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10/03/2010 | FRANCE | N°08-44391

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 mars 2010, 08-44391


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X..., engagée en 1998 par les sociétés Horizon et Horizon soutien, pour exercer des activités d'enseignement, est devenue ensuite responsable du secteur paramédical ; qu'à la suite de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de ces deux sociétés, le 26 mai 2003, la cession de ces entreprises a été autorisée le 30 juin 2003, au profit de la société Estudia, avec effet au 1er juillet suivant ; que Mme X..., qui se plaignait du non-paiement de la rémunération due pou

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Mme X..., engagée en 1998 par les sociétés Horizon et Horizon soutien, pour exercer des activités d'enseignement, est devenue ensuite responsable du secteur paramédical ; qu'à la suite de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de ces deux sociétés, le 26 mai 2003, la cession de ces entreprises a été autorisée le 30 juin 2003, au profit de la société Estudia, avec effet au 1er juillet suivant ; que Mme X..., qui se plaignait du non-paiement de la rémunération due pour les mois de juillet et août 2003, a pris l'initiative, le 7 septembre 2003, de rompre son contrat de travail ; qu'elle a saisi le juge prud'homal de demandes en paiement de salaires, d'indemnités et de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Estudia fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de dommages-intérêts, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que le manquement de l'employeur qui a fait l'objet d'une régularisation ne peut caractériser une faute de l'employeur qui permettrait de retenir que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par un salarié devait emporter les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en qualifiant de grave manquement aux obligations nées du contrat de travail la suppression d'une prime d'ancienneté, tout en constatant que la situation avait été régularisée à la suite des réclamations de la salariée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 1235-1, L. 1233-2, L. 1235-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui ne s'est pas seulement fondée sur la suppression d'une prime d'ancienneté, a également retenu que le nouvel employeur avait, après le transfert de l'entreprise et sans raison légitime, refusé de régler les salaires des mois de juillet et août 2003 ; qu'ayant ainsi caractérisé un manquement à ses obligations, elle a pu en déduire que la rupture du contrat de travail, dont la salariée avait pris l'initiative, produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Estudia aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Estudia à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la société Estudia.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Estudia à payer à Madame X... les sommes de 3.050 euros outre les intérêts légaux, à titre de salaires pour les mois de juillet et août 2003, de 250 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive, de 567,16 euros, outre les intérêts légaux, à titre de rappel de salaire à partir du 1er septembre 2003, de 12.000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 1.270,83 euros à titre d'indemnité de licenciement et de l'avoir déboutée de sa demande en garantie ;
AUX MOTIFS QUE sur la demande de paiement des salaires des mois de juillet et août 2003, Madame X... réclame à la société Estudia le paiement de salaires dus à compter du 1er juillet 2003, date d'entrée en jouissance de cette société cessionnaire ; que la société Estudia admet avoir repris le contrat de travail de Madame X... à compter de cette date ; que pour s'opposer à la prétention de Madame X..., au premier soutien de son appel, la société Estudia affirme que les salaires des mois de juillet et août 2003 doivent rémunérer des heures des cours annuels achevés au 30 juin 2003 et que les créances correspondantes sont nées antérieurement à la cession ; mais que les créances salariales de Madame X... sont nées de l'application des stipulations contractuelles que la société Estudia ne pouvait ignorer et qui prévoient une rémunération mensuelle, incluant les congés payés, tant pour les activités de cours que pour les activités induites ; que les salaires des mois de juillet et août 2003 correspondent à des créances nées et exigibles après le 1er juillet 2003 ; qu'au second soutien de son appel, la société Estudia excipe des dispositions de l'article L.122-12-1 devenu L.1224-1 du code du travail, selon lesquelles le nouvel employeur n'est pas tenu aux obligations de l'ancien en cas de liquidation judiciaire ; mais que les actes de cession stipulent que la société cessionnaire s'engageait à respecter tous les droits et avantages acquis attachés aux contrats de travail des salariés repris ; que la société Estudia ne peut se soustraire à l'obligation qu'elle a souscrite de poursuivre les relations contractuelles avec Madame X... dans les mêmes conditions que précédemment ; qu'il s'impose donc de faire droit à la demande de paiement ainsi qu'à la demande de délivrance des bulletins de salaire, sous astreinte ; que la résistance de la société Estudia est manifestement abusive dès lors qu'elle a trait à une obligation première de l'employeur qui résultait clairement du transfert du contrat de travail ; que sur la demande de reliquat de salaire à partir du mois de septembre 2003 ; que la société Estudia ne conteste pas avoir unilatéralement baissé le taux horaire de la rémunération de Madame X... pour passer de 15,20 euros bruts à 13,83 euros bruts ; que Madame X... est donc fondée à obtenir le reliquat que la société Estudia s'est dispensée de lui verser ; qu'aucune des condamnations mises à la charge de la société Estudia ne se rapporte à la période antérieure au 1er juillet 2003, date à laquelle cette société est entrée en jouissance de l'entreprise et est devenue l'employeur de Madame X... ; que la société Estudia est dès lors mal fondée en sa prétention à obtenir la garantie des organes des procédures collectives des précédents employeurs ;
