LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les deux moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 2 octobre 2008), que les époux Jean X... ont donné à bail verbal à M. Pierre Y... la parcelle n° AI 88, d'une contenance de 41 ares 96 centiares à compter du 1er octobre 1980 pour une durée de neuf années ; que les bailleurs ont autorisé le 9 octobre 1998 la cession de ce bail au profit de M. Bernard Y..., fils de M. Pierre Y... ; que par acte extrajudiciaire du 29 mars 2007, les époux X... ont fait délivrer à M. Bernard Y... un congé à effet du 30 septembre 2008 aux fins de reprise pour exploitation personnelle du bien par leur fils, M. André Joseph X... ; que M. Bernard Y... et Mme Sylvie Z..., son épouse, ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux d'une contestation du congé, soutenant que le bail était soumis au statut du fermage en intégralité ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen :
1° / qu'il résulte des articles 15, 16 et 135 du code de procédure civile que le juge doit écarter des débats une pièce qui n'a pas été communiquée dans des conditions permettant d'assurer le respect du principe du contradictoire ; qu'ainsi, la cour d'appel, en se fondant, pour considérer que la parcelle litigieuse était essentielle à l'exploitation des époux Y..., sur une attestation du président de l'Association de drainage du secteur communiquée le jour de l'audience, indiquant que le drainage avait été réalisé à la demande de M. X... père en 1977 et que la reprise de la parcelle porterait atteinte au réseau et nécessiterait des travaux pour le drainage d'autres parcelles, a violé les textes susvisés ;
2° / que selon l'article L. 411-3 du code rural, le bail d'une parcelle d'une superficie inférieure à la limite fixée par arrêté n'est soumis au statut du fermage que si cette parcelle est une partie essentielle d'une exploitation agricole ; qu'en se bornant à relever, pour considérer que la parcelle litigieuse était essentielle à l'exploitation des époux Y..., que le collecteur de drainage d'un ensemble de parcelles, dans lequel elle est située, était situé sous cette parcelle et que la reprise de la parcelle entraînerait la perte de cet avantage pour les époux Y..., sans préciser en quoi le changement d'exploitant de la parcelle remettrait en cause le drainage installé avant la conclusion du bail, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard du texte susvisé ;
Mais attendu qu'ayant constaté que l'état parcellaire de l'exploitation de M. Y... faisait apparaître que les parcelles qu'il cultivait faisaient toutes partie d'un même ensemble d'une superficie d'environ 20 hectares intégralement drainé et que le collecteur de ce drainage était situé sur la parcelle AI 88, retenu souverainement que la reprise de cette parcelle par le bailleur entraînerait pour les époux Y... la perte de cet avantage important, la cour d'appel qui en a déduit, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que la parcelle en cause constituait une partie essentielle de l'exploitation, a, sans violer le principe de la contradiction, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts X... à payer aux époux Y... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des consorts X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Bachellier et Potier de La Varde, avocat aux Conseils pour les consorts X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que les rapports des parties étaient soumis aux dispositions de statut du fermage en intégralité et annulé le congé délivré le 29 mars 2007.
AUX MOTIFS QUE les époux Y... indiquent que la parcelle se trouve incluse dans un secteur qui a été intégralement drainé, ce qui permet l'évacuation des eaux d'un seul et même bloc de culture mis en valeur par Monsieur Y..., et soutiennent que la reprise de la parcelle par le propriétaire, va nécessiter le démembrement de cette organisation avec des conséquences considérables pour le bloc de culture qui ne pourra plus être valablement drainé ; que les consorts X... prétendent que Monsieur Y... n'a jamais obtenu leur accord pour le drainage de la parcelle, drainage qui était inutile compte tenu de l'état de la parcelle et qui d'ailleurs leur a porté préjudice ; toutefois, les époux Y... versent aux débats l'attestation de M. Michel A..., Président de l'Association syndicale autorisée de drainage et d'irrigation de BETHUNE, qui indique que la parcelle AI 88 a été drainée en 1977 à la demande de Monsieur André X... (père) à l'époque syndic de l'association, lequel a donné son accord pour le positionnement des émissaires et des collecteurs sur les différentes parcelles concernées ; qu'il ne saurait donc être prétendu que les travaux de drainage réalisés par M. Y... l'ont