LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 novembre 2008), que M. X..., engagé le 8 novembre 2003 en qualité de " Head of Equity Management " par la société DWS investments, société de gestion de portefeuille aux droits de laquelle se trouve la société DWS Finanz services GMBH, a été licencié le 9 août 2005 pour, d'une part, insuffisance de résultats et prise de positions inacceptables et pour, d'autre part, refus de collaboration, provocations et critiques répétées ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :
1° / que le salarié conserve un droit de critique dès lors que son attitude ne nuit pas à la bonne marche de l'entreprise ; qu'en considérant que les propos suivants figurant dans les courriers qu'il a adressés à son employeur : " puisque vous semblez passionné par l'anecdote ", " je ne crois pas là que vos propos répondent au minimum de sérieux attendu ", " il n'existe absolument aucun soutien commercial je vous répète qu'il n'existe absolument aucune politique ou stratégie digne de ce nom ", " le climat actuel et ses événements les plus récents devraient peut-être vous amener à réflexion et autocritique " et " courriers déplacés ", étaient assimilables à des réflexions " sardoniques " qui justifiaient son licenciement, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé un abus du droit de critique, a violé l'article L. 1121-1 (anciennement L. 120-2) du code du travail ;
2° / que si le refus opposé par le salarié d'exécuter le travail pour lequel il a été embauché est de nature àjustifier son licenciement, encore faut-il que les instructions qui lui sont données soient suffisantes pour lui permettre de mener à bien la tâche demandée ; qu'en estimant que le grief qui lui est fait d'avoir refusé de rédiger des commentaires de gestion était fondé, tout en constatant qu'il avait simplement demandé à ce que les caractéristiques de ces fiches lui soient précisées et que M. Y..., " responsable des fonctions supports à la vente et des relations consultants ", s'était borné à " expliciter en quelques mots ce qu'il attendait ", la cour d'appel, qui n'a pas constaté qu'il était effectivement en mesure de réaliser la tâche qui lui était demandée, a violé les articles L. 1235-2 et suivants (anciennement article L. 122-14-4) du code du travail ;
3° / que la lettre de licenciement fixe les limites du débat ; que dans la lettre de licenciement du 9 août 2005, il lui est reproché d'avoir pris des risques excessifs sur la place de Madrid, de sorte qu'en retenant à son encontre le fait d'avoir " dépassé les ratios résultant de l'application de l'article R. 214-6 du Code monétaire et financier et cela de manière importante ", cependant que ce grief ne figurait pas dans le courrier de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 (anciennement L. 122-14-2) du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement l'existence et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu, sans excéder les limites du débat, fixées par la lettre de licenciement, que le salarié avait fait preuve d'insubordination en refusant d'établir des commentaires de gestion et qu'il avait abusé de sa liberté d'expression en adoptant un ton insolent dans ses rapports avec la hiérarchie ; qu'usant ensuite du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, elle a décidé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QU'il ressort des courriers adressés par Monsieur X... à la direction de DWS que celui-ci a adopté à son égard un ton insolent et ironique comportant, pour celui du 24 juin 2005, les phrases citées dans la lettre de licenciement, qui peuvent être assimilées à des réflexions " sardoniques " et constituent autant de critiques de son action, critiques et réflexions qui se retrouvent dans divers courriers électroniques produits ; que, pour établir la réalité du refus par Monsieur X... de rédiger des commentaires de gestion, il est produit des attestations de Monsieur A..., de Monsieur B... et de Monsieur C... en ce sens, attestations confortées par un courrier électronique émanant de Monsieur D... et adressé à Monsieur X... dans lequel il est demandé à ce dernier de rédiger ces commentaires de gestion des fiches mensuelles et des plaquettes semestrielles pour l'ensemble des fonds qu'il gère et, au plus tard, pour le 12 juillet pour ce qui concerne le mois de juin 2005 ; qu'il apparaît d'un courrier électronique du 12 juillet 2005 que Monsieur X... ne s'y est pas conformé puisqu'après avoir démenti son refus, il s'est offert de rédiger ces commentaires tout en en demandant les caractéristiques ; qu'il ressort d'un autre courrier électronique que Monsieur Guy Y..., responsable des fonctions supports à la vente et des relations consultants, a explicité, le 15 juillet 2005, en quelques mots ce qu'il attendait et que un " COO Board Member ", Alexis B..., a invité, le 4 août 2005, Monsieur X... à faire le nécessaire ; que ces documents établissent une mauvaise volonté réelle et persistante de Monsieur X... à satisfaire cette légitime demande, celui-ci étant le mieux placé en tant que gérant de ces fonds pour rédiger ces commentaires ; qu'ainsi, les autres faits invoqués pour illustrer le refus de collaboration, les provocations et critiques répétées de Monsieur X... sont ainsi établis ; qu'à l'appui du reproche de l'insuffisance de résultats et prise de position inacceptable, il est invoqué dans la lettre de licenciement que le journal " Les Echos " a fait paraître un comparatif des fonds européens dans lequel deux des fonds gérés par Monsieur X... figurent parmi les derniers ; qu'un client avait demandé son licenciement ; qu'il lui avait été attribué un bonus de 15. 