LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant rappelé que la caducité de la vente n'était pas discutée et retenu que la clause pénale n'était prévue qu'au seul cas où l'une des parties refuserait de réitérer la vente, ce qui supposait que les conditions suspensives avaient été remplies ce qui n'était pas le cas, la cour d'appel, sans dénaturation, en a exactement déduit que Mme X... n'était pas fondée à demander l'attribution de la clause pénale ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant souverainement retenu que Mme X... ne caractérisait aucune faute de la société civile immobilière
Y...
qui serait à l'origine d'un préjudice, la cour d'appel, sans dénaturation, a pu en déduire que sa demande de réparation devait être rejetée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondée ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident formé par la société civile immobilière
Y...
:
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 19 février 2009) que le 29 novembre 2005 la société civile immobilière
Y...
(la SCI) a acquis un immeuble appartenant à Mme X..., la convention prévoyant la consignation par l'acquéreur de la somme de 5 000 euros à titre de dépôt de garantie ;
Attendu que pour rejeter la demande de restitution formée par la SCI, l'arrêt retient que cette dernière ne justifie pas du dépôt de la somme dont le remboursement est sollicité ;
Qu'en statuant ainsi, alors que Mme X... ne contestait pas la réalité du versement du dépôt de garantie par la SCI et n'avait pas conclu au rejet de la demande de restitution, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la SCI Y... de sa demande en restitution du dépôt de garantie, l'arrêt rendu le 19 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à la SCI Y... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de Mme X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme X... (demanderesse au pourvoi principal).
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR refusé de condamner le promettant à payer à la bénéficiaire de la promesse la somme d'un montant de 44. 972 euros au titre de la clause pénale ;
AUX MOTIFS QUE « Madame X... n'est pas fondée à réclamer le bénéfice de la clause pénale prévue au seul cas où l'une des parties refuserait de réitérer la vente, ce qui suppose que les conditions suspensives ont été remplies, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; Qu'elle ne soutient pas que la SCI Y... aurait empêché la condition d'être accomplie ; Que dès lors le premier juge ne pouvait condamner l'acquéreur à payer une somme à ce titre ».
ALORS, D'UNE PART QU'aux termes de l'acte en date du 29 novembre 2005 (production n° 4, p. 4 et p. 5), il a été prévu que « les présentes sont expressément soumises aux conditions suspensives ci-après : que les titres de propriété antérieurs et les pièces d'urbanisme ou autres obtenus ne révèlent pas de servitudes, autres que celles éventuellement indiquées aux présentes, ni de vices non révélés aux présentes, pouvant grever l'immeuble et en diminuer sensiblement la valeur ou le rendre impropre à la destination que l'acquéreur déclare être l'habitation. Il est précisé que cette condition suspensive est stipulée au seul bénéfice de l'acquéreur qui sera seul fondé à s'en prévaloir. Au cas où il déciderait de ne pas s'en prévaloir, il serait seul tenu des inconvénients en résultant, sans recours contre quiconque. Qu'aucun droit de préemption pouvant exister ne soit exercé. Que l'état hypothécaire ne révèle pas des inscriptions dont la charge augmentée du coût des radiations à effectuer serait supérieure au prix, et pour lesquelles inscriptions il n'aurait pas été obtenu de dispense de purge des hypothèques. Vente par l'acquéreur d'un bien immobilier lui appartenant : La réalisation des présentes est soumise à la vente par l'acquéreur d'un bien immobilier lui appartenant, bien immobilier sis à .... Cette vente est indispensable à l'acquéreur à l'effet de constituer son apport personnel dans le cadre des présentes. L'acquéreur déclare :- avoir, pour ledit bien, conclu sous diverses conditions suspensives non encore accomplies un avant contrat en date du 18 novembre 2005. – que la date de réalisation convenue de cet avant contrat est fixée au plus tard le 2 mai 2006 ;- que les dispositions de l'article L 271-1 du Code de la Construction et de l'Habitation, dans la mesure où elles s'appliquent à cet avant contrat, ont été purgées. Il est expressément convenu entre les parties que si la vente du bien n'est pas conclue dans le délai sus-indiqué, la présente convention sera considérée comme nulle et non avenue au seul choix du vendeur et le dépôt de garantie éventuellement versé par l'acquéreur