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26/01/2010 | FRANCE | N°08-12186

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 janvier 2010, 08-12186


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique soulevé d'office, après avertissement délivré aux parties :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2007), que par jugement du 19 juin 2001, le tribunal a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre des six sociétés du groupe Aom Air Liberté ; qu'ultérieurement, il a arrêté le plan de cession de ces six sociétés au profit de la SAS Holco ; que cette dernière a été autorisée, par jugement du 13 septembre 2001 à se substituer quatre sociétés cré

ées pour les besoins de la reprise, dont la société Aom Air Liberté (la société Ao...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique soulevé d'office, après avertissement délivré aux parties :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 décembre 2007), que par jugement du 19 juin 2001, le tribunal a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre des six sociétés du groupe Aom Air Liberté ; qu'ultérieurement, il a arrêté le plan de cession de ces six sociétés au profit de la SAS Holco ; que cette dernière a été autorisée, par jugement du 13 septembre 2001 à se substituer quatre sociétés créées pour les besoins de la reprise, dont la société Aom Air Liberté (la société Aom) ; que cette dernière a été mise en liquidation judiciaire sans prolongation d'activité par jugement du 17 février 2003, MM. X... et Y... étant nommés liquidateurs (les liquidateurs) ; que, la société Holco ayant fait l'objet d'un redressement fiscal, a recherché la responsabilité des liquidateurs en invoquant leurs négligences dans l'établissement des comptes de la société Aom lui ayant fait perdre le bénéfice du régime de l'intégration fiscale pour lequel elle avait opté ;
Attendu que la société Holco reproche à l'arrêt de l'avoir déboutée de ses demandes et de l'avoir condamnée au paiement d'une certaine somme, alors, selon le moyen :
1°/ que le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, lesquelles sont exercées pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur à qui il incombe de dresser les comptes sociaux et de déposer la liasse fiscale correspondante, destinée à déclarer le résultat de l'exercice en vue des impositions sur le bénéfice des sociétés, que la cour d'appel qui a décidé du contraire a violé les articles L. 237-2, L. 237-25, L. 622-2, L. 622-4, L. 622-9, L. 622-12, L. 621-22 du code de Commerce et 1844-7-7°, 1844-8 du code civil ;
2°/ que dans ses conclusions délaissées, la société Holco avait fait valoir qu'une société membre d'un groupe fiscal, même si elle est en liquidation judiciaire, doit établir ses comptes pendant la période de liquidation et qu'elle n'est réputée ne plus appartenir au groupe qu'à compter du premier jour de l'exercice au titre duquel la clôture de la liquidation est prononcée ; qu'au cas particulier, la clôture de la liquidation de la société Aom n'était pas encore intervenue et que sa personnalité morale, subsistant pour les besoins de la liquidation, il appartenait aux liquidateurs judiciaires de procéder à l'établissement des comptes annuels dans les trois mois suivant la clôture de chaque exercice, soit le 31 mars 2003, et de souscrire les déclarations fiscales, ce que l'administration fiscale a précisément reproché à cette société, et l'a ainsi fait sortir du périmètre de l'intégration fiscale, la privant de ce fait, ainsi que la Société Holco de l'imputation d'un déficit permettant de neutraliser la charge fiscale des exercices antérieurs, que la cour d'appel qui n'a pas répondu à ce moyen a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que selon l'article 1844-7.7 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, la société prend fin par l'effet du jugement prononçant la liquidation judiciaire et qu'aux termes de l'article 201 du code général des impôts, la cessation d'une entreprise commerciale entraîne l'imposition immédiate des bénéfices non taxés ;
Et attendu que l'arrêt retient que la société Aom a été mise en liquidation judiciaire le 17 février 2003, qu'elle est dissoute depuis cette date et qu' aucune prolongation d'activité n'ayant été autorisée, l'exploitation a cessé à cette même date ; qu'il en résulte que c'est à cette date que les liquidateurs devaient établir les liasses fiscales et non dans les trois mois suivant la clôture de l'exercice, de sorte qu'ils ne peuvent se voir reprocher par la société Holco la perte du bénéfice de l'intégration fiscale, la seule cessation d'activité de la société Aom ne permettant plus de faire coïncider les exercices comptables de la société mère et de sa filiale, condition nécessaire, selon l'article 223 A du code général des impôts, pour bénéficier de cette intégration ; que par ce motif de pur droit substitué, la décision de la cour d'appel se trouve justifiée ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Holco aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour la société Holco.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la société HOLCO de l'ensemble de ses demandes et de l'AVOIR condamnée à payer à Maître X... et Maître Y... différentes sommes à titre de dommages et intérêts et d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « la société HOLCO soutient que Maîtres X... et Y... avaient l'obligation d'établir les comptes sociaux de la SOCIETE D'EXPLOITATION AOM AIR LIBERTE au 31 mars 2003 et de déposer la liasse fiscale correspondante ; qu'elle invoque l'article L 237-25 du Code de commerce et la doctrine administrative qui imposerait à une société en liquidation membre d'un groupe fiscal de continuer pendant la période de liquidation à établir ses comptes selon les dispositions de cet article, la sortie du groupe n'intervenant alors qu'à compter du premier jour de l'exercice a titre duquel la liquidation est prononcée; qu'en réalité la liquidation judiciaire de la SOCIETE D'EXPLOITATION AOM AIR LIBERTE été prononcée en application des articles L 622-1 et suivants du Code de commerce, que Maître X... et Y..., mandataires judiciaires, ont été désignés comme liquidateurs en vertu de l'article L 622-2 du Code de commerce, si bien que les articles L 237-1 et suivants du Code de commerce ne leur sont pas applicables, leur mission étant définie par les articles L 622-4 et L 622-7 et suivants du Code de commerce ; que par ailleurs, la SOCIETE D'EXPLOITATION AOM AIR LIBERTE a pris fin le 17 février 2003 par l'effet du jugement prononçant sa liquidation judiciaire, conformément à l'article 1844-7° du Code civil ; qu'elle est dissoute depuis cette date ; qu'au surplus, aucune prolongation d'activité n'ayant été autorisée, c'est à la même date que l'exploitation a cessé ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'entrait pas dans la mission légale de Maître Gilles X... et Maître Pierre Y..., différente de celle d'un mandataire social, de faire dresser les comptes sociaux ni au 31 mars 2003, ni au 17 février 2003, ni de déposer la liasse fiscale correspondante destinée à déclarer le résultat de l'exercice en vue des impositions sur le bénéfice des sociétés ; qu'au surplus, il ressort des courriers échangés entre les liquidateurs et les représentants de la société HOLCO en 2003, que Maître X... et Maître Y... ont normalement répondu aux demandes d'accès aux documents comptables qu'elle réclamait pour l'établissement de ses comptes consolidés ; que faute de démontrer que Messieurs Gilles X... et Pierre Y... auraient commis une faute dans l'accomplissement de leur mission de mandataire liquidateur dans le cadre du livre VI du Code de commerce, la société HOLCO doit être déboutée de son action en responsabilité à leur encontre, sans qu'il soit nécessaire de se pencher sur les raisons, ni sur les conséquences, pour la société tête de groupe de la remise en cause du bénéfice des dispositions de l'article 223 A du Code général des impôts; qu'il convient donc de confirmer le jugement du Tribunal de grande instance de CRETEIL, de condamner la société HOLCO aux frais de dépens et à une indemnité de 3 000 euros en faveur de chacun des intimés, destinée à compenser leur préjudice, déjà reconnu par le Tribunal et qui s'est prolongé dans cette instance d'appel révélatrice, par les demandes de sursis à statuer de dernière minute, d'une intention dilatoire» ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « la proposition de rectification adressée le 29 novembre 2004 par l'administration fiscale à la société HOLCO fonde la rectification sur le fait que cette dernière et la société AOM AIR LIBERTE n'ont pas clos leurs exercices à la même date et non sur un défaut de déclaration de la société AOM AIR LIBERTE ; en effet, il est mentionné dans ce courrier :
«En l'espèce, l'exercice social de la société d'exploitation AOM AIR LIBERTE s'étend du 1" avril 2002 au 17 février 2003, tandis que celui de la société HOLCO va du Ir avril 2002 au 31 mars 2003. Les sociétés n'ont donc pas clos leurs exercices à la même date. De fait, la société d'exploitation AOM AIR LIBERTE est donc sortie du groupe formé par HOLCO. En conséquence, HOLCO ne pouvait retenir le déficit réalisé par la société d'exploitation AOM AIR LIBERTE pour déterminer les résultats de l'intégration fiscale».
«La date de clôture de l'exercice de la société AOM AIR LIBERTE retenue par l'administration fiscale est le 17 février 2003, soit la date du jugement de liquidation judiciaire de cette société ; le refus à la société HOLCO du bénéfice du régime de l'intégration fiscale est doc fondé sur la différence des dates de clôture de leur exercice par les deux sociétés et non sur l'absence d'établissement des comptes sociaux par les mandataires judiciaires, comme le prétend la demanderesse , il s'avère en conséquence que la perte du régime d'intégration par cette dernière ne peut être imputée aux mandataires liquidateurs d'AOM AIR LIBERTE; d'ailleurs, l'avis d'absence de rectification du 2 décembre 2004, délivré par l'administration fiscale en ce qui concerne la société AOM AIR LIBERTE et versé aux débats par les défendeurs, vient confirmer qu'aucun reproche n'a été formulé par l'administration à l'égard des mandataires liquidateurs au titre d'obligations déclaratives ; en tout état de cause, aucune obligation fiscale ne pèse sur le liquidateur judiciaire indépendamment des opérations qu'il réalise ; les dispositions de l'article L 237-25 du Code de commerce relatives à l'obligation d'établir des comptes annuels et de réunir l'assemblée des associés pour statuer sur l'affectation des résultats ne concernent que la liquidation amiable et non la liquidation judiciaire ; en effet, pour ce qui est des procédures collectives, il résulte de l'article L 621-39 du Code de commerce que le représentant des créanciers, désigné par le Tribunal et dont les attributions sont ensuite dévolues au liquidateur, agit au nom et dans l'intérêt des créanciers de la société liquidée; il s'ensuit que le fait pour les mandataires liquidateurs de ne pas clôturer les comptes sociaux d'AOM AIR LIBERTE au 31 mars 2003, de ne pas déposer de liasse fiscale et d'éviter ainsi des frais à la charge de la procédure collective dans le seul intérêt de la société HOLCO, tiers à cette procédure, alors même que par ailleurs aucune obligation légales n'existe à cet égard, ne saurait constituer une faute au sens de l'article 1382 du Code civil» ;
1./ ALORS QUE le jugement qui prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, lesquelles sont exercées pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur à qui il incombe de dresser les comptes sociaux et de déposer la liasse fiscale correspondante, destinée à déclarer le résultat de l'exercice en vue des impositions sur le bénéfice des sociétés ; qu'en affirmant le contraire en l'espèce, pour juger que Maîtres X... et Y... n'avaient manqué à aucune obligation légale et n'avaient commis aucune faute, la Cour d'appel a violé les articles L 237-2, L 237-25, L 622-2, L 622-4, L 622-9 (L 641-9 nouveau), L 622-12 et L 621-22 (L 622-1 nouveau) du Code de commerce, et les articles 1844-7-7° et 1844-8 du Code civil ;
2./ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE, dans ses conclusions délaissées, la société HOLCO avait fait valoir qu'une société membre d'un groupe fiscal, même si elle est en liquidation judiciaire, doit établir ses comptes pendant la période de liquidation et elle n'est réputée ne plus appartenir au groupe qu'à compter du premier jour de l'exercice au titre duquel la clôture de la liquidation est prononcée ; qu'au cas particulier, la clôture de la liquidation de la société AIR LIBERTE n'était pas encore intervenue et que sa personnalité morale, subsistant pour les besoins de la liquidation, il appartenait aux liquidateurs judiciaires de procéder à l'établissement des comptes annuels dans les trois mois suivant la clôture de chaque exercice, soit le 31 mars 2003, et de souscrire les déclarations fiscales, ce que l'administration fiscale a précisément reproché à cette société, et l'a ainsi fait sortir du périmètre de l'intégration fiscale, la privant de ce fait, ainsi que la Société HOLCO de l'imputation d'un déficit permettant de neutraliser la charge fiscale des exercices antérieurs ; qu'en ne répondant pas à ce moyen pertinent, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
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Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-12186
Date de la décision : 26/01/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