000 € " pour le motiver " et, enfin, que Monsieur X... avait pris des positions faisant courir aux fonds qu'il gérait une exposition au risque hors norme et que, à la date de son licenciement, il considérait encore cela comme justifié ; qu'il est produit l'article susvisé du quotidien " Les Echos " daté du 3 décembre 2004 ; que toutefois ce document ne saurait fonder un licenciement intervenu huit mois plus tard, après l'attribution d'une prime " d'encouragement ", quelle que soit la faiblesse de son montant ; qu'en se qui concerne l'exposition au risque, il est notamment produit copie de l'article R. 214-6 du Code monétaire et financier, un document intitulé " exposition portefeuille DWS HAUSMAN EUROPE ", dépourvu de date et de toute certification, des courriers électroniques échangés en octobre 2004, une attestation confirmant qu'à cette date, l'exposition au risque de DWS HAUSMAN EUROPE était largement supérieure à ce qui est raisonnable ; que cette attestation et les courriers électroniques, s'ils établissent en effet une exposition excessive au risque, font référence à une situation antérieure à l'octroi de la prime d'encouragement, ce qui autorise à considérer qu'en dépit d'une gestion imprudente, DWS INVESTMENTS n'estimait pas cela comme blâmable ; que, cependant, il est justifié par la production d'un échange de courriers électroniques qu'Emmanuel X... a bien, à nouveau, précisément en juin 2005, dépassé les ratios résultant de l'application de l'article R. 241-6 du Code monétaire et financier et cela de manière importante ; que Monsieur X... l'a d'ailleurs admis dans un courrier en réponse, dans lequel il explique que ces dépassements sont dus au simple mouvement de valeurs des actions et non pas à des acquisitions d'actions ; que les dispositions de l'article R. 214-6 du Code monétaire et financier ne permettent pas que la valeur totale des instruments émis par un même émetteur dépasse 40 % de l'actif, sauf à contraindre l'organisme de placement de valeurs mobilières à ne pas dépasser 5 % de son actif en instruments financiers émis par une même identité, et sous peine de sanctions par l'AMF ; qu'ainsi, il apparaît donc bien établi que, bien que son attention ait été attirée en octobre 2004 sur une exposition au risque excessive et contraire aux règles du Code monétaire et financier, Monsieur X... n'en a pas tiré les leçons et réitéré ce comportement ; que cette attitude, jointe au fait qu'il avait adopté, peu avant son licenciement une attitude insolente et même l'insubordination vis-à-vis de sa direction, justifiait son licenciement ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le salarié conserve un droit de critique dès lors que son attitude ne nuit pas à la bonne marche de l'entreprise ; qu'en considérant que les propos suivants figurant dans les courriers adressés par Monsieur X... à son employeur : " puisque vous semblez passionné par l'anecdote ", " je ne crois pas là que vos propos réponde au minimum de sérieux attendu ", " il n'existe absolument aucun soutien commercial je vous répète qu'il n'existe absolument aucune politique ou stratégie digne de ce nom ", " le climat actuel et ses événements les plus récents devraient peut-être vous amener à réflexion et autocritique " et " courriers déplacés ", étaient assimilables à des réflexions " sardoniques " qui justifiaient le licenciement de Monsieur X... (arrêt attaqué, p. 5 § 3 et 5), la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé un abus par le salarié de son droit de critique, a violé l'article L. 1121-1 (anciennement L120-2) du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE si le refus opposé par le salarié d'exécuter le travail pour lequel il a été embauché est de nature à justifier son licenciement, encore faut-il que les instructions qui lui sont données soient suffisantes pour lui permettre de mener à bien la tâche demandée ; qu'en estimant que le grief fait à Monsieur X... d'avoir refusé de rédiger des commentaires de gestion était fondé, tout en constatant que le salarié avait simplement demandé à ce que les caractéristiques de ces fiches lui soient précisées et que Monsieur Y..., " responsable des fonctions supports à la vente et des relations consultants ", s'était borné à " expliciter en quelques mots ce qu'il attendait " (arrêt attaqué, p. 6 § 2), la cour d'appel, qui n'a pas constaté que Monsieur X... était effectivement en mesure de réaliser la tâche qui lui était demandée, a violé les articles L. 1235-2 et suivants (anciennement article L. 122-14-4) du Code du travail ;
ALORS, ENFIN, QUE la lettre de licenciement fixe les limites du débat ; que dans la lettre de licenciement du 9 août 2005, il est reproché à Monsieur X... d'avoir pris des risques excessifs sur la place de MADRID, de sorte qu'en retenant à l'encontre du salarié le fait d'avoir " dépassé les ratios résultant de l'application de l'article R. 214-6 du Code monétaire et financier et cela de manière importante " (arrêt attaqué, p. 6 § 9), cependant que ce grief ne figurait pas dans le courrier de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 (anciennement L122-14-2) du Code du travail.