été sans accord du bailleur ; que l'état parcellaire de M. Y... fait apparaître que les parcelles qu'il cultive font toutes partie d'un même ensemble d'une superficie d'environ 20 hectares intégralement drainé et que le collecteur de ce drainage est situé sur la parcelle AI 88 ; que la reprise de cette parcelle par le bailleur entraînerait pour les époux Y... la perte de cet avantage important ; que la parcelle constitue une partie essentielle de l'exploitation ; que le caractère essentiel de la parcelle pour l'exploitation doit s'apprécier à l'époque de la conclusion du bail ou de son renouvellement ; que tel est le cas en l'espèce dès lors que les travaux de drainage réalisés en 1977 sont antérieurs à la conclusion du bail ; que les conditions de l'article L. 411-3 du Code rural n'étant pas remplies, les rapports des parties portant sur la parcelle AI 88 sont soumis aux dispositions du statut du fermage en son intégralité ;
ALORS QU'il résulte des articles 15, 16 et 135 du Code de procédure civile que le juge doit écarter des débats une pièce qui n'a pas été communiquée dans des conditions permettant d'assurer le respect du principe du contradictoire ; qu'ainsi, la Cour d'appel, en se fondant, pour considérer que la parcelle litigieuse était essentielle à l'exploitation des époux Y..., sur une attestation du président de l'Association de drainage du secteur communiquée le jour de l'audience, indiquant que le drainage avait été réalisé à la demande de M. X... père en 1977 et que la reprise de la parcelle porterait atteinte au réseau et nécessiterait des travaux pour le drainage d'autres parcelles, a violé les textes susvisés.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que les rapports des parties étaient soumis aux dispositions de statut du fermage en intégralité et annulé le congé délivré le 29 mars 2007
AUX MOTIFS QUE les époux Y... indiquent que la parcelle se trouve incluse dans un secteur qui a été intégralement drainé, ce qui permet l'évacuation des eaux d'un seul et même bloc de culture mis en valeur par Monsieur Y..., et soutiennent que la reprise de la parcelle par le propriétaire, va nécessiter le démembrement de cette organisation avec des conséquences considérables pour le bloc de culture qui ne pourra plus être valablement drainé ; que les consorts X... prétendent que Monsieur Y... n'a jamais obtenu leur accord pour le drainage de la parcelle, drainage qui était inutile compte tenu de l'état de la parcelle et qui d'ailleurs leur a porté préjudice ; toutefois, les époux Y... versent aux débats l'attestation de M. Michel A..., Président de l'Association syndicale autorisée de drainage et d'irrigation de BETHUNE, qui indique que la parcelle AI 88 a été drainée en 1977 à la demande de Monsieur André X... (père) à l'époque syndic de l'association, lequel a donné son accord pour le positionnement des émissaires et des collecteurs sur les différentes parcelles concernées ; qu'il ne saurait donc être prétendu que les travaux de drainage réalisés par M. Y... l'ont été sans accord du bailleur ; que l'état parcellaire de M. Y... fait apparaître que les parcelles qu'il cultive font toutes partie d'un même ensemble d'une superficie d'environ 20 hectares intégralement drainé et que le collecteur de ce drainage est situé sur la parcelle AI 88 ; que la reprise de cette parcelle par le bailleur entraînerait pour les époux Y... la perte de cet avantage important ; que la parcelle constitue une partie essentielle de l'exploitation ; que le caractère essentiel de la parcelle pour l'exploitation doit s'apprécier à l'époque de la conclusion du bail ou de son renouvellement ; que tel est le cas en l'espèce dès lors que les travaux de drainage réalisés en 1977 sont antérieurs à la conclusion du bail ; que les conditions de l'article L. 411-3 du Code rural n'étant pas remplies, les rapports des parties portant sur la parcelle AI 88 sont soumis aux dispositions du statut du fermage en son intégralité ;
ALORS QUE selon l'article L. 411-3 du Code rural, le bail d'une parcelle d'une superficie inférieure à la limite fixée par arrêté n'est soumis au statut du fermage que si cette parcelle est une partie essentielle d'une exploitation agricole ; qu'en se bornant à relever, pour considérer que la parcelle litigieuse était essentielle à l'exploitation des époux Y..., que le collecteur de drainage d'un ensemble de parcelles, dans lequel elle est située, était situé sous cette parcelle et que la reprise de la parcelle entraînerait la perte de cet avantage pour les époux Y..., sans préciser en quoi le changement d'exploitant de la parcelle remettrait en cause le drainage installé avant la conclusion du bail, la Cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard du texte susvisé.