LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 24 novembre 2008), que les époux X... ont, par contrat du 19 mars 1998, chargé la société ABIP Maisons Challenger de la construction d'une maison individuelle ; que le constructeur a souscrit auprès de la société Aviva assurance (société Aviva) une assurance dommages-ouvrage pour le compte des maîtres de l'ouvrage et une garantie de livraison à prix et délais convenus auprès de la société Aioi Motor et General Insurance Company of Europe Ltd (société AIOI) ; qu'à la suite de la défaillance de la société ABIP Maisons Challenger, placée en liquidation judiciaire, et de l'abandon du chantier par la société Environnement et tradition désignée pour achever les travaux par la société AIOI, cette société a, après expertise, en exécution d'une ordonnance de référé du 25 juin 2003, réglé aux époux X... la somme provisionnelle de 120 059 euros correspondant au coût des travaux de démolition et de reconstruction et à l'indemnisation du trouble de jouissance ; qu'invoquant la subrogation dans les droits des époux X..., la société Aioi a assigné le 8 février 2005 la société Aviva en remboursement de la somme de 98 424,27 euros correspondant à l'indemnisation des désordres de nature décennale ;
Attendu que la société Aioi fait grief à l'arrêt de déclarer sa demande irrecevable, alors, selon le moyen, que les dispositions d'ordre public de l'annexe II à l'article A.243-1 du code des assurances imposant à l'assuré, pour mettre en oeuvre la garantie de l'assurance dommages obligatoire, de faire, soit par écrit contre récépissé, soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception une déclaration de sinistre à l'assureur, lequel doit désigner un expert ou, en cas de récusation, en faire désigner un par le juge des référés, interdisent seulement à l'assuré de saisir directement une juridiction aux fins de désignation d'un expert ; que l'assureur dommages-ouvrage, qui n'a pas opposé le défaut de déclaration de sinistre par l'assuré dans les formes prescrites au cours de l'instance de référé aux fins de désignation d'expert, ne peut se prévaloir ensuite de cette fin de non-recevoir dans le cadre de l'instance au fond tendant à sa condamnation ; qu'en déclarant irrecevable la demande de la société AIOI pour défaut de déclaration de sinistre, après avoir constaté que l'assureur ne s'était pas prévalu de cette fin de non-recevoir au cours de l'instance de référé, la cour d'appel a violé les articles L. 242-1 et A. 243-1 du code des assurances ;
Mais attendu que la cour d'appel a justement retenu que la présence de la société Aviva à l'expertise ordonnée par le juge des référés, saisi directement par les maîtres de l'ouvrage, ne constituait pas une manifestation de volonté non équivoque de cet assureur de renoncer à se prévaloir de l'absence de la déclaration de sinistre exigée par les articles L. 242-1 et A. 243-1 et son annexe II du code des assurances ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen, pris en sa seconde branche, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS:
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Aioi Motor et General Insurance Company of Europe Ltd aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Aioi Motor et General Insurance Company of Europe Ltd à payer à la société Aviva assurances la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Aioi Motor et General Insurance Company of Europe Ltd ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Aioi Motor et General Insurance Company of Europe Ltd
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de la société Aioi Motor et General Insurance Company of Europe Ltd tendant à voir la société Aviva condamnée à lui payer la somme de 98.424,27 euros en principal ;
AUX MOTIFS QUE la société AIOI, en sa qualité de subrogée dans les droits et actions de M. et Mme X..., ne peut se prévaloir de davantage de droits que ces derniers ; que la mise en oeuvre de la garantie de l'assurance dommages ouvrage est subordonnée, ainsi que le prévoient les articles L242-1 et l'annexe II à l'article A 243-1, à la déclaration du sinistre par l'assuré, soit par écrit contre récépissé, soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; qu'il s'ensuit un processus spécifique d'expertise contractuelle, au terme de laquelle l'assureur doit notifier à l'assuré dans des délais stricts sa décision quant au principe de mise en jeu des garanties du contrat ; que ces dispositions d'ordre public interdisent à l'assuré de saisir directement une juridiction aux fins de condamnation de l'assureur de dommages ouvrage ; que la société Aioi ne peut se prévaloir de la notification par la compagnie Aviva à M. et Mme X..., de la caducité du contrat d'assurance, pour justifier leur absence de déclaration de sinistre, alors que le fait que ceux-ci aient assigné en référé expertise, puis en référé provision, aussi bien leur garant que la compagnie Aviva, démontre qu'ils n'avaient pas acquiescé à la caducité et qu'ils entendaient la contester ; que ce fait ne les dispensait donc pas d'effectuer une déclaration de sinistre ; que d'autre part il ne saurait se déduire de la présence de la compagnie Aviva aux opérations d'expertise sa renonciation par une manifestation de volonté non équivoque à se prévaloir du moyen d'irrecevabilité qu'elle oppose, sa non comparution devant le juge des référés ayant ordonné la mesure d'expertise étant indifférente puisque l'ordonnance rendue par celui-ci lui a été notifiée ; qu'ainsi les époux X... qui n'ont procédé à aucune déclaration de sinistre avant la saisine du juge des référés, n'auraient pas été recevables à solliciter la garantie de la compagnie Aviva, de sorte que la société Aioi ne l'est pas davantage ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de la société Aioi ;
1°) ALORS QUE les dispositions d'ordre public de l'annexe II à l'article A 243-1 du code des assurances imposant à l'assuré, pour mettre en oeuvre la garantie de l'assurance dommages obligatoire, de faire, soit par écrit contre récépissé, soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception une déclaration de sinistre à l'assureur, lequel doit désigner un expert ou, en cas de récusation, en faire désigner un par le juge des référés, interdisent seulement à l'assuré de saisir directement une juridiction aux fins de désignation d'un expert ; que l'assureur dommages ouvrage, qui n'a pas opposé le défaut de déclaration de sinistre par l'assuré dans les formes prescrites au cours de l'instance en référé aux fins de désignation d'expert, ne peut se prévaloir ensuite de cette fin de non-recevoir dans le cadre de l'instance au fond tendant à sa condamnation ; qu'en déclarant irrecevable la demande de la société Aioi pour défaut de déclaration de sinistre, après avoir constaté que l'assureur ne s'était pas prévalu de cette fin de non-recevoir au cours de l'instance de référé, la cour d'appel a violé les articles L 242-1 et A 243-1 du code des assurances ;
ET AUX MOTIFS QUE l'action de la société Aioi qui n'est pas titulaire d'une action autonome mais exerce son recours, ainsi qu'il a été retenu, en sa qualité de subrogée dans les droits de M. et Mme X..., est soumise à la prescription biennale de l'article L114-1 du code des assurances ; qu'aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu entre la deuxième ordonnance de référé du 15 octobre 2001 et l'assignation de la compagnie Aviva du 8 février 2005 devant le juge du fond ; qu'un tel effet ne saurait être reconnu à la demande de provision diligentée par les maîtres de l'ouvrage contre la compagnie Aviva, alors que cette demande a été rejetée par l'ordonnance de référé du 25 juin 2003 et que l'interruption qui en découlait, doit être considérée comme non avenue ainsi qu'en dispose l'article 2247 du code civil ; que par suite, l'action de la société Aioi est aussi irrecevable comme prescrite ;
2°) ALORS QUE l'exposante faisait valoir dans ses conclusions devant la cour d'appel que la prescription biennale ne lui était pas opposable, agissant en qualité de subrogée dans les droits de victimes, et non d'assurée ; qu'en se bornant à affirmer que l'action de la société Aioi était soumise à la prescription biennale de l'article L114-1 du code des assurances, sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.