lui sera rendu immédiatement, sauf application des dispositions de l'article 1178 du Code civil aux termes duquel : « La condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition qui en a empêché l'accomplissement ». Absence de prêt application des dispositions des articles L 312-1 à L 312-36 – Chapitre II (Crédit Immobilier) du Livre III du Code de la Consommation relatif à l'information et à la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier : L'acquéreur reconnaît avoir été informé des dispositions desdits articles et déclare ne vouloir recourir à aucun prêt pour le paiement, en tout ou partie, du prix de cette acquisition. Si, contrairement à cette déclaration, il avait néanmoins recours à un tel prêt, il reconnaît avoir été informé qu'il ne pourrait, en aucun cas, se prévaloir des dispositions de ladite loi et notamment de la condition suspensive prévue aux articles L 312-1 à L 312-36 sus-visés. A cet égard, l'acquéreur porte aux présentes sous la forme manuscrite la mention suivante prévue à l'article L 312-17 du Code de la Consommation : « Je reconnais avoir été informé que si, contrairement aux indications portées dans le présent acte, j'ai besoin de recourir néanmoins à un prêt, je ne pourrai me prévaloir du statut protecteur institué par la loi du 13 juillet 1979 insérée dans le Code de la Consommation. Clause pénale : Au cas où, toutes les conditions relatives à l'exécution des présentes étant remplies, l'une des parties, après avoir été miese en demeure, ne régulariserait pas l'acte authentique et ne satisferait pas ainsi aux obligations alors exigibles, elle devra verser à l'autre partie la somme de 44. 972, 00 euros à titre de clause pénale, conformément aux dispositions des articles 1152 et 1226 du Code civil, indépendamment de tous dommages et intérêts. Il est précisé que la présente clause pénale ne peut priver, dans la même hypothèse, chacune des parties de la possibilité de poursuivre l'autre en exécution de la vente » ; qu'en déduisant de ces termes clairs et précis que l'absence d'octroi d'un crédit à la date de signature constituait une condition suspensive dont l'absence d'exécution empêchait le jeu de la clause pénale prévue dans le même acte en date 29 novembre 2005 (Arrêt de la Cour d'appel de POITIERS, Production n° 3), la Cour d'appel en a dénaturé le sens et la portée, violant de ce chef l'article 1134 du Code civil.
ALORS, D'AUTRE PART, QU'aux termes de ses conclusions récapitulatives en date du 7 novembre 2008 (Production n° 1), Madame X... avait repris les termes du jugement du Tribunal de Grande Instance de SAINTES et ainsi fait valoir que « bien que se déclarant toujours désireux d'acquérir l'immeuble, les gérants de la société n'ont pas plus été en mesure de signer l'acte authentique, demandant un report de signature au 29 mai 2006, le temps que les fonds soient débloqués ; que s'il n'est pas discutable que les gérants de la SCI Y... ont tout mis en oeuvre pour arriver à la conclusion effective de la transaction, force est de constater que Madame X... était, conformément aux clauses de la convention, en droit de renoncer à la vente, dès lors que la défaillance de l'acquéreur était acquise au 2 mai 2006 et réitérée le 15 mai 2006 ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen qui était de nature à influer sur la solution du litige, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Nouveau Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR refusé de condamner le promettant à payer à la bénéficiaire de la promesse la somme d'un montant de 44. 972 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « si l'échec de la vente a pu lui (Madame X...) causer le préjudice qu'elle invoque consistant en l'exposé de frais pour préparer son déménagement et la remise en cause de son projet d'installation dans une autre région, elle ne caractérise, ni même n'invoque, aucune faute de la SCI Y... qui serait à l'origine de celui-ci. Que si la SCI Y... a fait publier le procès verbal de carence établi le 29 mai 2006 et le compromis de vente dont elle se prévalait pour poursuivre la réalisation de celle-ci, cela ne pouvait suffire à interdire à Madame X... de remettre en vente son bien, les termes de l'acte du 29 novembre 2005 lui permettant manifestement de se prévaloir de sa caducité, de sorte qu'elle n'avait rien à craindre de la réclamation de la SCI Y... et de l'action engagée pourvoir déclarer parfaite la vente ; qu'ainsi l'attitude de la SCI Y... qui a tenté, moins d'un mois après que la caducité soit acquise, de parvenir à la réalisation de la vente qu'elle avait pu financer entre temps, mais qui s'est alors vu opposer un refus de la venderesse, n'a pas engagé sa responsabilité ».
