LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Patrick,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 15 avril 2009 qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à quinze mois d'emprisonnement avec sursis, et 15 000 euros d'amende, a ordonné la publication et l'affichage de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des impôts, partie civile ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 260, 261 et 1741 du code général des impôts, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Patrick X... coupable de fraude fiscale ;
"aux motifs que l'association Alice, dirigée par Patrick X..., a une activité purement commerciale constituée d'actes de commerce d'achats pour revente ; qu'en effet, l'association n'avait quasiment pas d'adhérents de sorte que son chiffe d'affaires était généré, non par les cotisations de ses membres, quasiment inexistants, mais par les actes de commerce qu'elle réalisait ; qu'en outre, son activité, qui consiste en l'achat pour la revente de produits ménagers, ne couvre pas une activité commerciale non développée par le marché ; qu'en effet, l'achat pour la revente de produits ménagers est une activité courante du secteur commercial ; que, dès lors, peu importe que cette activité soit faite par démarchage téléphonique ; qu'en outre, les bénéfices de l'entreprise ont été déguisés au travers des relations commerciales étroites qu'elle entretenait avec la société Gyro Limited, dont l'activité déclarée consistait en la réalisation de prestations de service de marketing, communication et relations publiques avec pour responsable en France Mme Y..., compagne à l'époque de Patrick X... ayant abandonné ses fonctions de trésorière de l'association Alice le 22 juillet 1998 pour reprendre la tête et avoir un salaire à Gyro Limited France créée le 15 juillet de la même année ; que la corrélation entre ces deux événements permet de constater la volonté de détourner les ressources de l'association Alice au profit indirect de Mme Y... ; qu'il convient de constater également que la société Gyro Limited avait pour seul client pour la période considérée l'association Alice ; que les actes de gestion du président de l'association Alice l'ont été à titre lucratif, à savoir en se rémunérant pour le travail effectué et en rémunérant indirectement Mme Y... mais aussi lui-même comme salarié de Gyro Limited ; qu'ainsi l'association Alice est bien une entreprise commerciale déguisée qui relève de l'imposition d'une entreprise commerciale ;
"1°) alors qu'une association peut être qualifiée comme étant « sans but lucratif » même si elle cherche systématiquement à générer des excédents dès lors qu'elle les affecte par la suite à l'exécution de ses prestations ; qu'en se fondant, pour dire que l'association Alice n'était en réalité qu'une entreprise commerciale, sur la circonstance que ses ressources étaient constituées par le chiffre d'affaires généré par son activité d'achat pour la revente de produits ménagers et non par les cotisations de ses membres, quasiment inexistants, au lieu de rechercher, ainsi que les conclusions d'appel de Patrick X... l'y invitaient, si elle affectait ou non son chiffre d'affaires au financement d'actions répondant au but non lucratif qu'elle s'était assigné, à savoir, selon l'article 2 de ses statuts, «le soutien des enfants et adultes malades, handicapés ou défavorisés», la cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision ;
"2°) alors qu'une association qui intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales bénéficie néanmoins de l'exonération de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée si elle exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, ce qui est le cas, notamment, lorsqu'elle vend ses produits à des prix sensiblement supérieurs à ceux pratiqués par le secteur commercial ; qu'en se fondant encore, pour qualifier l'association Alice d'entreprise commerciale, sur la circonstance que son activité d'achat pour la revente de produits ménagers ne couvrait pas une activité commerciale non développée par le marché sans répondre aux conclusions d'appel de Patrick X... qui faisait valoir que selon les propres constatations de l'administration fiscale, l'association pratiquait des prix nettement supérieurs à ceux du marché, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs ;
"3°) alors que le versement de rémunérations aux dirigeants d'une association ne fait pas obstacle à la reconnaissance du caractère désintéressé de sa gestion dès lors, du moins, que ces rémunération constituent la contrepartie d'un travail effectif et ne sont pas disproportionnées aux ressources de cette association ; que, dès lors, en se fondant, pour dénier un caractère désintéressé à la gestion de l'association Alice, sur la circonstance que son président se rémunérait pour le travail effectué au lieu de rechercher si cette rémunération était proportionnée aux ressources de l'association, la cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision ;
"4°) alors qu'en faisant enfin état, pour dénier un caractère désintéressé à la gestion de l'association Alice, d'une prétendue volonté de Patrick X... de détourner une partie des ressources de cette association au profit indirect de sa compagne au travers la société Gyro Limited sans constater l'existence d'actes effectifs de détournement, la cour d'appel n'a pas donné une base légale à sa décision" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de fraude fiscale dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Desgrange conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;