L.622-17 du Code de commerce. La résiliation a lieu parce que le contrat n'est plus utile à la procédure ; qu'en conséquence, Maître Y..., ès-qualités sera déboutée de sa demande de mainlevée des saisies pratiquées » ;
ALORS D'UNE PART QUE l'article L.641-13-I du Code de commerce ne vise ni les créances nées pour les besoins de la procédure, ni les créances nées pour les besoins de la liquidation judiciaire parmi les créances assorties d'un privilège de procédure ; qu'en qualifiant l'indemnité due au salarié licencié postérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire de son employeur de «créance née régulièrement pour les besoins de la procédure » pour affirmer que cette créance devait bénéficier d'un traitement préférentiel, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;
ALORS D'AUTRE PART QUE seules les créances nées pendant la poursuite provisoire de l'activité en liquidation judiciaire pour les besoins du déroulement de la procédure ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période bénéficient d'un privilège de procédure ; que tel n'est pas le cas de l'indemnité due au salarié, licencié pour motif économique en raison du prononcé, sans poursuite d'activité, de la liquidation judiciaire de son employé ; qu'en élisant néanmoins une telle créance à un rang privilégié aux motifs erronés qu'«il n'y avait pas lieu de distinguer entre créance indemnitaire liée à la rupture du contrat de travail et créance de salaire lorsque ces créances sont nées après l'ouverture de la procédure collective», la Cour d'appel a de nouveau violé l'article L.641-13-I du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-19351
Date de la décision : 16/06/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Liquidation judiciaire - Jugement - Créanciers postérieurs - Régime de faveur - Domaine d'application - Créance née pour les besoins du déroulement de la procédure - Cas - Créances indemnitaires résultant de la rupture du contrat de travail

Les créances nées régulièrement après le jugement, qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire, pour les besoins du déroulement de la procédure relèvent notamment du privilège institué par l'article L. 641-13-I du code de commerce dans sa rédaction applicable depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2006-845 du 26 juillet 2005 remplaçant l'ancien article L. 621-32 du même code. La cour d'appel, qui a retenu que le licenciement avait été prononcé par le liquidateur conformément à ses obligations dans le cadre de la procédure collective en cours, en a exactement déduit que les créances indemnitaires résultant de la rupture du contrat de travail relevaient de l'article L. 641-13-I précité, peu important que l'activité ait cessé immédiatement


Références :

article L. 641-13-I du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 02 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 jui. 2010, pourvoi n°08-19351, Bull. civ. 2010, V, n° 140
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, V, n° 140

Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat général : M. Lalande
Rapporteur ?: Mme Guyon-Renard
Avocat(s) : Me Blanc, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.19351
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award