La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/03/2010 | FRANCE | N°08-40895

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 mars 2010, 08-40895


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 décembre 2007), que M. X..., salarié protégé, a été engagé le 10 juin 1994 par la société Polyclinique du Tregor (la société) en qualité de cuisinier ; que dans le courant de l'année 2000, la société a confié la gestion de son service de restauration à la société Sodexho ; que par décision du 19 juin 2000, l'inspecteur du travail a autorisé le transfert du contrat de travail du salarié lequel a été licencié le 27 février 2003

par la société Sodexho ; que contestant à cette dernière sa qualité d'employeur, il a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 18 décembre 2007), que M. X..., salarié protégé, a été engagé le 10 juin 1994 par la société Polyclinique du Tregor (la société) en qualité de cuisinier ; que dans le courant de l'année 2000, la société a confié la gestion de son service de restauration à la société Sodexho ; que par décision du 19 juin 2000, l'inspecteur du travail a autorisé le transfert du contrat de travail du salarié lequel a été licencié le 27 février 2003 par la société Sodexho ; que contestant à cette dernière sa qualité d'employeur, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en nullité de son licenciement ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en nullité de son licenciement, en réintégration au sein de la société Polyclinique du Tregor et en paiement d'un rappel de salaires alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque les conditions d'application de l'article L. 122-12 alinéa 2 ne sont pas réunies, le transfert du contrat de travail d'un salarié protégé d'une entreprise à une autre constitue une modification de son contrat, qui ne peut intervenir sans son accord exprès, quand bien même le transfert aurait été autorisé par l'inspecteur du travail ; la cour d'appel qui a constaté que M. X..., délégué du personnel, n'avait pas accepté le transfert de son contrat de travail, ne pouvait décider que son contrat avait été valablement transféré de la société Polyclinique du Tregor au sein de la société Sodexho dans le cadre du contrat de sous-traitance liant les deux sociétés, au motif inopérant que l'inspecteur du travail avait donné son accord à un tel transfert ; que la cour d'appel a violé les articles L. 1224-1 (anc. art. L. 122-12 alinéa 2) et L. 2414-1 du code du travail (anc. art. L. 425-1) ;
2°/ en tout état de cause, que l'accord exprès du salarié ne peut résulter que d'une volonté claire et non équivoque du salarié qui doit se traduire par des actes certains, dépourvus d'ambiguïté, et non se réduire à une simple poursuite du travail et des actes d'abstention ; ne caractérise pas l'accord exprès de M. X... à son transfert de la société Polyclinique du Tregor à la société Sodexho, l'absence de recours administratif visant à contester valablement l'autorisation de l'inspecteur du travail, le défaut d'exercice des fonctions de délégué du personnel, l'absence de protestation sur le changement d'employeur ou la qualité d'employeur dans l'exercice de ses prérogatives ; en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1224-1 et L. 2414-1 du code du travail ;
Mais attendu que lorsqu'une autorisation administrative pour le transfert du contrat de travail d'un délégué du personnel a été accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, remettre en cause l'appréciation par l'autorité administrative de l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a retenu que l'autorisation administrative de transfert avait été délivrée sur le fondement de l'article L. 1224-1 du code du travail, en a exactement déduit, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche du moyen, que le changement d'employeur s'imposait au salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que Monsieur X... était salarié de la société française de services SODEXHO et en conséquence de l'avoir débouté de ses demandes en nullité de son licenciement prononcé le 12 mars 2003, en réintégration au sein de la société POLYCLINIQUE DU TREGOR et en paiement de salaires liés à sa qualité de salarié de la société POLYCLINIQUE DU TREGOR ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... qui n'a pas accepté le transfert conventionnel de son contrat de travail en déduit que la société SODEXHO qui n'a pas la qualité d'employeur ne pouvait procéder à son licenciement qui doit être déclaré nul ; que toutefois, le transfert du contrat de travail de Monsieur X... a fait l'objet d'une autorisation administrative, l'inspecteur du travail ayant été saisi par la société POLYCLINIQUE DU TREGOR d'une demande visant expressément l'article L.122-12 du Code du travail et fondée sur l'article L.425-1 dont le 6ème alinéa impose à l'inspecteur du travail de s'assurer de ce que le transfert d'un contrat de travail d'un délégué du personnel ne présente aucun caractère discriminatoire ; que la décision administrative s'impose au juge judiciaire qui ne peut, sauf violation du principe de séparation des pouvoirs, remettre en cause l'appréciation par l'autorité administrative de l'article L.122-12 alinéa 2 du Code du travail ; que Monsieur X... qui n'a pas exercé les voies de recours légales à l'encontre de cette décision administrative ne peut en conséquence remettre en cause le transfert de son contrat de travail ; qu'en outre à supposer qu'effectivement, le transfert dudit contrat de travail devait procéder d'une application volontaire de l'article L.122-12 nécessitant l'accord du salarié qui ne peut en principe résulter de la seule poursuite du travail, force est de constater :
- que Monsieur X... qui indique lui-même dans un courrier du 15 mai 2002 avoir fait état le 8 juin 2000, lors de l'enquête contradictoire diligentée par l'inspecteur du travail, de ce que le service restauration n'était pas une entité économique autonome et en conséquence, de l'inapplicabilité de plein droit de l'article L.122-12 du Code du travail, n'a pas contesté judiciairement l'autorisation administrative,- qu'il précise lui-même ne plus avoir exercé ses fonctions de délégué du personnel à compter du 19 juin 2000,- que s'il n'a pas retourné signé l'avenant au contrat de travail adressé par la SODEXHO, il n'a pas remis en cause le changement d'employeur ni auprès de SODEXHO, ni auprès de la Polyclinique,- que dans le cadre de l'exécution du contrat de travail, il n'a pas remis en caue le pouvoir disciplinaire de SODEXHO et en conséquence sa qualité d'employeur reconnue au demeurant par l'envoi de courriers relatifs à une sanction de mise à pied de 3 jours prononcée à son encontre par SODEXHO le 19 juin 2001 ;que ces éléments établissent que Monsieur X... a bien accepté, en toute connaissance de cause, le transfert de son contrat de travail qu'il ne peut dès lors contester à l'occasion de son licenciement intervenu 3 ans plus tard et contesté devant la juridiction prud'homale plus de 4 ans après ; que la SAS SODEXHO étant bien l'employeur de Monsieur X..., celui-ci sera débouté de sa demande tendant à la nullité du licenciement ;
ALORS QUE lorsque les conditions d'application de l'article L.122-12 alinéa 2 ne sont pas réunies, le transfert du contrat de travail d'un salarié protégé d'une entreprise à une autre constitue une modification de son contrat, qui ne peut intervenir sans son accord exprès, quand bien même le transfert aurait été autorisé par l'inspecteur du travail ; que la Cour d'appel qui a constaté que Monsieur X..., délégué du personnel, n'avait pas accepté le transfert de son contrat de travail, ne pouvait décider que son contrat avait été valablement transféré de la société POLYCLINIQUE DU TREGOR au sein de la société SODEXHO dans le cadre du contrat de sous-traitance liant les deux sociétés, au motif inopérant que l'inspecteur du travail avait donné son accord à un tel transfert ; que la Cour d'appel a violé les articles L.1224-1 (anc. art. L.122-12 alinéa 2) et L.2414-1 du Code du travail (anc. art. L.425-1) ;
ALORS en tout état de cause que l'accord exprès du salarié ne peut résulter que d'une volonté claire et non équivoque du salarié qui doit se traduire par des actes certains, dépourvus d'ambiguïté, et non se réduire à une simple poursuite du travail et des actes d'abstention; que ne caractérise pas l'accord exprès de Monsieur X... à son transfert de la société POLYCLINIQUE DU TREGOR à la société SODEXHO, l'absence de recours administratif visant à contester valablement l'autorisation de l'inspecteur du travail, le défaut d'exercice des fonctions de délégué du personnel, l'absence de protestation sur le changement d'employeur ou la qualité d'employeur dans l'exercice de ses prérogatives ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L.1224-1 et L.2414-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-40895
Date de la décision : 03/03/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Principe - Violation - Cas - Méconnaissance d'une décision administrative - Applications diverses

REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Contrat de travail - Modification dans la situation juridique de l'employeur - Transfert partiel d'entreprise - Salarié protégé compris dans le transfert - Autorisation administrative de transfert - Portée

Lorsqu'une autorisation administrative pour le transfert du contrat de travail d'un délégué du personnel a été accordée à l'employeur, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, remettre en cause l'appréciation par l'autorité administrative de l'application de l'article L. 1224-1 du code du travail. Doit dès lors être approuvé l'arrêt qui retient que l'autorisation administrative de transfert d'un salarié protégé ayant été délivrée sur le fondement de l'article L. 1224-1 du code du travail, le changement d'employeur s'imposait à l'intéressé


Références :

ARRET du 18 décembre 2007, Cour d'appel de Rennes, 18 décembre 2007, 06/03558
article L. 1224-1 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 18 décembre 2007

Sur la compétence de l'autorité administrative pour vérifier si le statut protecteur du salarié transféré et si les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail ont été respectés, à rapprocher : Soc., 17 juin 2009, pourvoi n° 08-42614, Bull. 2009, V, n° 154 (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 mar. 2010, pourvoi n°08-40895, Bull. civ. 2010, V, n° 53
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, V, n° 53

Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Foerst
Rapporteur ?: Mme Darret-Courgeon
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.40895
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award