LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 623-5, ensemble l'article L. 622-16 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à la loi du 25 janvier 2005 de sauvegarde des entreprises, ensemble l'article 1413 du code civil et les principes régissant l'excès de pouvoir ;
Attendu que lorsque des époux mariés sous le régime de la communauté légale ont été, par des décisions successives, mis, chacun, en liquidation judiciaire, la vente de gré à gré des biens communs, soumis dès son prononcé à l'effet réel de la procédure collective première ouverte, ne peut être autorisée que par le juge-commissaire de cette procédure ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que Mme X... ayant été mise en liquidation judiciaire le 27 novembre 1992, la procédure a été clôturée le 17 novembre 1995 ; que M. X... a été mis en liquidation judiciaire, le 7 novembre 1997, M. Y... étant désigné liquidateur ; que la liquidation judiciaire de Mme X... ayant été reprise le 6 juin 2003 et Mme Z... nommée liquidateur, le juge-commissaire, statuant sur la demande de cette dernière, a, le 18 octobre 2005, autorisé la cession amiable d'un immeuble dépendant de la communauté conjugale existant entre M. et Mme X... ; que le 24 octobre 2005, le juge-commissaire de la liquidation judiciaire de M. X..., statuant sur la demande de M. Y..., ès qualités, a autorisé la cession amiable du même immeuble et dit que le prix de cession sera affecté pour moitié à la procédure collective de M. X... ; que Mme Z..., ès qualités, a formé un recours contre cette décision ; qu'un jugement du 15 septembre 2006 a rejeté ce recours, dit que les créanciers de la liquidation judiciaire ouverte contre M. X... devaient bénéficier de la vente de l'immeuble et confirmé l'ordonnance ; que Mme Z..., ès qualités, a interjeté appel-nullité ;
Attendu que, pour déclarer cet appel irrecevable, l'arrêt retient qu'il entre dans les attributions et pouvoirs du juge-commissaire d'autoriser une cession amiable, que celui-ci s'est prononcé exclusivement sur ce qui lui était demandé ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le juge-commissaire de la liquidation judiciaire de M. X... a excédé ses pouvoirs en autorisant la vente de gré à gré d'un immeuble commun déjà inclus dans l'actif de la liquidation judiciaire de Mme X... par l'effet rétroactif de la reprise de cette procédure et que le tribunal a consacré l'excès de pouvoir ainsi commis, en rejetant le recours formé par Mme Z..., ès qualités, la cour d'appel a violé les textes et les principes susvisés ;
Et, vu l'article 627, alinéa 1er, du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel de Mme Z..., l'arrêt rendu le 21 janvier 2008 (RG 06/1529) entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit recevable l'appel-nullité de Mme Z..., ès qualités ;
Annule le jugement (RG 2005 004821) rendu le 15 septembre 2006 par le tribunal de commerce d'Auch, et l'ordonnance rendue le 24 octobre 2005 par le juge-commissaire de la liquidation judiciaire de M. X... ;
Condamne M. Y..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. X..., aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, avocat aux Conseils pour Mme Z..., ès qualités
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable l'appel principal interjeté par Maître Z... ès-qualités ;
AUX MOTIFS QUE les premiers juges n'ont pas procédé à la répartition du prix de cession entre les créanciers, qui incombe au liquidateur, mais qu'ils ont seulement précisé quelle était selon eux la quote-part du prix revenant à la liquidation judiciaire de Monsieur X... et que l'éventuelle erreur de droit qu'ils ont pu commettre dans cette appréciation n'est pas constitutive d'un excès de pouvoir, qui ne peut résulter que de la méconnaissance par le Juge de son pouvoir de juger ;
ALORS QUE, D'UNE PART, l'appel-nullité est toujours ouvert en cas d'excès de pouvoir ; que l'excès de pouvoir est la transgression par un juge compétent pour connaître du litige d'une règle d'ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité ; que l'appel-nullité est donc recevable contre un jugement statuant sur le recours formé contre l'ordonnance d'un Juge commissaire qui a commis un excès de pouvoir en statuant hors des limites de ses attributions ; qu'en cas de liquidation judiciaire d'un débiteur marié sous le régime de la communauté, les biens communs inclus dans l'actif de la procédure collective sont administrés par le seul liquidateur qui exerce pendant toute la durée de la liquidation judiciaire les droits et actions du débiteur dessaisi concernant son patrimoine ; qu'en l'espèce, Monsieur A..., Juge commissaire à la liquidation de Monsieur X..., n'avait pas le pouvoir d'autoriser la vente de l'immeuble commun inclus dans l'actif de la liquidation judiciaire de Madame X... ; que par suite, le jugement confirmant l'ordonnance du Juge commissaire qui avait statué hors des limites de ses attributions est lui-même entaché d'excès de pouvoir en sorte que l'appel-nullité formé par Maître Z... ès-qualités était recevable ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 543 du code de procédure civile, ensemble l'article L 622-9 ancien du code de commerce ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, le Juge commissaire peut, si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans de meilleurs conditions, autoriser la vente soit par adjudication amiable sur la mise à prix qu'il fixe, soit de gré à gré aux prix et conditions qu'il détermine ; que c'est le liquidateur qui répartit le produit des ventes et règle l'ordre des créanciers et que la répartition du prix de vente se fait selon la procédure d'ordre prévue aux articles L 622-25 ancien et suivants du code de commerce ; que ces dispositions sont d'ordre public, en sorte qu'elles peuvent être invoquées par tout intéressé sans qu'il soit tenu de justifier d'un grief ; qu'en statuant sur la répartition du prix de vente de l'immeuble, le Juge commissaire a outrepassé ses pouvoirs, en sorte qu'en confirmant son ordonnance, le jugement entrepris est entaché d'un excès de pouvoir, rendant recevable l'appel-nullité formé à son encontre ; que par suite, en déclarant irrecevable l'appel-nullité de Maître Z..., la Cour d'appel a violé à nouveau l'article 543 du code de procédure civile, ensemble les articles L 622-16 ancien et L 622-25 ancien et suivants du code de commerce.