LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 15 avril 2000 par contrat de travail à temps partiel en qualité de vendeuse par la société La Mouna ; qu'un avenant du 15 octobre 2000 a fixé à 27,30 heures sa durée hebdomadaire de travail ; qu'en août 2003, au cours de la suspension de son contrat de travail, Mme X... a signalé à l'inspection du travail que l'employeur ne lui avait pas rémunéré les heures supplémentaires effectuées ; qu'elle a saisi par la suite la juridiction prud'homale de demandes en paiement d'heures supplémentaires pour la période du 15 avril 2000 au 23 mai 2002 ;
Attendu que pour débouter Mme X... de ses demandes en paiement par la société La Mouna de diverses sommes à titre d'heures supplémentaires, l'arrêt retient que les attestations des trois clientes de l'entreprise, versées aux débats par la salariée, outre le fait qu'elles sont établies en 2007 soit bien après la période considérée, sont imprécises et ne comportent aucune date ou heure mais uniquement des généralités, que de même il n'est pas sérieux pour un client, autre témoin, sauf à être enraciné à la boulangerie, de déclarer avoir vu la salariée de 8 heures du matin à 19 heures, que les attestations d'anciennes salariées ne sont pas davantage probantes par leur absence de précision permettant d'établir la réalité des heures de travail effectuées, qu'au surplus, l'attestation de l'ancien pâtissier de l'entreprise est peu crédible, que par ailleurs que le décompte produit par la salariée qui fait état inconditionnellement de 87 heures de travail par semaine pour toute la période considérée, est manifestement erroné dans la mesure où il résulte des bulletins de salaire qu'elle a comptabilisé des heures de travail pour des périodes où elle était en congés payés ou en absence maladie, qu'enfin les affirmations de la salariée sont contredites par sa déclaration faite à la suite de l'accident du travail survenu le 23 mai 2002, aux termes de laquelle elle précise que ses horaires de travail le jour de l'accident sont de 8 heures 30 à 15 heures 30, ce dont il déduit que les éléments fournis par la salariée sont insuffisants pour étayer sa demande ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'employeur ne fournissait aucun élément et que la demande de la salariée était étayée par diverses pièces, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur la seule salariée, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société La Mouna aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Madame X... de ses demandes en paiement par la SARL LA MOUNA de diverses sommes à titre d'heures supplémentaires ;
Aux motifs que « s'il résulte de l'article L.212-1-1 du code du travail que la preuve des heures de travail n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;
qu'il convient de relever qu'à la suite de l'avenant au contrat de travail en date du 15 octobre 2000, la salariée effectuait contractuellement 27,30 heures de travail par semaine et non plus 23 comme soutenu à tort ;
que les attestations de Mme Z..., Mme A... et Mme B..., clientes de l'entreprise, versées aux débats par la salariée, outre le fait qu'elles sont établies en 2007 soit bien après la période considérée, sont imprécises et ne comportent aucune date ou heure mais uniquement des généralités « je rencontrais X... Christine à son poste tous les jours » ; que de même il n'est pas sérieux pour un client, sauf à être enraciné à la boulangerie, de déclarer avoir vu la salariée de 8 heure du matin à 19 heures (M. C...) ;
que les attestations d'anciennes salariées ne sont pas davantage probantes par leur absence de précision permettant d'établir la réalité des heures de travail effectuées ; qu'au surplus, l'attestation de M. D..., ancien pâtissier de l'entreprise, est peu crédible, dans la mesure où il atteste que X... Christine terminait son travail à 20 heures alors qu'il n'est pas contesté que celui-ci finissait son travail fin de la matinée ;
par ailleurs que le décompte produit par la salariée qui fait état inconditionnellement de 87 heures de travail par semaine pour toute la période considérée, est manifestement erroné dans la mesure où il résulte des bulletins de salaire qu'elle a comptabilisé des heures de travail pour des périodes où elle était en congés payés ou en absence maladie ;
enfin que les affirmations de la salariée sont contredites par sa déclaration faite à la suite de l'accident du travail survenu le 23 mai 2002, aux termes de laquelle elle précise que ses horaires de travail le jour de l'accident sont de 8h30 à 15h30 ;
qu'en conséquence les éléments fournis par la salariée sont insuffisants pour étayer sa demande ; qu'il convient donc de la débouter de ses demandes de rappel de salaire ; que la décision déférée doit en conséquence être infirmée » ;
Alors qu'il résulte de l'article L.3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; que, si le salarié qui demande le paiement d'heures supplémentaires doit fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande, ce dernier ne peut, pour rejeter cette demande, se fonder exclusivement sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié, mais doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés que l'employeur est tenu de lui fournir ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a constaté que la salariée fournissait divers éléments au soutien de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, a rejeté cette demande en se fondant sur l'absence de caractère probant de ces éléments et leur insuffisance, sans examiner les éléments que l'employeur était tenu de lui fournir et de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée, faisant ainsi peser exclusivement sur cette dernière la charge de la preuve en violation du texte susvisé.