LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., né le 16 août 1946, a sollicité une évaluation de ses droits à pension auprès de la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion (la caisse) ; que le relevé qui lui a été adressé le 2 mars 2007 validait cent huit trimestres, mais ne retenait pas diverses périodes d'activité qu'il avait signalées ; que M. X... a saisi une juridiction de sécurité sociale ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 351-2, alinéa 1er, et R. 351-11 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 1315 du code civil ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que les périodes d'assurance vieillesse ne peuvent être retenues, pour la détermination du droit à pension, que si elles ont donné lieu au versement d'un minimum de cotisations ; qu'en cas de force majeure ou d'impossibilité manifeste pour l'assuré d'apporter la preuve du versement de cotisations, celle-ci peut l'être à l'aide de documents probants ou de présomptions concordantes ;
Attendu que pour dire que la pension de M X... devait être calculée sur cent vingt deux trimestres au lieu des cent douze retenus par le tribunal, l'arrêt retient que devaient être ajoutés, d'une part, deux trimestres pour un travail effectué chez Burotech de septembre 1990 à février 1991, "cette société ayant été liquidée judiciairement peu après", et d'autre part, huit trimestres pour un travail effectué chez Lamina développement "dont attestent des coupures de journaux" ;
Attendu cependant, que si les textes susvisés n'excluent pas la preuve par présomption du versement ou du précompte des cotisations, les documents qui ne comportent aucune précision quant aux dates et au montant des précomptes ou versements prétendument effectués ne peuvent en tenir lieu ;
Qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juillet 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Delvolvé, avocat aux Conseils, pour la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les droits à pension de retraite de Jean Claude X... devaient être déterminés sur la base de 122 trimestres, d'avoir condamné la CGSSR à lui verser l'arriéré depuis la date d'entrée en jouissance de cette pension, et à lui payer la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts
AUX MOTIFS QUE selon l'article R.351-1 du Code de la sécurité sociale , «les droits à l'assurance vieillesse sont déterminés en tenant compte 1 ° des cotisations versées au titre de la législation sur les assurances sociales et arrêtées au dernier jour du trimestre civil précédant la date prévues pour l'entrée en jouissance de la pension... 2 ° de l'âge atteint par l'intéressé à cette dernière date 3° du nombre de trimestres d'assurances valables pour le calcul de la pension» ; qu'en application de l'article R.351-6 dudit Code, la durée maximum d'assurance est de 156 trimestres pour les assurés nés en 1946, ce qui était le cas de Monsieur X... (né le 16 août 1946) ; que selon l'article L.351-2 «les périodes d'assurances ne peuvent être retenues, pour la détermination de la pension ou de la rente, que si elles ont donné lieu à versement d'un minimum de cotisations. En cas de force majeure ou d'impossibilité manifeste pour l'assuré d'apporter la preuve du versement des cotisations, celle-ci peut l'être à l'aide de documents probants ou de présomptions concordantes» ; que ceci ne signifiait pas, comme semblait le croire l'assujetti, qu'il devait être cru sur sa parole mais seulement que des éléments qui n'auraient normalement pas été de nature à prouver la réalité des versements allégués (tels certificats de travail, bulletins de paye, attestations...) pouvaient être retenus par la juridiction à titre de présomptions, étant acquis que ces dernières ne résultent pas nécessairement de documents ; qu'au cas particulier, la CGSSR avait retenu 108 trimestres s'échelonnant de 1962 à 1992, y compris des périodes militaires en 1965, 1966 et 1967 (une activité au titre du régime général s'y ajoutant en 1965 et 1967) et des périodes de chômage en 1985, 1988, 1989 et 1991 ; que Jean Claude X... faisait valoir qu'ayant longtemps vécu à l'étranger et été pionnier dans de nombreux domaines, il n'était pas en possession de justificatifs d'une activité pourtant réelle au service d'entreprise dont plusieurs avaient fait l'objet de procédures collectives, ni de diplômes théoriquement indispensables à l'exercice de son ancien métier d'ingénieur, d'autant qu'il avait vécu un «divorce sévère» ; que son activité bénévole régulière à Madagascar devait également rentrée en ligne de compte, conformément aux engagements pris par l'actuel Président de la République au cours de la campagne qui avait précédé son élection ; enfin qu'il devait bénéficier des dispositions relatives aux débuts de carrière précoce ; qu'il entendait, plus précisément, voir prendre en considération, en sus des périodes retenues par la CGSSR et de celles pendant lesquelles il avait perçu le revenu minimum d'insertion (de novembre 1996 à 2001 soit 16 trimestres) ou l'ARA, celles où il avait été au service de : La Statistique, en 1978/80 pendant 5 trimestres ; de l'ITA, en 1978/79, pendant 5 trimestres, de Adéquat Services en 1987, pendant 1 trimestre, de Buroteck en 1990/91 pendant 2 trimestres, de IFT en 1992 pendant 4 trimestres, de Lamina Editions en 1997/99 (ayant perçu le RMI pendant cette période, il ne la comptabilisait pas une seconde fois) : qu'en fonction des considérations précédentes, c'était à juste titre que les premiers juges avaient retenu, en plus des périodes admises par l'organisme social, les quatre trimestres de 1979 au cours desquels Monsieur X... avait cotisé à l'ARRCO au titre d'un emploi salarié à La Statistique (cf récapitulatif de carrière établi par cette caisse complémentaire) ; qu'il convenait d'y ajouter les deux trimestres pendant lesquels il avait travaillé chez Burotech (septembre 1990 à février 1991), société qui avait été liquidée judiciairement peu après, et les 8 trimestres passés chez Lamina Développement dont attestaient des coupures de presse, mais non celles au cours desquelles il avait perçu le RMI ou l'ARA qu'aucun texte ne considérait comme équivalentes à une activité salariée donnant lieu à cotisations ; qu'aucun élément n'étayait en revanche les allégations de Monsieur X... au sujet d'emplois salariés qu'il aurait occupés de février 1962 à décembre 1964 (et donc de la carrière précoce qu'il invoquait) —dont il reconnaissait loyalement qu'il n'existait plus de trace officielle- et les engagements présidentiels ne s'étaient pas traduits en droit positif, de sorte que l'activité bénévole qu'il avait déployée à Madagascar pendant trois ans et demi n'avait aucune incidence sur ses droits à retraite ; que ceux-ci devaient être calculés sur la base d'une durée de 122 trimestres ; qu'il convenait de condamner la CGSSR au paiement des montants arriérés depuis la date à laquelle Monsieur X... devait entrer en jouissance et au paiement de 500 € à titre de dommages et intérêts
ALORS QUE si l'article L.351-2 du Code de la sécurité sociale permet à l'assuré, en cas de force majeure ou d'impossibilité manifeste d'apporter la preuve du versement de cotisations, de l'établir à l'aide de documents probants ou de présomptions concordantes, ni la circonstance qu'une société au sein de laquelle l'assuré aurait exercé une activité aurait « été liquidée judiciairement peu après », ni des coupures de presse dont on ignore la teneur, ne sauraient en tenir lieu ; et qu'en se fondant sur des circonstances impropres à établir, même par présomptions, le précompte des cotisations sur les salaires qui auraient été versés par les sociétés BUROTECK et LAMINA DEVELOPPEMENT à l'époque à Monsieur X..., la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L.351-2, R.351-11 du Code de la sécurité sociale et 1315 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
SUBSIDIAIREIL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Caisse générale de sécurité sociale de La Réunion à verser à Monsieur X... la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts
AUX MOTIFS QUE la CGSSR a retenu 108 trimestres pour le calcul de la pension de vieillesse de Monsieur X..., mais qu'il y a lieu de retenir également 4 trimestres de 1979 au cours desquels l'intéressé a cotisé à l'ARRCO, deux trimestres pendant lesquels il a travaillé chez BUROTECK et les huit trimestres passés chez LAMINA DEVELOPPEMENT
ALORS QU'en s'abstenant de caractériser la moindre faute qui aurait été commise par la CGSSR dans le calcul des droits à pension vieillesse de l'intéressé, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.