ALORS QU'aux termes des conclusions récapitulatives en date du 7 novembre 2005 (production n° 1, p. 3, § 6 à § 10, p. 4, § 1 et § 2), Madame X... a indiqué que « Madame Z..., acheteuse, suivant les termes du compromis signé par elle le 18 novembre 2005 avec la SCI Y..., concernant le bien appartenant à ladite SCI et situé au ..., avait fait part dès le 27 décembre 2005 de la réponse négative opposée à sa demande de prêt, qu'une prolongation du compromis avait été accordée le 27 décembre 2005 à Madame Z..., laquelle en définitive, devait annuler son achat suivant lettre recommandée avec accusée de réception en date du 25 janvier 2006 ; Que c'est dans ce contexte que la Société Y... adressait tout bonnement une carte postale à Madame X... le 6 février 2006, en lui donnant rendez-vous « pour le grand chambardement du 27 avril », s'agissant de son déménagement ; Que le 24 février 2006, Madame X... avait accepté le devis d'un déménageur, versant à cette occasion un chèque de 925 euros ; Que la Société Y..., et précisément ses deux associés, Madame Renée A... et Monsieur Roger D..., se trouvaient en Guadeloupe, pour un séjour de trois mois, et qu'ils n'en sont revenus qu'à la mi-carême (mars) sans prévenir Madame X... de quoi que ce soit ; Que le 30 mars, Madame X... recevait une correspondance du notaire la convoquant pour une signature de l'acte de vente avec le époux Y... ; Qu'en conséquence, Madame X... a cru légitimement disposer de la possibilité de vendre ceux de ses meubles trop encombrants, ce à quoi elle procédait ; Que le 14 avril, Monsieur D... téléphonait à Madame X... lui annonçant « un petit retard dans notre transaction, les Z... ont en effet des difficultés » ; qu'en déduisant de ces termes clairs et précis que Madame X... « ne caractérise, ni même n'invoque, aucune faute de la SCI Y... qui serait à l'origine de celui-ci (le préjudice) » (Arrêt de la Cour d'appel de POITIERS, p. 4, § 3, Production n° 3), la Cour d'appel en a dénaturé le sens et la portée, violant de ce chef l'article 1134 du Code civil.
Moyen produit par la SCP Tiffreau et Corlay, avocat aux Conseils pour la SCI Y... (demanderesse au pourvoi incident).
La SCI Y... reproche à la Cour d'appel de l'AVOIR déboutée « de sa demande de remboursement d'une somme de 5. 000 euros au titre du dépôt de garantie »,
AUX MOTIFS QUE « la SCI Y... ne justifie pas avoir déposé la somme de 5. 000 euros prévue au titre du dépôt de garantie, aucune quittance ou reçu n'étant produit et les termes de l'acte ne démontrant pas que la remise de cette somme est intervenue (…) »,
ALORS QUE 1°) dans le « bordereau de pièces » annexé à ses dernières conclusions signifiées le 14 novembre 2008 (p. 7), la SCI Y... produisait en pièce « 10 » le « PV de carence du 15 mai 2006 », en l'occurrence le « procès-verbal de difficultés » dressé « à la requête de Madame Janine Marie Marthe Yvonne X... », en « présence » de « la Société dénommée SCI Y... (…) représentée par Monsieur Roger D... et Madame Renée A..., ci-dessus nommée », avec la mention « après lecture faite, les parties sont signé le présent acte avec le notaire soussigné, à l'exception de Madame X... qui a déclaré ne pas vouloir le signer » ; que cet acte dressé en forme authentique entre les parties par « Maître Bernard B..., Notaire associé », énonçait au deuxième alinéa de sa page 3 que « aux termes du compromis de vente, l'acquéreur a expressément renoncé à la condition suspensive d'un prêt et a versé un dépôt de garantie d'un montant de CINQ MILLE EUROS (5. 000 €) » ; qu'en omettant de s'expliquer sur cette pièce régulièrement produite aux débats et ainsi soumis à la libre discussion des parties, la Cour d'appel l'a dénaturée par omission et violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile
ALORS QUE 2°), au surplus, en déclarant non établi le versement par la SCI Y... du dépôt de garantie, quand ce fait ne faisait l'objet d'aucune contestation de la part de Mme X..., qui n'avait pas conclu au rejet de la demande de « dire que le dépôt de garantie de 5. 000 € doit être restitué à la SCI Y... », la Cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile