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07/04/2010 | FRANCE | N°09-11196

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 avril 2010, 09-11196


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société ABN Amro bank Nv que sur le pourvoi incident relevé par la société Lagardère SCA :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 novembre 2008), que la société Lagardère SCA (la société Lagardère) a émis, au mois d'avril 1993, des obligations convertibles en actions puis, au mois d'avril 1994, des titres comportant des bons de souscription d'actions (BSA) qui en ont par la suite été détachés ; que la société MFK contrepartie, aux droits

de laquelle se trouve la société ABN Amro bank Nv (la société ABN Amro) détenai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société ABN Amro bank Nv que sur le pourvoi incident relevé par la société Lagardère SCA :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 novembre 2008), que la société Lagardère SCA (la société Lagardère) a émis, au mois d'avril 1993, des obligations convertibles en actions puis, au mois d'avril 1994, des titres comportant des bons de souscription d'actions (BSA) qui en ont par la suite été détachés ; que la société MFK contrepartie, aux droits de laquelle se trouve la société ABN Amro bank Nv (la société ABN Amro) détenait des obligations qui ont été converties le 8 juillet 1996, ainsi que des BSA qui ont été exercés le 4 mars 1997 ; que la société ABN Amro, faisant valoir que la société Lagardère avait procédé, au titre des exercices 1993 et 1994, à des distributions de dividendes prélevés pour partie sur le compte primes d'apport sans que ces distributions aient donné lieu à un ajustement des modalités de conversion des obligations et des droits de souscription conférés par les BSA, a fait assigner cette dernière par acte du 31 mai 2006 ; que, déclarant agir sur le fondement de la gestion d'affaire pour le compte de la masse des titulaires d'obligations convertibles émises en 1993 et de la masse des titulaires de BSA émis en 1994, elle a demandé, avant dire droit, que la société Lagardère soit condamnée à convoquer une assemblée générale de chacune de ces deux masses afin que celles-ci statuent sur l'opportunité de reprendre la procédure à leur compte et, au fond, que la société Lagardère soit condamnée à délivrer une action et à payer 1 euro, sauf à parfaire, à chacune des deux masses ; qu'à titre subsidiaire, la société ABN Amro a demandé que la société Lagardère soit condamnée à lui délivrer un certain nombre d'actions et à lui payer des dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que la société ABN Amro fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevables les demandes formées pour le compte des masses des titulaires de BSA et des titulaires d'actions convertibles, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 64-II de l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004, "les valeurs mobilières donnant accès au capital ou droit à l'attribution de titres de créances, émises sur le fondement des régimes prévus par les sous-sections 2, 3 et 4 de la section 4 du chapitre V du titre II du livre II du code de commerce, sont régies, à compter de l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, par la sous-section 4 de la section 3 et par la section 6 du chapitre VIII du titre II du livre II du même code, sous réserve du maintien des droits des titulaires définis par le contrat d'émission, lorsque celui-ci est antérieur à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance" ; que pour déclarer irrecevable la demande de la société ABN Amro, fondée sur la gestion d'affaires pour le compte des masses des porteurs de BSA, la cour d'appel a retenu que ces dernières ne pouvaient bénéficier des dispositions de ladite ordonnance, datée de 2004, ni donner dès lors naissance à la masse de porteurs qu'elle prévoit, compte tenu du fait qu'elles devaient au plus tard être exercées antérieurement, à savoir le 1er juillet 1997 ; qu'en se déterminant ainsi, quand les dispositions transitoires de ladite ordonnance ont explicitement réservé l'hypothèse des BSA émis avant l'entrée en vigueur du texte, quelle que soit leur date d'émission, pour les soumettre aux dispositions de ce dernier, la cour d'appel a violé l'article susvisé, ensemble l'article L. 228-103 du code de commerce, ensemble l'article 1372 du code civil ;
2°/ que, quand bien même la loi ne serait pas rétroactive, il n'en reste pas moins que les masses des porteurs existent en fait, de par la convergence des intérêts qui leur sont communs et qu'en tout cas, chaque porteur se trouve pourvu d'intérêts qu'un gérant peut préserver ; qu'en décidant l'inverse pour faire obstacle à la reconnaissance de la gestion d'affaires de ces intérêts communs, pris collectivement ou séparément, la cour d'appel a violé l'article 1372 du code civil ;
3°/ que la gestion d'affaires est l'acte par lequel un gérant s'occupe volontairement des affaires d'un géré, et pour son utilité, quoi qu'il n'ai reçu ni mandat ni autorisation, par des actes de conservation, d'administration ou de disposition ; qu'en l'espèce, la société ABN Amro a soutenu être fondée, pour l'utilité des masses de porteurs de BSA et d'obligations convertibles, compte tenu de l'inaction ou de l'absence de désignation de leurs représentants, à agir à titre conservatoire, afin que fût ordonnée la convocation d'assemblées générales permettant de décider de la poursuite de la procédure en leur nom ; que pour déclarer cette demande irrecevable, la cour d'appel a retenu, lors même que la masse des porteurs aurait survécu à l'échéance, qu'elle se heurtait aux dispositions impératives de l'article L. 228-54 du code de commerce, lesquelles réservent aux seuls représentants de la masse, dûment mandatés par l'assemblée générale, d'engager toute action défensive de ses intérêts communs ; qu'en se déterminant ainsi, quand les dispositions visées ne sont relatives qu'au mandat et établissent un mécanisme d'autorisation auquel, par hypothèse, celui de la gestion d'affaires est étranger, de sorte qu'elles ne sauraient l'exclure, la cour d'appel a violé l'article L. 228-54 du code de commerce, ensemble l'article 1372 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant énoncé que la gestion d'affaires ne peut jouer au profit d'une personne dépourvue d'existence, et relevé qu'aux termes du contrat d'émission, les BSA litigieux devaient être exercés au plus tard le 1er juillet 1997 et que ceux qui ne l'auraient pas été à cette date n'étaient plus valides, ce dont elle a exactement déduit que les dispositions de l'ordonnance du 24 juin 2004 n'avaient pu avoir pour effet de faire naître une masse des porteurs de BSA, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que les demandes formées pour le compte de ladite masse étaient irrecevables ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant exactement retenu que la société ABN Amro ne saurait, en invoquant les règles relatives à la gestion d'affaires, s'affranchir des dispositions impératives de l'article L. 228-54 du code de commerce selon lesquelles les représentants de la masse, dûment autorisés par l'assemblée générale des porteurs des valeurs mobilières concernées, ont seuls qualité pour engager, au nom de ceux-ci, toutes actions ayant pour objet la défense de leurs intérêts communs, la cour d'appel en a déduit à bon droit que même en admettant que la masse des porteurs d'obligations convertibles ait survécu à l'échéance de leurs dates limites d'amortissement et de conversion, les demandes formées pour le compte de ladite masse étaient irrecevables ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société Lagardère fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable comme non prescrite l'action en responsabilité civile engagée à son encontre par la société ABN Amro agissant pour son propre compte, alors, selon le moyen, que le point de départ d'un délai à l'expiration duquel une action ne peut plus être exercée se situe à la date de l'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance ; qu'en l'espèce, l'obligation qui a donné naissance à l'action de la société ABN Amro était, selon les propres énonciations de l'arrêt attaqué, celle qui imposait à la société Lagardère de procéder, à la suite de la distribution de dividendes pour partie prélevés sur les primes liées au capital au titre des exercices 1993 et 1994, à l'ajustement des parités de conversion ou de souscription des obligations convertibles et des BSA émis en avril 1993 et en avril 1994 ; que cette obligation était exigible dès les distributions de dividendes concernées ; qu'en retenant néanmoins que le délai de prescription n'avait couru contre la société ABN Amro qu'à compter de la date de conversion des obligations et de celle de l'exercice des BSA, soit à des dates postérieures à celles de l'exigibilité de l'obligation donnant naissance à son action, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 110-4 du code de commerce ;
Mais attendu que la prescription de l'action en responsabilité civile exercée par la société ABN Amro, qui avait pour objet la réparation du préjudice consistant dans l'obtention, lors de l'exercice des droits de conversion et de souscription, d'un nombre d'actions inférieur à celui auquel elle pouvait prétendre en vertu du contrat d'émission, n'a pu courir qu'à compter de la manifestation de ce préjudice ; que dès lors, ayant relevé que les obligations avaient été converties le 8 juillet 1996 et que les BSA avaient été exercés le 4 mars 1997, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action en réparation exercée le 31 mai 2006 ne se heurtait pas à la prescription décennale de l'article L. 110-4 du code de commerce ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le second moyen du pourvoi principal ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois, principal et incident ;
Dit que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société ABN Amro bank Nv ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils pour la société ABN Amro bank Nv.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, en cela infirmatif,
D'AVOIR dit que les demandes formées par la société ABN Amro Bank NV pour le compte des masses des titulaires de bons de souscription d'actions BSA et des titulaires d'obligations convertibles OC émis par la société Lagardère étaient irrecevables,
AUX MOTIFS QUE la gestion d'affaires ne peut jouer au profit d'une personne qui n'existe ni en fait ni en droit ; que la société ABN Amro se prévaut vainement des dispositions de l'article 1372 du Code civil en ce qui concerne la prétendue masse des porteurs de BSA litigieux dès lors que, selon le contrat d'émission ces valeurs mobilières devaient être exercées au plus tard le 1er juillet 1997, que celles qui ne l'auraient pas été à cette date ne sont plus valides, et que dans ces conditions les dispositions de l'ordonnance du 24 juin 2004 art. L. 228-103 du code de commerce , applicables aux valeurs mobilières composées déjà émises à la date de son entrée en vigueur, n'ont pu avoir pour effet de faire naître une masse de porteurs de BSA ; qu'en toute hypothèse, l'invocation des règles relatives à la gestion d'affaire par la Société ABN Amro ne sauraient lui permettre de s'affranchir des dispositions impératives de l'article L. 228-54 du Code de commerce selon lesquelles les représentants de la masse sont dûment autorisés par l'assemblée générale des porteurs des valeurs mobilières concernées, ont seuls qualité pour engager au nom de ceux-ci toutes actions ayant pour objet la défense de leurs intérêts communs, toute action intentée contrairement aux dispositions de cet article devant être déclarée d'office irrecevable, ainsi qu'en dispose son alinéa 3 ; que, devrait on admettre l'analyse de la Société ABN Amro selon laquelle la masse des porteurs d'obligations convertibles émises en avril 1993 a survécu à l'échéance, antérieure à l'acte introductif d'instance de leurs dates limites d'amortissement et de conversion, dès lors qu'il existe des intérêts communs à défendre, ces mêmes dispositions conduisent à déclarer irrecevable l'action exercée par la Société ABN Amro pour le compte de ladite masse et tendant à sa convocation en vue de la défense d'intérêts communs des porteurs de titres,
1°) ALORS QU'aux termes de l'article 64-II de l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004, « les valeurs mobilières donnant accès au capital ou droit à l'attribution de titres de créances, émises sur le fondement des régimes prévus par les sous-sections 2, 3, 4 de la section 4 du chapitre V du titre II du livre II du code de commerce, sont régies, à compter de l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, par la sous-section 4 de la section 3 et par la section 6 du chapitre VIII du titre II du livre II du même code, sous réserve du maintien des droits des titulaires définis par le contrat d'émission, lorsque celui-ci est antérieur à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance » ; que pour déclarer irrecevables la demande de la société ABN Amro, fondée sur la gestion d'affaires pour le compte des masses de porteurs de BSA, la cour a retenu que ces dernières ne pouvaient bénéficier des dispositions de ladite ordonnance, datée de 2004, ni donner dès lors naissance à la masse de porteurs qu'elle prévoit, compte tenu du fait qu'elles devaient au plus tard être exercées antérieurement, à savoir le 1er juillet 1997 ; qu'en se déterminant ainsi, quand les dispositions transitoires de ladite ordonnance ont explicitement réservé l'hypothèse des BSA émis avant l'entrée en vigueur du texte, quelle que soit leur date d'émission, pour les soumettre aux dispositions de ce dernier, la cour d'appel a violé l'article susvisé, ensemble l'article L. 228-103 du code de commerce, ensemble l'article 1372 du Code civil,
2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE, quand bien même la loi ne serait pas rétroactive, il n'en reste pas moins que les masses des porteurs existent en fait, de par la convergence des intérêts qui leur sont communs et qu'en tout cas, chaque porteur se trouve pourvu d'intérêts qu'un gérant peut préserver ; qu'en décidant l'inverse pour faire obstacle à la reconnaissance de la gestion d'affaire de ces intérêts communs, pris collectivement ou séparément, la cour d'appel a violé l'article 1372 du Code civil,
3°) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE la gestion d'affaires est l'acte par lequel un gérant s'occupe volontairement des affaires d'un géré, et pour son utilité, quoi qu'il n'en ait reçu ni mandat ni autorisation, par des actes de conservation, d'administration ou de disposition ; qu'en l'espèce, la société ABN Amro a soutenu être fondée, pour l'utilité des masses de porteurs de BSA et de OC, compte tenu de l'inaction ou de l'absence de désignation de leurs représentants, à agir à titre conservatoire, afin que fût ordonnée la convocation d'assemblées générales permettant de décider de la poursuite de la procédure en leur nom ; que pour déclarer cette demande irrecevable, la cour a retenu, lors même que la masse des porteurs aurait survécu à l'échéance, qu'elle se heurtait aux dispositions impératives de l'article L. 228-54 du code de commerce, lesquelles réservent aux seuls représentants de la masse, dûment mandatés par l'assemblée générale, d'engager toute action défensive de ses intérêts communs ; qu'en se déterminant ainsi, quand les dispositions visées ne sont relatives qu'au mandat et établissent un mécanisme d'autorisation auquel, par hypothèse, celui de la gestion d'affaires est étranger, de sorte qu'elle ne saurait l'exclure, la cour a violé l'article L. 228-54 du code de commerce, ensemble l'article 1372 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué
D'AVOIR condamné la société Lagardère, en réparation par équivalent du préjudice causé à la société ABN Amro par la violation de ses obligations contractuelles, à lui payer uniquement la somme de 1.897.122,48 € en principal,
AUX MOTIFS QUE la réparation par équivalent est appropriée aux circonstances, observation étant faite que les valeurs mobilières litigieuses ne sont plus en cours de validité, et la société ABN Amro a exercé en 1996 et 1997 l'intégralité de ses obligations convertibles et BSA et que ladite société, qui admet qu'elle aurait immédiatement cédé les titres dont elle a été privée ne saurait tirer profit ni d'ailleurs souffrir de la variation du cours de l'action Lagardère, ni imposer aux actionnaires actuels de la société Lagardère une dilution de leur participation qu'il n'ont pu anticiper ; qu'il y a donc lieu d'allouer à la société ABN Amro une indemnité égale à la contre-valeur des actions dont elle a été privée du fait de l'absence d'ajustement des droits de souscription attachés aux bons qu'elle a exercé le 4 mars 1997 ; que l'indemnité due correspond à la multiplication de ce nombre par le cours de l'action Lagardère au 4 mars 1997, soit 1.897.122,48 € ; que sur la demande relative aux OC émises par cette société en 1993, la société ABN Amro fait elle-même valoir que la masse des obligataires subsiste et que la faute de la société Lagardère concerne l'ensemble des obligataires, le préjudice leur étant commun ; qu'il a cependant été déclaré que la société Amro était irrecevable, sur le fondement de l'article L. 228-54 du code de commerce, à agir pour le compte de la masse, ce qui conduit à inviter les parties à s'expliquer sur la recevabilité de la demande de réparation liée à l'absence d'ajustement des OC,
1°) ALORS QUE le créancier ne peut pas être contraint d'accepter ou de recevoir autre chose que ce qui lui est du en vertu des engagements souscrits ; qu'il en est ainsi, autant que l'exécution de cette exécution n'est pas impossible, lors même que la chose exigée aurait finalement une valeur plus grande ; qu'en l'espèce, il est établi que la société Lagardère a commis une faute contractuelle, génératrice d'un préjudice à l'égard de la société ABN Amro, en ne procédant pas à l'ajustement des parités de conversion ou de souscription des OC et des BSA litigieuses ; que la société ABN Amro a dès lors demandé l'exécution forcée de cette obligation par la remise d'actions Lagardère, en soulignant qu'il n'était pas besoin d'en émettre de nouvelles et qu'il suffisait que la société Lagardère, soit en remette de celles qu'elle détient, soit qu'elle en achète, la remise s'avérant ainsi possible dans les deux cas ; que pour rejeter cette demande et décider que l'indemnisation devait s'opérer par équivalent, la cour a retenu qu'en toute hypothèse la société ABN Amro aurait immédiatement cédé les titres dont elle a été privé, et qu'elle ne pouvait imposer aux actionnaires de la société Lagardère une dilution non anticipée de leur participation ; qu'en se déterminant par tels motifs, inopérants quant à l'usage qu'auraient fait la société ABN Amro des titres si elle les avaient détenus, et l'exécution demandée soit parfaitement possible, la cour a violé l'article 1243 du code civil,
2°) ALORS QUE, pour écarter encore cette demande, la cour a retenu qu'elle ne pouvait être satisfaite sans conduire à lui faire profiter de la variation du cours de l'action Lagardère ; qu'en se déterminant ainsi, alors que l'exécution forcée peut être exigée du créancier lors même que la chose exigée et convenue aurait finalement une valeur plus grande, la cour a violé l'article 1243 du code civil,
ET AUX MOTIFS QUE en cause d'appel, la Société ABN Amro ne forme aucune demande particulière au titre de la réparation d'un dommage, au demeurant inexistant, qui serait lié à la privation de jouissance des actions manquantes ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement en sa disposition condamnant la Société Lagardère à payer une indemnité également à la privation de jouissance de ces actions résultant de l'absence de perception des dividendes mis en évidence,
3°) ALORS QUE la cour d'appel, qui retient ainsi qu'aucune demande n'était faite au titre du préjudice de jouissance, bien que l'exposante ait expressément fait valoir que sa demande était également fondée sur la privation de jouissance des titres (p. 18, § 4.2), la cour d'appel a dénaturé ses conclusions et a violé l'article 4 du Code de procédure civile,
4°) ALORS QU'en affirmant péremptoirement que ce préjudice n'existait pas sans invoquer aucun élément permettant de justifier cette allégation, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Lagardère.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit recevable, comme non prescrite, l'action en responsabilité civile engagée par la société ABN Amro NV contre la société Lagardère SCA ;
AUX MOTIFS QUE la prescription court à compter du jour où celui contre lequel on l'invoque a pu agir valablement ; qu'en l'espèce, les conditions de l'action en responsabilité exercée contre la société Lagardère se sont trouvées réunies lors de la conversion des obligations, le 8 juillet 1996, et de l'exercice des bons, le 4 mars 1997, dès lors que ce n'est que par l'exercice de son droit d'accès au capital de la société émettrice que la société ABN Amro a pu tenir pour certain que cette dernière n'avait pas procédé aux ajustement des parités d'échange en raison de la délivrance d'un nombre d'actions inférieur à celui qu'elle prétend lui être dû ; que la demande de la société ABN Amro n'est donc pas prescrite, peu important à cet égard que les obligations convertibles et les BSA soient négociables.
ALORS QUE le point de départ d'un délai à l'expiration duquel une action ne peut plus s'exercer se situe à la date de l'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance ; qu'en l'espèce, l'obligation qui a donné naissance à l'action de la société ABN Amro Bank NV était, selon les propres énonciations de l'arrêt attaqué, celle qui imposait à la société Lagardère SCA de procéder, à la suite de la distribution de dividendes pour partie prélevés sur les primes liées au capital au titre des exercices 1993 et 1994, à l'ajustement des parités de conversion ou de souscription des obligations convertibles et des BSA émis en avril 1993 et avril 1994 ; que cette obligation était exigible dès les distributions de dividendes concernées ; qu'en retenant néanmoins que le délai de prescription n'avait couru contre la société ANB Amro Bank NV qu'à compter de la date de conversion des obligations et de celle de l'exercice des bons de souscription, soit à des dates postérieures à celle de l'exigibilité de l'obligation donnant naissance à son action, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L.110-4 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 09-11196
Date de la décision : 07/04/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

SOCIETE COMMERCIALE (règles générales) - Valeurs mobilières émises par les sociétés par actions - Obliigations - Action pour la défense des intérêts communs des obligataires - Qualité pour l'engager - Monopole des représentants de la masse

L'article L. 228-54 du code de commerce réserve aux seuls représentants de la masse, dûment autorisés par l'assemblée générale des obligataires, qualité pour engager, au nom de ceux-ci, toutes actions ayant pour objet la défense de leurs intérêts communs. Ces dispositions impératives excluent que cette défense soit assurée par une autre personne agissant sur le fondement de la gestion d'affaires


Références :

Sur le numéro 1 : ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004
Sur le numéro 2 : article L. 228-54 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 avr. 2010, pourvoi n°09-11196, Bull. civ. 2010, IV, n° 75
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 75

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : Mme Petit (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Petit
Avocat(s) : SCP Ortscheidt, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.11196
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