LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, d'une part, que M. X... n'ayant pas soutenu que l'inexécution délibérée du contrat par la société LGSN était constitutive d'une faute dolosive de nature à écarter l'application de la clause pénale, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et partant irrecevable ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu qu'il n'était pas contesté que depuis le 18 mai 1992, la société LGSN ne disposait plus des autorisations administratives nécessaires pour procéder à l'extraction, que selon la clause pénale, au cas où le concessionnaire ne solliciterait pas une autorisation d'exploiter, le propriétaire serait en droit de conserver une somme de 300 000 francs destinée à le dédommager, sans qu'il puisse réclamer une indemnisation excédant cette somme, qu'il était invoqué par la société LGSN, sans que cela soit contesté par M. X..., que cette somme de 300 000 francs avait été versée en début de contrat, que cette somme lui était donc restée acquise à lui-même ou à Mme X...-Y..., de sorte qu'il n'avait plus aucun motif de la redemander ou de demander quoique ce soit d'autre en réparation de son préjudice et que la mention "s'il plaît au propriétaire", invoquée par M. X... qui, pour déjouer le jeu de cette clause pénale, déclarait n'avoir jamais souhaité la résiliation du contrat, si elle lui laissait la possibilité de proroger la relation contractuelle jusqu'a son terme, ne lui conférait pas droit à une indemnisation excédant la somme de 300 000 francs remise en début de contrat, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée relative à l'application de l'article 1178 du code civil, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable Monsieur X... pour ce qui est des annuités antérieures au 18 mai 1992 et de l'avoir ensuite débouté de ses autres demandes ;
AUX MOTIFS QUE «pour ce qui est de la période ultérieure au 18 mai 1992, M. X... fonde sa demande sur les moyens suivants : a) Exécution forcée : Selon lui la société venue aux droits de la société GOBITTA se doit de respecter le contrat qu'elle a signé et d'exploiter la parcelle concédée. Il demande, pour cette période également, la contrevaleur des 120.000 m3 de redevance annuellement garantie par le contrat. La SAS LGSN conclut au débouté. De fait il résulte des dispositions du contrat que cette contre-valeur correspondant à une exploitation annuelle de 120.000 m3 est conditionnée par l'obtention par l'entreprise des autorisations administratives d'exploitation (v. p. 6 du contrat : « sauf ce qui est dit ci-dessus au titre de l'indemnité d'immobilisation, les présentes conventions sont soumises aux conditions suspensives suivantes : que l'exploitant obtienne les autorisation administratives nécessaires pour procéder à l'extraction prévue au présent contrat (…) » ; Or il n'est pas contesté que depuis le 18 mai 1992, la SAS LGSN ne dispose plus de ces autorisations, de sorte que cette redevance minimale n'est pas due. B) Indemnité : M. X... estimant que ce défaut d'autorisation résulte du non dépôt par la SAS LGSN d'une nouvelle demande auprès des services de l'administration et que cette abstention enfreint ses obligations contractuelles, demande qu'elle soit condamnée, en application de l'article 1147 du c. civ. à l'indemniser à hauteur de ce qu'il aurait perçu si cette exploitation avait été autorisée, c'est-à-dire à la contre-valeur annuelle des 120.000 m3. La SAS LGSN conclut pareillement au débouté et partant à la réformation du jugement appelé sur ce point. De fait, il résulte des dispositions contractuelles que cette indemnisation est réglée par le contrat par une clause résolutoire et pénale ainsi libellée (même page) : «Les présentes conventions seront résiliées de plein droit, si bon semble au propriétaire, dans les cas suivants : - à défaut de dépôt par l'exploitant d'une demande dûment complétée d'autorisation d'exploiter, et ce dans les 6 mois de ce jour», - (…) ; - (…) ; «Dans ces trois cas les présentes conventions seront résiliées de plein droit (…) et la somme de trois cent mille francs versée restera acquise au propriétaire à titre de clause pénale». Selon cette clause pénale, au cas où le concessionnaire ne solliciterait pas une autorisation d'exploiter, le propriétaire sera en droit de conserver une somme de 300.000 F destinée à le dédommager, sans qu'il puisse réclamer une indemnisation excédant cette somme. Or, il est invoqué par la SAS LGSN, sans que cela soit contesté par M. X..., que cette somme de 300.000 F a été versée en début de contrat. Elle lui est donc restée acquise à lui-même ou à Mme Vve X...