SOCIETE (règles générales) - Dissolution - Causes - Décision ordonnant la liquidation judiciaire ou la cession totale des actifs - Cessation de l'entreprise - Effets - Imposition immédiate des bénéfices non taxés

En application des articles 1844-7 7° du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, et 201 du code général des impôts, d'une part, la société prend fin par l'effet du jugement prononçant la liquidation judiciaire, et d'autre part, la cessation d'une entreprise commerciale entraîne l'imposition immédiate des bénéfices non taxés. Aussi, se trouve légalement justifié, par un motif de pur droit substitué, l'arrêt qui, ayant relevé qu'une société commerciale a été mise en liquidation judiciaire le 17 février 2003, qu'elle est dissoute depuis cette date et qu'aucune prolongation d'activité n'ayant été autorisée, l'exploitation a cessé à cette même date, en a déduit que c'est à cette date que les liquidateurs devaient établir les liasses fiscales et non dans les trois mois suivant la clôture de l'exercice, de sorte qu'ils ne pouvaient se voir reprocher par la société commerciale cessionnaire la perte du bénéfice de l'intégration fiscale, la seule cessation d'activité de la société liquidée ne permettant plus de faire coïncider les exercices comptables de la société mère et de sa filiale, condition nécessaire, selon l'article 223 A du code général des impôts pour bénéficier de cette intégration


Références :

article 1844-7 7° du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises

article 201 du code général des impôts

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 décembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 jan. 2010, pourvoi n°08-12186, Bull. civ. 2010, IV, n° 23
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, IV, n° 23

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : Mme Bonhomme
Rapporteur ?: Mme Pinot
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.12186
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