LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que suivant ordonnance portant injonction de payer rendue par le tribunal d'instance de Marseille le 5 septembre 2002 et signifiée par procès-verbal de recherches infructueuses le 23 septembre 2002, M. X... a été condamné à payer la somme de 10 577 euros en principal au titre du solde débiteur de son compte bancaire ouvert dans les livres du Crédit lyonnais ; que, par arrêt en date du 19 septembre 2007, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a infirmé le jugement en date du 6 avril 2004 du tribunal d'instance de Marseille qui avait rejeté l'exception d'incompétence territoriale soulevée par M. X..., et a renvoyé l'affaire pour examen du fond du litige devant la cour d'appel de Montpellier, juridiction d'appel du tribunal d'instance de Perpignan jugé territorialement compétent ;
Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel, (Montpellier, 3 juillet 2008) d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'application de la forclusion biennale et d'avoir condamné M. X... à paiement, alors, selon le moyen :
1° / que les actions engagées par un organisme créancier, prêteur de deniers, ne peuvent être tenues pour valablement engagées dans le délai de la forclusion biennale par la signification d'une ordonnance d'injonction de payer rendue par une juridiction incompétente ; que tout en constatant que l'ordonnance d'injonction de payer avait été rendue par la juridiction marseillaise territorialement incompétente, la cour d'appel qui a cependant déclaré que la signification de l'ordonnance d'injonction de payer rendue par cette juridiction à l'encontre de M. X... avait valablement interrompu le délai de forclusion biennale au motif erroné que l'incompétence retenue n'était que territoriale et non matérielle, n'a pas, au prix de cette distinction artificielle et inexacte entre ces causes d'incompétence, tiré les conséquences légales de ses observations au regard de l'article L. 311-37 du code de la consommation ; 2° / que la forclusion biennale n'est valablement interrompue que par la signification d'une ordonnance d'injonction de payer et non par la seule présentation d'une requête en injonction non constitutive d'une citation en justice ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante des modalités de saisine du tribunal d'instance de Marseille, incompétent territorialement, par la présentation de la requête en injonction de payer, la cour d'appel qui a ainsi conféré un effet interruptif de la forclusion biennale à cette requête en injonction de payer, a méconnu le principe précité et violé l'article L. 311-37 du code de la consommation ;
Mais attendu que la signification d'une ordonnance d'injonction de payer, qui constitue une citation en justice au sens de l'article 2244 du code civil, rendue même par un juge incompétent, interrompt la prescription selon les dispositions de l'article 2246 du même code qui sont applicables à tous les délais pour agir et à tous les cas d'incompétence ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boutet, avocat aux Conseils pour M. X....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté la fin de non recevoir soulevée par Monsieur X... et tirée de la forclusion biennale et d'avoir en conséquence confirmé le jugement en ce qu'il l'avait condamné au paiement de la somme de 8. 898, 06 € au CREDIT LYONNAIS à titre de solde débiteur de son compte bancaire ;
AUX MOTIFS QU'il s'agit d'une fin de non recevoir qui, en application des articles 122 et 123 du Code de Procédure Civile, peut être invoquée en tout état de cause et donc pour la première fois devant la Cour d'Appel ; que selon l'article L 311-37 du Code de la Consommation, les actions doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance, à peine de forclusion ; que si Monsieur X... soutient qu'en application de l'article précité, l'action ne peut être tenue pour engagée dans le délai de forclusion expirant le 5 avril 2004, par la signification à la date du 27 septembre 2002 d'une ordonnance d'injonction de payer rendue par une juridiction incompétente, il convient de considérer que la juridiction saisie était bien celle du Tribunal d'Instance compétent en matière d'opération de crédit à laquelle est assimilé un découvert en compte de plus de trois mois, Monsieur X... ne mettant en cause que l'incompétence territoriale de la juridiction de MARSEILLE en raison de son domicile qui dépendait selon lui, à la date du dépôt de la requête, du ressort de PERPIGNAN où il aurait déménagé depuis le 1er mars 2002 ; que d'autre part, outre le fait qu'il ne justifie pas de la date effective de son déménagement autrement que par la production de l'arrêt de la Cour d'Appel d'AIX EN PROVENCE qui l'admet, cet argument ne peut être retenu au stade de l'ordonnance d'injonction de payer dès lors que l'organisme créancier qui était, en application de l'article 1406 du Code de Procédure Civile, tenu de déposer sa requête devant le Tribunal d'Instance du lieu où demeurait le débiteur poursuivi, l'a bien déposée au lieu où Monsieur X... s'était lui-même domicilié, tant par la domiciliation de son compte que par l'adresse qu'il avait dénoncée lors de l'ouverture du compte au ...; or, Monsieur X... ne justifie pas avoir informé l'organisme bancaire de son changement d'adresse au ...avant les débats sur l'audience d'opposition, ce qui lui a permis à cette date de soulever l'incompétence du Tribunal d'Instance au profit de celui de son nouveau domicile selon les modalités prévues à l'article 1417 du Code de Procédure Civile, étant précisé que même à cette date son adresse demeurait fluctuante puisque sa déclaration d'opposition du 22 octobre 2002 portait mention d'une domiciliation chez un ami demeurant ...et qu'il se déclare désormais domicilié ... ; que dans ces conditions, tant l'ordonnance que la signification effectuée par procès-verbal de recherches infructueuses au dernier domicile connu apparaissent exemptes de critiques, sauf à permettre aux débiteurs d'échapper à toute poursuite en différant d'au moins deux ans la communication aux créanciers prêteurs de deniers de leur changement de domicile ; que par conséquent, l'action doit être considérée comme ayant été valablement engagée dans le délai de deux ans ;
ALORS D'UNE PART QUE les actions engagées par un organisme créancier, prêteur de deniers, ne peuvent être tenues pour valablement engagées dans le délai de la forclusion biennale par la signification d'une ordonnance d'injonction de payer rendue par une juridiction incompétente ; que tout en constatant que l'ordonnance d'injonction de payer avait été rendue par la juridiction marseillaise territorialement incompétente, la Cour d'Appel qui a cependant déclaré que la signification de l'ordonnance d'injonction de payer rendue par cette juridiction à l'encontre de Monsieur X... avait valablement interrompu le délai de forclusion biennale au motif erroné que l'incompétence retenue n'était que territoriale et non matérielle, n'a pas, au prix de cette distinction artificielle et inexacte entre ces causes d'incompétence, tiré les conséquences légales de ses observations au regard de l'article L 311-37 du Code de la Consommation ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la forclusion biennale n'est valablement interrompue que par la signification d'une ordonnance d'injonction de payer et non par la seule présentation d'une requête en injonction non constitutive d'une citation en justice ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante des modalités de saisine du Tribunal d'Instance de MARSEILLE, incompétent territorialement, par la présentation de la requête en injonction de payer, la Cour d'Appel qui a ainsi conféré un effet interruptif de la forclusion biennale à cette requête en injonction de payer, a méconnu le principe précité et violé l'article L 311-37 du Code de la Consommation.