-Y..., de sorte que M. X..., contrairement à l'appréciation du premier juge, n'a plus aucun motif de la redemander ou de demander quoique ce soit d'autre en réparation de son préjudice. Cette interprétation s'impose, quoiqu'en prétende M. X..., même si cette abstention de demander une autorisation d'exploiter perdure une fois écoulé le délai de « 6 mois de ce jour », ce qui a été le cas à compter du 18 mai 1992. La mention « s'il plaît au propriétaire » invoquée par M. X... qui, pour déjouer le jeu de cette clause pénale déclare n'avoir jamais souhaité la résiliation du contrat, si elle lui laisse la possibilité de proroger la relation contractuelle jusqu'à son terme contractuel, ne lui confère pas pour autant droit à une indemnisation excédant la somme de 300.000 F remise en début de contrat. Ainsi M. X... sera débouté de l'ensemble de sa réclamation» (cf. arrêt page 2 - 4);
ALORS D'UNE PART QUE la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement ; qu'en l'espèce, le contrat du 12 mai 1986 prévoyait la condition suspensive selon laquelle l'exploitant doit obtenir les autorisations administratives nécessaires pour procéder à l'extraction prévue au contrat ; que l'exploitant avait obtenu l'autorisation administrative d'extraire le 29 mars 1989, devenue définitive par jugement du 14 décembre 1989 du Tribunal administratif, mais n'a – malgré cette autorisation - jamais procédé à l'extraction prévue au contrat de sorte que le retrait de l'autorisation d'exploiter à été prononcé le 18 mai 1992 ; que la société LGSN n'a par la suite jamais déposé une nouvelle demande d'autorisation d'extraire ; que l'exploitant a ainsi empêché l'accomplissement de la condition suspensive ; que la Cour d'appel a implicitement reconnu que le défaut d'autorisation résultait d'une faute de la société exploitante en considérant que Monsieur X... avait perçu au titre de la clause pénale prévue au contrat, une somme de 300.000 F en réparation de son préjudice (Arrêt page 3, § 11) ; que Monsieur X... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que le défaut de réalisation de la condition suspensive était dû au fait que la société exploitante avait décidé de ne pas utiliser l'autorisation qui lui avait été accordée et de la laisser périmer; qu'en rejetant néanmoins la demande de Monsieur X... tendant à l'exécution forcée du contrat et au versement de la redevance annuellement garantie par le contrat au seul motif qu' «il n'est pas contesté que depuis le 18 mai 1992, la SAS LGSN ne dispose plus de ces autorisations» (Arrêt page 3, § 3) alors que l'accomplissement de la condition suspensive avait été empêché par la personne obligée sous cette condition, la Cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations et a violé de ce fait les articles 1134 et 1178 du Code civil.
ALORS D'AUTRE PART QU' à titre subsidiaire et en tout état de cause, la Cour d'appel aurait dû rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions de Monsieur X..., si la société LGSN, obligée sous la condition suspension d'obtention d'autorisation d'extraire, n'en avait pas empêché l'accomplissement en laissant l'autorisation administrative se périmer et en ne sollicitant pas de nouvelle autorisation, de sorte qu'en application de l'article 1178 du Code civil la condition était réputée accomplie ; qu'en rejetant la demande de l'exposant sans procéder au préalable à cette recherche, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1178 du Code civil.
