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20/01/2010 | FRANCE | N°08-44465

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 janvier 2010, 08-44465


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-4 du code du travail alors applicable et 1382 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que selon protocole d'accord du 4 décembre 2006, la société Carrosserie Pain concédait la location-gérance de son fonds de commerce à compter du 1er janvier 2008 à M. X... qui était invité à démissionner de son emploi actuel pour conclure immédiatement, avec la société, un contrat de travail ; qu'il était engagé le 2 janvier 2007 en qualité de cadre-responsabl

e de la production ainsi que de l'établissement des certificats de carrossage, ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-4 du code du travail alors applicable et 1382 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que selon protocole d'accord du 4 décembre 2006, la société Carrosserie Pain concédait la location-gérance de son fonds de commerce à compter du 1er janvier 2008 à M. X... qui était invité à démissionner de son emploi actuel pour conclure immédiatement, avec la société, un contrat de travail ; qu'il était engagé le 2 janvier 2007 en qualité de cadre-responsable de la production ainsi que de l'établissement des certificats de carrossage, de la répartition des charges et des relations commerciales, pour une durée indéterminée avec une période d'essai de trois mois renouvelable une fois ; que par courrier du 25 janvier 2007, la société lui a notifié qu'elle mettait fin à cette période d'essai ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;
Attendu que pour rejeter cette demande , l'arrêt retient que M. X... est mal fondé à prétendre que la brièveté de sa période de travail ne lui a pas permis de réaliser les objectifs définis à son contrat de travail alors que quatre attestations de salariés ayant une grande ancienneté dans le métier de carrossier dénoncent ses carences tant sur le plan professionnel que relationnel ;
Attendu, cependant, que si l'employeur peut discrétionnairement mettre fin aux relations contractuelles avant l'expiration de la période d'essai, ce n'est que sous réserve de ne pas faire dégénérer ce droit en abus ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, eu égard à ses fonctions de responsable de production et aux objectifs qui lui étaient assignés, si la brève période qui avait précédé la rupture avait permis à l'intéressé de faire la preuve de ses capacités professionnelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 mars 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société Carrosserie Pain aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Mazars, président, et Mme Bringard, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition de l'arrêt, en son audience publique du vingt janvier deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que la rupture de la période d'essai du contrat de travail de M. X... n'était pas constitutive d'un abus de droit ;
aux motifs qu'en l'espèce, pour démontrer que la société Carrosserie Pain se serait comportée à son égard avec désinvolture et irresponsabilité, M. X... soutient :
- que la brièveté de sa période de travail ne lui a pas permis de réaliser les objectifs définis dans son contrat de travail ; cependant, cette argumentation n'est pas opérante dans la mesure où quatre attestations de salariés de la société, ayant une ancienneté dans le métier de carrossier de 40 ans pour M. Z..., et de 37 ans pour M. A..., dénoncent ses carences tant au plan professionnel, que relationnel ; certes, M. X... verse de son côté des témoignages de collègues vantant sa compétence et ses qualités humaines au travail, à l'époque où il était salarié de la société Trouillet, à une période non précisée ; ces attestations élogieuses qu'illustre la phrase insérée dans le protocole d'accord : « il est dans l'intérêt de la société Carrosserie Pain de s'adjoindre les compétences d'une personne expérimentée dans son activité mais qui au surplus assume des responsabilités de direction et d'action commerciale. Elle estime que M. X... répond à ces exigences » n'enlèvent pourtant rien à la valeur probante des doléances des salariés de la société Carrosserie Pain et l'explication de la société, aux termes de laquelle ses carences trouvent leur cause dans le fait qu'il ne travaillait plus dans sa spécialité où il avait déployé sa compétence professionnelle, est crédible ;- que la société, en le poussant à la démission, n'ignorait pas le péril auquel elle l'exposait dans la mesure où il perdrait le bénéfice du régime de l'assurance chômage en cas de licenciement. Cet argument n'est pas fondé, car s'il est vrai que la société l'a poussé à démissionner, ce qu'il a fait le 17 septembre 2006, avec effet au 18 décembre 2006, cette démission qui était au surplus impérative dans la perspective de l'achat du fonds, a aussi facilité la négociation du protocole d'accord et du contrat de travail subséquent, mesures favorables au salarié ;- que sa femme a perdu son emploi pour venir travailler dans la région parisienne ;- que M. X... ne saurait se prévaloir de cette circonstance qui n'est que la conséquence de son propre choix de réorienter son parcours professionnel ;- qu'il résulte de cette analyse que le salarié à qui incombe la charge de la preuve, ne démontre pas que l'employeur aurait commis un abus de droit ou agi avec une légèreté blâmable en rompant le contrat de travail pendant la période d'essai ;- que la décision doit, en conséquence, être réformé et M. X... débouté de ses réclamations ; (arrêt p. 4 et 5)
1°) alors que, d'une part, si l'employeur peut discrétionnairement mettre fin aux relations contractuelles avant l'expiration de la période d'essai, ce n'est que sous réserve de ne pas faire dégénérer ce droit en abus ; que la cour d'appel, qui a constaté que la société Carrosserie Pain avait mis fin à la période d'essai de trois mois seulement vingt trois jours après le début des relations contractuelles avec Monsieur X..., lequel âgé de 46 ans, avait démissionné de son emploi précédent à la demande de cette société et avait été engagé à la suite de longues négociations avec le président de cette société de carrosserie dont il devait reprendre le fonds de commerce, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations qui établissaient l'abus de l'employeur qui avait auparavant reconnu les qualités professionnelles du requérant dans le cadre de longues négociations et qui avait ensuite brutalement modifié son appréciation après l'avoir fait démissionner de son précédent emploi sans lui permettre de donner la mesure de ses qualités de cadre au regard de l'ensemble indivisible des conditions contractuellement prévues entre les parties ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour a violé l'article 1382 du code civil ;
2°) alors que, d'autre part, aux termes du protocole du 4 décembre 2006 tendant à la cession du fonds de commerce après une période de location-gérance faisant elle-même suite à un contrat de travail avec une période d'essai de trois mois, renouvelable, au profit de M. X..., ce dernier devait atteindre comme objectif essentiel l'accroissement de la clientèle et un chiffre d'affaires quantifié sous trois mois ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si la période d'essai de M. X... pouvait être rompue au bout de vingt trois jours alors que le protocole prévoyait un premier objectif d'accroissement du chiffre d'affaires dans un délai de trois mois à compter de l'embauche, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble le protocole du 4 décembre 2006.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44465
Date de la décision : 20/01/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 04 mars 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 jan. 2010, pourvoi n°08-44465


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.44465
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