1/ ALORS QUE la créance de salaire prend naissance au fur et à mesure de l'exécution du contrat de travail ; que dans le secteur de l'enseignement privé hors contrat, le principe de lissage de la rémunération conduit à verser au cours de la période dite « bloc estival », la rémunération correspondant à un travail accompli antérieurement, la date de début du bloc estival étant fixée au niveau de l'entreprise ; que le nouvel employeur n'est pas tenu des obligations qui incombaient à l'ancien employeur à la date de la modification à l'égard des salariés dont le contrat de travail lui est transféré quand la modification intervient dans le cadre d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ; que dans ce cadre, la créance de salaire née antérieurement au transfert d'un contrat de travail incombe à l'ancien employeur, quelle que soit la date de son exigibilité ; que la société Estudia avait fait valoir que la rémunération réclamée au titre des mois de juillet et août 2003 correspondait à une prestation de travail réalisée avant le transfert, précisant qu'au cours de la période dite « bloc estival », la rémunération était versée pour le travail accompli entre le 1er septembre et le 30 juin ; qu'en mettant néanmoins à sa charge le règlement des salaires des mois de juillet et août 2003 sans vérifier s'ils ne rémunéraient pas un travail accompli antérieurement à la cession intervenue le 1er juillet 2003 et dont le règlement incombait aux cédants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1224-1 du code du travail ;
2/ ALORS QUE la créance de salaire est la contrepartie de l'exécution d'une prestation de travail exercée au bénéfice de l'employeur ; que la société Estudia avait fait valoir que la rémunération réclamée au titre des mois de juillet et août 2003 correspondait à une prestation de travail réalisée avant le transfert, précisant qu'au cours de la période dite « bloc estival », la rémunération était versée pour le travail accompli entre le 1er septembre et le 30 juin, ce dont il résultait qu'aucune prestation de travail n'avait été accomplie en juillet et août 2003 au bénéfice de l'exposante ; qu'en ne vérifiant pas l'existence d'une prestation de travail justifiant le versement d'une rémunération, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
3/ ALORS QUE les conventions de cession d'entreprise conclues entre la société Estudia et respectivement, la société Horizon et la société Horizon Soutien, stipulaient en des termes identiques que « toutes sommes, indemnités, primes, treizième mois et autres formes d'intéressement ou de participation, ainsi que toutes autres charges (y compris les charges sociales de toute nature) liées aux contrats de travail des salariés repris, dues au titre ou à l'occasion de la période antérieure à la date fixée pour l'entrée en jouissance du cessionnaire demeureront à la charge du cédant » (articles 5.2.3 des conventions de cession d'entreprise) ; qu'en faisant néanmoins supporter à la société Estudia le paiement des rémunérations versées en juillet et août pour une prestation de travail exécutée antérieurement à la cession du 1er juillet 2003, la cour d'appel a violé l'article 5.2.3 des conventions de cession et l'article 1134 du code civil ;
4/ ALORS QUE la garantie des organes de la procédure collective est acquise à l'égard des créances salariales dues en contrepartie de la prestation de travail exécutée au profit de l'ancien employeur admis, dans le cadre d'un redressement judiciaire, au bénéfice d'un plan de cession ; qu'en déboutant la société Estudia de sa demande en garantie en retenant qu'aucune des condamnations mises à sa charge ne se rapportait à la période antérieure au 1er juillet 2003, sans vérifier si la rémunération réclamée pour les mois de juillet et août 2003 n'était pas due en contrepartie d'une prestation de travail exécutée avant le 1er juillet 2003 au bénéfice des anciens employeurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.626-24 et L.626-25 du code de commerce ;
5/ ALORS QUE la société Estudia avait fait valoir dans ses conclusions d'appel qu'en exécution des stipulations de l'article 5.2.3 des conventions de cession, tant le commissaire à l'exécution du plan que le représentant des créanciers seraient tenus de garantir, en cas de condamnation, le paiement des sommes liées au contrat de travail des salariés repris et dues au titre ou à l'occasion de la période antérieure à la date fixée pour l'entrée en jouissance du cessionnaire, ce qui était le cas des créances salariales litigieuses (conclusions d'appel, page, 8) ; qu'en ne s'expliquant pas sur cette argumentation, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
6/ ALORS QUE la société Estudia avait fait valoir dans ses conclusions d'appel qu'elle mentionnait sur les bulletins de paie, conformément à l'accord de branche du 3 avril 2001 relatif à l'enseignement privé hors contrat, les heures totales et le taux stipulé dans le contrat de travail, ce qui correspondait à la mention des heures de face à face pédagogique et des heures induites ; qu'elle avait précisé que ce système ne modifiait en rien l'horaire total (heures de face à face pédagogique et heures induites) ni le taux horaire (conclusions d'appel, page 4 et 5) ; qu'en retenant que la société Estudia ne contestait pas avoir unilatéralement baissé le taux horaire de la rémunération, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Estudia et violé l'article 1134 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Estudia à payer à Madame X... la somme 12.000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE … en premier lieu comme il a été dit ci-dessus, la société Estudia a totalement manqué à son obligation salariale en refusant de verser à Madame X... sa rémunération pour les mois de juillet et août 2003 ; qu'en deuxième, comme il a été également dit ci-dessus, la société Estudia a partiellement manqué à son obligation salariale en se dispensant de verser à madame X... l'intégralité de sa rémunération due à partir du mois de septembre 2003 ; qu'en troisième lieu, la société Estudia a supprimé à Madame X... le bénéfice de la prime d'ancienneté qui lui était antérieurement servie, ce qu'elle ne conteste pas et qu'elle a ultérieurement régularisé à la suite des réclamations de la salariée ; que ces trois graves manquements aux obligations nées du contrat de travail justifient la rupture dont la salariée a pris acte aux torts de l'employeur ; que la rupture emporte donc les effet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
ALORS QUE le manquement de l'employeur qui a fait l'objet d'une régularisation ne peut caractériser une faute de l'employeur qui permettrait de retenir que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par un salarié devait emporter les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en qualifiant de grave manquement aux obligations nées du contrat de travail la suppression d'une prime d'ancienneté, tout en constatant que la situation avait été régularisée à la suite des réclamations de la salariée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L.1235-1, L.1233-2, L.1235-1 et L.1235-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44391
Date de la décision : 10/03/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 27 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 mar. 2010, pourvoi n°08-44391


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44391
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