ALORS ENSUITE QUE Monsieur X... a mis en cause, à titre subsidiaire, la responsabilité contractuelle de la société LGSN sur le fondement de l'article 1147 du Code civil en demandant des dommages et intérêts d'un montant de 1.719.389,30 € avec intérêts ; qu'il a expressément fait valoir dans ses conclusions d'appel qu'il ne demande pas la résiliation du contrat (Conclusions page 8 § 5 et page 11 § 1) ; qu'il résulte des termes même de l'arrêt à la fois que Monsieur X... a fondé sa demande de dommages et intérêts sur l'article 1147 du Code civil (arrêt page 3, § 5), que la clause résolutoire et pénale confère au seul propriétaire le droit de demander la résiliation du contrat (voir la mention «s'il plaît au propriétaire» citée par l'arrêt page 3, dernier §) et que Monsieur X... n'a jamais demandé la résiliation du contrat (arrêt page 3, dernier §) ; qu'en faisant néanmoins application de la clause résolutoire et pénale non invoquée par Monsieur X... et par conséquent inapplicable en l'espèce, pour rejeter la demande de dommages et intérêts de l'exposant fondée sur l'article 1147 du Code civil, la Cour d'appel a violé les articles 1134, 1147 et 1184 du Code civil ;
ALORS EN OUTRE QU'il résulte des termes mêmes de l'arrêt que Monsieur X... a fondé sa demande de dommages et intérêts, formulée à titre subsidiaire, sur l'article 1147 du Code civil (arrêt page 3 § 5) ; qu'il résulte en outre implicitement mais nécessairement de l'arrêt que Monsieur X... avait subi un préjudice causé par le manquement contractuel de la société LGSN et qu'il a « droit à indemnisation» (arrêt page 3, §§ 11 et 13) ; qu'en déboutant néanmoins l'exposant de sa demande de dommages et intérêts et en refusant de faire application des règles régissant la responsabilité contractuelle, la Cour d'appel a violé les articles 1147 et 1134 du Code civil.
ALORS DE SURCROIT QUE, si, en règle générale, le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat, la clause limitant ainsi la réparation doit être écartée lorsque c'est par son dol que l'obligation n'est point exécutée ; que commet une faute dolosive le débiteur qui, de manière délibérée, se refuse à exécuter ses obligations contractuelles ; qu'une telle faute dolosive prive le débiteur du bénéfice des limitations d'indemnisation que lui ménage la loi ou le contrat ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que la société LGSN a délibérément omis d'exécuter le contrat de fortage et d'extraire les matériaux alors qu'elle avait obtenu l'autorisation administrative d'extraire au plus tard en 1992 ; que cette inexécution délibérée du contrat, alors que l'autorisation d'extraire avait été obtenue, constitue une faute dolosive de nature à écarter l'application de la clause pénale limitant la réparation à la somme de 300.000 Frs ; qu'en rejetant néanmoins la demande d'indemnisation de l'exposant au motif que la clause pénale limitait l'indemnisation pour inexécution du contrat à la somme de 300.000 Frs «de sorte que M. X..., contrairement à l'appréciation du premier juge, n'a plus aucun motif de la redemander ou de demander quoique ce soit d'autre en réparation de son préjudice» (Arrêt page 3, § 11) alors que l'inexécution délibérée du contrat par la société LGSN était constitutive d'une faute dolosive de nature à écarter l'application de la clause pénale, la Cour d'appel a violé l'article 1150 du Code civil.
ALORS DE PLUS QU'à titre subsidiaire, et même si on devait considérer que Monsieur X... avait mis en oeuvre la clause résolutoire de sorte que cette clause était applicable en l'espèce – ce qui n'est clairement pas le cas – la Cour d'appel devait alors, après avoir fait application de la clause résolutoire et pénale et après avoir reconnu que «selon cette clause pénale, …, le propriétaire sera en droit de conserver une somme de 300.000 F destinée à le dédommager, … que cette somme de 300.000 F … est donc restée acquise à» Monsieur X... (Arrêt page 4), accorder à l'exposant, dans son dispositif, cette somme, qui n'avait initialement été remise qu'à titre de garantie ; qu'en rejetant la demande de dommages et intérêts au seul motif que la somme donnée en garantie lui était acquise, sans attribuer dans son dispositif cette somme à Monsieur X..., la Cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 1134 et 1184 du Code civil ;
ALORS ENFIN QU'à titre subsidiaire, et même si on devait considérer que Monsieur X... avait mis en oeuvre la clause résolutoire de sorte que cette clause était applicable en l'espèce – ce qui n'est clairement pas le cas – la Cour d'appel ne pouvait appliquer cette clause pour rejeter la demande de dommages et intérêts de l'exposant, sans prononcer la résiliation du contrat et ordonner la libération des terrains après remise en état conformément aux termes du contrat ; qu'en se bornant à rejeter la demande de dommages et intérêts en application de la clause résolutoire sans mettre fin au contrat, la Cour d'appel a, là encore, violé les articles 1134 et 1184 du Code civil.